Résultat pour: "Charles VII"
MARIE-THÉRÈSE, née en 1717, fille aînée de Charles VI. Archiduchesse d’Autriche, reine de Hongrie et de Bohème, impératrice du Saint-Empire romain germanique.
Son règne commence dans le sang, la plupart des États généraux et des puissances européennes trahissant les engagements pris envers son père (la « Pragmatique Sanction ») et refusant de reconnaître les droits d’une femme au trône impérial. Sans déclaration de guerre préalable, Frédéric II de Prusse attaque la Silésie, riche territoire appartenant aux Habsbourg, ce qui a pour conséquence de déclencher la Guerre de succession d’Autriche (1740 à 1748). La Prusse, la Bavière, la Saxe, la France de Louis XV, le Piémont-Sardaigne et l’Espagne élisent comme empereur son cousin par alliance Charles Albert, Électeur de Bavière (Charles VII), contrairement à la volonté de Charles VI. Marie-Thérèse réussit à s’allier à l’Angleterre des Hanovre et à rallier à elle la noblesse hongroise, sauvant ainsi la Maison de Habsbourg. A la mort de Charles VII, elle fait élire son époux FRANZ III. STEPHAN VON LOTHRINGEN / FRANÇOIS-ÉTIENNE DE LORRAINE (1745 / 1765) sur le trône du Saint-Empire romain germanique (sous le nom de FRANZ I. / FRANÇOIS Ier) et devient elle-même impératrice consort des Romains. En réalité, c’est elle qui gouverne, courageuse, droite et pugnace, entamant une vaste œuvre de réformes destinées à consolider l’unité de l’empire selon les principes nouveaux du despotisme éclairé. Épouse très amoureuse, elle donnera à l’empereur seize enfants (dont Marie-Antoinette). Son grand diplomate, Wenzel Anton Rietberg, prince de KAUNITZ est l’artisan d’un spectaculaire renversement des alliances. Appuyée par la France, la Russie, la Suède, la Saxe et les Bourbons d’Espagne, elle reprend les hostilités contre Frédéric le Grand afin de récupérer la Silésie : c’est la Guerre de Sept Ans (1756 à 1763), remportée de justesse par la Prusse grâce au génie militaire de son roi. À la mort de son époux, Marie-Thérèse songe à abdiquer, mais effrayée par le tempérament autoritaire et vindicatif de son fils et successeur Joseph II, elle préfère conserver le pouvoir en l’associant au gouvernement comme corégent et en l’excluant de la politique étrangère.
Son règne commence dans le sang, la plupart des États généraux et des puissances européennes trahissant les engagements pris envers son père (la « Pragmatique Sanction ») et refusant de reconnaître les droits d’une femme au trône impérial. Sans déclaration de guerre préalable, Frédéric II de Prusse attaque la Silésie, riche territoire appartenant aux Habsbourg, ce qui a pour conséquence de déclencher la Guerre de succession d’Autriche (1740 à 1748). La Prusse, la Bavière, la Saxe, la France de Louis XV, le Piémont-Sardaigne et l’Espagne élisent comme empereur son cousin par alliance Charles Albert, Électeur de Bavière (Charles VII), contrairement à la volonté de Charles VI. Marie-Thérèse réussit à s’allier à l’Angleterre des Hanovre et à rallier à elle la noblesse hongroise, sauvant ainsi la Maison de Habsbourg. A la mort de Charles VII, elle fait élire son époux FRANZ III. STEPHAN VON LOTHRINGEN / FRANÇOIS-ÉTIENNE DE LORRAINE (1745 / 1765) sur le trône du Saint-Empire romain germanique (sous le nom de FRANZ I. / FRANÇOIS Ier) et devient elle-même impératrice consort des Romains. En réalité, c’est elle qui gouverne, courageuse, droite et pugnace, entamant une vaste œuvre de réformes destinées à consolider l’unité de l’empire selon les principes nouveaux du despotisme éclairé. Épouse très amoureuse, elle donnera à l’empereur seize enfants (dont Marie-Antoinette). Son grand diplomate, Wenzel Anton Rietberg, prince de KAUNITZ est l’artisan d’un spectaculaire renversement des alliances. Appuyée par la France, la Russie, la Suède, la Saxe et les Bourbons d’Espagne, elle reprend les hostilités contre Frédéric le Grand afin de récupérer la Silésie : c’est la Guerre de Sept Ans (1756 à 1763), remportée de justesse par la Prusse grâce au génie militaire de son roi. À la mort de son époux, Marie-Thérèse songe à abdiquer, mais effrayée par le tempérament autoritaire et vindicatif de son fils et successeur Joseph II, elle préfère conserver le pouvoir en l’associant au gouvernement comme corégent et en l’excluant de la politique étrangère.
1977/78 | **(tv) Louis XI ou Le Pouvoir central (FR) d’Alexandre Astruc Parties : 1. La Naissance d'un roi – 2. Le Pouvoir central ORTF (A2 20.12.77 et 7.2.78), 2 x 1h30 min. – av. Denis Manuel (Louis XI), Nicolas Silberg (Charles le Téméraire), Didier Haudepin (Charles de France, duc de Berry), Arielle Dombasle (Marie de Bourgogne), Emmanuelle Stahl (Jeanne d'Arc), Jean-Marie Robain (Georges de La Trémoille), Francine Bergé (Agnès Sorel), Daniel Gélin (Charles VII), Yves Vincent (Philippe de Bourgogne), Jacques Duby (Olivier Le Daim), Jean Boissery (Charles, comte de Charolais), Sabine Haudepin (Marguerite d’Écosse), Nelly Benedetti (Marie d'Anjou), François Siener (René, duc d'Alençon), Bernard Giraudeau (Philippe de Commynes), Jacques Dacqmine (le cardinal La Balue), Etienne Draber (le connétable Saint-Pol), Alain Feydeau (Edward IV, roi d’Angleterre), Jocelyne Boisseau (Charlotte de Savoie), Louis Navare (De Brézé), Stéphane Hervé (le dauphin Charles), Gérard Falconetti (le duc de Maine), Didier Valmont (Odet d’Aydie), Jacques Siclier (un prélat). Synopsis : La première partie de ce téléfilm d’Alexandre Astruc, mentor virtuose de la Nouvelle Vague et promoteur de la « caméra stylo », débute par la naissance du futur Louis XI à Bourges. Enfant, il découvre que son père n’est qu’un roi sans couronne et ne lui pardonnera jamais d’avoir laissé brûler la Pucelle. A dix-huit ans, sur conseil d’Agnès Sorel (la favorite paternelle), Louis obtient le gouvernement du Dauphiné. En désaccord total avec son père contre lequel il complote, et impatient de régner, il se réfugie auprès de son oncle, Philippe de Bourgogne, le géniteur de son futur ennemi, le Téméraire … Après les rapports haineux avec son père et l’apprentissage dans l’exil du métier de roi (il le deviendra à quarante ans seulement), Louis XI, à peine monté sur le trône, donne une importance prioritaire à la bourgeoisie et aux artisans de Paris, des roturiers dont ce prince toujours méfiant, méthodique et efficace aime à s’entourer, les estimant moins périlleux que sa propre famille (notamment son frère, le duc de Berry, qui convoite le trône). L’objectif de cette alliance insolite entre la couronne et le milieu des affaires et du travail est d’abattre les prérogatives de la noblesse. Le Parlement (au rôle purement consultatif) devient le principal outil de sa monarchie. Le roi développe l’agriculture et de nouvelles activités commerciales, fait converger toutes les routes en construction sur la capitale et, l’économie étant le facteur principal de la santé de son État-royaume, encourage une monnaie forte. Inventeur du dirigisme d’État, Louis XI installe ses réseaux de pouvoir comme une vaste toile d’araignée sur tout le pays. En éliminant les survivances de la féodalité, il prépare la voie aux monarques absolus. Selon Astruc, « la France lui doit d’être la première nation moderne à s’être dotée d’un immense pouvoir centralisé dont Louis XIV achèvera l’édification » (… jusqu’à la caricature). Le cinéaste vise moins un film historique que la démystification d’un personnage qui fut le contraire d’un roi chevalier, et ressusciter à l’écran cette partie serrée dont la France était alors l’enjeu, une France en miettes après la guerre de Cent Ans, vouée à la discorde (la Ligue du Bien public), aux innombrables complots ourdis contre la couronne. |
1955/56 | *Si Paris nous était conté (FR) de Sacha Guitry [et Eugène Lourié] C.L.M. Clément Duhour/Gaumont-Franco London Film, 2h15 min. – av. Sylviane Contis (Jeanne d’Arc), Paul Colline (Charles VII), Danielle Darrieux (Agnès Sorel), Gérard Philipe (le chanteur des rues). L’histoire de Paris, des origines à 1955, racontée à de jeunes étudiants par leur professeur (Guitry) sous forme de « déclaration d’amour lucide ». Après une brève scène avec sainte Geneviève sur les rives de la Seine, au Ve siècle, le récit débute vraiment en pleine guerre de Cent Ans. Dans un estaminet parisien où rêvasse François Villon, la population se plaint de l’occupation des Anglais dont les troupes défilent à l’extérieur. « Ce fut une jeune fille ardente et courageuse qui nous en débarrassa », commente Guitry, n’hésitant pas à montrer Jeanne d’Arc à cheval dans les rues d’une ville qui la combattit pourtant avec acharnement et la repoussa devant ses remparts ! (D’ailleurs, le fameux Journal d’un Bourgeois de Paris rédigé entre 1405 et 1449 ne parle d’elle que comme d’un suppôt du diable.) Plus tard, en 1432 au château des Tournelles, l’impopulaire Charles VII, assis sur un trône instable (qu’il fait réparer par deux laquais), sombre dans les remords après le lâchage de la Pucelle. Pour l’égayer, Agnès Sorel lui offre ses charmes. Il en meurt épuisé sous l’œil réjoui de son rejeton, le futur Louis XI (Guitry). Suivant son exemple dans la débauche, les Parisiens créent les premières maisons closes … (suite sous Louis XI) (cf. 8). Un kaléidoscope en Technicolor de personnages et de situations issus des manuels, reliés sans véritable souci de chronologie par la nonchalance ludique et les irrésistibles pirouettes verbales de Guitry. Du musée Grévin qui s’anime, certes, mais les conventions sont dynamitées par la logique narrative souvent stupéfiante de l’auteur. C’est l’ultime apparition de Guitry à l’écran, accablé par une polynévrite qui le cloue dans un fauteuil roulant (Henri-Georges Clouzot est chargé de le remplacer au cas où il mourrait avant le dernier clap). Eugène Lourié, décorateur et ancien bras droit de Jean Renoir, dirige les foules. Pour éviter des complications, on tourne presque tout aux Studios Eclair à Épinay-sur-Seine (60 jours) et les quelques décors en extérieurs sont érigés au parc d’exposition de la Porte de Versailles et, pour l’épisode gaulois, à Trappes (Yvelines). Chaque vedette est engagé pour un à deux jours de tournage. Rappelons que Guitry a, en 1941, signé le documentaire « De Jeanne d’Arc à Philippe Pétain », aperçu de cinquante-trois minutes sur cinq cents ans d’histoire nationale (« 1429-1942 ! C’est le même problème, avec les mêmes chiffres. Donc en 1429, nous en sommes littéralement là : les deux tiers de la France occupés, un roi dépossédé… »). |
2014 | (tv) Agnès Sorel, première des favorites (FR) de David Perrier, Quentin Canette, David Jankowski (fict.) Série "Secrets d'Histoire" présentée par Stéphane Bern, Jean-Louis Remilleux/Société Européenne de Production-France Télévisions (FR3 29.7.14), 94 min. - av. Margaud Lourdet (Agnès Sorel), Claude Rochet (Charles VII), Nathalie Cottais, Yves-Pol Denielou, Christophe Lopez, Marie-Caroline Morel, Juliette Capedevielle-Dussaillant, Marie Oriaux, Florence Monteiro, Catherine Morelli, Jean-Pierre Morelli, Claude Chambet, Jean-Michel Gaudion, Jean Ballin. Docu-fiction tourné sur les lieux historiques (Loches, Courcelles, Nancy), avec reconstitutions. Loin du drame de Jeanne d'Arc, Agnès Sorel (v.1422-1450) a à peine vingt ans lorsqu'elle rencontre Charles VII, dont elle devient la maîtresse en 1443. À la fois libre et pieuse, nommée favorite officielle (acceptée officiellement à la cour), elle a transformé le roi, de vingt ans son aîné, et a joué un rôle politique majeur à ses côtés. La première maîtresse officielle d'un roi de France, à qui elle donne trois filles qui seront légitimées comme princesses de France. Morte à l'âge de vingt-huit ans, probablement empoisonnée, peut-être sur ordre de Louis XI. |
1960 | (tv) Le Roi de l’ombre (FR) de Jean Vernier Radio-Télévision Française (RTF) (1e Ch. 6.12.60), 1h30 min. – av. William Sabatier (Charles VI), Robert Arnoux (Juvénal), Gabriel Cattand (Louis, duc d’Orléans), Robert Porte (Jean sans Peur, duc de Bourgogne), Germaine Lafaille (Isabeau de Bavière), Hélène Sauveneix (Valentine Visconti, duchesse d’Orléans), Michèle Lemoine (Odette de Champdivers), Michel Marceau (le dauphin, futur Charles VII), Georges Lannes (Gerson), Maurice Chevit (le bouffon), René Fleur (l’astrologue), Yves Brainville (Legrand), Jacques Ferry (Vieilleville), Jean Clarieux (Jean Caboche), Pierre Réal (l’officier). Synopsis : Tandis que Charles VI sombre lentement dans la démence, son frère unique, le duc Louis d’Orléans, lorgne le trône. Isabeau de Bavière est régente. Dans la rue, le peuple gronde et Jean Caboche se met à sa tête. Jean sans Peur, le nouveau duc de Bourgogne, se sent menacé par les prodigalités du frère du roi, son influence au sein du Conseil royal et ses manœuvres pour affaiblir les ambitions de la Bourgogne. Voyant le pouvoir lui échapper, il le fait assassiner à Paris le 23 novembre 1407. Ce meurtre provoque la guerre civile entre Armagnacs et Anglo-Bourguignons, désordres qui permettent à la guerre de Cent Ans de reprendre. – Une dramatique écrite par Jean Loisy qui repose partiellement sur le décalage existant entre la réalité politique et les fictions d’un esprit perdu, celles de « Charles le Fol ». |
1960 | (tv) Pierre de Giac qui vendit son âme au Diable (FR) de Jean Kerchbron série « L’Histoire dépasse la fiction », Radio-Télévision Française (RTF) (1e Ch. 31.5.60), 1h30 min. – av. Marcel Lupovici (Pierre de Giac), Françoise Fabian (Catherine de l’Isle Bouchard), Marcel Bozzuffi (Jean de La Roche), Yves Brainville (Georges de La Trémoille), Simone Cendrar (Jeanne de Naillac, dame de Giac), Gérard Guillaume (le connétable Arthur de Richemont), Jean-Paul Roussillon (Charles VII), Denise Carvenne (la reine Yolande d’Aragon), Pierre Moncorbier (Cavalcanti), Eugène Berthier (le prêtre). Synopsis : En 1419, alors que Charles VI sombre dans la folie et qu’Armagnacs et Bourguignons se disputent le pouvoir, Giac, amant de la reine-mère Isabeau de Bavière, assiste à l’assassinat du duc de Bourgogne (Jean sans Peur) lors de sa rencontre fatidique avec le dauphin, un meurtre qui fera basculer la Bourgogne dans le camp anglais. Giac tient le dauphin sous sa coupe. Plus tard, il tue sauvagement sa femme, Jeanne de Naillac, qui est tombée enceinte de Philippe le Bon, le nouveau duc de Bourgogne, puis épouse l’influente Catherine de l’Isle Bouchard. Devenu Chambellan de Charles VII, il exerce ses rapines sur le Trésor de la Couronne, mais portant ombrage à la politique menée par Yolande d’Aragon, la belle-mère du roi, il est condamné et noyé en présence de La Trémoille (qui épouse sa veuve). Kerchbron, grand défenseur des classiques français et de fantastique à la télévision (« Le Golem », 1969), se penche sur la destinée faustienne d’un personnage singulièrement violent et arriviste, le chevalier Pierre de Giac (1377-1427). En 1425, à la cour de Charles VII (alors seulement roi de Bourges), Giac vend son âme à Satan par l’entremise du mage italien Cavalcanti, ce qui lui permet de conquérir l’amour, le pouvoir et la richesse. Reconnu coupable d’assassinat, vol, brigandage, pillage, détournement des deniers publics et lèse-majesté lors de son procès deux ans plus tard, longuement évoqué ici, Giac se dit innocent… et accuse le diable comme responsable de ses crimes. Le téléfilm fait partie d’une série historique qui ambitionne vainement d’égaler « La caméra explore le temps », écrite par Henri Noguères. |
1952 | Die schöne Tölzerin / AT : Die Edelweissbraut (DE) de Richard Häussler Peter Ostermayr Filmprod., 98 min. – av. Ingeborg Cornelius (Christl), Paul Richter (Charles Albrecht, Prince-Électeur de Bavière), Annemaria von Schwerin (la princesse Maria Amalia d’Autriche, son épouse), Hans Reiser (cpt. Claudius), Richard Häussler (Franz von der Trenck, colonel des Pandours), Franziska Kinz (Öffelin), Willy Rösner (Kyrein, le bourgmestre), Wolf Ackva (adj. Gondola). En 1742 à Munich, au château de Nymphenburg, à la cour du Prince-Électeur Charles Albrecht de Bavière (le futur empereur germanique Charles VII, 1697/1745). Lorsqu’éclate la guerre de succession contre l’Autriche et que les armées de Louis XIV traversent le Rhin, le Prince-Électeur bavarois renvoie Christl, sa maîtresse et mère de son enfant, auprès de sa tante dans sa ville natale de Tölz, où les voisins lui reprochent sa conduite licencieuse à la cour. Christl doit retourner à Munich, qui entre-temps a été prise par les Autrichiens, et elle y fait la connaissance du fameux colonel Trenck (cf. 8.2), auquel elle tourne la tête. Quand les redoutables Pandours de Trenck saccagent la Bavière et menacent de détruire Tölz, elle parvient à sauver la ville par une ruse, et déniche par la même occasion un mari. Une comédie tournée à Bad Tölz, Innsbruck, Munich, au château de Nymphenburg et aux ateliers de Geiselgasteig, d’après le roman de Karl Weinberger (1943). |
1955 | ® Si Paris nous était conté (FR) de Sacha Guitry. – av. Sacha Guitry (Louis XI), Jean Debucourt (Philippe de Commynes), Pierre-Jean Vaillard (Jacques Coitier, médecin du roi), Fernand Bellan (Tristan l’Hermite), Marguerite Jamous (Charlotte de Savoie, la reine). – (Épisode précédent, cf. Charles VII – (7.7).) En 1480, dans la Salle du Trône au Palais des Tournelles à Paris, le roi se plaint de sa mauvaise santé, se dit tordu, chétif, maigrelet et universellement haï. Commynes lui offre un livre recouvert de velours bleu, semé de fleurs de lys, un produit de l’imprimerie que le roi a imposée en France. Il interdit toutefois l’édition de la Bible en français par crainte des conflits religieux, puis il reçoit une délégation des ouvriers et artisans de Paris qu’il affectionne particulièrement. – Dans son ultime film, cloué dans un fauteuil par la maladie, Guitry incarne et fait longuement monologuer un monarque qu’il admire entre tous, lui qui initia la diffusion généralisée des livres (suite sous François Ier) (cf. 9). |
À la mort de son père, Charles VI est encore mineur, ce sont ses oncles qui se partagent la régence et donc les recettes fiscales. C’est la lutte pour le contrôle des recettes de l’État qui entraîne une inextricable guerre civile entre les Armagnacs du duc d’Orléans, partisans de la couronne menés par le comte Bernard VII d’Armagnac, et les Bourguignons que dirige Jean sans Peur, duc de Bourgogne, liés à l’Angleterre (1407). En 1420, après la victoire anglaise à Azincourt (cf. infra) et à la faveur des crises de folie de Charles VI, la reine, Isabeau de Bavière, et Philippe IV le Bon, chef du parti bourguignon, font signer au roi le traité de Troyes qui déshérite le dauphin (futur Charles VII) au profit du vainqueur britannique, leur gendre Henry V. Le traité, dûment ratifié par les États généraux du royaume, est d’abord défendu par une large partie de la population qui voit l’avènement d’une « double monarchie » anglo-française d’un bon œil, tandis que le Parlement de Londres craint, lui, un déséquilibre en faveur de la France, plus vaste, plus riche et plus peuplée.
1973 | (tv) Jeanne d'Arc (FR) d’Yves-André Hubert Parties : 1. Domremy – 2. Les Batailles – 3. Rouen ORTF (1e Ch. 24.5.73), 2h. – av. Catherine Morley (Jeanne d’Arc), Claudia Casale (Hauviette, son amie), Denise Bosc (Mme Gervaise, une nonne), Louis Samier (Durand Lassois, l’oncle de Jeanne), Gérard Giroudon (Didier), Robert Lonbard (Pierre Cauchon, évêque de Beauvais), Yvan Varco (Gilles de Rais), René-Marie Feret (Jean II de Valois, duc d'Alençon), Dominique Rollin (Charles VII), Louis Lyonnet (Etienne de Vignolles dit La Hire), Claude Bertrand (Raoul de Gaucourt), Robert Marcy (père Nicolas Loyseleur), Albert Médina (Mathieu Bourat), Pierre Arditi (G. Eward), Vernon Dobtcheff (Regnault de Chartres, archevêque de Reims), Roland Monod (Patrice Bernard), André Reybaz (Vincent Claudet), Jacques Bauchey (maître Jean), Jean Brassat (Jean d’Estivet), Jean Mourat (Ignace Dasbrée), Georges Aubert (Jean Massieu), Jerry Brouwer (William Hailton). Drame de Charles Péguy (1897) en trois pièces centrées chacune sur un aspect de la vie de la sainte : à Domremy, après avoir discuté avec son amie d’enfance Hauviette et Mme Gervaise, Jeanne convainc son oncle Durand Lassois de la conduire à Vaucouleurs… A Orléans en avril 1429, elle remporte la victoire... A Rouen, alors que le procès de Jeanne a débuté, Nicolas l’Oyseleur (ou l’Oiseleur), chanoine de la cathédrale, discute ferme avec le père Mathieu Bourat, de l’ordre des Pêcheurs pour savoir si la prisonnière est hérétique ou non. L’œuvre juvénile de Péguy est dédiée « à tous ceux qui seront morts de leur mort humaine pour l’établissement de la République socialiste universelle. » Avant de devenir pour Péguy un symbole du mysticisme catholique, « la fille la plus sainte après la Sainte Vierge » (treize ans plus tard), Jeanne est d’abord l’incarnation fervente de ses idées socialistes et athées, d’une mystique sociale qui refuse d’accepter la victoire terrestre du mal. Dramatique mise en scène dans le cadre d’une soirée « Temps libre » consacrée à Charles Péguy et intitulée « le prophète contre la loi » (présentation de Maurice Clavel), avec, à nouveau, Catherine Morley et Denise Bosc (cf. 1970). L’original de Péguy nécessitant sept à huit heures de représentation, l’ORTF présente l’œuvre avec de très larges coupures. |
1948 | *Du Guesclin (FR) de Bernard de Latour et Pierre Billon Gaston Graza-Les Films du Verseau, 1h40 min. – av. Fernand Gravey (Bertrand du Guesclin), Noël Roquevert (l’écuyer Jagu), Gérard Oury (Charles V), Junie Astor (Tiphaine Raguenet, Dame du Guesclin), Léon Barry (Charles de Blois), Ketti Gallian (Jeanne de Malemains, mère de Bertrand), Howard Vernon (Henry de Grosmont, duc de Lancastre), Michel Salina (Thomas de Canterbury), Paul Amiot (Louis Ier, duc d’Anjou), Louis de Funès (l’astrologue Darian), Jacques Mercier (Bertrand enfant), Marcel Delaître (Sir John Chandos, connétable de Guyenne), Gisèle Casadesus (la comtesse de Penthièvre), Suzanne Nivette (Sœur Anne-Marie). André Marnay (Robin Raguenet), Roger Vincent (Edward de Galles, le Prince Noir). Synopsis : En 1405, devant le gisant de Du Guesclin à la basilique de Saint-Denis, le vieil écuyer Jagu raconte la vie de son maître… Enfant terrible, Bertrand du Guesclin est « mauvais comme un dogue » : il se bat contre les galopins de La Motte-Broons, près de Dinan, et brutalise ses propres frères et sœurs. Sept ans plus tard, il participe incognito au tournoi de Rennes qu’a organisé Charles de Blois et en défait tous les chevaliers en lice. Il se jette ensuite sur les brigands réfugiés dans la forêt de Brocéliande, et rançonne les Anglais qui s’y aventurent. Bertrand n’en sort que pour s’agenouiller au lit de mort de sa mère, déplorant de n’avoir pu s’en faire aimer. Adoubé, le « Dogue noir de Brocéliande » devient capitaine des armées de Bretagne et de France au service de Jean le Bon. A la suite du combat courtois qu’il remporte contre l’Anglais Thomas de Canterbury (1359) sur la place du Marché à Dinan, il épouse la belle Tiphaine, férue d’astrologie et qui a lu sa victoire dans les astres. Bertrand est blessé et prisonnier à la bataille d’Auray, Tiphaine vide ses coffres pour aider à financer sa rançon. Quand il la rejoint enfin, un nouvel ordre de Charles V le charge de mâter les Grandes Compagnies, des armées de pillards assassins qui ravagent le royaume. Du Guesclin emmène ces irréguliers combattre l’Anglais en Espagne (1365). A la bataille de Navarette (1367), il est capturé par le prince de Galles, dit le Prince Noir. Ayant payé une nouvelle rançon exorbitante, Charles V le fait connétable (1370). Tiphaine vend ses derniers bijoux pour payer la solde de ses troupes. Elle meurt dans sa maison de Mont-Saint-Michel en lui donnant son anneau, à remettre à « une jeune fille qui vient de l’Est ». Un soir de juillet 1380, alors qu’il assiège les Anglais devant Châteauneuf-de-Randon, Du Guesclin tombe malade. Il fait des adieux émouvants à ses compagnons et remet au roi l’anneau que Charles VII passera au doigt de Jeanne d’Arc, « jeune fille venue de l’Est ». Héros des manuels scolaires, Du Guesclin est boudé par les caméras Alors qu’il appartient au panthéon des figures historiques transmises par l’enseignement scolaire, le héros le plus populaire de la guerre de Cent Ans n’a jamais eu les honneurs de l’écran auparavant (il y eut juste un projet sans suite de la Gaumont en 1913, « *La Rançon de Bertrand Du Guesclin »), et même les divers films espagnols sur le conflit dynastique entre Henri de Trastamare et Pierre le Cruel en Castille, où il joua un rôle déterminant, ne le mentionnent pas. On le retrouvera en marge de « The Dark Avenger » (cf. infra) en 1955 comme principal adversaire du Prince Noir anglais. Mentionnons encore le court métrage burlesque « Le Dernier Preux » (1933) de Pierre-Jean Ducis dans lequel Jules Moy interprétait Du Guesclin sur un plateau de cinéma. Tel quel, « Du Guesclin » se présente comme une biographie relativement fidèle. Né vers 1320 à La Motte-Broons, près de Dinan, le légendaire capitaine breton est issu d’une modeste famille de barons campagnards. Il se fait vite remarquer par son énergie, sa turbulence et sa combativité. Adulte, il devient gouverneur de Pontorson et capitaine souverain du duché de Normandie. C’est le champion des coups de main, des coups fourrés, des embuscades, des attaques surprises. Face à la supériorité numérique de l’ennemi, il préfère le harcèlement aux grandes batailles coûteuses en hommes, une guerre à « l’économie » qui séduit le roi Charles V. Nommé connétable de France, Du Guesclin va consacrer son existence à délivrer le pays des armées anglaises et des Navarrais. À sa mort, les Anglais, chassés de Normandie, ne possèdent plus que quelques territoires en Aquitaine et dans le Nord. Son épouse Tiphaine Raguenet, fille de Robin Raguenet, vicomte de La Bellière, et de Jeanne de Dinan, était effectivement une astrologue réputée. La France entre occupation étrangère et maquis « Du Guesclin » est l’unique film de chevalerie français des années 1920 à 1950, entre « Le Miracle des loups » muet de Raymond Bernard en 1924 (cf. 8) et son remake d’Hunebelle en 1961 (en ne tenant pas compte des sujets médiévaux plus généraux). C’est là sa première particularité. En outre, la guerre de Cent Ans, prototype des guerres civiles européennes à venir, est un chapitre peu prisé après 1918 – le combat de Jeanne d’Arc mis à part, que le XIXe siècle a assimilé anachroniquement à une « guerre de libération » nationaliste – tant son approche est épineuse du point de vue social et politique. Initialement, il s’agit de la concrétisation d’un projet de Bernard de Latour (adaptation et dialogues) annoncé en 1946 sous le titre grandiloquent de « *Le Mystère du Grand Connétable – une merveilleuse page d’histoire sur Bertrand du Guesclin ». Mis en scène prévue par René Jayet et Latour lui-même, avec une musique de Pierre Blois et des chants de Marguerite Monnot, le film aurait contenu des allusions claires à l’occupation de la France par la Wehrmacht. Latour, qui a été producteur, exploitant, mais aussi assistant de Jacques Deval et de Jean Delannoy, envisageait d’aborder le sujet en 1938 déjà ; la guerre l’en empêcha, et peut-être aussi la censure : en haut lieu à Vichy, on était curieusement soucieux de ménager la « perfide Albion ». |
1985 | (tv) Catherine – Il suffit d’un amour (FR) de Marion Serraut Antenne 2-Société Française de Production (A2 19.3.-11.6.86), 60 x 26 min. – av. Claudine Ancelot (Catherine Legoix), Pierre-Marie Escourrou (Michel/Arnaud de Montsalvy), Pascale Petit (Sara la Noire), Philippe Auriault (Landry), Serge Marquand (le boucher Caboche), Jean-François Poron (Philippe IV le Bon, duc de Bourgogne), Georges Montillier (l’évêque Pierre Cauchon), Henry Guybert (Guillaume-Pierre Legoix), Antonin (Charles VII), Cyril Spiga (Jean sans Peur), Philippe Clay (Barnabé), Dora Doll (Ermengarde), Benoît Brionne (Gilles de Rais), Isabelle Guiard (Jeanne d'Arc), Geneviève Casile (la reine Yolande d'Aragon), Christian Alers (Mathieu Gautherin), Jacques Brucher (Jacques de Roussay), Stéphane Bouy (Garin de Brazey), Isaach de Bankolé (Alis), Jean-François Bayonne (La Mise), Gérard Chambre (Jean Poton de Xaintrailles), Pierre Deny (Dunois), Isabelle Duby (Isabelle de Séverac), Jean-Louis Buquet (Jan Van Eyck), Jacques Duby (frère Etienne), Anne Lefébure (Jacquette Legoix), Christian Alers (Mathieu Gautherin), Sylvie Lebrigant (Marthon), Amidou (Abou), Clément Michu (Cornelis), Sylvie Folgoas (Michelle de France), Daniel Tarrare (Jean de Luxembourg), François Brincourt (Richemont), Lena Grinda (Mme de La Trémoille), Marie Daëms (Anne de Sillé), Sylvain Lemarie (l’abbé Bernard), Anne-Marie Scieller (Marie de Comborn), Philippe Murgier (l’argentier Jacques Cœur), James Sparrow (le chevalier Hugh Alan Kennedy), Serge Bento (Renaudot). Synopsis : En avril 1413 à Paris, au moment de l’émeute menée par le boucher Caboche, l’universitaire Pierre Cauchon et Guillaume Legoix. La nièce de ce dernier, la belle Catherine, va croiser moult personnages historiques pendant cette période troublée qui oppose les Bourguignons, partisans de Jean sans Terre, aux Armagnacs qui soutiennent Charles VI, puis son fils Charles VII. Catherine reste fidèle à l’amour de sa vie, Arnaud de Montsalvy, alors que Philippe de Bourgogne lui fait un enfant, que Gilles de Rais la viole, que le sadique Garin de Brazay la maltraite, qu’elle est présentée à la cour de Charles VII, rencontre l’évêque Pierre Cauchon et le peintre flamand Van Eyck, qu’elle tente de sauver Jeanne d’Arc du bûcher, trouve refuge auprès de l’argentier royal Jacques Cœur, etc. Une interminable série de 26 heures tirée d’un non moins redoutable cycle de romans de gare de Juliette Benzoni, dont les titres sont éloquents : Il suffit d’un amour (1963), Belle Catherine (1966), Catherine des Grands Chemins (1967), Catherine et le temps d’aimer (1968), Piège pour Catherine (1973) et La Dame de Montsalvy (1978). Le premier volume a déjà été adapté par Bernard Borderie en 1969, sans succès (cf. supra). Cette pâle copie carbone d’« Angélique » mobilisant toutes les célébrités de la France du XVe siècle est bâclée en vidéo par la SFP, maison spécialisée dans la fabrication de fictions télévisuelles à moindre coût. Il n’y a rien à y sauver, sinon guetter au fil des épisodes l’apparition cocasse de Philippe Clay, de Pascale Petit, de Jean-François Poron, de Dora Doll ou encore de l’historien médiéviste Jacques Duby, égaré dans cette galère. |
Moyen Âge et Renaissance > LE ROYAUME DE FRANCE > LE CRÉPUSCULE DU MOYEN ÂGE: LOUIS XI (1461 à 1483)
Roman paru en 1823. – La France en 1465. Charles le Téméraire veut marier sa pupille, la comtesse Isabelle de Croye (héritière de la riche province du même nom), à son favori, le condottiere napolitain Nicola di Monforte, comte de Campobasso. Elle refuse, s’enfuit et se réfugie à la cour de Louis XI à Plessis-lès-Tours. Le Téméraire exige son retour sous menace de guerre, et le roi se débarrasse de l’encombrante damoiselle en l’envoyant en Flandre chez l’évêque de Liège. Quentin Durward, un archer qui a sauvé la vie du souverain lors d’un accident de chasse, est chargé d’escorter la comtesse. Tenaillé par la pauvreté, Durward a quitté son Écosse natale pour entrer dans la Garde écossaise du roi de France, où son oncle Ludovic Lesley dit le Balafré a fait carrière. En réalité, Louis XI, retors, destine la comtesse à son allié, le brutal Guillaume de La Marck surnommé le « Sanglier des Ardennes », chef d’une armée de coupeurs de gorges sans foi ni loi, mais aussi seigneur de domaines considérables et qui pourrait mettre le duc de Bourgogne en difficulté. En cours de route, Quentin déjoue les tentatives d’enlèvement d’Isabelle imaginées par Louis XI. Celui-ci orchestre alors secrètement le soulèvement de la population de Liège contre l’évêque-gouverneur de la cité, Philippe de Bourbon (beau-frère du Téméraire), et la prise de la ville par La Marck. L’évêque est assassiné par les soudards au château de Schonwaldt (aux abords de Liège), Quentin et Isabelle leur échappent de justesse et sont capturés par les Bourguignons. A Péronne, chez le Téméraire qui l’accuse de fourberie, Louis XI feint tout ignorer et, en signe de paix, joint son armée à celle de son ennemi pour assiéger Liège et terrasser conjointement La Marck. Le duc de Bourgogne promet la main d’Isabelle à celui qui lui ramènera la tête du redoutable « Sanglier des Ardennes ». Au cours de la bataille, alors qu’il se mesure au « Sanglier », Quentin doit porter secours à Gertrude, la fille du syndic Pavillon importunée par la soldatesque, et c’est l’oncle de Quentin, Ludovic Lesley, qui décapite La Marck. Mais trop âgé pour se remarier, il cède sa place à son neveu, comme le souhaite Isabelle.
Nota bene :
- Le roman de Walter Scott a inspiré un opéra de François-Auguste Gevaert ("Quentin Durward", 1858) et un tableau d’Eugène Delacroix, "L’assassinat de l’évêque de Liège" (1829).
- La Garde écossaise (« archers de la garde du roy »), corps militaire d’élite à la cour de France, a été créé par Charles VII en 1422. Les princes écossais, issus de maisons bretonnes comme les Stuart, ou normandes, sont possessionnés en France et à ce titre vassaux du roi de France. L’opposition à l’Angleterre crée un lien supplémentaire. En outre, Louis XI a épousé en premières noces Marguerite, la fille du roi d’Écosse avec lequel il s’est allié pour prendre les Anglais à revers.
- Situé à un point stratégique entre la frontière de Bourgogne et la Flandre, le riche comté de Croye dépend directement du Téméraire. Or, la jurisprudence féodale permet à un seigneur de disposer de la main d’une vassale (ici la comtesse Isabelle), pour empêcher ainsi son héritage de tomber sous la dépendance d’un ennemi.
- En réalité, l’assassinat de l’évêque de Liège par La Marck eut lieu en août 1482, soit cinq ans après la mort de Charles le Téméraire. Excommunié par l’archevêque de Cologne, La Marck fut capturé lors d’une embuscade dressée par les troupes brabançonnes de l’empereur Maximilien Ier (qui a épousé la fille du Téméraire) et décapité à Maëstricht en juin 1485. Pour les besoins de l’intrigue, Walter Scott mélange cet épisode avec ceux de l’entrevue dramatique de Péronne et de la répression de l’insurrection liégeoise de 1468. Il peut ainsi reporter opportunément sur ce « Sanglier » les crimes du roi comme ceux du Téméraire.
Nota bene :
- Le roman de Walter Scott a inspiré un opéra de François-Auguste Gevaert ("Quentin Durward", 1858) et un tableau d’Eugène Delacroix, "L’assassinat de l’évêque de Liège" (1829).
- La Garde écossaise (« archers de la garde du roy »), corps militaire d’élite à la cour de France, a été créé par Charles VII en 1422. Les princes écossais, issus de maisons bretonnes comme les Stuart, ou normandes, sont possessionnés en France et à ce titre vassaux du roi de France. L’opposition à l’Angleterre crée un lien supplémentaire. En outre, Louis XI a épousé en premières noces Marguerite, la fille du roi d’Écosse avec lequel il s’est allié pour prendre les Anglais à revers.
- Situé à un point stratégique entre la frontière de Bourgogne et la Flandre, le riche comté de Croye dépend directement du Téméraire. Or, la jurisprudence féodale permet à un seigneur de disposer de la main d’une vassale (ici la comtesse Isabelle), pour empêcher ainsi son héritage de tomber sous la dépendance d’un ennemi.
- En réalité, l’assassinat de l’évêque de Liège par La Marck eut lieu en août 1482, soit cinq ans après la mort de Charles le Téméraire. Excommunié par l’archevêque de Cologne, La Marck fut capturé lors d’une embuscade dressée par les troupes brabançonnes de l’empereur Maximilien Ier (qui a épousé la fille du Téméraire) et décapité à Maëstricht en juin 1485. Pour les besoins de l’intrigue, Walter Scott mélange cet épisode avec ceux de l’entrevue dramatique de Péronne et de la répression de l’insurrection liégeoise de 1468. Il peut ainsi reporter opportunément sur ce « Sanglier » les crimes du roi comme ceux du Téméraire.
2017 | (tv) La Guerre des trônes - La véritable histoire de l'Europe : 4. Le Roi fou et la Pucelle (1392-1453) (FR/CA) d'Alain Brunard et Vanessa Pontet Série présentée par Bruno Solo (saison 1, épis. 4), Samuel Kissous/Pernel Media-TV5 Québec-CNC-France Télévisions-Histoire TV (FR5 29.12.17), 51 2in. - av. Michael Erpelding (Charles VI le Fou), Patrice Tepasso (Charles VII), Marguerite Dabrin (Jeanne d'Arc), Catherine Zavlav (Isabeau de Bavière), François David Cardonnel (Henry V d'Angleterre), Sébastien Grill (Jean sans Peur), Thibaud Lepage (Philippe le Bon), Victorien Robert (Louis Ier d'Orléans), Bertrand Chamerois (messager noble français). À 24 ans, le roi de France Charles VI bascule dans la folie. Le trône de France est en péril. Boourguignons et Armagnacs s'affrontent, la guerre civile fait rage et ravive la convoitise du roi d'Angleterre: la guerre de Cent Ans repart de plus belle. Mais avec l'aide de Jeanne, une jeune fille de 17 ans venue de Domrémy, le dauphin de France, futur Charles VII, ne va pas laisser les Anglais lui ravir le trône... - Docu-fiction retraçant à gros traits l'épopée des dynasties rivales qui ont écrit la grande histoire de l'Europe, au moyen de reconstitutions soignées (jolis costumes) mais pataudes et souvent minimalistes (cadrages serrés); planté devant une carte du continent en relief, Bruno Solo survole avec une bonne dose de sensationnalisme les jeux de pouvoir, les ambitions et les passions humaines qui ont façonné les nations. Tournage à l'abbaye de Royaumont (entre autres). |
Profitant de la faiblesse mentale et politique de Charles VI, Henry V relance le conflit armé en 1415, traverse la Manche, s’empare d’Harfleur, anéantit l’armée française des Armagnacs à Azincourt. C’est une victoire anglaise écrasante (3000 morts et des centaines de prisonniers, dont Charles d’Orléans) – pour une guerre sans issue. Pour l’instant, Henry V lance une conquête méthodique de la Normandie et se trouve bientôt aux portes de Paris. En épousant Catherine de Valois, la fille de Charles VI, le jeune roi d’Angleterre se fait nommer régent et s’impose héritier de la couronne de France. Mais il meurt deux ans plus tard (un mois et demi avant Charles VI), emporté par une maladie foudroyante et laissant sur le trône vacillant de France un fils âgé de quelques mois. La porte est alors ouverte à la reconquête du royaume par celui qu’une partie de la population considère désormais comme le roi légitime, Charles VII, le dauphin écarté par le « honteux traité de Troyes ».
C’est l’avant-dernier chapitre de la guerre de Cent Ans. Le 21 mai 1420, profitant de la folie intermittente de Charles VI, son épouse, Isabeau de Bavière, et Philippe le Bon, chef du parti bourguignon rallié aux Anglais, ont fait signer au roi malade le Traité de Troyes qui déshérite son propre fils, le dauphin français, déclaré bâtard, au profit de la couronne d’Angleterre (en mains de la dynastie des Lancastre). Né de la brève union entre Henri V de Lancastre et Catherine de France, Henri VI a moins de 1 an lorsqu’il devient souverain des deux royaumes à la suite de la mort prématurée de son père, à 36 ans, en 1422 ; le duc de Bedford est nommé régent et tuteur de l’enfant. Le traité suscite l’opposition des légistes français, qui estiment que la couronne n’est pas un patrimoine privé dont un roi peut disposer à sa guise et que celle-ci revient de droit au dauphin de France, futur Charles VII. Mais le roi anglais est reconnu dans tous les territoires occupés par les armées britanniques (la France lancastrienne), y compris à Paris, où le régent tient cour, tandis que le « soi-disant » dauphin, officiellement banni, protégé de l’ennemi au nord par la Loire, ne règne que sur Bourges (où il s’est réfugié), le centre, le Midi et quelques régions dans l’est lui restant fidèles.
Jeanne d’Arc naît à Domremy, dans les Vosges (région rattachée au royaume de France) le 6 janvier 1412. Elle prend conscience de sa mission vers 1425. En octobre 1428, les Anglais mettent le siège devant Orléans, verrou sur la Loire et dernière ville fortifiée sur la route de Bourges où se tient le dauphin, indolent et indécis. L’année suivante, mandatée par le « Roi des Cieux », Jeanne se rend à Vaucouleurs et persuade Robert de Baudricourt de lui donner une escorte en territoire occupé par l’ennemi bourguignon jusqu’à Chinon, où le dauphin la reçoit. En mars 1429, après un examen de la Pucelle par des théologiens à Poitiers, le dauphin fait rassembler une armée et un convoi de vivres destinés à Orléans, dont Jeanne prend le commandement. Le 7 mai, elle s’attaque au fort des Tourelles ; vaincus, les Anglais lèvent le siège, qui a duré sept mois. La délivrance inespérée d’Orléans fait l’effet d’un coup de tonnerre, galvanisant l’armée (qui accepte de suivre la Pucelle même sans solde), et derrière elle, la majorité de la population. La campagne de Loire qui suit est destinée à nettoyer la route du sacre. En juin, Jeanne et ses compagnons d’armes remportent des victoires à Jargeau, Meung, Beaugency et Patay, Troyes et Châlons ouvrent leurs portes et, en juillet, le dauphin peut entrer à Reims où l’archevêque Regnault de Chartres le sacre roi légitime de France. À l’insu de Jeanne, Charles VII conclut alors une trêve néfaste avec les Anglo-Bourguignons, qui anéantit les effets positifs des récents combats. En septembre, Jeanne lance vainement un assaut sur Paris et le roi dissout l’armée du Sacre.
En mai 1430, à la tête de mercenaires, Jeanne reprend les hostilités contre les Bourguignons de Philippe le Bon qui assiègent Compiègne. Elle y est capturée. Emprisonnée jusqu’à la fin de décembre aux châteaux de Beaulieu, puis de Beaurevoir, elle est ensuite livrée aux Anglais moyennant une rançon de 10'000 écus et transférée au château de Bouvreuil à Rouen. Charles VII ne fait rien pour la sauver. Son procès de cinq mois débute en janvier 1431 sous la direction de Pierre Cauchon, évêque de Beauvais, qui s’affaire avec une mauvaise foi patente à déguiser un procès politique foncièrement inique en procès d’hérésie (une hérétique aurait dû être enfermée en prison ecclésiastique et gardée par des femmes, alors que Jeanne est traitée en prisonnière de guerre et gardée par des soldats anglais, ses ennemis). Le 30 mai, à l’instigation de l’Université de Paris, elle est brûlée vive sur la place du Vieux-Marché à Rouen ; aux yeux des Anglais, sa condamnation au bûcher est une nécessité, l’inculpation de sorcellerie permettant d’invalider le sacre royal à Reims. Jeanne a 13 ans quand elle entend les « voix célestes », 17 ans quand elle combat et 19 ans quand elle périt. Charles VII, qui entre finalement à Rouen, capitale de la France lancastrienne, en 1449, sait qu’il ne peut devoir son trône à une hérétique ; il obtient donc du pape Calixte III l’autorisation de réviser le procès en Inquisition (réclamée par la mère de Jeanne, Isabelle Romée) et faire réhabiliter la Pucelle en 1456. Les Anglais ont quitté le royaume du lys trois ans auparavant, comme l’avait prédit la jeune Lorraine.
Jeanne d’Arc naît à Domremy, dans les Vosges (région rattachée au royaume de France) le 6 janvier 1412. Elle prend conscience de sa mission vers 1425. En octobre 1428, les Anglais mettent le siège devant Orléans, verrou sur la Loire et dernière ville fortifiée sur la route de Bourges où se tient le dauphin, indolent et indécis. L’année suivante, mandatée par le « Roi des Cieux », Jeanne se rend à Vaucouleurs et persuade Robert de Baudricourt de lui donner une escorte en territoire occupé par l’ennemi bourguignon jusqu’à Chinon, où le dauphin la reçoit. En mars 1429, après un examen de la Pucelle par des théologiens à Poitiers, le dauphin fait rassembler une armée et un convoi de vivres destinés à Orléans, dont Jeanne prend le commandement. Le 7 mai, elle s’attaque au fort des Tourelles ; vaincus, les Anglais lèvent le siège, qui a duré sept mois. La délivrance inespérée d’Orléans fait l’effet d’un coup de tonnerre, galvanisant l’armée (qui accepte de suivre la Pucelle même sans solde), et derrière elle, la majorité de la population. La campagne de Loire qui suit est destinée à nettoyer la route du sacre. En juin, Jeanne et ses compagnons d’armes remportent des victoires à Jargeau, Meung, Beaugency et Patay, Troyes et Châlons ouvrent leurs portes et, en juillet, le dauphin peut entrer à Reims où l’archevêque Regnault de Chartres le sacre roi légitime de France. À l’insu de Jeanne, Charles VII conclut alors une trêve néfaste avec les Anglo-Bourguignons, qui anéantit les effets positifs des récents combats. En septembre, Jeanne lance vainement un assaut sur Paris et le roi dissout l’armée du Sacre.
En mai 1430, à la tête de mercenaires, Jeanne reprend les hostilités contre les Bourguignons de Philippe le Bon qui assiègent Compiègne. Elle y est capturée. Emprisonnée jusqu’à la fin de décembre aux châteaux de Beaulieu, puis de Beaurevoir, elle est ensuite livrée aux Anglais moyennant une rançon de 10'000 écus et transférée au château de Bouvreuil à Rouen. Charles VII ne fait rien pour la sauver. Son procès de cinq mois débute en janvier 1431 sous la direction de Pierre Cauchon, évêque de Beauvais, qui s’affaire avec une mauvaise foi patente à déguiser un procès politique foncièrement inique en procès d’hérésie (une hérétique aurait dû être enfermée en prison ecclésiastique et gardée par des femmes, alors que Jeanne est traitée en prisonnière de guerre et gardée par des soldats anglais, ses ennemis). Le 30 mai, à l’instigation de l’Université de Paris, elle est brûlée vive sur la place du Vieux-Marché à Rouen ; aux yeux des Anglais, sa condamnation au bûcher est une nécessité, l’inculpation de sorcellerie permettant d’invalider le sacre royal à Reims. Jeanne a 13 ans quand elle entend les « voix célestes », 17 ans quand elle combat et 19 ans quand elle périt. Charles VII, qui entre finalement à Rouen, capitale de la France lancastrienne, en 1449, sait qu’il ne peut devoir son trône à une hérétique ; il obtient donc du pape Calixte III l’autorisation de réviser le procès en Inquisition (réclamée par la mère de Jeanne, Isabelle Romée) et faire réhabiliter la Pucelle en 1456. Les Anglais ont quitté le royaume du lys trois ans auparavant, comme l’avait prédit la jeune Lorraine.
1928/29 | **La Merveilleuse Vie de Jeanne d'Arc, fille de Lorraine (FR) de Marco de Gastyne Bernard Natan/Pathé-Cinéma des Productions Natan/Rapid Film, 4800 m./3h./2h10 min. (reconstruction). – av. Simone Genevois (Jeanne d’Arc), Jean Debucourt (Charles VII), Philippe Hériat (Gilles de Rais), Jean Toulout (Georges de La Trémoille), Gaston Modot (Lord William Glasdall, commandant des Tourelles), Daniel Mendaille (Lord John Talbot, comte de Shrewsbury), Mario Nastasio (Richard de Beauchamp, comte de Warwick), Choura Milena (Isabeau de Paule), Jeanne-Marie Laurent (Éléonore de Paule), Fernand Mailly (Etienne de Vignolles dit La Hire), Georges Paulais (Jean Bâtard d’Orléans, comte de Dunois/le père Nicolas Loyseleur), Jean Manoir (Jean de Metz), Marcel Chabrier (Robert de Baudricourt), Jean Diener (Regnault de Chartres, archevêque de Reims), Jean Darcignac (Jean II de Valois, duc d'Alençon), Louis Allibert (Rémy Loiseau), Pierre Douvan (Pierre Cauchon, évêque de Beauvais), Mario Nasthasio (Richard, comte de Warwick), Florus (Jean Le Maistre, inquisiteur), Léonce Cargue (Jean, duc de Luxembourg), Bernard Taft (Prélati, âme damnée de Gilles de Rais), Dorah Starny (Gilda la Sorcière), François Viguier (Frère Jean Pasquerel), Marc Valbel (Bertrand de Poulengy), Jean Dalbé (Minguet, le page de Jeanne), Soyez (Jean Poton de Xaintrailles), Jean-Pierre Stock (Jean Poitou), Michel Roux (Stacquet), Mary Serta (la captive), Genica Athanasiou (la bohémienne), Henri Valbel (le soldat mourant). En 1920, le président Paul Deschanel institue une seconde fête nationale française, célébrée le deuxième dimanche du mois de mai en l’honneur de Jeanne d’Arc. Sept ans plus tard, au printemps 1927, le producteur Bernard Natan annonce la fabrication d’une grande fresque nationale sur la sainte afin de marquer le cinquième centenaire de la libération d’Orléans (1429), commémoration qui donne lieu à diverses festivités dans le chef-lieu du Loiret. Natan veut ainsi combattre l’hégémonie du cinéma américano-germanique sur les écrans hexagonaux, et regagner les faveurs du public : Jeanne doit sauver l’industrie cinématographique française, et, pour y parvenir, cette dernière doit non seulement être meilleure, mais « plus française » que les produits étrangers. À la veille du dixième anniversaire de l’armistice, on se propose simultanément de « donner un sens à une mémoire nationale déstabilisée par le travail de deuil sur un passé récent et traumatique – et par l’entrée du pays dans la modernité » (Dimitri Vezyroglou, L’Événement, Paris, 2004). Conçue sur la lancée du « Miracle des Loups » de Raymond Bernard (1924) (cf. 8), l’initiative de Natan reçoit l’appui massif des pouvoirs publics. Le comité d’honneur du film est placé sous le patronage de Raymond Poincaré, président du Conseil et ancien président de la République, et d’Edouard Herriot, ministre de l’Instruction publique ; parmi les autres membres, on découvre le nom du maréchal Pétain, le récent vainqueur de la guerre du Rif (en 1940, il s’appropriera sans vergogne les vertus de la petite Vosgienne pour sa propagande personnelle). Le cardinal Dubois, archevêque de Paris, annonce son parrainage. La sanctification de Jeanne par le Vatican, obtenue en échange du rétablissement des relations diplomatiques françaises avec le Saint-Siège, est tombée au moment politique opportun. Après l’hécatombe de la Grande Guerre, on rêve à l’unité du pays, le Bloc National est au pouvoir. Le pape Pie XI a accentué le geste du Saint-Office en proclamant officiellement la bergère de Domremy « patronne secondaire de la France » (puis en procédant à la béatification-canonisation de Bernadette Soubirou et de Thérèse de Lisieux). Le scénariste Jean-José Frappa, écrivain et auteur dramatique ultranationaliste (son dernier roman s’intitule À Paris sous l’œil des métèques, 1926), ne fait pas dans la dentelle et, en attaquant le projet rival de Dreyer, il martèle : « Jeanne d’Arc est française. Elle fut la première Française. Son épopée courte et magnifique est la plus belle de notre histoire. C’est Jeanne la Pucelle qui créa vraiment la France. (…) Pour bien comprendre Jeanne d’Arc, il faut être français, français de père en fils. » (Chanteclerc, 1.1.27). « Elle sauva la France et créa chez nous le sentiment national, renchérit-il ailleurs, c’est la première Française au sens précis du mot ». N’insistons pas sur ses notions biaisées d’histoire médiévale. Ces propos chauvins, dignes d’un Paul Déroulède ou Charles Maurras, ne sont du reste pas ceux de la Rome catholique, qui souhaite alors établir le culte d’une héroïne de juste milieu, en renvoyant dos à dos anticléricaux et royalistes (Pie XI a mis l’Action française de Maurras à l’Index en 1926). Une Pucelle résolument populaire, catholique et nationaliste Monument à la Nation, le film sera donc placé sous la paternité républicaine de Michelet, cité en exergue : « La patrie, chez nous, est née du cœur d’une femme. » Reste à trouver l’interprète idéale, parmi 400 candidatures. Conditions : l’élue doit avoir moins de 18 ans et, cela va de soi, « être de nationalité et de parents français ». Le jury, présidé par le romancier Henry Dupuy-Mazuel (Le Miracle des loups) choisit Simone Genevois, 15 ans. Un choix heureux. Elle ne sait pas monter et n’est pas particulièrement costaude, mais elle séduit par sa grâce naturelle, sa sensibilité, sa fraîcheur et son allant. Simone Genevois a déjà du métier : après ses débuts à l’âge de 4 ans dans le sérial « Protéa » de Feuillade (1917), elle a tenu des rôles d’enfant dans une vingtaine d’autres films, puis joué Pauline Bonaparte pour le « Napoléon » de Gance (elle se retirera du cinéma en 1935). Sa jeunesse en fait une Jeanne hors du commun, son jeu simple et expressif, sans poses ni affectation, est un des atouts du film ; gaie à Domremy, lionne à Orléans, elle parvient même à faire rire ses juges à Rouen dans une scène pourtant périlleuse. Ses remontrances et rudoiements, elle les adresse à des gens d’ailleurs à peine plus âgés qu’elle : Gilles de Rais et Xantrailles avaient 24 ans, le dauphin 25 et d’Alençon 19, le plus vieux étant La Hire avec ses 38 ans. |
Né en 1387, fils d’Henry IV Lancaster (Bolingbroke) et de Mary de Bohun. Marié à Catherine de Valois. En 1415, profitant des dissensions qui déchirent la France divisée entre Armagnacs et Bourguignons, et qu’augmente encore la maladie mentale de Charles VI en France, Henry V rompt le traité de paix qu’avait signé Richard II en 1396 et relance le conflit armé en 1415. Surnommé « Harry le belliqueux », il traverse la Manche, s’empare d’Harfleur après un intense pilonnage de bouches à feu et anéantit l’armée française des Armagnacs le 25 octobre à Azincourt. C’est une victoire anglaise écrasante (3000 Français morts et des centaines de prisonniers, dont Charles d’Orléans) – pour une guerre sans issue. Cette victoire entraîne une alliance entre la Bourgogne et l’Angleterre. Henry V lance une conquête méthodique de la Normandie et se trouve bientôt aux portes de Paris. En épousant Catherine de Valois, la fille de Charles VI, le jeune roi d’Angleterre se fait nommer régent et s’impose héritier de la couronne de France. Mais il meurt deux ans plus tard (un mois et demi avant Charles VI), emporté par une maladie foudroyante, et laisse sur le trône vacillant de France un fils âgé de quelques mois. La porte est alors ouverte à la reconquête du royaume par celui qu’une partie de la population considère désormais comme le roi légitime, Charles VII, le dauphin écarté par le « honteux traité de Troyes ».cf. « The Life of King Henry V », drame de William Shakespeare (1599).
Nota Bene : la liste des captations et dramatiques tv des pièces de Shakespeare n’est pas exhaustive.
1929/30 | Jeanne d’Arc au château féodal de Vez (Oise), ancienne capitale du Valois, en l’an 1430 (FR) de Robert Péguy et Eugène Barbier Nicaea Films Production (Paris), 1900 m. (env. 1h10 min.). – av. Suzanne Delmas (Jeanne d’Arc). Une curiosité exploitée hors des circuits commerciaux au profit de l’« Union Nationale des Anciens Combattants » et de celle des « Mutilés et Réformés ». Selon la publicité de ce film à but charitable, Jeanne, « la plus belle incarnation des vertus françaises », a réussi, « comme nos poilus en 14-18 », à bouter l’ennemi dehors. Le scénario évoque comment la Pucelle, laissant Charles VII à son indolence, s'achemine avec ses compagnons vers Compiègne que menace le duc de Bourgogne. Elle inspecte du 15 avril au 23 mai 1430, et à plusieurs reprises, la citadelle de Vez, où elle est reçue par les châtelains Bernard de Chateauvillain et son épouse Jeanne de Saint-Clair, y entend la messe et fait de longues stations dans la petite tourelle d’où elle surveille les routes environnantes. - Le réalisateur, le poète Robert Péguy, cousin de Charles Péguy et scénariste de Feuillade sous le pseudonyme de Marcel Robert, travaille dans le cinéma – facilement édifiant – depuis 1908 (on lui doit un « Paul et Virginie » tourné sur l’île Maurice en 1924) ; Suzanne Delmas est apparue dans une douzaine de bandes durant les années vingt, et quant à Eugène Barbier, conservateur des lieux, il est l’auteur de l’ouvrage historique Le Château de Vez (1926). |
2018 | (tv) La Guerre des trônes - La véritable histoire de l'Europe : 3. Le Jeu des alliances (1461-1483) (FR/CA) d'Alain Brunard et Vanessa Pontet Série présentée par Bruno Solo (saison 1, épis. 3), Samuel Kissous/Pernel Media-TV5 Québec-CNC-France Télévisions-Histoire TV (FR5 5.1.18), 51 min. - av. Laurent Bariteau (Louis XI), Sébastien Gill (Jean sans Peur), Patrick Hauthier (Charles le Téméraire), Geoffroy Lopez (Edward IV d'York), Laure Massard (Margaret d'York), Madeleine Poutargh (Marie de Bourgogne), Anthony Sourdeau (Maximilien d'Autriche), Patrice Tepasso (Charles VII). Louis XI est un fin stratège. Sur l'échiquier européen, il est surnommé l'"universelle araigne" tant il est maître dans l'art de tisser des pièges à ses ennemis. Détesté, ce roi machiavélique voit son trône menacé par deux hommes redoutables: le duc de Bourgogne Charles le Téméraire et Edward IV d'York, roi d'Angleterre... - Docu-fiction retraçant à gros traits l'épopée des dynasties rivales qui ont écrit la grande histoire de l'Europe, au moyen de reconstitutions soignées (jolis costumes) mais pataudes et souvent minimalistes (cadrages serrés); planté devant une carte du continent en relief, Bruno Solo survole avec une bonne dose de sensationnalisme les jeux de pouvoir, les ambitions et les passions humaines qui ont façonné les nations. |
Déclenchée par des querelles familiales sordides, la Guerre de Cent Ans devient le premier conflit occidental opposant non pas deux lignages - les Plantagenêts et les Valois - mais deux États et leurs alliés; les Français affrontent non seulement des Anglais, mais se combattent aussi entre eux, Armagnacs contre Bourguignons, sans parler des ravages commis par les Grandes Compagnies, meutes de mercenaires sans foi ni loi. La guerre n'a du reste pas duré cent ans : les dates de 1339 à 1453 ont tendance à occulter de longues périodes de trêve, voire de paix; il n'y eut en tout que sept ans de véritables conflits armés. Edward III d’Angleterre, petit-fils de Philippe le Bel par sa mère Isabelle, de langue et de culture françaises comme ses prédécesseurs Plantagenêts, revendique la couronne de France et déclenche les hostilités sur le continent. Avec ses 14 millions d’habitants, la France est alors le royaume le plus peuplé et le plus riche de l’Occident chrétien ; l’Angleterre ne compte que 3,5 millions d’habitants, soit quatre fois moins que la France. Les souverains adversaires de l’Angleterre sont :
PHILIPPE VI de Valois 1328 / 1350
Né en 1293, fils de Charles de Valois et de Marguerite de Sicile. Reines: Jeanne de Bourgogne (1293-1348), Blanche de Navarre (?-1398). Victoire écrasante des Anglais à Crécy (1346), qui imposent une nouvelle tactique de guerre fondée sur les archers et les fantassins, et perte de Calais (1347) qui restera anglais pendant deux cents ans. Philippe VI meurt complètement discrédité.
Cette même année, en 1350, la Grande Peste, venue d’Asie, commence à ravager l’Europe et s’étend de Paris à Moscou, faisant trente millions de victimes, soit entre un tiers et une moitié de la population du continent.
JEAN II dit « le Bon » 1350 / 1364
Né en 1319. Reines: Bonne de Luxembourg (1316-1349), Jeanne de Boulogne (1326-1361). Fait prisonnier à la bataille de Poitiers, une nouvelle défaite française en 1356 (sept mille Anglais affamés et terrorisés écrasent quinze mille Français mal dirigés), Jean le Bon finit ses jours en captivité à Londres.
CHARLES V dit « le Sage » 1364 / 1380
Né en 1338, fils de Jean II le Bon. Reine: Jeanne de Bourbon (1338-1377). Régent pendant la captivité de son père à Londres, son règne marque la fin de la première partie de la guerre de Cent Ans : Charles V réussit à récupérer la quasi-totalité des terres perdues par ses prédécesseurs, restaure l’autorité de l’État et relève le royaume de ses ruines. L’instauration d’impôts durables permet à Charles V de doter la couronne d’une armée permanente. Ayant retourné les vassaux gascons favorables à l’ennemi, il encourage le sentiment national naissant qui transforme peu à peu les Anglais en « envahisseurs ». Souverain lettré, il fonde au Louvre la première librairie royale.
CHARLES VI dit « le Fou » 1380 / 1422
Né en 1368, fils de Charles V, pris de crises de folie à partir de 1392. Reine: Isabeau/Elisabeth (Isabelle) de Bavière (1371-1435), fille d’Etienne II de Bavière. Guerre civile entre les Armagnacs du duc d’Orléans, partisans de la couronne, et les Anglo-Bourguignons que dirige Jean sans Peur, duc de Bourgogne (1407). Après la défaite d’Azincourt (1415) où cinquante mille Français sont écrasés par douze mille Anglais, les souverains déshéritent le dauphin en faveur du roi d’Angleterre (traité de Troyes).
CHARLES VII dit « le Victorieux » 1422 / 1461
Né en 1403, fils de Charles VI. Reine: Marie d’Anjou (1404-1463). Quoique déshérité en faveur de Henry V d’Angleterre, puis du jeune fils de celui-ci, Henry VI (qui, enfant, monte sur le trône en 1422), le dauphin est sacré roi à Reims en 1429 grâce à Jeanne d’Arc et au parti armagnac. Mais il ne fait rien pour sauver la Pucelle du bûcher.
Les victoires successives de Jeanne d’Arc (cf. infra, 7.7) et de Charles VII à Orléans (1429), à Patay, en Bretagne et en Normandie annulent le traité de Troyes. Devenu un des seigneurs les plus puissants d’Europe mais craignant d’être débordé par les Anglais, Philippe le Bon, duc de Bourgogne, finit par se rapprocher de Charles VII et conclut avec lui le traité d’Arras en 1433, qui (en échange de grosses concessions territoriales sur la Somme et en Picardie) met fin à l’alliance anglo-bourguignonne. Privés du soutien de la population, les Anglais sont peu à peu chassés du continent. La guerre de Cent Ans – qui en aura duré cent douze – prend fin en 1453, tandis que l’Angleterre plonge à son tour dans une guerre civile dite « des Deux-Roses. »
PHILIPPE VI de Valois 1328 / 1350
Né en 1293, fils de Charles de Valois et de Marguerite de Sicile. Reines: Jeanne de Bourgogne (1293-1348), Blanche de Navarre (?-1398). Victoire écrasante des Anglais à Crécy (1346), qui imposent une nouvelle tactique de guerre fondée sur les archers et les fantassins, et perte de Calais (1347) qui restera anglais pendant deux cents ans. Philippe VI meurt complètement discrédité.
Cette même année, en 1350, la Grande Peste, venue d’Asie, commence à ravager l’Europe et s’étend de Paris à Moscou, faisant trente millions de victimes, soit entre un tiers et une moitié de la population du continent.
JEAN II dit « le Bon » 1350 / 1364
Né en 1319. Reines: Bonne de Luxembourg (1316-1349), Jeanne de Boulogne (1326-1361). Fait prisonnier à la bataille de Poitiers, une nouvelle défaite française en 1356 (sept mille Anglais affamés et terrorisés écrasent quinze mille Français mal dirigés), Jean le Bon finit ses jours en captivité à Londres.
CHARLES V dit « le Sage » 1364 / 1380
Né en 1338, fils de Jean II le Bon. Reine: Jeanne de Bourbon (1338-1377). Régent pendant la captivité de son père à Londres, son règne marque la fin de la première partie de la guerre de Cent Ans : Charles V réussit à récupérer la quasi-totalité des terres perdues par ses prédécesseurs, restaure l’autorité de l’État et relève le royaume de ses ruines. L’instauration d’impôts durables permet à Charles V de doter la couronne d’une armée permanente. Ayant retourné les vassaux gascons favorables à l’ennemi, il encourage le sentiment national naissant qui transforme peu à peu les Anglais en « envahisseurs ». Souverain lettré, il fonde au Louvre la première librairie royale.
CHARLES VI dit « le Fou » 1380 / 1422
Né en 1368, fils de Charles V, pris de crises de folie à partir de 1392. Reine: Isabeau/Elisabeth (Isabelle) de Bavière (1371-1435), fille d’Etienne II de Bavière. Guerre civile entre les Armagnacs du duc d’Orléans, partisans de la couronne, et les Anglo-Bourguignons que dirige Jean sans Peur, duc de Bourgogne (1407). Après la défaite d’Azincourt (1415) où cinquante mille Français sont écrasés par douze mille Anglais, les souverains déshéritent le dauphin en faveur du roi d’Angleterre (traité de Troyes).
CHARLES VII dit « le Victorieux » 1422 / 1461
Né en 1403, fils de Charles VI. Reine: Marie d’Anjou (1404-1463). Quoique déshérité en faveur de Henry V d’Angleterre, puis du jeune fils de celui-ci, Henry VI (qui, enfant, monte sur le trône en 1422), le dauphin est sacré roi à Reims en 1429 grâce à Jeanne d’Arc et au parti armagnac. Mais il ne fait rien pour sauver la Pucelle du bûcher.
Les victoires successives de Jeanne d’Arc (cf. infra, 7.7) et de Charles VII à Orléans (1429), à Patay, en Bretagne et en Normandie annulent le traité de Troyes. Devenu un des seigneurs les plus puissants d’Europe mais craignant d’être débordé par les Anglais, Philippe le Bon, duc de Bourgogne, finit par se rapprocher de Charles VII et conclut avec lui le traité d’Arras en 1433, qui (en échange de grosses concessions territoriales sur la Somme et en Picardie) met fin à l’alliance anglo-bourguignonne. Privés du soutien de la population, les Anglais sont peu à peu chassés du continent. La guerre de Cent Ans – qui en aura duré cent douze – prend fin en 1453, tandis que l’Angleterre plonge à son tour dans une guerre civile dite « des Deux-Roses. »
1960 | ® (tv) An Age of Kings – 9. The Red Rose and the White (Henry VI, Part 1) (GB) de Michael Hayes ; Peter Dews-BBRC-BBCtv (BBC 25.8.60), 60 min. – av. Eileen Atkins (Jeanne d’Arc), David Andrews (Charles VII, le « bâtard d’Orléans »), Terry Scully (Henry VI), John Warner (le duc d’Anjou), Anthony Valentine (Jean II de Valois, duc d’Alençon), Patrick Garland (John, duc de Bedford). – Dans la première partie de Henry VI de William Shakespeare, une œuvre de jeunesse écrite vers 1592, le monarque anglais, âgé de huit ans (il est proclamé roi de France en 1429 et sacré en 1431 à Paris) lutte contre Jeanne d’Arc, nouveau commandant militaire des Français qui lui reprend Orléans et refoule ses armées. Charles VII n’est que « le bâtard d’Orléans ». Ennemie politique, la Pucelle est dépeinte comme une femme rusée, peu digne de confiance et lascive (elle se déclare enceinte devant les conseillers du roi d’Angleterre pour tenter d’échapper au bûcher auquel ceux-ci, indignés, finissent par la livrer). Au Ve acte de la pièce, on apprend même que tout au long de sa carrière militaire, Jeanne a pu bénéficier du soutien d’esprits surnaturels. Pour le barde débutant, qui recopie littéralement des passages entiers des Chronicles of England, Scotland and Ireland (1577) de Raphael Holinshed à ce sujet, elle n’est qu’une sorcière et une fille de joie coupable « d’exécrables abominations ». Cette accusation permet d’affirmer que le sacre à Reims est œuvre du diable et que ce n’est donc pas Charles VII qui est le roi légitime de France, mais Henry VI de Lancastre, selon les termes du Traité de Troyes en 1420. L’image de Jeanne en Grande-Bretagne changera du tout au tout à partir de la fin du XVIIIe siècle, sous la plume des écrivains romantiques (Robert Southey, S. T. Coleridge, Charles Lamp, Thomas de Quincey), sans parler de Shaw. – cf. Moyen Âge : Angleterre. |
Né en 1423, fils aîné de Charles VII (qu’il déteste) et de Marie d’Anjou. Épouses: Marguerite d’Écosse (?-1445) et Charlotte de Savoie (1442-1483). Politicien rusé, retors et avare, grêle et machiavélique (on le surnomme « l’Universelle Aragne »), il combat la haute noblesse féodale et le clergé en s’appuyant sur la bourgeoisie, encourage l’économie nouvelle et impose l’imprimerie en France. Le fait qu’il ait réussi à rattacher plusieurs principautés importantes au territoire royal – agrandissement effectué aux prix d’escroqueries politiques – peut être considéré comme une étape essentielle dans l’unification du pays. Il laisse toutefois derrière lui une véritable « légende noire » illustrée par sa cruauté occasionnelle et le sort terrible qu’il aurait réservé à ses ennemis (enfermés dans des cages de fer minuscules baptisées « fillettes du roi »).
Les princes qui possèdent les grands fiefs de la couronne, particulièrement le duc de Bourgogne et de Bretagne, gouvernent leurs États en seigneurs absolus et ne se font aucun scrupule de lever l’étendard contre leur suzerain, le roi. Ils constituent un danger potentiel face à l’Angleterre dont le monarque, Edward IV (alors plongé dans la guerre des Deux-Roses), se dit toujours, comme ses prédécesseurs, roi de France et d’Angleterre. Le principal adversaire de Louis XI est le puissant CHARLES LE TÉMÉRAIRE, dernier duc de Bourgogne (1433-1477), flamboyant et impulsif, qui brigue une couronne royale et rêve de transformer ses principautés disséminées entre la Bourgogne, la Franche-Comté, l’Artois, la Flandre et le Brabant en un grand royaume rhénan, en un empire s’étirant de Besançon à Bruges (l’ancienne Lotharingie) – pour peu qu’il parvienne à conquérir la Champagne, la Lorraine et l’Alsace. Payés par Louis XI, les Suisses écrasent son armée à Grandson et à Morat et le Téméraire périt pendant le siège de Nancy.
Les princes qui possèdent les grands fiefs de la couronne, particulièrement le duc de Bourgogne et de Bretagne, gouvernent leurs États en seigneurs absolus et ne se font aucun scrupule de lever l’étendard contre leur suzerain, le roi. Ils constituent un danger potentiel face à l’Angleterre dont le monarque, Edward IV (alors plongé dans la guerre des Deux-Roses), se dit toujours, comme ses prédécesseurs, roi de France et d’Angleterre. Le principal adversaire de Louis XI est le puissant CHARLES LE TÉMÉRAIRE, dernier duc de Bourgogne (1433-1477), flamboyant et impulsif, qui brigue une couronne royale et rêve de transformer ses principautés disséminées entre la Bourgogne, la Franche-Comté, l’Artois, la Flandre et le Brabant en un grand royaume rhénan, en un empire s’étirant de Besançon à Bruges (l’ancienne Lotharingie) – pour peu qu’il parvienne à conquérir la Champagne, la Lorraine et l’Alsace. Payés par Louis XI, les Suisses écrasent son armée à Grandson et à Morat et le Téméraire périt pendant le siège de Nancy.
1998/99 | Jeanne d’Arc / Joan of Arc / The Messenger : The Story of Joan of Arc (FR/[US]) de Luc Besson Luc Besson, Patrice Ledoux/Leeloo Prod.-Gaumont-Buena Vista International, 2h38 min. – av. Milla Jovovich (Jeanne d’Arc), Vincent Cassel (Gilles de Rais), Pascal Greggory (Jean II de Valois, duc d’Alençon), John Malkovich (Charles VII), Faye Dunaway (la reine Yolande d’Aragon), Dustin Hofman (la conscience de Jeanne/le confesseur), Richard Ridings (Etienne de Vignolles dit La Hire), Tcheky Karyo (Jean Bâtard d’Orléans, comte de Dunois), Desmond Harrington (Jean d’Aulon), Timothy West (Jean Cauchon, évêque de Beauvais), Christian Erickson (Georges de La Trémoille), Vincent Regan (Buck), Tonio Descanvelle (Jean Poton de Xaintrailles), Andrew Birkin (John Talbot, comte de Shrewsbury), Tony D’Amario (le maire de Compiègne), Philippe du Janerand (Dijon), Christian Erickson (Georges de La Trémoille), David Gand (Jean de Lancastre, duc de Bedford), Robert Goodman (Barbe Noire), Jean-Pierre Gos (Laxart), Bruce Byron (Jacques d’Arc), Framboise Gommendy (Isabelle Romée d’Arc), Joanne Greenwood (Catherine d’Arc), Bernard Grenet (l’évêque de Senlis), Michael Jenn (Philippe le Bon, duc de Bourgogne), Carl McCrystal (William Glasdall, commandant des Tourelles), Gina McKee (la duchesse de Bedford), John Merrick (Regnault de Chartres, archevêque de Reims), Quentin Ogier (Louis), Olivier Rabourdin (Arthur de Richemont), Irving Pomepui (Louis XI à 5 ans), Olga Sekulic (Marie d’Anjou), Joseph Sheridan (Canon). Lors du saccage de Domremy par l’armée anglo-bourguignonne, Jeanne est le témoin horrifié de l’assassinat et du viol de sa sœur par un soudard. Dès lors, elle hait la guerre : la religion et la prière sont tout pour elle. Devenue jeune fille, elle est sûre de recevoir de pressants messages de Dieu et de ses saints… Selon un sondage IPSOS organisé à l’occasion de la sortie du film de Luc Besson et publié dans France-Soir, Jeanne d’Arc serait au troisième rang (42%), après Napoléon (49%) et Charlemagne (45%), dans le palmarès des personnages historiques qui ont le plus marqué les Français. Suivent le Roi-Soleil (39%), et loin derrière, Vercingétorix et Henri IV. Comme on s’en doute, la Pucelle séduit des Français de bords politiques opposés, Jeanne la laïque s’attire 53% des suffrages des militants d’extrême-gauche, devançant Robespierre, tandis que Jeanne la pieuse a marqué 59% des militants du RPF de Charles Pasqua et Philippe de Villiers, plus fervents que ceux du Front national de Le Pen qui lui accordent 52% de leurs voix. Voilà ce qui aurait pu justifier, du moins commercialement, la mise en chantier de ce film par ailleurs inutile. De la science-fiction au « New Age » médiéval Mais la réalité est plus sordide que statistique : la cinéaste américaine Kathryn Bigelow (alors mariée à James Cameron) travaille depuis 1990 à un film sur la Pucelle intitulé « *Company of Angels » et coécrit avec Jay Cocks. Une fortune a déjà été investie dans le projet (esquisses, repérages). En 1992, elle confie une copie du scénario à Luc Besson qui, quatre ans plus tard, se décide à financer le film de Bigelow conjointement avec Morgan Creek Productions. Claire Danes ou Winona Ryder sont pressenties pour jouer Jeanne d’Arc et Jean Reno sera Gilles de Rais. Le tournage est fixé au printemps 1998, lorsque Besson fait volte-face et s’obstine à imposer sa compagne du moment, Milla Jovovich, dans le rôle-titre. Bigelow fait un test et refuse, Besson et Morgan Creek se retirent. Le travail de Bigelow torpillé, Besson peut annoncer son propre « Jeanne d’Arc » soutenu par Gaumont (budget : 60 millions de dollars), tandis que la réalisatrice flouée le poursuit en justice pour plagiat. Le projet passe ainsi d’une créatrice originale, habitée par son sujet, à un faiseur d’images roublard que le personnage n’inspire pas. Mais Besson est en position de force, les derniers films du « Golden Boy » (« Le Grand Bleu », « Nikita », « Léon ») ont pulvérisé les records d’entrées, et sa toute récente saga intergalactique, « Le Cinquième Élément » (Gaumont), s’est hissé au « top 10 » du box-office américain – du jamais vu pour un film étranger. Milla Jovovich en est la vedette féminine ; actrice, chanteuse rock et top-modéle américaine d’origine ukrainienne (née de parents russo-monténégrins), elle était déjà à neuf ans chez Disney et à onze sur une couverture de magazine ; le temps d’une année, cette pop star androgyne se présente comme la nouvelle Mme Luc Besson et une Pucelle tout sauf sainte. |
1943/44 | *** Henry V / The Chronicle History of King Henry the Fift with His Battell fought at Agincourt in France (Henri V) (GB) de Laurence Olivier [et Reginald Beck] Filippo Del Giudice, Laurence Olivier, J. Arthur Rank/Two Cities Films Ltd.-Rank Film Org., 2h17 min. – av. Laurence Olivier (Henry V, roi d’Angleterre), Robert Newton (Ancient Pistol), Renée Asherson (Catherine de Valois), Leo Genn (Charles Ier d’Albret, connétable de France), Felix Aymler (Henry Chichele, archevêque de Canterbury), Harcourt Williams (Charles VI, roi de France), Esmond Knight (le capitaine gallois Fluellen), George Robey (Sir John Falstaff), Ralph Truman (Montjoie, le héraut français), Robert Helpmann (John Fordham, évêque d’Ely), Leslie Banks (Chorus), Max Adrian (le dauphin de France), Valentine Dyall (Philippe, duc de Bourgogne), Francis Lister (Charles, duc d'Orléans), Janet Burnell (la reine Isabelle de Bavière), Gerald Case (Ralph Neville, comte de Westmoreland), Griffith Jones (Thomas Montagu, comte de Salisbury), Morland Graham (Sir Thomas Erpingham, capitaine des archers), Nicholas Hannen (Thomas Beaufort, duc d’Exeter), Niall MacGinnis (l’Irlandais MacMorris), Michael Shepley (Gower), Michael Warre (Humphrey de Lancastre, duc de Gloucester), Ernest Thesiger (Jean Ier, duc de Berry), Frederick Cooper (le caporal Nym), Russell Thorndike (Jean Ier, duc de Bourbon), John Laurie (le capitaine écossais Jamie), Freda Jackson (Mistress Quickly). Dernier de la série des drames historiques de Shakespeare, Henry V chante la geste héroïque d’un monarque connu principalement pour son expédition militaire en France et que le barde orne de toutes les vertus royales et chevaleresques. Plus proche de l’épopée nationale que du drame (car son intérêt majeur se concentre sur l’épisode guerrier, la complexité psychologique du « prince Hal » ayant déjà été traitée dans Henry IV), la pièce est destinée à réveiller le patriotisme du public anglais. Impitoyable pour les insurgés, mais protecteur du peuple qui l’adule, Henry V (1387-1422) profite des dissensions entre Armagnacs et Bourguignons qui déchirent l’Hexagone pour réclamer le trône de France et relancer le conflit armé. Ayant remporté la victoire d’Azincourt (25 octobre 1415), il s’empare de la Normandie lors d’une deuxième campagne (1417/19) et signe en 1420 le traité de Troyes qui lui donne pour épouse Catherine de Valois, la fille de Charles VI le Fol et d’Isabeau de Bavière. Ce mariage le désigne comme héritier au trône français au préjudice du dauphin (Charles VII), mais la mort prématurée de « Great Harry » deux ans plus tard, à l’âge de trente-quatre ans, ruine les espérances anglaises et marque un tournant décisif dans la guerre de Cent Ans. Le monarque laisse un fils de quelques mois, le futur Henri VI. |
Né en 1421, fils d’Henry V et de Catherine de Valois, marié à Marguerite d’Anjou. En 1422, à la mort de Charles VI, il est proclamé roi de France alors qu'il n'a pas encore un an ; le duc de Bedford assume la régence et la tutelle de l'enfant-roi. Henry VI est couronné en novembre 1429 à Londres (en réponse au sacre de Charles VII à Reims) et sacré en novembre 1431 à Paris (après l'exécution de Jeanne d'Arc). L’an 1453 voit la fin de la Guerre de Cent Ans en 1453 et la perte de toutes les possessions anglaises en France, notamment l’immense duché d’Aquitaine et sa capitale, Bordeaux. Cette perte suscite chez le roi une crise de schizophrénie et d’aliénation mentale.
C’est le début d’une guerre civile sur 30 ans, la Guerre des Deux-Roses entre le clan de la « Rose rouge » (Lancaster) et celui de la « Rose blanche » (York), 1455-1485. Henry VI finit assassiné à la Tour de Londres, vraisemblablement sur les ordres d'Edward IV.
1977 | ® (tv) Louis XI – 1. La Naissance d’un roi (FR) d’Alexandre Astruc. – av. Emmanuelle Stahl (Jeanne d’Arc), Jean-Marie Robain (Georges de La Trémoille), Daniel Gélin (Charles VII). – Enfant, le dauphin découvre que son père n’est qu’un roi sans couronne et ne lui pardonnera jamais d’avoir laissé brûler la Pucelle. - cf. Louis XI (8). |
1969 | (tv) Sainte Jeanne (FR) de Claude Loursais ORTF (2e Ch. 4-5.12.69), 2 x 1h45 min. – av. Dominique Labourier (Jeanne d’Arc), François Marthouret (Charles VII), Maurice Teynac (Regnault de Chartres, archevêque de Reims), Dominique Paturel (Jean Bâtard d’Orléans, comte de Dunois), Pierre Tornade (Robert de Baudricourt), Michel Etcheverry (Pierre Cauchon, évêque de Beauvais), Noël Roquevert (Georges de La Trémoille), François Maistre (Gilles de Rais), Gérard Dournel (Etienne de Vignolles dit La Hire), Marc Eyraud (l’intendant), Paul Le Person (Bertrand de Poulangy), Bernard Mesguich (le page du dauphin), Jacqueline Plessis (la duchesse de Trémoille) Jacques Rispal (le chapelain Jean de Stogumber), Philippe Normand (le page de Dunois), Gianni Esposito, André Weber. – Le drame de G. B. Shaw dans une adaptation française signée Georges Neveux et avec Dominique Labourier, la Julie de « Céline et Julie vont en bateau » de Jacques Rivette (1974). |
2019 | Jeanne (FR) de Bruno Dumont Rachid Bouchareb, Jean Bréhat, Muriel Merlin/3B Productions, 137 min./124 min. - av. Lise Leplat Prudhomme (Jeanne d'Arc), Fabrice Luchini (Charles VII), Annick Lavieville (Mme Jacqueline), Justine Herbez (Marie), Benoît Robail (Regnault de Chartres), Alain Desjacques (Raoul de Gaucourt), Serge Holvoet (Mgr. Patrice Bernard), Julien Manier (Gilles de Rais), Jérôme Brimeux (Maître Jean), Benjamin Demassieux (Jean, duc d'Alençon), Laurent Darras (le page), Marc Parmentier (baron de Montmorency), Jean-François Causeret (Pierre Cauchon), Jean-Pierre Baude (comte de Clermont), Joseph Rigo (le héraut d'armes), Yves Baudelle (Frère Jean Pasquerelle), Fabien Fenet (Me Nicolas Loiseleur), Valério Vassallo (Frère Mathieu Bourat), Laurent Brassart (Me Fidèle Pierret), Joël Carion (Me Jean Beaupère), Franck Dubois (Me Nicolas Midi), Daniel Dienne (Me Thomas de Courcelles), Yves Habert (Me William Haiton), Robert Hanicotte (Jean d'Estivet), Aurélie Desain, Laurence Malbete, Augustin Charnet (choristes). Vie et mort de Jeanne d'Arc selon l'oeuvre de Charles Péguy (1897), écrivain athée, socialiste, universaliste, anticlérical, idéaliste, qui s'attaque à tous les dogmatismes. Selon lui, Jeanne est une héroïne historique et nationale, la raconter, c'est "montrer ce qu'être Français veut dire". Fabrice Luchini est le seul acteur professionnel de ce film "littéraire", lyrique, parfois burlesque, interprété par des amateurs souvent maladroits, sublimé par la voix séraphique du chanteur Christophe, mais historiquement fantasque. Les espaces sont nus, bruts, sans fioriture, les batailles hors champ. Jeanne est constamment jouée par une fillette de 10 ans, même à l'approche de sa fin (pour évoquer, dit Dumont, une sorte d'"éternité universelle", pour signaler "sa dimension poétique"). Le procès, qui relève de la représentation théâtrale, est enregistré à l'intérieur de la cathédrale d'Amiens et la prison est située dans des anciens bunkers allemands laissés sur les côtes normandes. Dumont cherche avec sa Jeanne une personnification tout à fait à part de la nation, totalement irrécupérable pas sa manière d'échapper à toute interprétation. Bref, un mélange de religiosité et d'incongru, soit la "spiritualité" de celui qui n'y croit pas. Sélection "Un certain regard" au Festival de Cannes 2019 (mention spéciale du Jury). |
1985 | ® (tv) Catherine – Il suffit d’un amour (FR) Marion Serrault. – av. Isabelle Guiard (Jeanne d’Arc), Benoît Brionne (Gilles de Rais), Georges Montillier (Pierre Cauchon, évêque de Beauvais), Antonin (Charles VII), Pierre Deny (Jean Bâtard d’Orléans, comte de Dunois). – Tandis que la France est déchirée par la guerre entre Anglo-Bourguignons et Armagnacs, la belle Catherine croise maints personnages historiques, se fait violer, ô délice, par Gilles de Rais et tente de sauver Jeanne d’Arc à Rouen (d’après les romans de gare de Juliette Benzoni). Cf. Charles VI (7.4). |
1951 | (tv) Saint Joan (GB) de Val Henry Gielgud et Kevin Sheldon « Festival Drama » (BBC 6.5.51), 3h. – av. Constance Cummings (Jeanne d’Arc), Heron Carvic (Charles VII), Eugene Leahy (Pierre Cauchon, évêque de Beauvais), Michael O’Halloran (Robert de Baudricourt), James Carney (Jean Bâtard d’Orléans, comte de Dunois), John Gabriel (Georges de La Trémoille), Bryan Johnson (Gilles de Rais), Richard Warner (Etienne de Vignolles dit La Hire), John Benson (Canon de Courcelles), Jane Cotton (la duchesse de La Trémoille), Martin Starkie (frère Martin Ladvenu), Alan Wheatley (Richard de Beauchamp, comte de Warwick), Felix Felton (Regnault de Chartres, archevêque de Reims). Jeanne d’Arc fait sa deuxième apparition à la télévision (cf. 1946) à travers cette adaptation de la pièce de George Bernard Shaw (1923) mise en scène par Val Gielgud, frère de Sir John Gielgud et, dès 1930, pionnier anglais du petit écran. Le « drame historique en six actes et un épilogue » de Shaw se voudrait une tragédie sans « méchants », écrite trois ans après la canonisation de Jeanne. Pour l’auteur, tous les protagonistes y sont de bonne foi et ont une raison d’agir comme ils le font, mais tous sont impliqués dans un tort commun. Son texte est un pavé dans la mare des chroniqueurs accusés d’avoir fait de Jeanne un personnage romantique afin de mieux noircir ses ennemis, une attaque en règle contre l’histoire formatée des manuels. « Elle heurte de la façon la plus discordante le romanesque idolâtre qui s’est formé autour d’elle », affirme l’écrivain irlandais. Le drame de Shaw, un pavé dans la mare Jeanne apparaît ici comme le précurseur des deux hérésies qui, à la fin du Moyen Âge, vont détruire l’ordre féodal : le protestantisme et le nationalisme. En revendiquant l’existence d’une mission que Dieu lui a directement confiée, sans intermédiaire du clergé, elle est protestante ; en affirmant les droits à l’autonomie de son pays, elle est nationaliste. La bonne foi des inquisiteurs contraste avec la volonté résolue des Anglais d’accomplir un assassinat politique sous le couvert de la défense de l’ordre. Shaw ne cherche pas à savoir si la condamnation de l’astucieuse Jeanne était juste ou non, il signale simplement que son supplice n’avait rien d’extraordinaire pour l’époque, que c’était un châtiment aussi courant que la crucifixion du Christ sous l’Empire romain. Implicitement, Shaw réhabilite ses bourreaux, Cauchon et Le Maistre, le premier étant montré comme un prélat noble qui ne songe qu’à sauver le prestige de l’Église et l’âme de la condamnée (« c’est toujours les hommes honnêtes qui commettent les pires erreurs », dit à son propos Charles VII). Quant à Jeanne, en vertu d’un solide bon sens inné, elle voit les choses telles qu’elles sont et non comme veulent les voir les généraux, les chambellans et les prélats, tous obnubilés par des préjugés de tradition ou de caste. Dans son introduction à la pièce, Shaw précise que la Pucelle est portée à concrétiser ses propres impulsions et à les regarder comme « des voix d’êtres mystérieux » qui la conseillent : elle est la première à croire en ce prodige, sans être pour cela ni une hystérique ni une visionnaire. Chaque époque a ses superstitions, rappelle l’écrivain avec malice et insolence, et la superstition scientifique n’est pas plus intelligente ni plus évoluée que la superstition religieuse (il énumère toutes les croyances que la civilisation bourgeoise des XIXe et XXe siècles a répandues comme des dogmes). Finalement, prise entre les forces de l’Église et de la loi, Jeanne refuse de vivre privée de liberté et préfère la mort à l’emprisonnement à perpétuité. L’auteur ajoute ici un épilogue fantastique, situé vingt-cinq ans après le supplice, alors qu’un nouveau procès a réhabilité la mémoire de la sainte. En pleine nuit, à Chinon, Charles VII reçoit la visite du fantôme de Jeanne, auquel se joignent peu à peu ceux de Cauchon, Dunois, Ladvenu, Warwick, Stogumber, du bourreau et d’un simple soldat. Un dialogue dépassionné, presque goguenard s’installe. Pour le roi, Jeanne est toujours aussi présomptueuse (« les hommes se souviendront de moi alors que Rouen sera oublié », affirme-t-elle) ; Cauchon, déshonoré, excommunié de son vivant, estime que « les saints morts sont moins dangereux pour l’Église que les vivants » et conjure Jeanne de ne pas revenir parmi les hommes, car il est trop tôt. Le roi, toujours agité, retourne dans son lit. Demeurée seule, la Pucelle s’adresse au Ciel : « O Dieu qui avez créé cette Terre si belle, quand sera-t-elle prête à recevoir vos saints ? Quand ? » Au petit écran, c’est l’Américaine Constance Cummings qui, la première, interprète l’héroïne en titre. Jadis une actrice remarquée chez Frank Capra, Harold Lloyd et James Whale, mais allergique à Hollywood, elle a émigré en Grande-Bretagne en 1937, où on la verra dans « Blithe Spirit (L’Esprit s’amuse) » de David Lean (1945) et sur scène aux côtés de Laurence Olivier. Le grand écran devra attendre encore six ans, avant qu’Otto Preminger ne tente sa chance avec Shaw et Jean Seberg en 1957 (cf. infra). |
1993/94 | *Jeanne la Pucelle – (FR) de Jacques Rivette Parties : 1. Les Batailles – 2. Les Prisons Martine Marignac/Pierre Grise Productions (Maurice Tinchant)-La Sept Cinéma-FR3 Cinéma, 2h40 + 2h56 min. – av. Sandrine Bonnaire (Jeanne d’Arc), André Marcon (Charles VII), Jean-Louis Richard (Georges de La Trémoille), Baptiste Roussillon (Robert de Baudricourt), Olivier Cruveiller (Jean de Metz), Marcel Bozonnet (Regnault de Chartres, archevêque de Reims), Jean-Pierre Lorit (Jean II de Valois, duc d'Alençon), Martine Pascal (la reine Yolande d'Aragon), Patrick Le Mauff (Jean Bâtard d’Orléans, comte de Dunois), Stéphane Boucher (Etienne de Vignolles dit La Hire), Didier Agostini (Montmorency), Philippe Morier-Genoud (Philippe le Bon, duc de Bourgogne), Yann Collette (Jean, duc de Luxembourg), Edith Scob (Jeanne de Béthune, son épouse), Hélène de Fougerolles (Jeanne de Bar, leur fille), Monique Mélinand (Jeanne de Luxembourg), Alain Ollivier (Pierre Cauchon, évêque de Beauvais), Bruno Wolkowitch (Gilles de Laval [Gilles de Rais]), Pierre Baillot (Jacques Boucher), Catherine Bidault (Dame Boucher), Mathias Jung (Jean Pasquerel), Xavier Maly (Jean Poton de Xantrailles), Quentin Ogier (Raymond), Vincent Solignac (Pierre d’Arc), Tatiana Moukhine (Isabelle Romée d’Arc), Jean-Marie Richier (Durant Laxart, l’oncle), Didier Sauvegrain (Raoul de Gaucourt), Matthieu Busson (Louis de Coutes, page), Bernard Sobel (Pierre de Versailles), Jean-Pierre Becker (Jean d’Aulon), Thierry Bordereau (Le Basque), Florence Darel (Jeanne d’Orléans, femme de d’Alençon), François Chattot (le connétable Arthur de Richemont), Pascal Bonitzer (le scribe), Didier Agostini (Montmorency), Nathalie Richard (Catherine de La Rochelle), Bernard Sachse (Lionel, Bâtard de Wandonne), Michel Berto (Guillaume Erard), Jean-François Lapalus (Frère Martin Ladvenu), Loïc Houdre (Jean Toutmouillé), Mario Luraschi (Barthélémy Baretta), Dominique Le Bé (le chirurgien), Frédéric Witta (Jean Massieu), Jean-Claude Frissung (Nicolas Loyseleur), Michael Goldman (Richard de Beauchamp, comte de Warwick), Jean-Luc Petit (Henri Le Royer), Bernadette Giraud (Catherine Le Royer), Jean-Claude Jay (Jacques Alain), Jacques Rivette (Jean Fournier, curé de Vaucouleurs). Avec son deuxième film à costumes après « La Religieuse », de Diderot, en 1966, film à scandale et son seul succès populaire, Jacques Rivette fait l’impasse sur l’imagerie pastorale. Le réalisateur ne s’intéresse ni à la passion de Jeanne (Dreyer), ni à son procès (Bresson), ni à l’épopée (Fleming), ni à ses contacts politico-mondains (Preminger/Shaw). On ne connaît d’elle, dit-il, que des moments figés, des tableaux, des postures. Or, lui veut montrer Jeanne « en mouvement », s’attacher à ce qui s’est passé entre les scènes obligées, ce qui les lie, découvrir la multiplicité et la diversité des rencontres qu’elle a faites durant sa très brève carrière (« j’ai à peine une année devant moi », prédit-elle). En se concentrant sur l’à-côté, sur la vie domestique, la préparation militaire, les relations avec ses proches, il capte les attentes entre les combats, les interminables trajets à cheval, l’ennui, les silences, le froid, la captivité à Margny et à Beaurevoir bien avant le procès, etc. Rivette veut un « reportage médiéval » pris sur le vif Cinéaste rigoriste issu des Cahiers du Cinéma et de la « nouvelle vague », ayant le spectaculaire, la dramatisation gratuite comme le mélo en aversion, Rivette lorgne du côté des téléfilms historiques d’un Roberto Rossellini : il veut raconter un récit familier comme s’il était inédit, du pris sur le vif, un « reportage médiéval » plutôt qu’une recréation en costumes, ce qui implique une mise en scène à la fois claire et pointilleuse, entre réalisme et stylisation. La narration plutôt que l’action. Ses sources prioritaires sont des références : Régine Pernoud (Jeanne par elle-même et par ses témoins, éd. du Seuil) et Georges et Andrée Duby (Les Procès de Jeanne d’Arc, éd. Gallimard). D’entente avec Christine Laurent (aussi costumière) et Pascal Bonitzer, le tandem de scénaristes qui travaille sur ses films depuis « La Bande des quatre » (1989), le cinéaste privilégie le moins connu, par exemple le procès apocryphe de Poitiers en février-mars 1429, lorsque des ecclésiastiques mandatés par le dauphin interrogent Jeanne et lui font passer un examen de virginité. On apprend que c’est la reine, Yolande d’Aragon, qui finance son armée avec ses propres bijoux. Le couronnement à Reims, filmé dans une palette de couleurs ternes à l’abbatiale de Saint-Ouen à Rouen, dépeint le rituel du sacre (en abrégé) presque de façon documentaire : le dauphin s’allonge au sol en longue chemise devant l’autel avant d’être progressivement habillé par les prêtres, une cérémonie un peu bâclée, comme elle le fut sans doute en réalité, et allant contre les habituels impératifs de somptuosité du cinéma – et de l’Église. Fort de l’accueil favorable fait à sa dernière œuvre, « La Belle Noiseuse », primée à Cannes, Rivette bénéficie d’un budget honnête de 40 millions de francs, de quoi tourner en décors naturels aux châteaux de Châteaudun (Eure-et-Loir) dans le « rôle » de Tourelles, de Pisy (Yonne) et de Sedan (Ardennes), aux alentours de Semur-en-Auxois, à Epoisses, à Châteauneuf-en-Auxois, à Villers-la-Faye (Côte-d’Or) et au barrage de Grosbois-en-Montagne ainsi qu’en Lorraine. La réalisation prend douze semaines, de septembre 1993 à février 1994. À l’instar de sa Pucelle, Rivette gère la pénurie tant bien que mal ; si sa démarche intellectuelle est remarquable, son réalisme, en revanche, bute sur l’évocation de la guerre qui nécessiterait un traitement conséquent : on frise l’humour à la Monty Python quand huit chevaliers s’attaquent aux hautes murailles de Paris, menés par une virago qui hurle « Rendez la ville au roi de France ou nous entrerons par force ! ». (Le barrage de Chazilly, en Bourgogne, est utilisé pour représenter les anciens remparts de la capitale.) |
1935 | Das Mädchen Johanna. Die Jungfrau von Orleans / Das Mädchen von Orleans / Die Sendung (Une fille nommée Jeanne d'Arc) (DE) de Gustav Ucicky Bruno Duday/Universum Film AG (Ufa), Berlin, 1h27 min. – av. Angela Salloker (Jeanne d’Arc), Gustaf Gründgens (Charles VII), Willy Birgel (Georges de La Trémoille), Heinrich George (Philippe le Bon, duc de Bourgogne), Theodor Loos (Jean Bâtard d’Orléans, comte de Dunois), Erich Ponto (John Talbot, comte de Shrewsbury), Aribert Wäscher (Jean II de Valois, duc d'Alençon), René Deltgen (Guillaume de Lucé, évêque de Maillezais), Franz Nicklisch (Jean de Metz), Veit Harlan (Pierre), Paul Bildt (un bourgeois), Bernhard Minetti (un scribe), S. O. Schoening, Friedrich Ulmer, Fritz Genschow, Paul Wagner, Karl Dannemann, Knut Hartwig, Edlef Schauer, Katja Bennefeld, Maria Koppenhöfer, Wera Liessem, Elsa Wagner, Lea Irene Kieselhausen, Josef Sieber. Synopsis : « Quand un peuple a cessé d’espérer, il végète pitoyablement dans la honte. Mais quand il a perdu la foi, il doit disparaître et seul un miracle peut le sauver… » Pour les Français, la guerre de Cent Ans semble perdue. Combien de temps Charles VII pourra-t-il encore tenir la ville d’Orléans ? Le roi a dépêché en vain son conseiller politique, Maillezais, afin de négocier une paix auprès de Lord Talbot et son allié Philippe de Bourgogne. Pour toute réponse, Talbot mutile le visage de Maillezais. Dans le camp français, à l’insu du souverain, La Trémoille, Dunois et d’Alençon se remplissent les poches sur le dos de la population. La nuit tombée, Charles VII et Maillezais tentent de fuir Orléans, mais des habitants prennent le roi pour le cruel d’Alençon et veulent le lyncher quand, au son des cloches, survient la Pucelle qui lui annonce sa mission céleste. Afin de se concilier ses ministres et restaurer l’unité nationale, Charles VII feint d’y croire. Une fois les Anglais battus et les Bourguignons ralliés à sa cause, il se fait couronner à Reims. Mais, lorsqu’une épidémie de peste s’y déclare, les bourgeois manipulés secrètement par La Trémoille et consorts, convaincus qu’il s’agit d’un châtiment divin, accusent Jeanne de sorcellerie et la livrent aux Anglais. Le roi n’intervient pas : « une sainte morte est plus utile au royaume de France et à son peuple qu’une vivante. Morte, elle devient invincible. » Maillezais veut prendre Rouen d’assaut, mais un décret royal l’en empêche. La Trémoille est arrêté, Bourgogne meurt (de la peste ?), Dunois tourne sa veste et aide à bouter l’Anglais hors du pays. Vingt-cinq ans plus tard, Charles VII proclame l’annulation de la condamnation pour hérésie. « La France est sauvée parce qu’elle croyait en Jeanne. En se sacrifiant, fait-il annoncer à ses sujets, celle-ci a donné au Reich (sic) sa terre et sa grandeur, et au peuple, la paix. » Jeanne la libératrice, porte-parole de la révolution hitlérienne ? Il faut s’y résigner : le premier film parlant – et l’unique film des années 1930 – consacré à la sainte patronne de France est une œuvre de propagande nazie. Jeanne est phagocytée par la « révolution nationale » du voisin germanique. Précisons d’emblée qu’il n’existe aucun rapport entre « Das Mädchen Johanna », œuvre de prestige de la nouvelle cinématographie du Troisième Reich, et le drame romantique Die Jungfrau von Orleans de Friedrich Schiller (1801), un auteur farouchement libertaire dont Hitler se méfie (le Guillaume Tell de Schiller sera interdit sur scène six ans plus tard pour incitation à la révolte et à l’assassinat politique). Pourtant, le sujet est dans le vent : au moment de la mise en chantier du film, en automne 1934, la Pucelle de Shaw (avec Paula Wessely) et celle de Schiller sont à l’honneur dans les théâtres berlinois. Contrairement à ce qu’on pourrait attendre, on ne relève dans ce film pas non plus de tendance anglophobe particulière (sinon celle, implicite, que véhicule la matière même) : à une année des Olympiades à Berlin, le régime veut donner à ses voisins une image positive et conciliante. Du surcroît, Joachim von Ribbentrop et le Premier ministre conservateur anglais Stanley Baldwin (ennemi politique de Churchill) ont signé le 18 juin 1935 un traité naval germano-britannique qui torpille les dispositions du Traité de Versailles : le Royaume-Uni, sans consulter ses alliés, autorise le Reich à disposer d’une flotte de guerre au tonnage limité. Certains membres de la Chambre des Lords encouragent le renforcement des relations économiques avec l’Allemagne et, ainsi, la création d’un barrage contre l’empire soviétique ; Hitler lui-même espérera jusqu’en 1939 que Londres se rangera à ses côtés en cas de conflit international. C’est en 1941 seulement, en pleine bataille d’Angleterre, que l’opéra Giovanna d’Arco de Giuseppe Verdi (1845) sera travesti à Berlin pour servir la propagande antibritannique. |
1900 | *Jeanne d'Arc (FR) de Georges Méliès Star Film no. 264-275, 250 m./15 min. – av. Jeanne Calvière (Jeanne d’Arc), Jeanne D'Alcy (Isabelle Romée d’Arc, sa mère / une dame chez Baudricourt / une dame à Orléans), Georges Méliès (Jacques d’Arc / Durant Laxart, l’oncle / Robert de Baudricourt / Regnault de Chartres, archevêque de Reims / un soldat / un geôlier / un bourreau). Suite des douze tableaux selon le descriptif donné par Méliès lui-même : 1. « Le village de Domremy, lieu de naissance de Jeanne d’Arc » – 2. « La forêt de Domremy (les apparitions) » – 3. « La maison de Jeanne d’Arc à Domremy » – 4. « La porte de Vaucouleurs » – 5. « Le château de Baudricourt (superbe tableau intérieur moyen âge) » – 6. « Entrée triomphale à Orléans, grand cortège (magnifique tableau) » – 7. « Le couronnement de Charles VII à Reims, cathédrale (un tableau soigneusement composé) » – 8. « La bataille de Compiègne (superbe tableau reproduisant une bataille au moyen-âge) » – 9. « La prison » – 10. « L’interrogatoire » – 11. « Le supplice, place du Marché à Rouen (tableau étonnant, superbe décor) » – 12. « Apothéose ». Dans ce dernier tableau, la fumée du bûcher se dissipe peu à peu pour faire apparaître des nuages dorés au milieu desquels Dieu et les saintes attendent la martyre. Au premier plan, Jeanne surgit des nuages et gagne le séjour des élus. Cette « pièce cinématographique à grand spectacle en douze tableaux » (et autant de décors), coloriée au pochoir, est mise en scène au printemps 1900 au studio-verrière de Montreuil, que Méliès vient de faire sérieusement agrandir ; c’est son deuxième film à plusieurs tableaux après Cendrillon (1899) et le premier qui dépasse les 200 mètres. De son propre aveu, le cinéaste prestidigitateur a surtout été motivé par la partie truquage, le côté merveilleux du récit, notamment les apparitions des saintes et de l’archange Gabriel, et l’arrivée de l’âme de Jeanne au ciel. Le reste de ce récit en vignettes découle de l’imagerie populaire la plus naïve, loin de toute interprétation idéologique (même si Méliès se dit républicain laïc et dreyfusard), le film étant destiné en priorité à des patronages. Une certaine ironie perce dans la description du peu majestueux Charles VII. Dans les scènes d’Orléans et de Compiègne, l’ingénieux illusionniste claironne la mobilisation de 500 figurants ; en vérité, ce ne sont guère plus d’une trentaine de badauds, plus quatre chevaux, qui déambulent plusieurs fois devant la caméra, en sortant par le côté cour pour revenir par le côté jardin, après avoir contourné le studio par le nord. L’entrée à Orléans reconstitue le fameux tableau de Jean-Jacques Scherrer (1887). Jeanne est mimée par Jeanne Calvière, une jeune écuyère du Cirque d’Hiver venant du Trianon Lyrique et qui a amené son propre canasson (gages : un louis d’or par jour, plus le déjeuner) ; elle restera longtemps dans la troupe du cinéaste. Méliès lui-même joue sept rôles différents, dont celui d’un bourreau qui jette du bois sur le bûcher pour nourrir les flammes et tombe raide mort ; Jeanne d’Alcy, son actrice fétiche et sa future épouse, interprète notamment la mère de la sainte. Précisons que son film ne fait pas mention du procès et ne désigne jamais nommément l’ennemi de la France. |
1956 | (tv) The Lark [L’Alouette] (GB) de Julian Amyes « BBC Sunday-Night Theatre » (BBC 11.11.56), 1h44 min. – av. Hazel Penwarden (Jeanne d’Arc), Robert Harris (Pierre Cauchon, évêque de Beauvais), Michael Goodliffe (l’inquisiteur), Michael Caine (Boudousse), Alastair Hunter (Robert de Baudricourt), Anthony Sagar (Jacques d’Arc), Betty Henderson (Isabelle Romée d’Arc), John Arnatt (Richard de Beauchamp, comte de Warwick), David Coote (le frère de Jeanne), Peter Lambert (Frère Martin Ladvenu), Patricia Cree (Agnès Sorel), John Saunders (Charles VII), Myra Lowdon (Marie d’Anjou, la reine), Llewellyn Rees (Regnault de Chartres, archevêque de Reims), Charles Stapley (Georges de La Trémoille), Gregory Scott (le bourreau). Dramatique d’après la pièce de Jean Anouilh : devant ses juges à Rouen, Jeanne (« cette petite alouette chantant dans le ciel de France, au-dessus de la tête de ses fantassins », disait Warwick) raconte sa vie pour les convaincre de son innocence. Rappelons que, selon Le Bestiaire du Christ de Louis Charbonneau-Lassay (1941), le caractère ascensionnel de l’alouette en fait l’image de la prière, de l’élévation de l’âme humaine vers Dieu. Le drame d’Anouilh, qui applique le principe pirandellien du théâtre dans le théâtre (les personnages sortent de scène en commentant l’action) alterne entre les scènes d’accusation – de Cauchon, de l’inquisiteur, du promoteur et du comte de Warwick – et les retours en arrière retraçant la vie publique de la Pucelle, ici radicalement désacralisée. A Dompierre, sa famille la prenait pour une menteuse, son père la battait, persuadé qu’elle rejoignait un amant quand elle parlait avec Saint Michel dans l’Arbre aux Fées. Le principal reproche de son entourage tient à son habillement en homme (« un acte de rébellion et de terrorisme ») et à son refus d’une vie soumise dans le cadre du mariage ou des conventions mesquines de la cour. Warwick, pour qui gouverner le monde, c’est « faire croire à des imbéciles qu’ils pensent d’eux-mêmes ce que nous leur faisons penser », exige la vie de Jeanne par nécessité politique. Touchés par la grâce de l’alouette, les comédiens refusent d’en rester à la scène du bûcher, le démontent pour laisser place à un autel et au sacre royal à Reims, soit à « une histoire qui finit bien », avec une Jeanne tiromphante. Trempant sa plume dans du vitriol à l’eau de rose, Anouilh fait le procès au procès de Rouen ; sa Jeanne, personnage situé entre François d’Assise et Martin Luther, pourvue d’une sorte d’auréole laïque, s’oppose à une Inquisition qui proclame « quiconque aime l’homme n’aime pas Dieu », à une Église qui s’impose comme l’intermédiaire obligatoire entre l’individu et la Providence, à d’effrayants doctrinaires, sans repos « tant qu’il restera un homme qui ne sera pas brisé ». Å travers Jeanne d’Arc, Anouilh retrouve une de ces figures lumineuses qui se sacrifient au nom du devoir – ici envers la patrie – ou envers Dieu (Becket ou l’Honneur de Dieu), mais aussi un de ces enfants du refus (Antigone) qui s’insurgent contre le cours des choses. Tour à tour naïve, rouée et insolente (« c’est plein d’imbéciles, le paradis ! »), Jeanne tient tête à ses bourreaux. Dans un ultime acte d’héroïsme, elle assume de devenir le personnage hors du commun qu’au fond d’elle, elle souhaite être. L’Alouette, une des trois « pièces costumées » d’Anouilh, a été créée le 15 octobre 1953 avec Suzanne Flon et Michel Bouquet (Charles VII) au Théâtre Montparnasse, dans une mise en scène de l’auteur et de Roland Piétri (608 représentations). Elle a été reprise dans le répertoire de nombreux théâtres mais reste, à ce jour, curieusement inédite à la télévision française, alors qu’elle a eu les honneurs des chaînes cathodiques anglaise, américaine, allemande, italienne, espagnole et même roumaine. Ce sont donc les Anglais qui, les premiers, filment la pièce pour le petit écran, dans une remarquable adaptation due à l’auteur dramatique Christopher Fry (ce même jour, la radio de la BBC diffuse également la pièce, avec une distribution différente). Hazel Penwarden a déjà joué L’Alouette sur scène à Londres en en tournée (rôles de Jeanne et d’Agnès Sorel). |
1990 | (tv) Jeanne d'Arc ou Le Pouvoir de l'innocence (FR) de Pierre Badel Parties : 1. Vaucouleurs, hiver 1428 – 2. Orléans, printemps 1429 – 3. Compiègne, printemps 1430 Société française de production (SFP)-Antenne 2 (Claude Contamine)-La Sept (A2 24.1., 31.1. et 7.2.90), 3 x 90 min. – av. Cécile Magnet (Jeanne d’Arc), Raymond Pellegrin (Pierre Cauchon, évêque de Beauvais), Nadine Alari (la reine Yolande d'Aragon), Christophe Odent (Charles VII), Nicolas Silberg (Georges de La Trémoille), Didier Sandre (Philippe le Bon, duc de Bourgogne), Vincent Gauthier (Gilles de Rais), Steve Kalfa (Frère Jean Pasquerel), Gérard Darrieu (Robert de Baudricourt), François Caron (Bertrand de Poulengy), Christian Cloarec (Jean de Metz), Henri Deus (Jean Bâtard d’Orléans, comte de Dunois), Simon Eine (Regnault de Chartres, archevêque de Reims), Dimitri Radochevitch (Fournier), Claude Brosset (Etienne de Vignolles dit La Hire), Michel Etcheverry (Jean de Lancastre, duc de Bedford), Marianne Moinot (Catherine Royer), Eric Vasberg (Jean d’Aulon), Olivier Brunhes (Jean II de Valois, duc d’Alençon), Jean-Claude Dreyfus (Jean de Luxembourg), Alain Christie (William), Philippe Deplanche (Flavy), Nicolas Silberg, Hélène Vauquois, Jean-Pol Dubois. Vétéran de la dramatique, spécialisé dans Molière, Beaumarchais et Musset, Pierre Badel est chargé d’une véritable superproduction pour petit écran, une télésuite de prestige en trois parties pour laquelle la Société française de production a réuni un budget enviable de 44 millions de francs et des centaines de figurants. Le projet circulait depuis huit ans dans les couloirs des chaînes de télévision françaises : en 1980, le romancier Pierre Moinot, de l’Académie française, et Jean-François Griblin rédigent un premier scénario de six heures destiné à Serge Moati à TF1 (1982), puis à Marcel Bluwal et à d’autres jusqu’en 1987. Las d’attendre un hypothétique passage à l’écran, Pierre Moinot transforme alors son scénario en livre qui paraît chez Flammarion, Jeanne d’Arc, le pouvoir et l’innocence (1988). L’ouvrage retient l’attention du patron d’Antenne 2, Claude Contamine, dont le frère Philippe dirige l’Institut Jeanne d’Arc à Orléans. Le scénario devant être ramené à 4h30, on fait l’impasse sur l’enfance de la petite bergère de Lorraine. Assisté de Didier Albert pour la seconde équipe, Badel tourne la prise d’Orléans à Carcassonne, le supplice de Jeanne, le sacre et d'autres scènes à Bourges (place Étienne Dolet, la cathédrale, palais Jaque-Coeur, rue des Trois Maillets), on filme en couleurs aux châteaux de Pierrefonds, d’Angers et du Haut-Koenigsbourg, puis, pour le procès, dans les nouveaux studios de la SFP à Brie-sur-Marne. C’est Cécile Magnet, 30 ans, plutôt gaie, d’un tempérament fougueux et exigeant, qui décroche le grand rôle ; elle a fait ses débuts en 1975 dans « Å nous les petites Anglaises » (ce qui ne manque pas de piquant !) et est dotée d’une solide expérience théâtrale (de boulevard) et télévisuelle. Sa Pucelle plutôt garçonne n’est ni prude ni pimbêche, parfois naïve mais jamais sotte ; elle aime la compagnie des hommes et a un rapport simple avec eux (« sa vie était bien trop passionnante pour penser au sexe », estime Griblin). Badel, qui veut « une Jeanne de tous les jours », insiste sur sa puissance de persuasion politique, sa rudesse de fantassin, elle qui portait une armure de 30 kilos et dirigeait six mille soldats. Son propos n’est toutefois pas d’engager une quelconque polémique sur l’action historique de la libératrice d’Orléans, sur sa sainteté ou ses rapports avec les autorités, mais seulement de dresser le constat d’une période tourmentée. Son téléfilm, sobre, d’honnête facture, manque hélas de hardiesse, et son imagerie d’épinal, jamais iconoclaste, irrite les partisans d’une Jeanne politicienne manipulée par son entourage. Un film sans point de vue : la légende y est restituée intacte avec, pour seul rajout, ce rêve prophétique qu’aurait eu le dauphin la veille de la visite de Jeanne et que cette dernière lui relate ensuite pour lui prouver qu’elle a bien reçu commandement de Messire Dieu. C’est un peu maigre pour trois soirées d’histoire de France, malgré l’emphase subtilement dosée de Cécile Magnet et une mémorable composition de Raymond Pellegrin en Cauchon. |
1979 | (tv) Saint Joan (GB) de Jane Howell Louis Marks/BBCtv (BBC 30.12.79), 2h43 min. – av. Gabrielle Lloyd (Jeanne d’Arc), Peter Benson (Charles VII), Michael Byrne (Jean Bâtard d’Orléans, comte de Dunois), Bernard Lee (Georges de La Trémoille), Jeremy Kemp (Richard de Beauchamp, comte de Warwick), James Aubrey (Gilles de Rais), Stephen Murray (Pierre Cauchon, évêque de Beauvais), Bruce Purchase (Etienne de Vignolles dit La Hire). – Téléfilm en couleurs d’après la pièce de G. B. Shaw, interprété par une comédienne galloise qui a surtout fait carrière au petit écran mais qu’on a notamment aperçu dans « Sleepy Hollow, la légende du cavalier sans tête » de Tim Burton (1999). |
1959 | (tv) Johanna aus Lothringen [Jeanne la Lorraine] (DE) de Michael Kehlmann Bayerischer Rundfunk (ARD 26.3.59), 2h05 min. – av. Elfriede Kuzmany (Jeanne d’Arc/Mary Grey), Adolf Spalinger (Jean Le Maistre, l’inquisiteur/Jimmy Masters), Heinrich Schweizer (Charles VII/Lesley Ward), Arnulf Schröder (Georges de La Trémoille/Jeffson), Carlos Werner (Jean Bâtard d’Orléans, comte de Dunois (Lang), Walter Buschhoff (Etienne de Vignolles dit La Hire/Nobel), Robert Michal (Pierre Cauchon, évêque de Beauvais), Gustl Weishappel (Jean d’Arc/Joe Cordwell), Harald Dietl (Pierre d’Arc/Dollner), Peter Tim Schaufuss (Jean de Metz/Farell), Georg Lehn (Bertrand de Poulengy/Garder), Hans Elwenspoek (Regnault de Chartres, archevêque de Reims), Rudolf Rhomberg (Harry), Ursula Herwig (sainte Marguerite/Ellen Sadler), Ina Peters (sainte Catherine/Aurore/Tessie),Fritz Rasp (Père Massieu), Charles Regnier (Alain Chartier/Sheppard), Wolfried Lier (Jean d’Estivet), Wolfgang Dohnberg (Thomas de Courcelles). Unique transposition télévisée connue du drame Joan of Lorraine de Maxwell Anderson (1946), dans une traduction allemande de Walter Firner. L’œuvre d’Anderson est une pièce dans la pièce (deux actes) ; une troupe de théâtre du XXe siècle rejoue l’histoire de Jeanne d’Arc, récit qui influe sur le comportement de tous les concernés (la plupart des acteurs jouent plusieurs rôles). Mary Grey, l’interprète fictive de Jeanne, est en conflit avec son metteur en scène, Jimmy Masters, quant à la perception du personnage, conflit qui se résout au cours des répétitions. La Pucelle est effondrée en réalisant que le roi pour lequel elle a combattu n’est ni sage, ni juste, ni honnête - mais comment la Providence peut-elle cautionner dans ce cas une intervention miraculeuse ? Finalement, la comédienne réalise que Jeanne était prête à faire des compromis dans de petites choses, mais pas dans le domaine de sa foi ou de son âme. Le drame a été créé à Broadway à l’Alvin Theatre en novembre 1946 par Ingrid Bergman, Joseph Wiseman et Sam Wanamaker, dans une mise en scène de Margo Jones. Anderson reprend des passages de sa pièce dans le scénario qu’il a écrit pour « Joan of Arc » de Victor Fleming (cf. supra, 1948). |
Graham Greene modernise Shaw Greene et Preminger effectuent quelques « modernisations » en plaçant des remarques sur le Paris du futur occupé par les Allemands en 1940 (Charles VII en est horrifié), puis libéré par les Américains (« quelle langue parlent-ils, ceux-là ? »). Le principal changement concerne le fameux épilogue de la pièce, que Shaw utilise pour délibérer de la condamnation de Jeanne, de sa liberté retrouvée en mourant, de la remise en cause ultérieure de la sentence, de la perception du personnage dans le futur, etc. Le cinéaste décide de transformer cet épilogue en récit cadre et de le scinder en trois parties, la première étant placée en ouverture (à l’instar du scénario imaginé en 1935 par Shaw lui-même) : Charles VII se réveille au cœur d’une nuit de l’an 1456 dans sa chambre à coucher à Chinon, déambule en bonnet et en pantoufles, courbé par l’âge, à travers les couloirs désertés du palais, retourne au lit et se trouve face à face avec le fantôme amusé de Jeanne d’Arc … ou est-ce un mauvais rêve ? « Ça t’a fait mal quand ils t’ont brûlée ? Es-tu contente d’être réhabilitée ? », demande-t-il, hésitant, rongé par le remords. Elle sourit pour le rassurer et les deux évoquent (flash-back) le « bon vieux temps » quand Jeanne, en 1429, attendait devant le château de Vaucouleurs et que Baudricourt finit par accepter de l’envoyer chez le dauphin. Une deuxième partie de l’épilogue apparaît juste après le couronnement à Reims, lorsque le fantôme de Warwick, responsable du supplice, intervient pour justifier son action au nom de la raison d’État : Jeanne n’était pas seulement une victime et une martyre, mais un défi vivant à la société de son temps. Enfin, après l’exécution à Rouen, le bourreau jette le cœur de la jeune fille, retrouvé intact au milieu des flammes, dans la Seine. « Vous n’entendrez plus jamais parler d’elle », promet-il au comte de Warwick, qui lui, reste dubitatif. Fin du flash-back, dernier retour à l’an 1456, où, entre-temps, Jeanne et le roi ont été rejoints par d’autres fantômes, et le film reprend grosso modo la conclusion de la pièce. Cette discussion finale, menée sur un ton bon enfant, déroute plus qu’elle n’éclaire et, du point de vue de la dramaturgie proprement cinématographique, fonctionne à contre-effet. De surcroît, en révélant la fin dès le début, et surtout en désamorçant d’emblée le conflit (Jeanne apaisée, badine), on supprime toute tension narrative ; la simple information remplace le sensationnel, la conversation noie le drame. Preminger admettra rétrospectivement qu’il s’est laissé envoûter par l’humour très caustique de Shaw, un humour souvent au deuxième degré, et des considérations philosophiques beaucoup trop intellectuelles pour le grand public – alors que celui-ci attendait une émotion qui n’affleure jamais à l’écran. Car le drame shawien, assez bavard, se veut d’abord un débat d’idées (le rôle de la religion dans l’histoire humaine, etc.). |
1960 | (tv) An Age of Kings. A Pageant of English History – Henry VI: 9. The Red Rose and the White – Henry VI: 10. The Fall of a Protector – Henry VI: 11. The Rabble from Kent – Henry VI: 12. The Morning’s War – Henry VI: 13. The Sun in Splendour – Richard III: 14. The Dangerous Brother – Richard III: 15. The Boar Hunt (GB) minisérie de Michael Hayes Peter Dews/BBRC-BBC Television (BBC 25.8.+8.9.+22.9.+6.10.+20.10.+3.11.+17.11.60), 7 x 60 min. – av. Terry Scully (Henry VI), Mary Morris (la reine Marguerite d’Anjou, son épouse), Patrick Garland (John, duc de Bedford), John Ringham (Humphrey, duc de Gloucester), Noel Johnson (Thomas Beaufort, duc d’Exeter), Robert Lang (Henry Beaufort, évêque de Winchester), Jerome Willis (Charles, le Dauphin / Henry Tudor, comte de Richmond, futur Henry VII), Anthony Valentine (Jean II de Valois, duc d’Alençon),John Warner (le duc d’Anjou), David Andrews (Charles VII, le « bâtard d’Orléans »), Eileen Atkins (Jeanne d’Arc), Jack May (Richard Plantagenet), Alan Rowe (John Beaufort, comte de Somerset), Frank Windsor (le comte de Warwick / Sir Robert Brackenbury), Tony Garnett (Vernon), Edgar Wreford (le duc de Suffolk / le duc de Buckingham), Robert Lang (le cardinal Beaufort, évêque de Winchester), Gordon Gostelow (le comte de Salisbury), Jack May (Richard, duc d’York), Kenneth Farrington (le duc de Buckingham / le comte de Northumberland), Nancie Jackson (Eleanor, duchesse de Gloucester), Patrick Garland (John Hume / George, duc de Clarence), Terence Lodge (l’assassin / Smith the Weaver), Adrian Brine (l’assassin / Walter Whitmore), Julian Glover (Edward IV), Jane Wenham (la reine Elizabeth Woodville, son épouse), Paul Daneman (Richard, duc de Gloucester, Richard III), Adrian Brine (la marquise de Montague), Jeffrey Wickham (le duc de Norfolk), Terry Scully (Henry VI), Jerome Willis (Lord Clifford), Leon Shepperdson (le comte de Westmoreland), John Greenwood (Edward, prince de Galles), John Warner (Louis XI, roi de France), Tamara Hinchco (Lady Bona), Kenneth Farrington (Lord Rivers), David Andrews (Lord Hastings), Jill Dixon (Lady Anne Neville), Jack May (Lord Stanley, comte de Derby), John Ringham (Sir William Catesby), Alan Rowe (Sir Richard Ratcliff), Leon Shepperdson (Lord Grey), Robert Lang (Sir Thomas Vaughan), Frank Pettingell (l’évêque d’Ely), Violet Carson (Cecily Neville, duchesse d’York), Terence Lodge (Sir James Tyrell). Henry VI est une trilogie consacrée au règne d’Henry VI et à la Guerre des Deux-Roses (elle forme avec Richard III ce que la critique appellera “la première tétralogie de Shakespeare”). La première partie met en scène – sur fond de guerre de Cent Ans – les débuts du règne d’Henry VI, d’abord enfant, puis jeune homme doux et pieux, mal préparé à faire face à la brutalité des moeurs politiques de son temps. Les Anglais affrontent la “sorcière” Jeanne d’Arc qui mène les troupes du dauphin contre une armée anglaise de Lord Talbot affaiblie par les divisions. Talbot déjoue la ruse de la comtesse d’Auvergne qui veut l’assassiner. Richard Plantagenet, duc d’York, se dispute avec le duc de Somerset de Lancaster. Les spectateurs de la querelle prennent parti en choisissant une rose rouge ou blanche. Henri VI choisit naïvement une rose rouge, se ralliant à Somerset et déclenchant la Guerre des Deux-Roses entre la rose rouge des Lancastre et la rose blanche des York. Talbot et son fils tombent sur le champ de bataille, tandis que York capture la Pucelle et la fait brûler. La discorde entre les régents du royaume et les luttes de pouvoir expliquent politiquement les défaites anglaises, aggravées par les émeutes populaires de Jack Cade à Londres (1450) et le mariage malheureux du roi et de Marguerite d’Anjou, fille du roi René d’Anjou, dont la nature passionnée se satisfait mal de cet époux trop chaste. Elle le trompe bientôt avec Edmond Beaufort, duc de Somerset. Le bon sens, la noblesse et le dévouement sont vaincus par l’orgueil, la ruse et l’avidité. Edward Plantagenet se proclame roi sous le nom d’Edward IV malgré l’existence du roi Henry VI, battu par le clan York et enfermé à la Tour de Londres. Louis XI prête à la reine Marguerite des troupes fraîches commandées par Warwick pour l’aider à reconquérir son trône. Mais Warwick est tué à la bataille de Barnet (1471). La reine Marguerite marche sur Londres avec son fils, le prince héritier Edward mais le clan York défait ses troupes à Tewkesbury et le prince héritier est égorgé par les trois frères York. Richard de Gloucester se rend à la Tour de Londres où il assassine Henry VI. Ainsi, Edward IV retrouve le trône royal et s’en félicite, sans se douter que Richard, bossu maléfique, rumine des projets de royauté pour lui-même... – Synopsis de Richard III, cf. film de Sir Laurence Olivier (1955). En 1960, les 15 parties de An Age of Kings forment la série la plus ambitieuse de la BBC consacrée aux chroniques royales de Shakespeare, avec 600 rôles parlants et 30 semaines de répétitions ; chaque épisode d’une durée de 65 à 70 minutes (adaptation d’Eric Crozier) coûte la fortune de 4000 £. Nota Bene : dans la première partie de Henry VI, une œuvre de jeunesse écrite vers 1592, le monarque anglais, âgé de huit ans (il est proclamé roi de France en 1429 et sacré en 1431 à Paris) lutte contre Jeanne d’Arc, nouveau commandant militaire des Français qui lui reprend Orléans et refoule ses armées. Charles VII n’est que « le bâtard d’Orléans ». Ennemie politique, la Pucelle est dépeinte comme une femme rusée, peu digne de confiance et lascive (elle se déclare enceinte devant les conseillers du roi d’Angleterre pour tenter d’échapper au bûcher auquel ceux-ci, indignés, finissent par la livrer). Au Ve acte de la pièce, on apprend même que tout au long de sa carrière militaire, Jeanne a pu bénéficier du soutien d’esprits surnaturels. Pour le barde débutant, qui recopie littéralement des passages entiers des Chronicles of England, Scotland and Ireland (1577) de Raphael Holinshed à ce sujet, elle n’est qu’une sorcière hystérique et une fille de joie coupable « d’exécrables abominations ». Cette accusation permet d’affirmer que le sacre à Reims est œuvre du diable et que ce n’est donc pas Charles VII qui est le roi légitime de France, mais Henry VI de Lancastre, selon les termes du Traité de Troyes en 1420. L’image de Jeanne en Grande-Bretagne changera du tout au tout à partir de la fin du XVIIIe siècle, sous la plume des écrivains romantiques (Robert Southey, S. T. Coleridge, Charles Lamp, Thomas de Quincey), sans parler de G. B. Shaw. |
1963 | Yolanta / Iolantha (Yolande) (SU) de Vladimir Gorikker Rigas Kinostudija, 1h22 min. – av. Natalia Rudnaya (Yolande d’Anjou), Fiodor Nikitin (René d’Anjou, comte de Provence, son père), Youri Perov (le comte Vaudémont), Aleksandr Beliavski (Robert, duc de Bourgogne), Piotr Glebov (Ibn Hakia), Valentina Ouchakova (Marthe), Valdis Sandberg (Bertrand), Valentina Charykina (Brigitta), Ya. Filipson (Almeric). Synopsis : La princesse Yolande est aveugle de naissance, mais ignore son état ; son père, le roi René de Provence, interdit ses appartements à tout étranger sous peine de mort, tant il craint qu’elle n’apprenne la vérité. Il revient de voyage en ramenant un célèbre médecin maure, Ibn Hakia, qui déclare qu’une guérison de Yolande est possible, pour autant que celle-ci s’instruise de tout et désire voir cette lumière dont lui a parlé le comte Vaudémont, son amoureux. Afin d’exacerber chez sa fille ce désir, dont dépend le succès d’Ibn Hakia, le roi René condamne Vaudémont à mort si l’opération échoue. Yolande voit enfin, et son ancien fiancé, Robert de Bourgogne, cède sa place à son rival. Spécialiste de l’opéra à l’écran, Gorikker transpose pour le cinéma une œuvre lyrique peu connue de Piotr Ilyitch et Modeste Tchaïkovski (1892), reprise jadis par le Bolchoï après le décès du compositeur et créée en Allemagne par Gustav Mahler. L’opéra est lui-même adapté d’une pièce danoise de Henrik Hertz, Kong Renés Datter (La fille du roi René), datant de 1845. Le film soviétique (tourné en Sovcolor dans les studios de Riga) purge toutefois le scénario de toute allusion religieuse, car le livret original s’achève sur un hymne à la gloire de l’Éternel. L’intrigue est fantaisiste, mais elle met en scène des personnages authentiques. Surnommé par ses sujets provençaux « le bon roi René », René Ier duc d’Anjou (1409-1480) – pair de France, roi de Naples, roi titulaire de Jérusalem et d’Aragon – a contribué à la relance de l’économie locale affectée par les séquelles de la peste et la Guerre de Cent Ans, renforçant les efforts de Charles VII (dont il a gagné l’amitié) contre les Anglais ; il côtoie Jeanne d’Arc à la bataille de Montépilloy. Mécène, écrivain, cultivé, il est passionné des sciences arabes et de l’Orient. Son épouse, la duchesse Isabelle de Lorraine, lui donne neuf enfants, dont cette Yolande (1428-1483), appelée également Yolande de Lorraine, Yolande de Bar ou Yolande d’Anjou et mariée à Ferry II, duc de Lorraine en 1473, auquel elle donnera à son tour six enfants. La sœur de Yolande, Marguerite d’Anjou, épouse Henry VI, roi d’Angleterre. Aucun écrit atteste que Yolande était aveugle dans sa jeunesse. La pièce Henrik Hertz a fait le sujet de deux autres films, « King René’s Daughter » de W. Eugene Moore, Jr. En 1913 (cf. supra) et « Das Licht der Liebe » de Gunther Scholz en 1991, dont l’action est transposée sous Charlemagne (cf. 2). |
1916/17 | **Joan the Woman (Jeanne d'Arc) (US) de Cecil B. DeMille Cardinal Film Corp.-Paramount (Famous Players-Lasky), 10'446 ft./13 bob./2h11 min. – av. Geraldine Farrar (Jeanne d’Arc), Raymond Hatton (Charles VII), Hobart Bosworth (Etienne de Vignolles dit La Hire), Theodore Roberts (Pierre Cauchon, évêque de Beauvais), Wallace Reid (Sir Eric Trent), Charles Clary (Georges de La Trémoille), Ernest Joy (Robert de Baudricourt), John Oaker (Jean de Metz), Hugh B. Koch (Philippe le Bon, duc de Bourgogne), William Conklin (Jean, duc de Luxembourg), Clarence H. Geldert (Jean le Bâtard d’Orléans, comte de Dunois), Tully Marshall (le père Nicolas Loyseleur), James Neill (Lazart, l’oncle de Jeanne), Lawrence Peyton (Gaspard, le déserteur), Horace B. Carpenter (Jacques d’Arc), Cleo Ridgely (le favori du roi), Lillian Leighton (Isabeau de Bavière), Marjorie Daw (Catherine d’Arc), Stephen Gray (Pierre d’Arc), Walter Long (le bourreau), William Elmer (Guy Townes), Emilius Jorgensen (Michael), Ramon Novarro (un paysan affamé), Jack Holt. Synopsis : « En 1916, dans une tranchée anglaise quelque part en France », un officier britannique, Eric Trent, découvre une épée médiévale en étayant sa casemate. Peu après, il est convoqué avec ses pairs par l’officier commandant la tranchée : il lui faut, à minuit, un volontaire pour une mission suicide. Revenu dans sa casemate, Eric est, avant de s’endormir, visité par l’esprit de Jeanne d’Arc qui lui annonce que l’heure est venue de payer les péchés commis à son encontre : les Anglais doivent à présent se racheter envers la France… Flash-back : au XVe siècle, alors qu’il est à la tête de pillards bourguignons, son ancêtre se trouve face à la bergère de Domremy, prête à se sacrifier pour retarder la soldatesque et permettre à ses proches de fuir. Sir Eric lui évite le pire, mais un déserteur français le blesse. Jeanne cache son sauveur, dont elle s’est éprise, le soigne et lui offre son crucifix quand il la quitte. Puis, l’Archange lui étant apparu, elle se rend à Chinon voir le dauphin, etc. Parmi les prisonniers à Orléans se trouve Sir Eric, Jeanne obtient sa libération mais refuse son amour, son cœur appartenant « à la France ». En route pour Compiègne, elle est capturée par les Bourguignons de Sir Eric, devenu comte. Cauchon exulte, il va pouvoir se venger de celle qui l’a empêché de prendre le pouvoir. Charles VII refusant de payer la rançon de Jeanne, Sir Eric le fait à sa place, mais Cauchon déjoue tous ses efforts pour la libérer. Sir Eric tente d’obtenir son pardon en rendant à la condamnée le crucifix offert jadis… Quand il se réveille dans sa casemate, Eric se porte volontaire afin de racheter l’infamie de son lointain ancêtre et meurt en accomplissant sa mission sous le feu ennemi. « Jeanne d’Arc n’est pas morte. Elle ne mourra jamais. Et, dans les terres tourmentées par la guerre qu’elle aimait tant, son Esprit se bat toujours. » Survolant les tranchées en armure, auréolée de lumière, elle tend la main à un militaire agonisant. Icône populaire de l’Amérique profonde Bâti sur une homologie laborieuse entre la guerre de Cent Ans et le Première Guerre mondiale, « Joan the Woman » a été réalisé dans le but de convaincre le public américain de la nécessité d’une intervention militaire en Europe. C’est un plaidoyer exaltant le patriotisme d’une jeune Française, tandis que la réhabilitation métonymique des Anglais à travers le sacrifice d’Eric préserve l’unité du camp allié face à l’envahisseur allemand. Enfin, la présence « sanctifiante », rassurante de cette héroïne d’un autre âge masque habilement la réalité terrifiante d’un conflit de type nouveau, la guerre technologique moderne. Depuis la fin du XIXe siècle, Jeanne d’Arc est une figure familière dans la culture américaine. Les élites chérissent l’ultime roman de Mark Twain (et son favori), Personal Recollections of Joan of Arc, by the Sieur Louis de Conte (1896), mémoires du page (fictif) de la fille de Lorraine. L’Amérique profonde, surtout protestante, est séduite par ses origines modestes et rurales, sa croisade nationaliste et religieuse. Le fait qu’elle soit victime d’un monarque et de la cléricature catholique lui confère un statut particulier tant chez les conservateurs que chez les suffragettes : son combat sert toutes les causes. En abordant la matière, Cecil B. DeMille, qui adéjà vingt-quatre films à son actif, se lance pour la première fois dans le genre spectaculaire qui va faire sa renommée. Mais, s’il cherche à enfoncer les fresques rivales d’un D. W. Griffith (« Intolérance ») ou d’un Thomas Ince (« Civilisation »), c’est en privilégiant systématiquement le drame individuel plutôt que les grandes destinées collectives. Il a sans doute été marqué par le tableau Jeanne d’Arc de Jules Bastien Lepage (1879), célèbre acquisition du Metropolitan Museum of Art à New York, quand il confie le rôle-titre à une actrice ressemblant aussi fortement au modèle du peintre naturaliste français (silhouette, coiffure et costume coïncident). L’Américaine Geraldine Farrar, 34 ans, est la soprano la plus fêtée des États-Unis. Star absolue de la Metropolitan Opera (elle y a créée Madame Butterfly), réputée pour ses éclats, ses liaisons scandaleuses (Toscanini, Caruso), elle a fini par accepter le pont d’or que lui offrait le producteur Jesse L. Lasky – deux dollars par minute devant la caméra – et a déjà tourné trois films pour DeMille en 1915/16, dont une version de « Carmen ». Pour « Joan the Woman », le choix est toutefois discutable car, malgré sa verve, son autorité et son charisme, la comédienne est trop âgée pour le rôle … et pour la caméra. En Californie, sa ligne s’est alourdie et c’est hélas une matrone affectionnant la pose théâtrale, les bras écartés, l’index levé vers le ciel, qui représente la frêle bergère à l’écran. (Terrorisée par les chevaux, elle est doublée pour les plans généraux sur son destrier.) Cette Jeanne-là n’est pas une fleur de vitrail et n’a plus rien de mystérieux, elle doit préparer l’Amérique à l’entrée en guerre ; lors de la sortie du film à Boston, Geraldine Farrar s’enveloppe du drapeau américain pour entonner l’hymne national. |
1957 | *Saint Joan (Sainte Jeanne) (US) d’Otto Preminger Otto Preminger/Wheel Productions-United Artists, 1h50 min. – av. Jean Seberg (Jeanne d’Arc), Richard Widmark (Charles VII), Anton Walbrook (Pierre Cauchon, évêque de Beauvais), Richard Todd (Jean Bâtard d’Orléans, comte de Dunois), Francis De Wolff (Georges de La Trémoille), David Oxley (Gilles de Rais), John Gielgud (Richard de Beauchamp, comte de Warwick), Harry Andrews (le chapelain Jean de Stogumber), Archie Duncan (Robert de Baudricourt), Finlay Currie (Regnault de Chartres, archevêque de Reims), Patrick Barr (Etienne de Vignolles dit La Hire), Bernard Miles (le bourreau), Barry Jones (Thomas de Courcelles), Felix Aylmer (Jean Le Maistre, l’inquisiteur), Margot Grahame (la duchesse de La Trémoille), Kenneth Haigh (Frère Martin Ladvenu), Sydney Bromley (Steward), Patrick Magee (garde de Dunois), Kenneth Warren (Poulenguy), Thomas Gallagher (Frank), David Hemmings (un page). C’est la première – et à ce jour unique – fois que le texte de George Bernard Shaw (cf. 1951) a les honneurs du grand écran. Du temps de son vivant, les cinéastes se sont vainement battus pour obtenir le feu vert de l’écrivain, resté très méfiant à l’égard du cinéma. La RKO (Pandro S. Berman) envisageait une « Saint Joan » avec Katharine Hepburn en 1933/34 déjà, filmée par George Cukor, mais l’auteur jugea les raccourcis du scénario inacceptables. On en resta à quelques bouts d’essais en Technicolor. Entre 1934 et 1936, Shaw avait lui-même rédigé un script d’après sa pièce qu’il destinait à Elisabeth Bergner (interprète du rôle chez Max Reinhardt à Berlin en 1924), et que devait diriger son époux Paul Czinner ; le projet capota toutefois quand la presse américaine révéla l’hostilité de l’Église catholique à la pièce. (Son scénario sera publié en 1968 : Saint Joan. A Screenplay, University of Washington Press.) Dans les années cinquante, Otto Preminger, cinéaste-producteur indépendant, passe aux Etats-Unis pour le grand pourfendeur des interdits du Code Hays : drogue, racisme, sexe, viol. Auréolé des succès mondiaux de « Carmen Jones » et de « Man with the Golden Arm (L’Homme aux bras d’or) », Preminger flirte depuis toujours avec l’idée de porter à l’écran la pièce de Shaw (qu’il place en tête de liste des drames de la littérature mondiale) et en acquiert les droits pour 100'000 $, après deux ans de négociations ardues avec les héritiers. Comme Shaw, le réalisateur viennois est un sceptique invétéré, pudique, cultivant le goût du paradoxe, refusant toute sentimentalité. Il ne veut pas produire « une Jeanne d’Arc de plus », mais montrer fidèlement la Pucelle telle qu’imaginée par l’écrivain irlandais, en altérant légèrement la continuité des scènes et en raccourcissant diverses tirades (le scénario initial est réduit de 3 heures à 1h50). Pas de batailles surajoutées (juste quelques images de la traversée de la Loire sur des embarcations pour attaquer les Tourelles) ; pas d’écran large, pas de Technicolor ni de tableaux spectaculaires qui pourraient distraire, hormis la très brève scène à Reims, où la comédie l’emporte (le dauphin lutte avec ses attributs royaux trop encombrants). L’adaptation est signée par un autre romancier, Graham Greene, converti au catholicisme, qui s’attaque non sans malice à ce canevas anticlérical (le texte de la synchronisation française est de Jean Anouilh, L’Alouette oblige). |
Moyen Âge et Renaissance > LE ROYAUME DE FRANCE > LE CRÉPUSCULE DU MOYEN ÂGE: LOUIS XI (1461 à 1483)
Roman paru en 1831. – Paris en 1482, un an avant le décès de Louis XI. Le jour de la fête des Fous, sur le parvis de Notre-Dame, la belle gitane Esméralda exhibe sa chèvre savante Djali tout en dansant et chacun l’admire, délaissant le « Mystère » du poète Gringoire. Frollo, l’archidiacre de Notre-Dame, inquisiteur tourmenté par la chair, la contemple avidement, tandis que du haut de la cathédrale, Quasimodo, le carillonneur bossu, difforme, fort comme Hercule que Frollo a recueilli enfant suit fasciné le spectacle de son œil unique. Quasimodo est élu Pape des Fous, mais la nuit venue, sur ordre de son maître, il tente d’enlever Esméralda. Le fringant capitaine des archers Phoebus sauve la belle, le monstre est condamné au pilori, flagellé sur la place publique sous les quolibets de la foule hilare. La gitane a pitié et lui apporte à boire. Entre-temps, Gringoire s’est égaré dans les quartiers interdits de la Cour des Miracles, repaire de tous les truands de Paris dirigés par Clopin, et Esméralda lui sauve la vie et l’épousant sur le papier. Torturé par la jalousie, Frollo poignarde Phoebus dans les bras d’Esméralda qui est accusée de meurtre. L’archidiacre laisse la « sorcière » qui l’a dédaigné être torturée et condamnée au gibet sur la place de Grève. Quasimodo, éperdument amoureux, lui aussi, l’arrache au bourreau et l’emporte vers les tours de Notre-Dame où elle bénéficie du droit sacré d’asile. Il l’installe dans une logette non loin de la cellule de Frollo qui essaye vainement d’assouvir sa passion. Apprenant que Frollo et les notables poussent Louis XI à violer le droit d’asile, Gringoire incite les truands à donner l’assaut à Notre-Dame pour venir au secours d’Esméralda. Quasimodo croit la gitane menacée et défend la place tout seul en lançant des pierres et du plomb fondu sur les assaillants. Les archers de Phoebus (qui a survécu à ses blessures) interviennent sur ordre du roi, massacrent les mendiants et livrent Esméralda au bourreau. Elle est pendue. Quasimodo précipite dans le vide son maître Frollo, responsable de la tragédie. Puis il s’étend près du cadavre de son amour dans les sous-sols du gibet de Montfaucon et se laisse mourir.
Nota bene :
- L’Église catholique a toujours ressenti le personnage odieux du prêtre Claude Frollo comme une incitation à l’irrespect de la hiérarchie, de l’ordre et du pouvoir, ce pourquoi toutes les adaptations scéniques du roman de Hugo ont été interdites de 1831 jusqu’à la fin du Second Empire, en 1871, pour des motifs politiques et religieux. Le cinéma s’est d’emblée heurté aux mêmes réticences de la censure, en France et en particulier aux Etats-Unis, ce jusque dans les années 1980.
- En 1469, l’imprimerie arrive à Paris. Sur ordre de Louis XI, trois auxiliaires de Jean Furst, Ulrich Gering, Martin Krantz et Mikael Freiburger, appelés de Rhénanie par le recteur de l’université, Guillaume Fichet, établissent un atelier dans le collège de la Sorbonne. L’imprimerie est officiellement inaugurée par le roi en 1471, qui la considère comme une arme de propagande et de transmission du savoir (seront diffusés en premier des écrits de Platon, Salluste, Virgile, Juvénal et Xénophon). Exemptes du droit d’aubaine, les imprimeries se multiplient très rapidement à Paris. En 1477, le roi commande l’édition du premier livre en français, une chronique de l’histoire de France depuis le temps des Romains jusqu’à son père, Charles VII.
- La Cour des Miracles – située jadis dans l’actuel quartier du Sentier (Paris 2) – , son ghetto de mendiants et sa criminalité organisée sont en réalité un phénomène social du milieu du XVIIe siècle, décrit par Henri Sauval (1620-1670) dans son "Histoire et recherches des antiquités de la ville de Paris", publiée en 1724 ; rien de tel n’existait à l’époque de Louis XI.
- Dans le même ordre d’idées, rappelons qu’en 1831, l’année de la parution du roman de Hugo, les gargouilles et chimères construites au XIIIe siècle avaient depuis longtemps disparu. Elle furent entièrement imaginées et recrées par Viollet-le-Duc qui s’inspira pour cela en partie de Victor Hugo : les sculptures perchées sur les tours et les galeries, donnant au monument son aspect effrayant, n’étaient, en 1843, pas le fruit d’une simple restauration, mais le dernier avatar en date de la conception hugolienne du style gothique. Viollet-le-Duc dessina les monstres qui seraient plus tard considérés comme l’essence même de l’art médiéval. « La Notre-Dame de Viollet-le-Duc, cette cathédrale qui crie sa douleur en silence, est un monument des névroses du milieu du XIXe siècle » (Graham Robb). Cf. à ce sujet "Les Gargouilles de Notre-Dame" de Michael Camille, éd. Alma, Paris, 2011.
- Pierre Gringoire (qu’Hugo semble utiliser comme un substitut de François Villon, disparu vingt ans plus tôt) s’appelle en réalité Pierre Gringore (1475 ?-1538). Poète, dramaturge et pamphlétiste normand, il est l’auteur de pièces satiriques qui s’attaquent au pape guerrier Jules II et à sa politique « armée » au Vatican (1506 à 1512), ainsi qu’à Martin Luther ("Le blazon des hérétiques", 1524). De 1502 à 1507, il dirige l’exécution des « mystères » à Paris – soit vingt ans après le récit de Hugo. Il s’établira en Lorraine où il épousera une certaine Catherine Roger.
- Les gitans (bohémiens, tziganes, Roms, Égyptiens) arrivent en France au début du XVe siècle. Pris pour des pèlerins, les Roms d’Europe sont d’abord protégés par des princes en Hongrie, en Bohème, en Pologne et en France, et l’opinion manifeste alors à leur égard un mélange de tolérance et de crainte respectueuse. À partir du XVIe siècle et l’embourgeoisement progressif de la société, ils sont déclarés hors-la-loi dans plusieurs régions et peuvent être persécutés impunément (on note des mesures d’expulsion de faible portée sous Louis XII en 1504, suivies d’un édit de François Ier en 1539 et d’une ordonnance de Charles IX en 1561).
Nota bene :
- L’Église catholique a toujours ressenti le personnage odieux du prêtre Claude Frollo comme une incitation à l’irrespect de la hiérarchie, de l’ordre et du pouvoir, ce pourquoi toutes les adaptations scéniques du roman de Hugo ont été interdites de 1831 jusqu’à la fin du Second Empire, en 1871, pour des motifs politiques et religieux. Le cinéma s’est d’emblée heurté aux mêmes réticences de la censure, en France et en particulier aux Etats-Unis, ce jusque dans les années 1980.
- En 1469, l’imprimerie arrive à Paris. Sur ordre de Louis XI, trois auxiliaires de Jean Furst, Ulrich Gering, Martin Krantz et Mikael Freiburger, appelés de Rhénanie par le recteur de l’université, Guillaume Fichet, établissent un atelier dans le collège de la Sorbonne. L’imprimerie est officiellement inaugurée par le roi en 1471, qui la considère comme une arme de propagande et de transmission du savoir (seront diffusés en premier des écrits de Platon, Salluste, Virgile, Juvénal et Xénophon). Exemptes du droit d’aubaine, les imprimeries se multiplient très rapidement à Paris. En 1477, le roi commande l’édition du premier livre en français, une chronique de l’histoire de France depuis le temps des Romains jusqu’à son père, Charles VII.
- La Cour des Miracles – située jadis dans l’actuel quartier du Sentier (Paris 2) – , son ghetto de mendiants et sa criminalité organisée sont en réalité un phénomène social du milieu du XVIIe siècle, décrit par Henri Sauval (1620-1670) dans son "Histoire et recherches des antiquités de la ville de Paris", publiée en 1724 ; rien de tel n’existait à l’époque de Louis XI.
- Dans le même ordre d’idées, rappelons qu’en 1831, l’année de la parution du roman de Hugo, les gargouilles et chimères construites au XIIIe siècle avaient depuis longtemps disparu. Elle furent entièrement imaginées et recrées par Viollet-le-Duc qui s’inspira pour cela en partie de Victor Hugo : les sculptures perchées sur les tours et les galeries, donnant au monument son aspect effrayant, n’étaient, en 1843, pas le fruit d’une simple restauration, mais le dernier avatar en date de la conception hugolienne du style gothique. Viollet-le-Duc dessina les monstres qui seraient plus tard considérés comme l’essence même de l’art médiéval. « La Notre-Dame de Viollet-le-Duc, cette cathédrale qui crie sa douleur en silence, est un monument des névroses du milieu du XIXe siècle » (Graham Robb). Cf. à ce sujet "Les Gargouilles de Notre-Dame" de Michael Camille, éd. Alma, Paris, 2011.
- Pierre Gringoire (qu’Hugo semble utiliser comme un substitut de François Villon, disparu vingt ans plus tôt) s’appelle en réalité Pierre Gringore (1475 ?-1538). Poète, dramaturge et pamphlétiste normand, il est l’auteur de pièces satiriques qui s’attaquent au pape guerrier Jules II et à sa politique « armée » au Vatican (1506 à 1512), ainsi qu’à Martin Luther ("Le blazon des hérétiques", 1524). De 1502 à 1507, il dirige l’exécution des « mystères » à Paris – soit vingt ans après le récit de Hugo. Il s’établira en Lorraine où il épousera une certaine Catherine Roger.
- Les gitans (bohémiens, tziganes, Roms, Égyptiens) arrivent en France au début du XVe siècle. Pris pour des pèlerins, les Roms d’Europe sont d’abord protégés par des princes en Hongrie, en Bohème, en Pologne et en France, et l’opinion manifeste alors à leur égard un mélange de tolérance et de crainte respectueuse. À partir du XVIe siècle et l’embourgeoisement progressif de la société, ils sont déclarés hors-la-loi dans plusieurs régions et peuvent être persécutés impunément (on note des mesures d’expulsion de faible portée sous Louis XII en 1504, suivies d’un édit de François Ier en 1539 et d’une ordonnance de Charles IX en 1561).
1974 | (tv) Die Jungfrau von Orleans [La Pucelle d’Orléans] (DE) de Wilfried Minks et Heribert Wenk Zweites Deutsches Fernsehen-Deutsches Schauspielhaus Hamburg (ZDF 29.10.74), 1h50 min. av. Eva Mattes (Jeanne d’Arc), Christoph Bantzer (Charles VII), Angela Schmid (Agnès Sorel), Christa Berndl (Isabeau de Bavière, la reine mère), Charles Brauer (Philippe le Bon, duc de Bourgogne), Manfred Meihoefer (Jean Bâtard d’Orléans, comte de Dunois), Werner Hinz (John Talbot, comte de Shrewsbury), Josef Dahmen (Thibaut d’Arc), Wolf-Dietrich Berg (Fastolf), Rolf Becker (Lionel), Karl Obermayr (Raoul, le paysan), Timo Wüllner (Du Châtel), Rolf Jülich (Étienne de Vignolles, dit La Hire), Olaf Salmon (Montgomery), E. O. Fuhrmann (Regnault de Chartres, archevêque de Reims). Synopsis : Tragédie romantique en cinq actes, La Pucelle d’Orléans de Friedrich Schiller (1801) diverge sur de nombreux points de l’historiographie classique. Le père de l’héroïne, Thibaut d’Arc, est ici un riche propriétaire terrien, Jeanne promise à un voisin non moins aisé. Lorsque Philippe de Bourgogne et la reine-mère Isabeau de Bavière se rallient aux Anglais (qui ont pris Paris où ils veulent nommer le duc de Lancastre roi de France), Jeanne obéit à une vision de la Vierge, se transforme en furie guerrière « d’une beauté terrifiante » et remporte deux écrasantes victoires. Follement amoureux, Dunois et La Hire la courtisent, mais Jeanne se sait invincible tant qu’elle demeure sans attaches sentimentales. Elle affronte en combat singulier Lionel, un chevalier anglais, le bat, l’épargne et s’éprend de lui. Dès lors, elle est tourmentée à l’idée d’avoir trahi sa mission divine. Au cours du couronnement du dauphin à Reims, Thibaut d’Arc accuse sa propre fille de dévergondage ; la « sorcière d’Orléans » est chassée de la cour et capturée par Isabeau. En prison, elle se détache de l’emprise de Lionel, puis, apprenant les malheurs militaires de Charles VII, elle supplie la Vierge de la délivrer de ses chaînes. Libre, elle se jette dans la bataille, sauve le roi et meurt curieusement non sur le bûcher, mais au combat … La tragédie naît du conflit de l’humanité de Jeanne confrontée à l’inhumanité du commandement céleste. Dans cette première adaptation de Schiller à la télévision (en couleurs), Jeanne est interprétée par Eva Mattes, 18 ans, une des égéries du nouveau cinéma allemand des années 1970, vue notamment chez R. W. Fassbinder (« Les Larmes amères de Petra von Kant », « Fontane – Effi Briest ») et chez Werner Herzog (« Stroszek », « Woyzeck »), son compagnon à qui elle donnera une fille. La Jeanne d’Eva Mattes, jeune fille prodige, a fait sensation sur scène au Deutsches Schauspielhaus de Hambourg dans la mise en scène de Wilfried Minks (automne 1973), reprise ici pour le petit écran. |
1948 | *Joan of Arc (Jeanne d'Arc) (US) de Victor Fleming Walter Wanger/Sierra Pictures-RKO Radio Pictures, 2h33 min./2h26 min./1h40 min. – av. Ingrid Bergman (Jeanne d’Arc), José Ferrer (Charles VII), Francis L. Sullivan (Pierre Cauchon), Gene Lockhart (Georges de La Trémoille), Henry Brandon (Gilles de Rais), J. Carrol Naish (Jean, duc de Luxembourg), Ward Bond (Etienne de Vignolles dit La Hire), John Emery (Jean II de Valois, duc d'Alençon), Leif Erickson (Jean Bâtard d’Orléans, comte de Dunois), Cecil Kellaway (Jean Le Maistre), Richard Ney (Charles de Bourbon, duc de Clermont), George Coulouris (Robert de Baudricourt), Selena Royle (Isabelle Romée d’Arc), Robert Barrat (Jacques d'Arc), Irene Rich (Catherine Le Royer), Richard Derr (Jean de Metz), Nicholas Joy (Regnault de Chartres, archevêque de Reims), Colin Keith Johnston (Philippe le Bon, duc de Bourgogne), Shepperd Strudwick (Père Jean Massieu), Jimmy Lydon (Pierre d’Arc), Rand Brooks (Jean d’Arc), Roman Bohnen (Durand Laxart, l’oncle de Jeanne), Nestor Paiva (Henri Le Royer), Ray Teal (Bertrand de Poulengy), David Bond (Jean Fournier), George Zucco (le connétable de Clairveaux), Vincent Donahue (Alain Chartier), John Ireland (Jean de la Boussac), Morris Ankrum (Jean Poton de Xaintrailles), Thomas Browne Henry (Raoul de Gaucort), Gregg Barton (Louis de Culan), Ethan Laidlaw (Jean d’Aulon), Hurd Hatfield (Père Pasquerel), Frederick Worlock (Jean de Lancastre, duc de Bedford), Dennis Hoey (Sir William Glasdall), Mary Currier (Jeanne, comtesse de Luxembourg), Roy Roberts (Wandamme), Taylor Holmes (Jean de Saint-Avit, évêque d’Avranches), Alan Napier (Richard de Beauchamp, comte de Warwick), Philip Bourneuf (Jean d’Estivet), Aubrey Mather (Jean de la Fontaine), Stephen Roberts (Thomas de Courcelles), Herbert Rudley (Isambard de la Pierre), Frank Puglia (Nicolas de Houppeville), William Conrad (Guillaume Erard), John Parrish (Jean Beaupère), Victor Wood (Nicolas Midi), Houseley Stevenson (le cardinal de Winchester), Jeff Corey (un geôlier), Bill Kennedy (Thierache, le bourreau), Vincent Donahue (le bouffon du roi). Le rêve d’Ingrid Bergman Le film de Victor Fleming, la version la plus populaire – mais aussi la plus vilipendée – de la vie de Jeanne d’Arc, est un de ces cas d’école où l’historique de production se révèle hélas plus intéressant que le résultat à l’écran. Le sujet ne laisse pas Hollywood indifférent : en 1934, la Metro-Goldwyn-Mayer d’Irving Thalberg l’envisage pour Greta Garbo, d’après un scénario de son amie intime Mercedes De Acosta, mais la divine prend peur et se désiste. Cette même année, à la RKO, lorsque les pourparlers de la RKO pour filmer la pièce de G. B. Shaw capotent (cf. la « Saint Joan » d’Otto Preminger en 1957), le producteur Pandro S. Berman demande d’abord à l’auteur dramatique Maxwell Anderson, trop occupé, puis à Thornton Wilder de lui développer un script original sur Jeanne, qui reste dans les tiroirs. En janvier 1940, David O. Selznick reprend temporairement l’ébauche de Wilder pour faire plaisir à sa jeune recrue suédoise, Ingrid Bergman (elle rêve de ce rôle), à mettre en scène par Jean Renoir ; peu après, la MGM charge Victor Saville de filmer la pièce de Shaw avec Greta Garbo en Angleterre, initiative repoussée à cause du débarquement en Normandie. En novembre 1946, Ingrid Bergman peut enfin incarner la Pucelle … mais seulement sur les planches à Broadway, dans le drame Joan of Lorraine de Maxwell Anderson (cf. infra, 1959), une construction à la Pirandello mettant en parallèle le récit historique et les conflits des acteurs censés le représenter. Positiviste et athée, Anderson se sert de l’héroïne pour démontrer l’impossibilité de servir une cause politique, aussi noble fût-elle, sans compromissions douteuses, et de s’interroger ainsi sur les rapports entre politique et idéal, cela tout en gommant l'aspect religieux des motivations de la Pucelle. La critique new-yorkaise juge la Bergman « incandescente », elle récolte le prestigieux Tony Award, Steinbeck et Hemingway l’acclament. Vu le succès, Anderson et sa comédienne, devenue entre-temps une immense star à Hollywood, envisagent d’en faire un film, et William Wyler les assiège dans ce sens. Il s’agit alors de prendre de vitesse deux autres projets encore, celui de Gabriel Pascal, détenteur des droits du texte de Shaw, avec Deborah Kerr en Grande-Bretagne, et celui de Selznick pour Jennifer Jones (à partir d’un script de Ben Hecht). Pour Hollywood, le moment est propice : le marché européen est à nouveau ouvert et dans l’imaginaire du public américain, la présence de la France, récemment délivrée par les forces alliées et théâtre de sanglantes opérations militaires, a été réactualisée. |
1973 | *(tv) L'allodola [L’Alouette] (IT) de Vittorio Cottafavi RAI (Segondo Programma 16.3.73), 2h09 min. – av. Ileana Ghione (Jeanne d’Arc), Virginio Gazzolo (Pierre Cauchon, évêque de Beauvais), Manlio Guardabassi (Richard de Beauchamp, comte de Warwick), Manlio De Angelis (Robert de Baudricourt), Luigi Diberti (Charles VII), Lia Zoppelli (la reine Yolande d'Aragon), Anna Leonardi (Marie d’Anjou, sa fille), Leda Palma (Agnès Sorel), Gianni Rizzo (Georges de La Trémoille), Winnie Riva (Isabelle Romée d’Arc), Leonardo Severini (Jacques d’Arc), Renzo Giovampietro (juge instructeur), Ferruccio De Ceresa (Jean Le Maistre), Umberto Ceriani (frère Martin Ladvenu), Luigi Sportelli (frère Boudousse), Lino Troisi (Regnault de Chartres, archevêque de Reims), Antonio Dimitri (le bourreau). Un chef-d’œuvre oublié de la télévision italienne, signé par l’auteur des péplums les plus intelligents produits à Cinecittà (« Hercule à la conquête de l’Atlantide », 1961). Neuf ans après avoir abandonné le cinéma (après l’échec public des étonnants « Cent cavaliers » en 1964), Cottafavi, toujours à l’affût de sujets originaux et d’innovations, se penche à son tour sur le texte de Jean Anouilh, qu’il adapte lui-même en respectant le plus scrupuleusement possible l’esprit de son auteur (cf. le téléfilm de 1956). Le cinéaste y retrouve tous les thèmes qui lui sont chers : les dilemmes moraux et religieux, un portrait de femme mémorable (« Traviata 53 »), la modernisation provocatrice de sujets historiques, les rapports entre pouvoir et liberté, individu et histoire (« Le legioni di Cleopatra »), sainteté et violence (« Messalina, venere imperatrice »). Brechtien dans l’âme, Cottafavi opte pour un décor central unique animé (en couleurs) par une caméra en constant mouvement, la dynamisation spatiale faisant éclater le cadre du théâtre comme celui de la télévision classique, car l’action scénique est située dans un studio de télévision dont les parois sont visibles, et les comédiens y arpentent le plateau pour fumer une cigarette, discuter, s’adresser au public ou s’asseoir en attendant leur prochaine intervention. Pour la note médiévale, Cottafavi fait œuvre de pionnier en Italie en utilisant pour la première fois l’écran bleu (chroma-key) pour insérer des éléments de peintures du XVe siècle qui rappellent les fameuses compositions d’« Henry V » de Laurence Olivier (1944) et se dissolvent au début de chaque scène. Jeanne est jouée par Ileana Ghione, que Cottafavi a déjà dirigée en 1965 dans la télésérie « Vita di Dante » (où elle interprétait l’épouse du poète) ; elle est étonnante quand elle simule l’adolescente de Domremy ou qu’elle se dédouble face à l’Archange qui a ses propres traits. La dramatique attire 3,8 millions de téléspectateurs dans la Péninsule et obtient le Prix de la critique à Salsomaggiore. |
1953 | (tv) The Servant (GB) de Douglas Allen (BBC1 28.6.53), 1h20 min. – av. Pamela Alan (Jeanne d’Arc), Peter Copley (Pierre Cauchon), Marjorie Manning (Isabelle Romée d’Arc), Jonathan Meddings (Charles VII), Philip Ray (Jacques d’Arc), Arthur Young (Regnault de Chartres, archevêque de Reims), Emrys Leyshon (Jean II de Valois, duc d’Alençon), Paul Homer (Gilles de Rais), George Woodbridge (Gaucourt, cpt. d’Orléans), Lee Fox (Frère Richard), Anthony Viccars (Jean d’Aulon / héraut anglais), Edgar K. Bruce (le père Nicolas Loyseleur), David Enders (Frère Pierre Maurice), Natasha Sokolova (une traînée/le double de Jeanne), James Beattie (tailleur), John Glen (narration). A peine un mois après la RTF (cf. supra), la BBC présente à son tour la pièce de Marcelle Maurette, dans une traduction de Juliet Mansel. La production se justifie en expliquant que, grâce à G. B. Shaw, « la Jeanne des Français est aussi devenue une peu la nôtre », et que, depuis 1431, on a eu « amplement le temps de méditer sur l’égoïsme qui a poussé deux nations voisines à s’entretuer » (Radio Times, 26.6.53). |
1955 | (tv) Saint Joan / The Trial of Saint Joan (US) de Michael Ritchie série « Omnibus », Ford Foundation-Columbia Broadcasting System (CBS 1.2.55), 60 min. – av. Kim Hunter (Jeanne d’Arc), Torin Thatcher (Charles VII), Robert Flemyng, Richard Higgins, Frederick Rolf, Larry Blyden, Everett Sloane, Jay Barney. Violemment contestée par le clergé américain après avoir été montée au Garrick Theatre à New York (avant Londres !) en décembre 1923, la pièce de George Bernard Shaw s’introduit dans le living room des ménages yankees à travers une version télévisée un peu condensée (contenu cf. le téléfilm britannique de 1951). Jeanne est campée par Kim Hunter, une émule de l’Actors Studio célèbre pour avoir joué l’épouse malmenée de Marlon Brando dans « Un tramway nommé désir » d’Elia Kazan en 1951, rôle qui lui valut l’Oscar ; victime, comme la Pucelle d’Orléans, de la chasse aux sorcières (Cauchon s’appelle à présent McCarthy), elle est confinée pendant presque vingt ans au petit écran ; on la reverra sur le grand sous le masque simiesque du Dr. Zira dans « La Planète des singes » (1968) et ses suites. Quand au téléaste Ritchie, il signera en 1972 l’acerbe satire politique « The Candidate (Votez McKay) » avec Robert Redford. Affinités avec Shaw garanties. |
1957 | *(tv) The Lark [L’Alouette] (US) de George Schaefer G. Schaefer pour « The Hallmark Hall of Fame » (NBC 10.2.57), 1h19 min. – av. Julie Harris (Jeanne d’Arc), Boris Karloff (Pierre Cauchon, évêque de Beauvais), Eli Wallach (Charles VII), Basil Rathbone (Jean Le Maistre, l’inquisiteur), Denholm Elliott (Richard de Beauchamp, comte de Warwick), Bruce Gordon (Etienne de Vignolles dit La Hire), Jack Warden (Robert de Baudricourt), Michael Higgins (frère Martin Ladvenu), Gregory Morton (Georges de La Trémoille), Charles Penman (Regnault de Chartres, archevêque de Reims), Ward Costello (Jacques d’Arc), Mary Loane (Isabelle Romée d’Arc), Jan Farrand (Agnès Sorel), Elspeth March (la reine Yolande d’Aragon), Barbara Stanton (Marie d’Anjou, sa fille), Harold Winston (le promoteur), David Winters (Jacques d’Arc), Ralph Roberts (le bourreau), Harry Davis (soldat anglais). Aux États-Unis, L’Alouette, pièce en un acte de Jean Anouilh (cf. téléfilm de 1956), est montée pour la première fois au Longacre Theater à New York, le 17 novembre 1955, dans une adaptation de l’auteure dramatique Lillian Hellman et une mise en scène par Joseph Anthony. Alors qu’à Londres, Christopher Fry s’est tenu à une traduction littérale – et très littéraire – de la pièce, Lillian Hellman en sabre 43 pages, resserre l’intrigue, simplifie le langage, gomme les mises en abyme et transforme le tout en un drame poignant qui fait sensation à Broadway ; on comptabilise 229 performances à guichets fermés. Très engagée politiquement, antifasciste véhémente, victime du maccarthysme, interdite d’Hollywood (comme son époux Dashiell Hammett), Hellman revit à travers Jeanne sa propre persécution par les « chasseurs de sorcières » et les médias de la droite. C’est son plus grand succès au théâtre, mais ce triomphe tient aussi à l’interprétation bouleversante de sensibilité exacerbée de la jeune Julie Harris (l’inoubliable amour de James Dean dans « East of Eden / À l’est d’Eden » d’Elia Kazan), que la critique new-yorkaise salue à cette occasion comme la digne héritière de Sarah Bernhardt, de Helen Hayes ou d’Ethel Barrymore. Échappant passagèrement aux films d’épouvante qui ont fais sa célébrité, Boris Karloff (le monstre de « Frankenstein ») lui donne la réplique : il est nominé en 1956 au Tony Award pour sa création d’un Cauchon désespéré à l’idée de « tuer une enfant », l’apogée, dira-t-il, de toute sa carrière. Leurs échanges pendant le procès à Rouen sont un des grands moments du théâtre américain du XXe siècle. Fasciné, William Wyler envisage un temps de porter la pièce à l’écran. Pour sa transposition télévisuelle (due à James Costigan), filmée en couleurs, George Schaefer reprend le décor, réduit à quelques éléments symboliques, et une bonne partie de la distribution théâtrale : Julie Harris, Boris Karloff, Bruce Gordon, Michael Higgins et Ralph Roberts ; en revanche, Christopher Plummer (Warwick) et Joseph Wiseman (l’inquisiteur) ne sont plus libres. Deux autres « gueules » patibulaires d’Hollywood, Basil Rathbone et Eli Wallach, compensent leur absence, ce dernier particulièrement frappant en dauphin infantile et roué. La musique – huit chœurs inspirés par la liturgie médiévale – sur scène comme à la télévision est de Leonard Bernstein (« West Side Story »). Excusez du peu. |