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– la rome impériale 
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factions anti-romaine (les rois chérusques Segimer et Seges-
tes) et proromaine (Marobod, le roi des Markomans). De
surcroît, Marobod convoite Thusnelda, la fille de Segestes
qui, elle, aime Hermann. Son rival jaloux tente de le faire
empoisonner. Hermann jure à son père mourant qu’il « déli-
vrera la Germanie » du joug étranger, puis enlève Tusnelda
pendant la cérémonie de mariage qui devait l’unir à Maro-
bod. Les Romains prenant la défense de leur allié, Hermann
convoque le Thing, se fait élire commandant d’une armée
germanique unie et écrase l’ennemi dans la forêt. – Au
lendemain du traité de Versailles, ce film ultranationaliste
allemand vise l’ennemi héréditaire « latin » des XIX 
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siècles, la France.
Le personnage d’Arminius a enflammé
l’imagination des patriotes allemands depuis les guerres de
libération contre Napoléon, et sa statue («Hermannsdenk-
mal »), érigée en 1875 au sommet du Grotenburg près de
Detmold, cinq ans après la fondation du Deuxième Reich,
pointe toujours son épée en direction de l’Hexagone mau-
dit. Dans la République de Weimar, l’appel à l’unité des
Allemands (topoï aussi fréquent depuis 1810 que la haine
du Français) n’est certes plus prioritaire, mais en 1918 les
Français, comme jadis les Romains, sont les nouveaux vain-
queurs et l’occupant. Les Allemands se sentent humiliés,
exploités, voire réduits à l’esclavage comme le furent leurs
ancêtres, les Germains. En janvier 1923, en raison du re-
tard dans les livraisons de charbon stipulées par le traité
de Versailles (réparations de guerre), la France et la Bel-
gique occupent militairement la Ruhr et ses installations
industrielles, une manœuvre qui indigne tout le pays, en-
traîne huit mois de manifestations, de confiscations, d’ex-
pulsions et de combats de rues et fait le beurre du nouveau
parti national-socialiste fondé à Munich par Adolf Hitler.
L’économie allemande est en faillite. Arminius /Hermann
devient le porte-drapeau de l’extrême droite, et la légende
du « coup de poignard » dans le dos du fantassin combat-
tant au front, asséné par les ploutocrates à Berlin en 1918
(«Dolchstosslegende »), est mis en rapport avec l’assassinat
d’Arminius par sa propre parenté (un épisode évidemment
absent du film).
C’est dans ce contexte explosif que le film de Leo König,
metteur en scène aux théâtres de Düsseldorf et de Müns-
ter, est mis en chantier. Il est réalisé dans la région de Det-
mold, soit proche des lieux historiques – carrières de Bären-
La panique des légions romaines et le suicide de Varus
Arminius et sa fiancée Thusnelda (haut) s'opposent à la luxure et à
l'arbitraire de Rome dans
Die Hermannsschlacht
(1923 / 24)
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