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 l'antiquité au cinéma
1908
Un Cicerone a Roma
(IT) Cines, Roma (« Scène co-
mique »), 83 m. –
La statue de Cicéron s’anime et discute
avec un guide touristique.
1908
Julius Caesar
(US) Sigmund Lubin ; Lubin Manufac-
turing Co., 10 min.
1908
Julius Caesar. An Historical Tragedy
(US) WilliamV.
Ranous et J. Stuart Blackton ; Vitagraph Co. of Ame-
rica, 299 m. / 15 tableaux. – av. Charles Kent (Jules Cé-
sar), Earle Williams (Brutus), William Shea, Maurice
Costello, Florence Lawrence (Calpurnie), Paul Panzer,
William V. Ranous (Cassius). –
Réalisé dans les studios
Vitagraph de Flatbush à Brooklyn (New York), le film
s’inspire jusque dans ses détails érudits du fameux tableau
La mort de César
de Jean-Léon Gérôme (1859) et fait
suite au
Cleopatra
tourné quelques mois auparavant, avec
Florence Lawrence dans le rôle de la reine (cf. 6a.6). En
Grande-Bretagne, le film s’achoppe à la censure en raison
de la « violence » du meurtre de César et des tuniques « trop
courtes ».
1909
Giulio Cesare /Giulio Cesare e Brutus (Jules César)
(IT) Giovanni Pastrone (?) ; Itala Film, Torino, 255 m.
– av. Arturo Garzes (Jules César), Luigi Mele (Brutus).
Le film reprend la trame de la tragédie de Shakespeare,
illustrant le retour de César de Gaule, son triomphe qui
suscite la jalousie de certains sénateurs, le rêve prémoni-
toire de Calpurnie, l’assassinat, le discours de Marc An-
toine qui fait fuir les conjurés, Brutus hanté par le spectre
de César, sa défaite à Phillippe et son suicide.
1910
Catilina (La conspiration de Catilina)
(IT) Mario Ca-
serini ; Cines, 272 m. – av. Amleto Novelli (Lucius Ser-
gius Catilina), AntonioMonti (Cicéron), Maria Caserini
Gasperini (Fulvia), Bruto Castellani. –
Aigri, dépravé et
pressé par ses débiteurs, Catilina complote contre la Répu-
blique en –63 av. JC. Fulvia le dénonce à Cicéron qui se
fait donner des pouvoirs étendus et interpelle le conspira-
teur en plein Sénat (« Jusques à quand, Catilina, abuse-
ras-tu de notre patience ? »), puis ordonne son arrestation.
Catilina s’échappe en Etrurie. Il meurt à la tête de ses par-
tisans, après avoir vainement tenté de tuer celle qui l’a
trahi. US :
The Conspiracy of Catiline
.
1910
Bruto
(IT) Giuseppe De Liguoro, Milano Films, 163 m.
– av. Arturo Pirovano (Marcus Junius Brutus), Eugenia
Tettoni, Giuseppe De Liguoro. –
Adaptation du drame
Bruto secondo (1787)
de Vittorio Alfieri qui glorifie Bru-
tus, combattant de la liberté, et justifie l’assassinat de Cé-
sar. Auparavant, ce dernier lui aura révélé qu’il est son père
naturel.
1911
Bruto / Brutus (Brutus)
(IT) Enrico Guazzoni, Cines,
Roma (série «Cines Princeps »), 362 m. – av. Amleto
Novelli (Marcus Junius Brutus), Gianna Terribili Gon-
Reste le cas épineux de Vercingétorix – et par conséquent du cinéma de l’Hexagone, premier concerné. Le
chef des Arvernes jouit d’une popularité toute récente, car il est demeuré quasi inconnu des Français durant
dix-huit siècles. Pendant idéologique du Germain Arminius /Hermann pour les Allemands (cf. texte 6b.1), le
mythe a été bricolé au XIX
e
siècle. En 1828, l’
Histoire des Gaulois
d’Amédée Thierrey donne le coup d’envoi, et
le résistant héroïque monte sur les planches dès 1840 avec
Le dévouement de Vercingétorix ou le dernier jour de la
Gaule
de Modeste Anquetin, pièce qui sera suivie de vingt autres jusqu’en 1908, sans parler de la poésie et de la
peinture (Jean-François Millet, Henri-Paul Motte). Le duc d’Aumale le proclame « le premier des Français » en
1858. On l’associe à Jeanne d’Arc, autre figure emblématique qui se serait sacrifiée pour la patrie. Une révision
sérieuse permet toutefois de modérer, là aussi, ce bilan pour manuels scolaires : trahi par les siens, « le plus grand
homme de la nation celte ne fut qu’un preux » (Théodore Mommsen), et la guerre de « libération nationale »
imaginée par les patriotes revanchards de 1870 fut en priorité un embarrassant conflit celto-celtique dont Cé-
sar a su profiter 
8
. Faute de moyens ou d’intérêt, on ne compte que deux films français consacrés à la saga de
Vercingétorix, une production Pathé de dix minutes en 1909 et le ratage pathétique de Jacques Dorfmann en
2000, échec d’autant plus regrettable que les intentions étaient sérieuses et l’éclairage anti-romain pour le moins
original. C’est en mode comique, par la dérision tous azimuts, que la France prendra sa revanche sur l’arrogante
Rome, avec la potion magique d’Astérix.
1
Enchaînant les liaisons avec des femmes de tous bords, César fut accusé de corruption et d’adultère
(stuprum)
pour ses relations inadmissibles avec
des épouses de condition libre. Quant à sa prétendue bisexualité (on lui reprocha d’avoir eu dans sa jeunesse des rapports homosexuels avec le roi de
Bithynie, relations « passives » qui étaient la honte suprême aux yeux d’un Romain), elle pourrait bien n’être qu’une invention de ses ennemis politi-
ques car, par ailleurs, on lui connaît exclusivement des aventures féminines. Suétone en dresse un véritable tableau de chasse.
2
Cf. Maria Wyke, «Caesar, Cinema, and National Identity in the 1910s », p. 172, in :
Julius Caesar in Western Culture
(ed. M. Wyke), Blackwell Pu-
blishing, Malden-Oxford-Victoria 2006.
3
Forzano avait déjà travaillé à deux reprises avec le Duce sur des sujets historiques pour le théâtre et le cinéma. La fin de Napoléon fit l’objet d’un drame
(1930) et d’un film (1934) :
Campo di maggio (Les Cent-Jours
)
(la version allemande du film,
Hundert Tage
, était signée Franz Wenzler, 1935). Le
comte Cavour, architecte du royaume d’Italie, était le héros de la pièce
Villafranca
(1932). – Cf. Jane Dunnett, «The Rhetoric of Romanità : Repre-
sentations of Caesar in Fascist Theatre », pp. 257-260, in :
Julius Caesar in Western Culture
, op. cit.
4
Cf. Johann Chapoutot,
Le national-socialisme et l’Antiquité
, Presses universitaires de France, Paris 2008.
5
Cf. Michael Grant,
Julius Caesar
, Book Club Associates, London 1974, p. 101. Les chiffres rapportés par Plutarque dans ses
Vies parallèles
sont pro-
bablement exagérés mais néanmoins révélateurs de la saignée considérable occasionnée par les campagnes de César.
6
Alexandre Grandazzi, «Nos prétendus ancêtres les Gaulois », in :
Historia
no. 740, août 2008, p. 28.
7
Cf. Jean-Louis Brunaux,
Nos ancêtres les Gaulois
, Seuil, Paris 2008, pp. 127-143 et 218-232.
8
Cf. «Vercingétorix, un Gaulois trahi par les siens», in:
Historia
nº 650, févr. 2001, «Le péril gaulois: un mythe romain» par Nadine Robert, p. 64ss.
s
6a.5.1
Nota bene : pour Jules César, cf. aussi le chapitre sur Cléopâtre (6a.6)
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