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  l’antiquité au cinéma
La bataille navale est refilmée (48 caméras) pendant huit
semaines à Lucarno, près de Livourne, cette fois avec 30
navires grandeur nature, dont un bateau amiral de 60
mètres de long qui finit par prendre feu, créant la pani-
que parmi la figuration. Le tournage chaotique à Anzio
et dans les studios Cinès à Rome stagne, saboté plusieurs
fois par les Chemises Noires de Mussolini (qui contestent
la représentation négative des Romains). Après sept mois
de travaux, le Coliseum n’est toujours pas terminé, les dé-
cors de la grande porte de Joppa sont détruits par une tem-
pête, les fonds de costumes par un incendie vraisemblable-
ment provoqué par les fascistes. En janvier 1925, après
deux millions de $ de dépenses et seulement la moitié du
film en boîte, Thalberg ordonne l’arrêt des travaux et ra-
patrie l’équipe à Hollywood où il fait réédifier Jérusalem
à Culver City et le Circus Maximus d’Antioche sur les ter-
rains de La Cienega (Venice Boulevard), reconstitution en-
core plus gigantesque que la Babylone de Griffith en 1916.
La course avec douze chars (contre neuf en 1959) est fil-
mée en octobre par B. Reeves « Breezy » Eason, spécialiste
du western de série B ; 4300 comparses animent les gra-
dins, tandis que des miniatures suspendues au-dessus de la
caméra et des maquettes avec poupées mobiles amplifient
l’illusion. Les plans tournés en Egypte ne sont pas utilisés,
mais plusieurs scènes sont photographiées enTechnicolor bi-
chrome (épisodes bibliques, extérieurs à Jérusalem, la fête
romaine), malgré l’opposition de Niblo. Ferdinand P. Earle
filme la Nativité en teintes doucereuses, des chromos saint-
sulpiciens qui font tache.
Mais Niblo mène son récit de 2h28 tambour battant,
l’agencement, les cascades et le montage de la course de
chars sont d’une efficacité redoutable. La faiblesse du film
reste ses interprètes : Novarro, séduisant et athlétique, est
fort convaincant quand il agit, nettement moins quand
l’émotion l’étreint. Bushman est caricatural en Messala
et la présence féminine ne fait pas le poids. Néanmoins,
ce
Ben-Hur
marque en quelque sorte l’aboutissement du
péplum muet, surpassant aisément les meilleures réussites
italiennes. Les coûts définitifs sont tellement élevés (c’est
la production la plus chère du cinéma muet, avec 3,9
millions de $, soit plus du double d’
Intolerance
) que le
film ne fera en fin de compte pas de gros bénéfices, mais il
Le Circus Maximus d'Antioche érigé à Hollywood (
Ben-Hur
, 1925)
La course de chars mortelle, où se mesurent Juda Ben-Hur (Ramon Novarro) et son ennemi Messala, est le clou du film muet de 1925
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