6c – rome : l'antiquité tardive 
        
        
          
            589
          
        
        
          
            possède la bombe H depuis deux mois, une nouvelle qui
          
        
        
          
            crée une forte inquiétude en Occident). Constantinople-
          
        
        
          
            Ankara, renforcé par Washington, devient le rempart de
          
        
        
          
            la civilisation contre la menace asiatique. Au même mo-
          
        
        
          
            ment, les catholiques américains saluent comme un mar-
          
        
        
          
            tyr le cardinal Wyszynski, démis de ses fonctions par le
          
        
        
          
            gouvernement communiste à Varsovie. Dans le film, poli-
          
        
        
          
            tiquement et militairement, la péninsule italienne n’existe
          
        
        
          
            pas, seule la présence papale se fait sentir. Valentinien III,
          
        
        
          
            l’empereur d’Occident, néglige ses responsabilités, peut-être
          
        
        
          
            une allusion à l’état de crise permanent du gouvernement
          
        
        
          
            de la Democrazia christiana. L’invasion des Huns est due
          
        
        
          
            à l’absence de gouvernements forts ; or, il faut une opposi-
          
        
        
          
            tion musclée en Europe pour endiguer l’« épidémie venue
          
        
        
          
            de l’Est », d’autant plus que l’adversaire se confond en faus-
          
        
        
          
            ses promesses : Attila veut « libérer » l’Ouest en détruisant
          
        
        
          
            Rome mais, en réalité, il réduit en esclavage les peuples qui
          
        
        
          
            le suivent. Ces facteurs conditionnent certes le squelette du
          
        
        
          
            scénario (cf. aussi le commentaire général sur Attila), mais
          
        
        
          
            la mise en scène de Douglas Sirk y ajoute une coloration
          
        
        
          
            très particulière. Fantaisie débridée, le film réunit un inou-
          
        
        
          
            bliable Attila qu’interprète Jack Palance avec une sauvage-
          
        
        
          
            rie animale proprement envoûtante (inspiré par le
          
        
        
          Tamer-
        
        
          lan
        
        
          
            de Christopher Marlowe, Sirk le drape dans la sombre
          
        
        
          
            dignité d’un surhomme élisabéthain) et l’étoile des ballets
          
        
        
          
            de Serge Lifar, Ludmilla Tcherina, dans son unique rôle
          
        
        
          
            à Hollywood. Pour détourner les rois barbares de l’émeute
          
        
        
          
            lors d’une réception, elle exécute à la cour une danse las-
          
        
        
          
            cive (prestation incongrue de la part d’une princesse by-
          
        
        
          
            zantine !) qui sera excisée dans diverses copies. Beaucoup
          
        
        
          Thompson (Seyte), Fred Nurnay (le chambellan Euse-
        
        
          bius), Norbert Schiller (un devin), Sim Iness (Hercu-
        
        
          lanus). –
        
        
          
            Attila intrigue à Constantinople où il intimide
          
        
        
          
            le falot Théodose II. Le général Marcien, qui fut prison-
          
        
        
          
            nier des Huns, met l’empereur d’Orient en garde contre
          
        
        
          
            Attila, mais il est emprisonné. Théodose est renversé par sa
          
        
        
          
            sœur Pulchérie qui libère Marcien et le place à la tête de
          
        
        
          
            ses légions, tandis que les hordes hunniques marchent vers
          
        
        
          
            l’Ouest. Ebranlé par la visite surprise du pape et la mort
          
        
        
          
            de sa fille Kubra, qu’il tue parce que devenue chrétienne,
          
        
        
          
            Attila renonce à l’assaut de Rome. Les troupes byzantino-
          
        
        
          
            romaines de Marcien piègent les Huns à Pilium, près de
          
        
        
          
            Ravenne, où l’esclave Ildico poignarde Attila (qui avait fait
          
        
        
          
            exécuter ses parents) alors qu’il se bat en duel contre le gé-
          
        
        
          
            néral romain. A l’image de la prédiction de sa nourrice, le
          
        
        
          
            Hun périt sous le signe de la croix : l’ombre portée du poi-
          
        
        
          
            gnard la dessine sur son cadavre.
          
        
        
          
            Dans cet unique péplum de l’Universal (avant le
          
        
        
          
            
              Sparta-
            
          
        
        
          
            
              cus
            
          
        
        
          
            de Kubrick en 1960) et son deuxième film en Cine-
          
        
        
          
            maScope et Technicolor, l’épopée d’Attila est montrée du
          
        
        
          
            point de vue de Byzance. Un point de vue tout sauf gra-
          
        
        
          
            tuit : comme l’
          
        
        
          
            
              Attila, flagello di dio
            
          
        
        
          
            de Pietro Francisci (cf.
          
        
        
          
            infra), quoique moins axé sur la politique vaticane, cette
          
        
        
          
            version est marquée par les tensions de la guerre froide, et
          
        
        
          
            si Constantinople vient ici à l’aide d’une Italie déliques-
          
        
        
          
            cente pour sauver de justesse le monde chrétien, il n’est pas
          
        
        
          
            déplacé de rappeler que la Grèce comme la Turquie ont ad-
          
        
        
          
            héré à l’OTAN en 1951, qu’une première base aérienne a
          
        
        
          
            été installée à Izmir en octobre 1953, suivie de la signature
          
        
        
          
            d’un traité militaire musclé avec les Etats-Unis (l’URSS
          
        
        
          «
        
        
          Quiconque vit par l'épée périra par l'épée » prédit le pape Léon le Grand à Attila sous les murs de Rome (
        
        
          
            Sign of the Pagan
          
        
        
          , 1954)