242
 l’antiquité au cinéma
Kedar Kapoor, qui a déjà réalisé une vie de Gengis Khan
(
Changez Khan
, 1957), fabrique un remake en East-
mancolor du film de Sohrab Modi de 1941 (cf. supra),
dont il reprend l’interprète principal. Quatorze ans plus
tôt, Prithviraj Kapoor jouait Alexandre le Grand. Devenu
le Nestor du cinéma et du théâtre indiens, ce patriarche
barbu à la voix de stentor passe à l’écran pour l’incar-
nation de la royauté moghole après avoir été l’empereur
Akbar dans
Mughal-e-Azam
(1960) ; c’est donc logique-
ment à lui de représenter ici l’Inde sous les traits du roi
Pôros. Le rôle titulaire est tenu par Dara Singh, un acteur
et cascadeur punjabi adulé par les foules, un ex-lutteur pro-
fessionnel spécialisé dans les rôles d’hommes forts au cœur
tendre, et qui vient d’incarner Hercule, Samson et Tarzan
à Bollywood (1964 / 65). A ses côtés, la sensuelle Mumtaz,
la Brigitte Bardot indienne, star absolue du chanté-dansé
pour laquelle le script invente le personnage de Cynthia,
l’amour secret du conquérant (Roxane, l’authentique épouse
d’Alexandre, ne fait en revanche qu’une apparition dan-
sante). Kapoor tourne sa fresque aux studios Kamal et Roop
Tara à Bombay, les extérieurs dans le Maharashtra, où le
chef-cascadeur Burhanuddin dirige 5000 figurants, de la
cavalerie et une vingtaine d’éléphants pour les scènes de
bataille, plutôt réussies.
Passons sur les éléments incontournables du cinéma po-
pulaire indien, la bluette incongrue, la piscine de mar-
bre rose-bonbon cernée de statues hellènes (Zeus, Praxitèle)
dans laquelle Mumtaz se baigne nue, les costumes bariolés
(Aristote en tunique azur, des armures plutôt romaines),
les fanfreluches et pendeloques dorés, le music-hall dans le
campement macédonien, le tout agrémenté de zooms et de
mouvements de grue extravagants. Les déclamations à la
cour du raj sont interminables et statiques mais, comme
souvent, l’action s’anime avec le choc des armes : perché sur
son éléphant, Pôros tue Bucéphale, le cheval d’Alexandre,
et le Macédonien escalade une tour d’assaut (sic) pour se
battre à la hauteur de son adversaire. L’éléphant renverse la
tour, etc. Le film de Kapoor, aux accents résolument patrio-
tiques, interpelle par sa dénonciation de l’ethnocentrisme
européen et sa condamnation de la guerre : c’est au contact
avec la sagesse immémoriale de la civilisation indienne
qu’Alexandre réalise la vanité et la cruauté de ses conquê-
tes. Le panhellénisme est malmené : «Tu as versé des fleuves
de sang pour conquérir un trône – c’est un comportement
bon pour un Grec, pas pour un Indien ! » lui assène Pôros,
un brin chauvin. (On néglige le fait que Pôros fut réin-
vesti en tant que vassal et allié d’Alexandre dont il devint
en quelque sorte le représentant personnel.) Le film récolte
un phénoménal succès public et sa chanson-leitmotiv
Jahan
daal daal par sone ki chidiya
(« Là où les moineaux d’or
garnissent les arbres, c’est mon pays, l’Inde »), interprétée
par Rafi Saab sur des images de Jaipur, d’Hrishikesh, d’Ha-
ridwar et de Nashik – alors que la menace macédonienne
se précise – devient vite aussi populaire que l’hymne na-
tional. Ecrite par Hansraj Behl et Rajinder Kishan (paro-
les), elle vante les beautés matérielles et spirituelles du pays.
Une popularité qui s’explique aussi par l’actualité : depuis
fin 1964, les violences quotidiennes au Cachemire se sont
intensifiées et débouchent sur un conflit ouvert avec le Pa-
kistan. En septembre 1965, la bataille fait rage au Pend-
jab et la Chine, qui affronte l’Inde sur sa frontière orien-
tale depuis janvier, soutient le Pakistan à l’ONU. – Au
printemps 2008, Romy Behl, fils du producteur Gulshan
Behl, annonce un remake du film pour N. C. Films, avec
Akshay Kumar dans le rôle d’Alexandre.
1968
Δ
(tv)
Einer wird gewinnen
(DE) Ekkehard Böhmer.
– av. Thomas Reiner (Alexandre le Grand).
1980 (tv)
Heroes of History
(IR) Tony Mayer ; épis. nº 2 de
la série
«
Crossroads of Civilization – An Inquiry into
History
»
, David Frost, Mehrdad Azarmi Prod.-NIRT,
58 min. –
Docu-fiction avec reconstitutions et acteurs ano-
nymes (rôles muets) : Alexandre conquiert l’empire perse.
1981 (tv)
The Search for Alexander the Great – 1. The
Young Lion – 2. The Young Conqueror – 3. Lord of
Asia – 4. The Last March
(GB /US) Peter Sykes ; Mi-
chael Latham-Video Arts TV-Time LifeTelevision (PBS
6.-27.5.81), 4 × 55 min. – av. Nicholas Clay (Alexan-
dre le Grand), Gabriel Byrne (Ptolémée), Jane Lapotaire
(Olympias), Robert Stephens (Darius III), Julian Glover
(Philippe II de Macédoine), Ian Carlson (Héphaestion),
Michael Williams (Aristote), Michael Byrne (Démos-
thène), Barry Stanton (Cleitos), JackKlaff (l’eunuque
Bagoas), Justin Sykes (Alexandre jeune), James Ma-
son (narrateur). –
Tous les contemporains d’Alexandre,
amis et ennemis, les vivants comme les morts, sont réu-
nis sous une tente au bord de la mer et racontent la vie du
grand homme. Ce dernier est campé par Nicholas Clay,
qui fut Lancelot dans
Excalibur
de John Boorman l’an-
née précédente. Le récit suit scrupuleusement la destinée du
conquérant, ponctuée de retours en arrière, d’interventions
de James Mason (en costume moderne dans les ruines anti-
ques), de tableaux, de gravures et de cartes. On insiste sur
les amours d’Alexandre et d’Héphaestion : lorsque celui-ci
meurt, Alexandre reste prostré, couché à côté du cadavre,
fait tondre la croupe des chevaux de son armée, bannit
musique et danses pendant une année et impose le deuil à
toutes les cités grecques. L’approche narrative imaginée par
George Leffers et Simon Raven masque cependant mal la
pauvreté des moyens, et l’abondance de dialogues en plan
rapproché rend l’ensemble statique et bavard - un comble
pour une vie aussi mouvementée. Une série télévisée tour-
née avec la coopération du Ministère grec de la culture à
Delphes, à Sicyone, à Aigira et à Xylokastron, dans le golfe
de Corinthe.
1989
Δ
Acropolis Now – The Trouble with Mothers
(AU)
Ted Emery. – av. Sebastian Gunner (Alexandre le
Grand).
1989 [épisode parodique :]
Iskanderiyya kamen wa ka-
men / Alexandrie encore et toujours
(EG/ FR) Yous-
sef Chahine ; Misr International-Classics-La Sept, 105
min. – av. Hossein Fahmi (Alexandre le Grand), Yousra,
Amr Abdel Guelil, Menha Batrawi. –
Porté sur les épau-
les d’un guerrier macédonien, Alexandre le Grand est ac-
cueilli triomphalement par les Egyptiens.
1996
Δ
Gulliver’s Travels
(GB /USA) Charles Sturridge. –
av. Ian Dann (Alexandre le Grand).
1997 [(tv)
Araekusanda Senki / Alexander /Reign : The
Conqueror (Alexandre le Grand)
(HK/KR/ JP) Yoshi-
nori Kanemori, Peter Chung ; Rintaro-CCHTV-Film
Workshop-KBS-MadHouse-NHK, 13 × 25 min. – série
animée –
Monté sur le trône après l’assassinat de son père,
Alexandre part à la conquête de la Perse ... Un scénario
d’Hiroshi Aramata prenant un maximum de libertés avec
l’Histoire et saupoudré d’éléments fantastiques bien super-
flus, qui minent la crédibilité de l’ensemble.
]
2001
Δ
The Pharaoh Project
(US) Brad Tanenbaum. – av.
Jack Maxwell (Alexandre le Grand).
I...,232,233,234,235,236,237,238,239,240,241 243,244,245,246,247,248,249,250,251,252,...674