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 l'antiquité au cinéma
haraja de Jodhpur met à disposition l’imposante forteresse
moghole de Mahrangarh, les palais d’Umaid Bhawan et de
Balsamand Lake. Décorateurs, accessoiristes et costumiers
(Neeta Lula) de Bollywood créent un univers enchanteur,
des vêtements et bijoux somptueux qui font l’attrait pu-
rement visuel de cette version très « exotique » de la fable,
avec des statues de lions ailés d’une hauteur de six mètres.
(Même si les figurants indiens de couleur noire ne sont pas
très crédibles en courtisans achéménides.)
La publicité fait grand cas du casting de Peter O’Toole et
Omar Sharif, autrefois les deux têtes d’affiche du
Lawrence
of Arabia
de David Lean (1962), ici dans de petits rôles.
Le film est tiré du roman
Hadassah : One Night With
the King
(2004) de Mark Andrews Olsen et Tommy Ten-
ney. Hadassah-Judith y est une adolescente qui rêve de de-
venir princesse (son amoureux du moment finira eunuque
au palais) : c’est un conte de fées biblique destiné aux pré-
adolescentes israéliennes. L’Assuérus de la Bible est ici clai-
rement identifié à Xerxès I 
er
, que l’on voit occupé à vouloir
venger son père Darius, battu à Marathon, et préparer une
deuxième campagne militaire contre Athènes. Luke Goss en
fait un beau jeune prince un brin doucereux et aussi in-
décis qu’Hamlet. Aman l’Amalécite, présenté comme une
préfiguration d’Hitler (son couvre-chef arbore une sorte
de swastika), est flanqué d’un conspirateur, Haman, qui
veut s’emparer du trône. Mort 500 ans plut tôt, le prophète
Samuel apparaît dans un prologue qui explique la haine
d’Aman pour les Hébreux, car son ancêtre Agag, le roi des
Amalécites qui s’opposait aux conquêtes israéliennes, fut
massacré avec tous les siens sur ordre de Saül, et seule la
reine, enceinte, put échapper au couteau. Aman ne vit que
pour venger ses aïeux, rappeler à Xerxès que la Perse (com-
prenez : l’Iran actuel) est « ennemie de la démocratie » et
mettre en garde le souverain contre « le complot des Grecs
et des Juifs » qui veulent conquérir l’univers et imposer un
monde où tous les hommes seraient égaux. Il est bien sûr
acclamé par une horde de proto-islamistes barbus et fa-
natiques ... Mais grâce à Hadassa (aujourd’hui le nom de
la «Women’s Zionist Organization of America »), la ma-
chination visant au génocide du peuple juif échoue. On
se souviendra que l’assimilation de l’Iran d’Ahmadinejad
avec l’Allemagne hitlérienne et l’Holocauste est le fruit du
Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou (chef du
Likoud, parti d’extrême droite), et que l’iranophobie des
ultra-orthodoxes à Jérusalem est renforcée par la diabolisa-
tion de Téhéran par les Américains. Las, les splendeurs de
l’architecture rajpoute ne compensent en rien la niaiserie
du scénario, le rythme languissant, le manque d’authenti-
cité (costumes et parures de tous azimuts) et un commen-
taire en off frisant le ridicule. Pris dans son corset de zélote
prosélyte, le film se situe aux antipodes de la version sans
complaisance d’Amos Gitaï (1985) et se garde bien évi-
demment de mentionner la suite moralement embarras
sante du récit d’Esther.
La révolte des Maccabées
au II 
e
siècle av. JC
La conquête de la Perse par Alexandre le Grand fait pas-
ser les Hébreux sous la domination grecque (– 332) : celle
des Ptolémées Lagides d’Egypte, puis celle des Séleucides de
Syrie, qui appliquent une politique d’hellénisation forcée
(interdiction de la Torah et de la circoncision) contre la-
quelle l’élite sacerdotale de Judée est amenée à se révolter.
Les Maccabées est le nom donné aux cinq fils de Mattathias :
Judas, Jonathan « le Rusé », Simon (†134 av. JC), Eleazar
Le soulèvement des frères Maccabée est cruellement réprimé dans
Il Vecchio Testamento
de Gianfranco Parolini (1962)
s
2.5.4
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