Ia - NAPOLÉON ET L'EUROPE

10. NAPOLÉON ET L’AUTRICHE DES HABSBOURG

10.1. Un empire vétuste sous la menace

1907La Partie d’échecs de Napoléon (FR) de Victorin-Hippolyte Jasset
Compagnie des Cinématographes & Films « Le Lion » (Paris), 60 m./865 ft. – Fin novembre 1805 dans la campagne morave, à la veille d’Austerlitz. Max, un lieutenant de l’armée autrichienne, rend visite à sa bien-aimée qui vit chez son oncle, un curé. En voulant rejoindre son régiment, il est capturé par les Français et condamné à mort comme espion, mais il parvient à s’évader de nuit et se terre, blessé, chez le curé. Entre-temps, Napoléon a pris logis dans le village et, pour se changer les idées, exprime le désir de jouer une partie d’échecs. Or, seul le curé connaît ce jeu. Napoléon se rend donc dans la cure, joue, perd la partie et dit à l’ecclésiastique qu’il peut formuler un souhait. À cet instant, des grenadiers découvrent Max en sang dans sa cachette. Le curé demande la vie du lieutenant comme prix de sa victoire. Napoléon la lui accorde. – US : Napoleon’s Game of Chess.
1909Le conscrit de 1809 (FR) de Gérard Bourgeois
Henri Joseph Joly/Société des Phonographes & Cinématographes Lux. – av. Joe Hamman, Le Gosset, Dorny, Person-Dumaine, Jeanne-Maria Laurent, Claude Ritter. – Au printemps 1809, à la veille de son mariage, un jeune paysan de 16 ans est mobilisé dans la Grande Armée. Son comportement héroïque au combat à Wagram lui vaut une blessure, une médaille, un grade d’officier et un congé pour revoir sa fiancée, congé qu’il obtient enfin en rencontrant Napoléon dans les jardins de St-Cloud. De retour au village, sans se faire reconnaître, il assiste au mariage de sa bien-aimée avec un rival et décide, effondré, de repartir à la guerre et de mourir pour l’Empereur. Saynète filmée dans les studios Lux de Gentilly (Île-de-France).
1909[La Bataille d’Austerlitz (FR) d’Emile Cohl ; Établissements Gaumont S.A. (Paris), 84 m. – Film d’animation illustrant les manœuvres des armées à Austerlitz (1805). – DE : Der Schlachtplan von Austerlitz.]
1910[Le Pupille de Napoléon (FR) Établissements Gaumont S.A. (Paris). – À la veille de Wagram, en juillet 1809. Deux sentinelles, le grenadier vétéran Tartas et Fleuriet, sont surpris par Napoléon qui fait sa ronde. Tandis que Tartas soigne une blessure de Fleuriet, l’Empereur prend son fusil et monte la garde à sa place. Dans le bourg d’Aspern, le comte von Strelitz, colonel du corps francs de chasseurs tyroliens, supplie en vain son épouse de s’éloigner des combats avec leur enfant. Pendant la nuit, il fait attaquer les sentinelles françaises, Fleuriet est égorgé, Tartas capturé. Le grenadier refusant d’indiquer les positions de la Grande Armée, von Strelitz s’apprête à le tuer quand la comtesse horrifiée intercède en sa faveur en le protégeant de leur enfant et il est relâché. Au soir de la bataille de Wagram, Tartas arrache héroïquement un étendard de la Vieille Garde aux Tyroliens et assiste à la mort de von Strelitz et de son épouse, qui lui confie son enfant avant de rendre l’âme. Sanglant, balafré, le grenadier enveloppe l’enfant dans le drapeau sauvé et le présente ainsi à l’Empereur, qui décide de l’adopter après avoir décoré le brave ému aux larmes. – Film annoncé par Gaumont, mais peut-être jamais tourné.]
1911Il piccolo tamburino di Austerlitz (Le Petit Tambour d’Austerlitz) (IT)
Società Italiana Cines, Roma, 237 m. – À la bataille d’Austerlitz, le 2 décembre 1805, Jacquot, un tambour de 12 ans dont la mère est cantinière à la Grande Armée, pousse les grognards à charger une batterie d’artillerie de l’ennemi ; la moitié du bataillon y perd la vie. Les survivants de cet acte héroïque reçoivent la Légion d’honneur, mais Napoléon estime que Jacquot est encore trop jeune pour pareille distinction. Quatre ans plus tard, au soir de la bataille de Wagram, Jacquot, blessé à la tête, se présente à l’Empereur et reçoit enfin la décoration tant convoitée. – DE : Der Tambour von Austerlitz, GB : The Austerlitz Drummer Boy, ES : El tamborino de Austerlitz.
1911Checkmated / By Order of Napoleon (Par ordre de Napoléon) (GB) de Theo Frenkel [= Theo Bouwmeester]
Natural Colour Kinematograph Co. (London) – Charles Urban Trading Co., 152 m./18 min. – av. THEO BOUWMEESTER (Napoléon), Julie Meijer.
Synopsis : Fin novembre 1805, à la veille d’Austerlitz. Aux abords d’un village morave, un lieutenant de hussards autrichiens, Max, fait sauter un pont pour freiner l’avance de l’ennemi, puis il rend visite au curé dont il aime la nièce. Sur son chemin de retour, il est capturé par des Français et condamné à mort comme espion. La nuit, il parvient à s’échapper et, blessé, se cache dans la cure. Également installé dans le village, fatigué, Napoléon souhaite se changer les idées en faisant une partie d’échecs. Or, le seul villageois capable de jouer est le curé. L’Empereur investit la cure avec son état-major, Max se terre, mais laisse des marques de sang. Napoléon promet au curé de lui accorder n’importe quelle faveur si celui-ci parvient à le battre. Les soldats débusquent Max et le curé, qui remporte justement la partie, demande la vie du jeune homme. « Dette de jeu, dette d’honneur », dit Napoléon et ordonne de libérer Max.
Remake de La Partie d’échecs de Napoléon de 1907 (cf. supra). Un épisode tourné en Kinemacolor, probablement le tout premier film de fiction en couleurs, produit, réalisé et interprété par un des pionniers du cinéma néerlandais, entouré du clan des Bouwmeester, une dynastie de comédiens. Tournage dans les studios de Charles Urban à Hove, près de Brighton. – DE : Partie Schach mit Napoleon, US : Napoleon’s Game of Chess.
1911/12La Légende de l’Aigle (FR) de Victorin-Hippolyte Jasset et Emile Chautard
Parties : 1. Ordre de l’Empereur (280 m.) – 2. A la veille d’Austerlitz (365 m.) – 3. Tu ne tueras pas ! (180 m.) – 4. Il était trois grenadiers (230 m.) – 5. La Boucle de cheveux (224 m.) – 6. Le Déserteur (240 m.) – 7. A bon chat, bon rat (186 m.).
Marcel Vandal, Charles Jourjon/Société Française des Films Eclair-Auguste Agnel/Association des compositeurs et auteurs dramatiques (A.C.A.D.). – av. EDMOND DUQUESNE (Napoléon), André Liabel, Jacques Faure, Josette Andriot, Gilbert Dalieu, Henri Gouget, Renée Sylvaire, Paul Guidé.
1. « Ordre de l’Empereur » illustre ce qui attendait tout soldat de la Grande Armée s’il importunait une femme en territoire ennemi. Automne 1805. Les Français traversent la campagne autrichienne, le soleil brûle, les hommes sont fatigués. Le grenadier Gridart abuse du vin dans une auberge, puis, titubant, tente de violer une paysanne dans un champ, mais son mari l’assomme d’un coup de bêche. Une cantinière retrouve Gridart inconscient, Napoléon surgit, le grenadier affirme avoit été attaqué sans raison par un paysan. L’Empereur ordonne de capturer l’agresseur et de le passer par les armes. Resté seul à l’infirmerie, Gridart est saisi de remords, un innocent va payer pour sa désobéissance aux ordres disciplinaires. Il confesse sa faute à Napoléon qui, inflexible, fait appliquer la loi. À l’orée de la forêt, le paysan autrichien et sa femme reconnaissants couvrent de fleurs le cadavre de Gridart, soldat héroïque dans sa loyauté. (Nota bene : viols et pillages étaient en principe punis de mort, mais plus le commandement de l’armée était éloigné, moins ce genre de dérapage était contrôlable.)
2. « À la veille d’Austerlitz ». Après une longue marche, l’Empereur se repose dans un champ. Accompagnée de sa mère, une petite fille de fermiers autrichiens croise son chemin et lui offre gentiment un bol de lait. Le jour suivant, des conspirateurs du cru attentent à la vie de Napoléon. Celui-ci échappe aux balles ennemies, car le chef des patriotes découvre horrifié sa propre petite fille grimpant sur les genoux de l’Empereur. Il manque sa cible, des grenadiers de la Garde l’interceptent, le peloton d’exécution l’attend. Réalisant que son père est en danger, la fillette s’enhardit jusqu’à la tente impériale et Napoléon, ému, lui accorde la grâce de son géniteur. (La teneur des parties 3 à 6 est inconnue.)
7. Deux grenadiers sont envoyés en billet de logement chez un riche paysan morave. Impressionnée par leur belle allure, la servante met leur couvert à la table du maître, mais celui-ci ordonne d’envoyer les soldats dans la grange avec de la soupe et une cruche d’eau. Ils scient un petit pont qui traverse un ruisselet et le paysan tombe à l’eau. Ils lui portent secours, reconnaissant, le paysan les gorge de victuailles et de bon vin. Quand il découvre le piège, il attire à son tour les deux grenadiers et les laisse patauger et se débattre dans l’eau.
Cette série de petits films que seule relie la thématique napoléonienne et le lieu de l’action – près d’Austerlitz, en Moravie – est rédigée (du moins partiellement) par Georges d’Esparbès, un feuilletoniste qui s’est fait connaître par plusieurs nouvelles d’inspiration militaire exaltant l’héroïsme du soldat français. Proclamé « chantre du Grognard », d’Esparbès publie en 1893 La Légende de l’Aigle, un poème épique en vingt contes qui sert de canevas pour cette série Eclair – d’une naïveté hagiographique à toute épreuve – tournée dans les studios d’Épinay-sur-Seine, sur le terrain du château Lacépède, et sortie entre septembre 1911 et mai 1912. Edmond Duquesne, qui interpréta déjà Napoléon sur scène lors de la création de Madame Sans-Gêne de Sardou en 1893, vient, en 1911, de reprendre le rôle du « Petit Tondu » dans une transposition de cette pièce à l’écran produite par le Film d’Art (cf. chap. 7.1). Il a également campé l’Empereur dans Après la chute de l’Aigle (1910), autre récit tiré de La Légende de l’Aigle d’Esparbès et mis en scène par Jasset (cf. chap. 15.3). – DE : 1. Tagesbefehl Napoleons – 2. Vor Austerlitz, US : 1. The Legend of the Golden Eagle : 1. By Napoleon’s Order – 2. On the Eve of Austerlitz (A Story of Napoleon).
1912/13?[Napoléon dans l'Empire austro-hongrois (?)] (HU/RO)
Projectograph Mozgófénykép ès Gépgyár Rt, Budapest. (Fragment de 4 min. d'un film non-identifié): Napoléon pénètre dans un village, s'installe devant un moulin où on lui amène un prisonnier, un aristocrate ennemi (?) qu'il ordonne de faire fusiller. L'épouse du prisonnier le supplie à genoux de l'épargner, Napoléon tente vainement de la séduire, d'autres villageois et le vieux père (?) du malheureux interviennent en gesticulant. Napoléon hésite.
1913® Za chest’ russkogo znameni. Voennyi episod iz voiny 1805 goda (Pour l’honneur du drapeau russe. Episode de la guerre de 1805) (RU) de Iakov Protazanov. – av. Mikhail Tamarov, Elizaveta Thiemann. – Alors que les armées russes de Koutouzov sont en pleine débandade à Austerlitz, un soldat sauve les couleurs de son régiment (cf. p. 516).
1914Scuola di eroi (Napoléon à Austerlitz) (IT) d’Enrico Guazzoni
Società Italiana Cines, Roma, 2230 m. – av. Amleto Novelli (cpt. Charles Larive), Pina Menichelli (Rina Larive, sa sœur), Achille Majeroni (maréchal Larive, leur père), Gianna Terribili Gonzales (comtesse de Longueville), Raffaello Vinci (Elleux), CARLO CATTANEO (Napoléon), Ida Carloni Talli (Mère Larose), Totò Majorana.
Synopsis : Pendant la guerre de Vendée, la femme du capitaine républicain Larive est tuée et ses deux enfants, Charles et Rina, sont trouvés et adoptés par une paysanne, la Mère Larose. Les croyant morts, Larive grade dans l’armée et obtient en 1804 son bâton de maréchal d’Empire. Il ignore que son fils Charles, 16 ans, est tambour dans la Grande Armée qui marche sur Vienne. À la bataille d’Austerlitz, Charles entraîne ses camarades avec fougue à l’assaut du dispositif central des Autrichiens ; il est blessé au combat et Napoléon, qui a remarqué sa vaillance depuis une colline, lui rend visite à l’infirmerie et le décore. Quelque temps plus tard, le jeune homme est promu capitaine de cavalerie. Coqueluche de la nouvelle aristocratie, il tombe amoureux de la comtesse de Longueville, une conspiratrice royaliste rencontrée au bal du maréchal Marmont. À la veille d’une nouvelle campagne, la comtesse tente de faire déserter Charles et l’attire dans un piège pour lui arracher un message secret destiné à l’Empereur. Elle le fait enfermer par ses complices dans une tour de son château. Sa sœur Rina, à présent cantinière, découvre l’endroit où son frère croupit et, quoique sérieusement blessée, parvient à transmettre le message à l’état-major. Charles s’évade, mais il est traduit devant une cour martiale pour désertion. Son propre père, le maréchal Larive, préside le tribunal qui le condamne à mort. Cédant aux supplications de Rina, Napoléon intervient, reconnaît l’héroïque tambour d’Austerlitz et réunit le maréchal et ses enfants après avoir gracié Charles : si le jeune homme doit mourir, qu’il meure pour lui sur le champ de bataille !
Cette « école des héros » est un gros mélo militariste fidèle à la légende dorée de Napoléon. Il est créé par le pionnier Guazzoni (célèbre pour son impressionnant Quo Vadis en 1913), peintre et décorateur de talent, avec un réel souci d’authenticité historique. La saga est enregistrée dans les ateliers de Via Appia Nuova à Rome, mais aussi en extérieurs dans le Latium, où la séquence d’Austerlitz frappe les spectateurs par son dynamisme et son ampleur. Un succès international de la Cines. – GB : How Heroes Are Made, ES : Escuela de héroes, US : For Napoleon and France.
1920Névtelen vár (= Le Château sans Nom) (HU) de Marton Garás
Corvinfilm, 2200 m. – av. Emil Fennyvessy (comte Vavel), Käthe Molnár (Katalyn/Catherine alias Mme Thémire), Oszkár Dénes, Jenö Törzs.
Synopsis : Paris en 1804. Napoléon est sur point de se faire sacrer empereur. La police de Fouché découvre une conspiration royaliste dont fait partie le comte Vavel, père d’un officier jacobin. Avant d’être fusillé, le père supplie son fils de mettre en sûreté Marie, 12 ans, qui serait la dernière dauphine de France. Ayant juré de venger l’exécution de son géniteur, Vavel fils cache Marie, mais Fouché introduit une fillette du même âge, Amélie, dans les cercles monarchistes pour y semer la confusion et charge sa meilleure espionne, Mme Thémire, mère d’Amélie, de leur surveillance. Vavel et Marie parviennent néanmoins à quitter la France. En 1808, Thémire a enfin localisé la cachette des fugitifs dans le Château sans Nom, sur les rives du lac de Neusiedl (ou Fertö), à la frontière hongroise. Elle s’établit dans un domaine voisin sous le nom de baronne Katalyn et avec le marquis de Pervians, homme de main de Fouché, planifie l’enlèvement de Marie. Cette dernière s’est éprise de Vavel qui, lui, est sous le charme de Katalyn alias Thémire, avec laquelle il s’est fiancé. Au printemps 1809, Napoléon prépare la guerre contre l’Autriche, où la présence d’une héritière au trône de France le gêne dans ses plans. Vavel a organisé une armée royaliste pour combattre l’envahisseur et, avant de partir au front, il confie sa protégée à sa fiancée. Thémire, dont la fille Amélie a été emportée par une épidémie qui décime la Grande Armée, se dispute avec Pervians et refuse de lui livrer Marie, qui lui est devenue chère. Mais en traversant les marais pour se réfugier dans le Château sans Nom, Marie est à son tour victime des fièvres. Elle s’éteint sous les yeux de Vavel et Thémire.
Le film (tourné sur place au lac de Neusiedl) est tiré d’un roman rocambolesque paru en 1877 sous la plume de Mór Jókai (aussi Maurus Jokai, Moriz Jokai), le Walter Scott hongrois, lecture romantique qui a bercé toute la jeunesse du pays. Cela dit, la trame en est assez délirante sur le plan historique, puisque la dauphine de France (1778-1851), duchesse d’Angoulême et comtesse de Marnes, mourut près de Vienne à soixante-treize ans, après une vie intime et politique passablement agitée (trois exils successifs, deux sous la Révolution et Napoléon, un sous Louis-Philippe). Elle quitta la prison et la France en 1795, le jour de ses dix-sept ans, pour s’établir à Vienne, à la cour de son cousin germain, l’empereur François II. L’autre fille de Louis XVI, Marie-Sophie-Béatrice de France (1786-1787), décéda de la tuberculose à Versailles bien avant la Révolution. Le roman comme le film reprennent des éléments de la légende de la mystérieuse « comtesse des Ténèbres » (qui vécut dans le duché de Saxe-Hildburghausen) avec laquelle « Madame Royale » a parfois – et abusivement – été identifiée. – Remake télévisé en 1980 (cf. infra).
1922Napoleon in Schönbrunn (AT) de Hans Otto [Löwenstein]
Techne-Victoria-Film Wien-Allianz-Film GmbH (Wien), 1700 m./5 actes. – av. RAINER SIMONS (Napoléon), Paul Flemmig, Olaf Fjord, Franz Kammauf, Annemarie Steinsieck, Olga Lewinsky, Grete Horn-Otlinger, Tilde Ondra.
En mai 1809, le jour de son anniversaire, Marietta, la fille d’un propriétaire terrien près de Vienne, apprend que Napoléon, son idole, s’approche avec ses troupes. Elle revêtit l’uniforme de son frère et parvient ainsi à s’introduire auprès de l’Empereur qu’elle stupéfie et amuse par son audace ; Napoléon la garde toute la nuit dans sa chambre d’auberge et lui donne rendez-vous plus tard à Schönbrunn. L’annonce de l’arrivée imminente de Napoléon à Schönbrunn met la demeure du jardinier impérial Fleury en émoi. Caroline de Cherval, sa nièce, fille de sa sœur Manon (de nationalité française), est impatiente de voir le grand Corse, ce qui inquiète son fiancé jaloux, l’étudiant Friedrich Staps. Lingère dans sa jeunesse, Manon eut une liaison avec le lieutenant Bonaparte et Caroline est sa fille naturelle. Lors d’une audience, cette dernière assiste admirative au pardon que l’Empereur accorde à un général autrichien qui a abusé de ses fonctions (pardon accordé sur supplication de sa femme). Caroline révèle à Napoléon qu’il est son père et il la serre dans ses bras. Plus tard, sur la terrasse du château, Staps se jette sur Napoléon pour le poignarder, mais celui-ci pare le coup, Staps est arrêté et condamné à mort. Tandis que Napoléon écrase les armées autrichiennes à Wagram, Marietta s’introduit dans la cellule de Staps et, prenant sa place, l’aide à s’évader, déguisé en femme. Schönbrunn fête la victoire de la Grande Armée, l’Empereur décerne décorations et honneurs. Caroline parvient à obtenir la grâce de son fiancé, Napoléon décide de faire discrètement fusiller un incendiaire à sa place et ordonne de lui amener Staps. Mais l’étudiant reste muet, puis, à l’étonnement général, embrasse l’Empereur : c’est Marietta en habit d’homme ! Le lendemain, l’authentique Staps est appréhendé lors de sa fuite. Napoléon lui révèle qu’il est le géniteur de Caroline et bénit le jeune couple.
Le scénario de cette bande quasi inconnue – et perdue – mélange joyeusement la chronologie (en réalité, Napoléon s’installe le 11 mai à Schönbrunn, se bat le 6 juillet à Wagram et échappe le 13 octobre au poignard de Staps), imagine un subterfuge pour épargner l’étudiant fanatique, qui agit ici par simple jalousie et non par patriotisme, tout en empruntant des éléments à Der junge Medardus d’Arthur Schnitzler (cf. infra, film de 1923) et en déplaçant l’intercession médiatisée de la princesse de Hatzfeld pour obtenir le pardon de son mari de Berlin à Vienne (cf. p. 364, film de 1909). Mais ce qui surprend en priorité, c’est l’éclairage positif, francophile, même franchement admiratif, que cette production autrichienne jette sur le vainqueur des Habsbourg – à peine quatre ans après la fin de la Première Guerre mondiale et le démembrement de l’Empire austro-hongrois ! Notons que le réalisateur Hans Otto a déjà deux autres sujets napoléoniens à son actif, Der Herzog von Reichstadt (1920) et Die Schauspieler des Kaisers (Les Comédiens de l’Empereur) (1921). Quant à Rainer Simons qui interprète également Napoléon dans Der Herzog von Reichstadt précité et Les Courriers de l’Empereur (cf. infra, 1924), c’est un comédien d’origine rhénane, chanteur, metteur en scène et directeur de théâtre (Volksoper et Raimund-Theater à Vienne), professeur à l’Académie de musique à Vienne. – DE : Manon de Cherval, die Geliebte des Revolutionärs.
1922Δ [épisode :] Cikáni [= Les Tziganes] (CZ) de Karel Anton ; AB Vinohrady. – av. KAREL FALTYS (Napoléon). – Dans un flash-back de ce mélodrame feuilletonesque situé en Bohème et à Venise au XIX e siècle, le vieux Bárta raconte comment, jeune conscrit, il a observé Napoléon près de Wagram lors de la campagne d’Autriche en 1809. L’épisode a été rajouté par Karel Anton, car il ne figure pas dans le roman éponyme de Karel Hynek Mácha (1835), premier poète tchèque moderne, dont est tiré ce film.
Mauvaise nouvelle: à Essling-Aspern, Napoléon (Michael Xantho) se heurte à une très forte résistance des armées de l’archiduc Charles.
1923*Der junge Medardus (tv : Le Jeune Médard) (AT) de Mihály Kertesz [= Michael Curtiz]
Alexander Kolowrat/Sascha-Filmindustrie AG, 3400 m./7 actes/124 min. [2010 m./79 min.] – av. Michael Varkonyi [= Victor Varconi] (Medardus Klähr), Anny Hornik (Agathe Klähr, sa sœur), Maria Hegyesi (Franziska Klähr, leur mère), Egon von Jordan (Etzel, commis de librairie), Franz Glawatsch (le maître tourneur Berger, son père), Julius Szöreghy (Jakob Eschenbacher, seller et frère de Mme Klähr), Josef König (Wachshuber, épicier), Agnes d’Esther [= Agnes von Esterhazy] (duchesse Hélène de Valois), Ferdinand Onno (marquis Albert de Valois), Ludwig Rethey (duc de Valois), Karel Lamac (François de Valois), Mary Stone (Anna Berger, fiancée de Medardus), MICHAEL XANTHO (Napoléon).
La réalisation de ce drame napoléonien et de son détournement français exploité cinq ans plus tard sous le titre de Gloire (cf. infra) représentent un cas très particulier dans le cadre du septième art. Les deux films sont presque inconnus dans l’Hexagone. Ils marquent pourtant la rencontre apparemment incongrue entre le Viennois Arthur Schnitzler (l’auteur sensible et mélancolique de La Ronde, de Mademoiselle Else), Michael Curtiz (réalisateur oscarisé des flamboyantes Aventures de Robin des Bois avec Errol Flynn ou du mythique Casablanca) et du comte Alexandre Kolowrat, pionnier et premier producteur d’Autriche. Romancier et auteur dramatique prolifique, Arthur Schnitzler (1862-1931) est aussi médecin, un ami et disciple de Freud. Ses intrigues et la nature souvent tourmentée de ses personnages révèlent un intérêt profond pour la psychologie, la sexualité, ses dérives et aberrations, ainsi qu’une fascination pour la ligne étroite qui sépare l’illusion de la réalité. Ses pièces ont tenté quelques cinéastes à l’étranger, mais en Autriche, pays catholique, Schnitzler reste un auteur juif entaché de scandale, tout juste toléré sur scène, mais pas dans le cadre de la cinématographie nationale. Or l’unique sujet « respectable » qui pourrait prêter matière à un film de fabrication locale semble être Der junge Medardus (Le Jeune Médard), un drame historique de cinq actes auquel les Viennois ont réservé jadis un accueil triomphal. La pièce a vu le jour le 24 novembre 1910 au prestigieux Burgtheater, et elle restera au répertoire de la maison pendant vingt-deux ans ! À sa première, certains critiques affirmèrent (et ce n’était pas un compliment à leurs yeux) que sa trame ferait un bon scénario. L’œuvre a été écrite à l’occasion du centenaire de la bataille d’Aspern-Essling, un affrontement qui mit aux prises les troupes françaises et autrichiennes dans la banlieue de Vienne, du 20 au 22 mai 1809. Considérée, selon le point de vue, comme une victoire des Habsbourg sur la Grande Armée ou un match nul, la boucherie se solda par 45 000 morts des deux côtés, la première grande hécatombe des temps modernes. (La décision se joua quelques semaines plus tard à Wagram.) En modifiant les noms, Schnitzler a inséré dans sa trame la tentative d’assassinat de Napoléon par l’étudiant allemand Friedrich Staps à Schönbrunn (13 octobre 1809). Pourtant, l’immense succès public de sa pièce repose sur un malentendu : Der junge Medardus brosse en réalité un portrait peu flatteur de la petite-bourgeoisie de Vienne, de son incapacité pitoyable à défendre la ville, de la lâcheté collective, de la frivolité nonchalante des masses, des opportunistes, des collaborateurs et des dénonciateurs (l’épicier Wachshuber). Lâché au milieu d’eux, l’étudiant en titre, Medardus Klähr, fils d’un libraire viennois tombé près d’Austerlitz, est une sorte de Hamlet du Danube, patriote exalté parti pour tuer Napoléon et qui devient involontairement son sauveur. Rien de bien glorieux.
Le destin de la famille Klähr est tragiquement lié à celui des Valois, des parents de Louis XVI réfugiés en Autriche. Schnitzler ridiculise les chimères légitimistes du duc de Valois, vieillard aveugle et risée des Viennois, ainsi que les manœuvres futiles de son clan pour renverser l’« usurpateur corse ». Agathe, la sœur de Medardus, se suicide avec son amoureux François de Valois, le vieux duc s’étant opposé à l’union entre « la fille d’un épicier et le descendant d’une dynastie royale ». Rejetant la culpabilité de leur mort sur Hélène de Valois (l’altière égérie des légitimistes et sœur du défunt), Medardus cherche à la compromettre publiquement pour venger Agathe ; il la séduit puis s’en éprend comme un adolescent. Hélène, qui n’est pas insensible aux élans passionnels de l’étudiant, doit cependant épouser son cousin Albert, chef des conspirateurs et seul héritier putatif du trône de France après la disparition de son frère. Lorsque Napoléon s’empare de la capitale, Hélène manipule Medardus pour qu’il tue l’Empereur, vengeant ainsi son père et par la même occasion le duc d’Enghien (son oncle à elle). Mais, fin stratège, Napoléon invite les Valois à un concert à Schönbrunn et se plaît à flirter avec la belle tandis qu’à l’extérieur, ses troupes assaillent les Autrichiens concentrés dans la plaine d’Aspern. Medardus s’imagine qu’Hélène est devenue la maîtresse du conquérant et, fou de jalousie, la poignarde alors que, justement, elle s’apprêtait à tuer le Corse sous couvert d’une invitation galante. En prison, le jeune homme refuse la grâce que lui accorde l’Empereur (une lettre retrouvée sur la morte l’innocente) et menace même de l’assassiner à la prochaine occasion. Napoléon hausse les épaules et le livre au peloton d’exécution. Tous les personnages du drame sont prisonniers d’une passion sans amour, née de sentiments complexes : mélangée à la haine et à la souffrance chez Medardus, garçon fantasque, idéaliste et immature dont les élans contradictoires du cœur torpillent les moindres initiatives : il ne lui reste à la fin plus qu’à diriger son héroïsme contre lui-même et périr. Hélène, sensuelle, orgueilleuse, inapprochable, est déchirée entre ses obligations dynastico-familiales, son goût du pouvoir et l’attirance physique pour son jeune amant. La fatalité, doublée d’un sentiment absurde de fierté clanique, précipitent les deux couples d’amoureux dans la mort.
Dès 1919/20, plusieurs sociétés de Vienne se concurrencent pour porter l’œuvre à l’écran, notamment la Österreichische Kinofilm Industrie, la Projectograph-Film Oskar Glück et la Sascha-Filmindustrie du comte Alexander (« Sascha ») Kolowrat, qui finit par l’emporter en avril 1922. Der junge Medardus sera la seule adaptation autrichienne de Schnitzler avant les années soixante, et l’unique collaboration directe, concrète de l’écrivain avec le cinéma. Un événement pour lequel Kolowrat et Curtiz mettent le paquet, le tournage du film s’étirant sur presque une année, de juillet 1922 à juin 1923, et entraînant des coûts pharaoniques : trois milliards de Kronen, selon la presse de l’époque. Les studios de Sievering sont mobilisés entièrement, mais c’est en extérieurs dans la « Sascha-Filmstadt » au Laaerberg qu’Artur Berger et Julius von Borsody érigent leurs décors les plus impressionnants, les rues de l’ancienne Vienne, surplombées de l’église Saint-Charles Borromée ; les remparts de la Hofburg avec la cathédrale Saint-Etienne à l’horizon sont recrés en maquette. Le palais de Schönbrunn, Laxenburg, Salzbourg, la région de Wagram, Aspern et Lobau servent pour ressusciter les chapitres mouvementés de la saga napoléonienne, peuplés de milliers de figurants (en majorité des chômeurs). Les chefs opérateurs habituels de Curtiz – Gustav Ucicky et Eduard von Borsody, deux futurs réalisateurs – soignent l’aspect romantico-pittoresque des images, qui alternent avec un réalisme anti-naturaliste et des effets de perspective (premier plan dans l’ombre) typiques du style de Curtiz. Devant la caméra, le cinéaste utilise des compatriotes exilés comme Mihály Várkonyi et Agnes d’Ester (alias la comtesse Agnes von Esterhazy, qui fait ici ses débuts) pour interpréter Medardus et sa flamme. Créateur du rôle de Liliom dans la pièce homonyme de Ferenc Molnár à Budapest, Várkonyi deviendra un comédien apprécié à Hollywood sous le nom de Victor Varconi. Autre futur cinéaste, Karl Lamac campe le malheureux François de Valois, et pour amadouer Schnitzler, Kolowrat confie un petit rôle à son jeune fils Heinrich (un ami de Medardus, plans coupés au montage).
Une fois le contrat avec la Sascha signé, l’écrivain s’est appliqué à revoir son scénario auquel il peine depuis plus de deux ans. Comme il n’a aucune expérience en la matière, Kolowrat lui a assigné un professionnel d’envergure, László (Ladislaus) Vajda père. Leur premier souci a été de concentrer une pièce de cinq heures en un long métrage d’une durée exploitable, puis d’élargir son cadre d’action : les 13 lieux de la pièce ont fait place à 70 décors différents. Quoique assidu des salles sombres, Schnitzler, 61 ans, ne voit pas dans le cinéma un travail créatif équivalant à celui des autres arts, mais il reconnaît que le langage filmique est plus proche du roman ou de la nouvelle que du théâtre et qu’il exige une approche spécifique. En livrant le script achevé à la production, il craignait, confie-t-il à son journal intime, trouver à l’écran des « scènes d’un kitsch insupportable » (Tagebuch, 12.7.22). Mais lorsqu’il voit ce que Curtiz en a fait, il s’avoue « agréablement surpris » (ibid. 16.10.22). Les décors qu’il a visités pendant le tournage à Laaerberg l’ont stupéfié, et dans la presse, il se dit très admiratif de « l’énergie de Curtiz comme de la maîtrise qu’il déploie dans la direction des foules ».
Dans la pièce, les batailles n’étaient bien sûr que mentionnées, et le personnage de Napoléon n’apparaissait jamais sur scène. À l’écran, tout change: les opérateurs viennois ont pu enfin fabriquer des images de guerre d’un réalisme jadis impensable dans les actualités censurées de la Sascha-Film pendant la Première Guerre mondiale. Schnitzler comprend le besoin d’exorciser ces années de cauchemar par des séquences guerrières trop longtemps refoulées, et ce pour la première fois dans le cinéma national. Il accepte également que, malgré ses propres réticences, ni Curtiz ni Kolowrat ni Vajda ne puissent résister à la tentation de faire apparaître Napoléon à l’écran (interprété par le comédien de théâtre Mihail Xantho, mort à Vienne en 1940), ainsi que divers épisodes rattachés à la sanglante campagne de 1809 (le bombardement de la capitale, la mort du maréchal Lannes, etc.). Des peintres comme Vernet, Meissonnier, Gros ou Detaille ont servi de parrains pour la geste militaire. Il est certain que la présence de ces séquences épiques magnifiquement composées sera déterminante pour le succès commercial du film, et l’écrivain finit par donner raison aux cinéastes. Il désapprouve toutefois les plans en flash-back de l’exécution du duc d’Enghien et du père de Medardus (Curtiz les maintient) et propose d’éliminer l’ajout final du mariage de Napoléon avec Marie-Louise (ce qui sera fait, rien n’ayant préparé le public à l’événement) ; Curtiz remplace la scène par une brève procession de grâce dans les rues de Vienne et la signature de paix entre Napoléon et l’empereur François I er. Schnitzler, lui, aurait souhaité clore par le commentaire laconique « Medardus Klähr est mort et l’Histoire du monde continue ... » qui correspond mieux à son approche personnelle du sujet. Il est évident que la présence de plus en plus dominante de Napoléon dans la deuxième moitié du film s’opère aux frais des relations intimes, des motivations et espoirs politiques des autres protagonistes, les obscurs de la petite histoire. La galerie de toiles animées (la reddition de Vienne en flammes, le duel au bord de l’eau à la lueur des torches) fonctionne au détriment de développements psychologiques plus subtils. Ce qui au théâtre se présentait comme un drame satirique sur la curiosité infantile, la soif de spectacle du Viennois (qui acclame toutes les parades militaires, de quelque origine qu’elles soient) devient, sous la férule de Curtiz, un grand spectacle romantique justement destiné à ce même public. D’une certaine manière, Napoléon, devenu à l’écran le troisième pôle du triangle passionnel aux côtés de Medardus et d’Hélène, semble l’unique personnage solide, équilibré du film. Ses apparitions brèves et très emblématiques (silhouettes, jeux d’ombres) le montrent certes implacable, sérieux, mais ni insensible ni en tyran sanguinaire. Par ailleurs, le cinéaste, dont on connaît le goût pour les sujets morbides, le cynisme, les sentiments ambigus et cette notion de fatalité pesant sur ses héros, fait, ça et là, transparaître un pessimisme existentiel qui jure avec la gloriole des étendards. En développant, fût-ce en mode romanesque, la tragédie si évitable et inutile de Medardus, il rejoint l’esprit de Schnitzler, le tout étant servi par un art du découpage et un sens plastique peu commun.
Accueilli par un concert de critiques élogieuses, Der junge Medardus sort à Vienne le 5 octobre 1923 et reste plusieurs semaines à l’affiche. Dans une interview du quotidien Neue Freie Presse, Curtiz insiste sur le caractère culturel et européen de son film et se félicite de s’être distancié sciemment des schémas tant scénaristiques que narratifs d’Hollywood. Il aurait notamment « filmé les scènes de batailles de manière statique, sans mouvements d’appareils, afin de ne pas briser le rythme posé, réfléchi de l’ensemble du récit ». Le célèbre théoricien Béla Balász vante ce choix : « Chaque plan est parfait en lui-même, réclame un cadre », écrit-il, fait l’effet de « belles reproductions de chefs-d’œuvre inconnus de la peinture historique. Nous avons vu des scènes de foules plus imposantes chez Lubitsch et Griffith, mais jamais des masses pareillement dynamisées par le montage d’une mosaïque de plans vivante et étudiée. Ce n’est pas seulement l’ensemble qui frappe, chaque recoin de l’image est travaillé, a du relief » (Der Tag, 9.10.23). Le film fait également une belle carrière en Allemagne, en Suisse alémanique et en Europe centrale. – CH : Napoleon und der junge Medardus, GB : Passions of the Great .
1923[remontage : 1927/28] *Gloire – Visions de l’épopée napoléonienne (Campagne d’Autriche 1809) / Pour l’honneur (AT) de Mihály Kertesz [= Michael Curtiz] et Gérard Bourgeois
Alexander Kolowrat/Sascha-Filmindustrie AG, 2430 m./ 8 bob. – av. MICHAEL XANTHO (Napoléon), Michael Varkonyi [= Victor Varconi] (Christian d’Aurigny), Anny Hornik (Hélène d’Aurigny), Maria Hegyesi (Mme d’Aurigny), Ludwig Rethey (le prince de Thannberg), Agnes d’Esther [= Agnes von Esterhazy] (Diana von Thannberg), Ferdinand Onno (marquis de Richemont), Karel Lamac (Arnold von Thannberg), Mary Stone (Annette, fiancée de Christian).
Suite à l’inflation allemande et au krach boursier à Vienne, l’industrie cinématographique autrichienne s’effondre en 1924, les trois quarts des sociétés ferment leurs portes. La Sascha-Film du comte Alexander Kolowrat, qui a produit Der junge Medardus de Michael Curtiz, d’après la pièce d’Arthur Schnitzler (cf. film précédent), résiste non sans peine. Si la Grande-Bretagne a acheté ce titre en 1924 (dans une version de 67 minutes), la vente aux États-Unis a échoué. Plus d’un tiers des films européens achetés outre-Atlantique sont censurés et remontés d’office, mais Schnitzler, qui a un droit de veto sur son scénario, s’est catégoriquement opposé aux modifications exigées par les Américains, notamment que Médard épouse Hélène avant de passer une nuit « coupable » avec elle ; il refuse également de faire grâcier son héros par le Corse, comme le souhaitent les acquéreurs à Paris. Cependant, le comte Kolowrat ne peut plus se permettre de renoncer au marché français, en particulier avec un sujet pareil. Les rapports avec l’écrivain s’étant envenimés au fil des mois pour des questions de droits d’auteur, il fait la sourde oreille. En 1927, pour prendre de vitesse le Napoléon en gestation d’Abel Gance tout en profitant de l’intense campagne publicitaire orchestrée autour de sa production, l’Union-Artistic-Films de Paris charge le réalisateur Gérard Bourgeois de fabriquer une version franco-française de Der junge Medardus. Né à Genève de parents français, Bourgeois a débuté au cinéma peu avant les années dix et signé notamment quatre sujets portant sur la même période historique, Le Conscrit de 1809 (1909), La Dot de l’Empereur (1910), Cadoudal (1911) et Un drame sous Napoléon (1921). La transformation – effectuée bien entendu à l’insu d’Arthur Schnitzler comme de Curtiz (qui travaille déjà à Hollywood) – par le seul traficotage des textes et du montage est stupéfiante, tout le film et son optique particulière se muant en un produit quasi antithétique. Le détournement est digne de celui opéré en Union soviétique sur le Sodome et Gomorrhe de Curtiz deux ans auparavant, où la parabole biblique, nettoyée de ses oripeaux religieux, avait été utilisée pour illustrer la lutte des classes !
Bourgeois réduit le film autrichien de 3400 à 2430 mètres, soit de près d’une heure, en altère radicalement la fin et introduit de nouveaux intertitres, rédigés par ses soins (« L’étoile de Napoléon était à son zénith » est remplacé par « L’astre impérial répandait ses rayons de gloire immortelle, et le monde ébloui se courbait devant la puissance de César ... », suivi de quelques vers enfiévrés de Victor Hugo). Les Autrichiens deviennent des Français, et inversement. Le bourgeois Medardus se métamorphose en un émigré du nom de Christian d’Aurigny, de petite noblesse provinciale ayant fui la Révolution et qui refuse de se battre contre « ceux de sa race, de son sang ». Pourtant, son propre père est tombé à Austerlitz en bataillant dans les rangs autrichiens pour la cause de la monarchie ... Quant à Hélène, la royaliste française qui veut tuer l’usurpateur, elle devient à présent une princesse autrichienne du nom de Diana von Thannberg, fiancée au chef des légitimistes, le marquis de Richemont (ex-marquis de Valois). Oublié le duc d’Enghien, épisode peu glorieux qui n’a plus sa raison d’être. Tous les personnages secondaires viennois disparaissent, ainsi que l’exécution de l’oncle de Medardus, Eschenbach, qui détenait dans sa boutique un atlas géographique interdit par l’occupant. On reprend, en modifiant les identités, l’épisode du mariage avorté (Hélène d’Aurigny aime ici Arnold de Thannberg) et du suicide qui s’ensuit, ce qui donne une bonne raison à Medardus/d’Aurigny de haïr toute la noblesse autrichienne ! « Pendant ce temps, l’Aigle volait de victoires en victoires. Après Eckmühl, après Ratisbonne, l’armée française marchait sur Vienne ... » Pour venger Richemont, son époux comploteur fusillé à Paris (Bourgeois utilise les images du duc d’Enghien), Diana se rend à Schönbrunn dans le but d’y trucider elle-même le tyran, car Christian a refusé de servir ses vils desseins. Ce dernier la poignarde non par jalousie, mais pour sauver l’Empereur ! Christian demande à être exécuté. « Si tu veux mourir, que ce soit peut-être un jour sur le champ de bataille », lui répond Napoléon qui récompense le nobliau déconcerté en l’incorporant dans la Grande Armée, mieux : dans sa garde personnelle. La vieille maman du héros pleure de reconnaissance. Auparavant, Bourgeois aura déplacé 70 % du métrage de la semi-défaite d’Aspern-Essling pour recréer de toutes pièces l’éclatante victoire de Wagram, bien sûr inexistante dans la version originale comme dans la pièce, introduite par des vers ronflants d’Edmond Rostand (empruntés à L’Aiglon) et dont la moindre étape est commentée avec emphase. Le spectacle s’achève aux cris de « Vive l’Empereur ! »
En conciliant monarchistes, républicains et nationalistes à travers l’intervention salutaire de Christian, puis en concluant par la défaite du futur ennemi de 14-18 suivi d’un traité de paix, le scénario de Bourgeois s’aligne sur la politique de l’Union nationale de Poincaré au pouvoir depuis 1926, politique qui vise à l’unité du pays après l’hécatombe de la Grande Guerre et les déchirements sociaux consécutifs. Muni du nouveau titre de Gloire, film de « Michel Kertetz », ce traficotage plutôt habile et ultra-cocardier n’est projeté à Paris qu’à partir du 1 er avril 1928 au cinéma « Empire » (sic), les distributeurs du Napoléon de Gance ayant fait pression pour que sa sortie soit retardée de quelques mois, soit après la première de leur propre fresque. Entre-temps, le comte Kolowrat a été emporté par un cancer à l’âge de 42 ans (décembre 1927). Le nom d’Arthur Schnitzler n’apparaît plus au générique, ce qui n’est que justice : il ne reste plus rien de sa plume dans ce travestissement que l’indéniable splendeur des chromos de Curtiz ne parvient pas à sauver du fiasco commercial. Ses comédiens sont d’illustres inconnus dans l’Hexagone, l’obscur Xantho en Napoléon figure au haut de l’affiche (alors qu’il traîne en fin de liste dans la version originale). Après une diffusion tout aussi brève en Belgique, Gloire disparaît des écrans. Une redécouverte s’impose pourtant, passionnante et riche en enseignements divers.
1924Kuryri císarovi (Napoleon) [= Les Courriers de l’Empereur] / Ve stinu Napoleonové [= A l’ombre de Napoléon] (CZ) de Robert Blümsrieder et V. R. Gersik
Brunafilm. – av. RAINER SIMONS (Napoléon), Stella Smehlíková (comtesse Arenberger), Paul Askonas (comte Ormond), Leopold Reznicek (Metternich), Nini Forsterová (Ginette).
Synopsis : Le 11 mai 1809, Napoléon s’installe au château de Schönbrunn tandis que la cour impériale autrichienne se réfugie à Prague. Le prince Metternich charge la comtesse Arenberger de séduire un des messagers de Napoléon afin de se renseigner sur les déplacements de la Grande Armée et de préparer une contre-offensive à Essling-Aspern. La belle comtesse jette son dévolu sur le comte Ormond qui, lui, s’est épris de Ginette, la fille du jardinier de Schönbrunn. Elle parvient néanmoins à subtiliser dans son bureau d’importants documents militaires qu’elle transmet à Prague. Accusé de haute trahison, Ormond et condamné à mort. Entre-temps, Ginette a découvert qu’elle est une fille naturelle de Napoléon et supplie ce dernier d’épargner son amoureux. L’Empereur ordonne une nouvelle enquête, la comtesse est contrainte de restituer les papiers volés et Ormond peut serrer Ginette dans ses bras. – Film présumé perdu dans lequel le directeur d’opéra Rainer Simons interprète pour la troisième fois Napoléon (cf. supra, Napoleon in Schönbrunn, 1922, et Der Herzog von Reichstadt, 1920).
1939Haydns letzter Besucher [= Le dernier visiteur de Haydn] (DE) de Jürgen von Alten
Ottmar Ostermayr/Terra-Filmkunst GmbH, 19 min. – av. Julius Brandt (Joseph Haydn), Josefina Dora (Nannerl, la cuisinière), Karl Ettlinger (Joseph, le valet), Hans Zesch-Ballot (cpt. Clément Sulémy), Josef Reithofer (Dr. Hohenholz).
Synopsis : Le 30 mai 1809, le grand compositeur Haydn est mourant alors que Napoléon entre à Vienne. Il rejoue souvent Gott erhalte Franz den Kaiser (Dieu garde l’empereur François), le futur hymne national allemand. Napoléon, qui admire le musicien, fait placer une garde d’honneur devant sa maison et le capitaine Clément Sulémy, officier de cavalerie et grand mélomane, lui rend visite et chante pour lui ; Haydn lui joue La Création. Il meurt dans la nuit suivante. Court métrage tourné aux ateliers Terra-Marienfelde à Berlin.
1934Das unsterbliche Lied (Le Chant immortel) (DE/CH) de Hans Marr
Bavaria-Film AG (München)-Arophon-Film AG (Zürich), 75 min. – av. Hans Marr (l’aubergiste du Stern), Anny Hartmann (Trautel, sa fille), Heinz Galetzki (Leonhard, son fils), Paul Richter (Lois), Felix Gruber (le compositeur Franz Xaver Gruber), Max Weydner (le pasteur Josef Mohr).
Synopsis : Autriche en 1811/12, à Oberndorf. Trautel, la fille de l’aubergiste, s’est éprise de Lois, un passeur bavarois qui l’a sauvée de la noyade. L’aubergiste hait Lois, car c’est un ennemi, allié des Français. Lorsque Napoléon part pour la Russie, Lois et Leonhard, le fils de l’aubergiste, sont mobilisés dans la Grande Armée. Seul Lois survit au désastre. Trautel l’épouse, le couple est répudié par l’aubergiste et vit misérablement sur l’alpe. Leur cabane ayant été détruite, ils se réfugient avec leur enfant dans une étable. Ému par leur sort, l’instituteur Franz Xaver Gruber (1787-1863), qui a miraculeusement échappé à la conscription en 1812, compose le cantique O Douce Nuit (Stille Nacht, heilige Nacht), dont le curé Josef Mohr crée les paroles. En l’entendant, l’aubergiste en larmes serre son gendre dans ses bras. – Mélo sentimentalo-religieux filmé dans les ateliers Bavaria à Munich-Geiselgasteig, aux ateliers Vita (Rosenhügel) à Vienne, dans le massif de la Jungfrau en Suisse, dans les alpes bavaroises et à Salzbourg. – Titres alternatifs : Das ewige Lied, Das Lied der Heimat, GB : The Immortal Song.
1934® So endete eine Liebe (La Fin d’un amour) (DE) de Karl Hartl. – av. Paula Wessely (l’archiduchesse Marie-Louise), Willi Forst (le duc Franz von Modena), Gustav Gründgens (Metternich), Franz Herterich (l’empereur François Ier), Rose Stradner (l’impératrice Maria Ludovika). – Vienne 1809: Marie-Louise doit renoncer au duc de Modène pour épouser Napoléon (cf. p. 70).
1941Háry János (HU) de Frigyes Bán
Antal Güttler/Palatinus Filmterjesztö Vállalat, 90 min. – av. Antal Páger (János Háry), Margit Dayka (Örzse, sa fiancée), ERNÖ MIHALYI (Napoléon), Kató Bárczy (l’impératrice Marie-Louise), Zoltán Makláry (François Ier d’Autriche), Vilma Medgyaszay (l’impératrice Marie-Thérèse), Sándor Pethes (chevalier Ebelasztin), József Juhász (Marci, le cocher), Sándor Naszódy (Diák), István Palotai (Katona), Judit Csermely, Mária Deésy, Lajos Kelemen, László Misoga, Ferenc Pethes, György Solthy, Gyula Szöreghy, George Tatar, Lajos Ujváry.
Synopsis : Dans un café de son village natal à Nagyaboni, Háry János, un vétéran de l’armée hongroise, raconte à la tablée avinée comment il a capturé l’empereur Napoléon... Flash-back : jeune hussard stationné en Galicie, à la frontière russo-hongroise, Háry retrouve sa fiancée Örzse qui l’a suivi pour lui apporter ses bottes. Tandis qu’ils flirtent, un carrosse transportant l’impératrice Marie-Louise, sa suite et le courtisan Ebelasztin arrivent à la frontière. Le garde russe ayant refusé de laisser passer l’impératrice, Háry bande ses muscles et déplace le poste russe sur territoire hongrois, libérant ainsi Marie-Louise. Pleine d’admiration pour la force herculéenne du héros, elle l’engage dans sa garde personnelle à Vienne, mais fait une petite crise de jalousie lorsque Háry veut emmener Örzse, qui s’occupera du poulailler impérial. Dans la capitale où il soigne avec succès la goutte de François I er, Háry est la coqueluche de ces dames, au grand dam du courtisan Ebelasztin, un intrigant qui essaie vainement de l’éliminer et incite Napoléon, jaloux du succès du hussard auprès de son épouse, à faire la guerre à l’Autriche. Élevé au rang de capitaine de cavalerie, Háry assiège la ville de Milan où sont retranchés les Français, qu’il bat à plate couture en renvoyant les boulets de canon avec ses mains. Il fait prisonnier Napoléon lui-même, auquel il dicte ses conditions. Impressionnée, Marie-Louise quitte son raté de mari pour épouser le vaillant Hongrois, mais Örzse ne l’entend pas de cette oreille. Reçu en grande pompe à la cour impériale à Vienne, assis à la droite de François I er, Háry doit épouser Marie-Louise et servir de nouveau père aux sept (sic) enfants de Napoléon, mais il ne rêve plus que de son village et de sa fiancée. Il récupère finalement Örzse dans le poulailler impérial et retourne à la campagne, abandonnant Marie-Louise à Ebelasztin... Quand il a fini son récit, le fanfaron aux chevaux blancs se découvre seul à table. En partant, il fait un clin d’œil au portrait de Napoléon à la paroi, l’Empereur lui rend la pareille.
Ce film musical est tiré de la comédie lyrique en 6 mouvements de Zoltán Kodály, créée à l’Opéra royal hongrois de Budapest le 16 octobre 1926 d’après l’épopée héroïco-comique Le Vétéran ou Le vieux briscard et Napoléon (Az obsitos) de Janos Garay (1843). Auteur de ballades lyriques et historiques, Garay a participé à la révolution de 1848 à Pest qui fut écrasée par les Habsbourg, et sa ballade conte la capture par un petit hussard de la puszta de celui qui fit trembler l’Empire autrichien. Kodály voit en ce vantard truculent, matamore cocasse dont les récits fantasques mêlent réalité et naïveté, une sorte de visionnaire et poète rural. Ses aventures rêvées synthétisent la force poétique d’un folklore qui transcende les frustrations politiques du peuple hongrois et que le compositeur a cherché à représenter sous forme d’un opéra. Sans doute l’adaptation cinématographique de 1941 tournée aux studios Hunnia à Budapest par le jeune Frigyes Bán (plus tard un des piliers du cinéma socialiste hongrois) n’est-elle pas innocente ; la Hongrie de l’amiral Horthy est alliée aux puissances de l’Axe et, en l’absence de concurrence internationale, le cinéma local connaît une brève flambée, permettant à de petites firmes comme l’éphémère Palatinus de faire vibrer la corde nationaliste au détriment d’une France pétainiste humiliée. Inversement, on peut imaginer que ce Münchhausen magyar illustre la revanche des petits sur les maîtres du monde, où qu’ils soient. Antál Páger, vedette populaire, émigrera en Argentine à la fin de la guerre, s’étant lourdement compromis au service de la propagande du Reich. On retiendra surtout l’amusant Napoléon d’Ernö Mihályi, despote irascible qui peine à sortir sa main de son gilet et que Háry, victorieux, transforme littéralement en nain (placé dans des décors surdimensionnés ou joué de dos par un enfant). Cf. remakes en 1965 et 2002 (tv).
1943/44[sortie : 1945] ® Kolberg (DE) de Veit Harlan. – av. Franz Herterich (François Ier d’Autriche). – Devant la défection de la Confédération du Rhin et les tergiversations de la Prusse, François II renonce à la couronne du Saint Empire romain germanique et devient François I er, empereur d’Autriche (cf. p. 387).
1949Eroica (Éroïca) (AT) de Walter Kolm-Veltée
Guido Bagier, W. Kolm-Veltée/Wiener Kunstfilm Kolm-Veltée (Wien)-Neue Wiener Filmproduktions GmbH, 101 min./95 min. – av. Ewald Balser (Ludwig van Beethoven), Marianne Schönauer (la comtesse Therese von Brunswick), Judith Holzmeister (Giulietta Guicciardi), Oskar Werner (Karl van Beethoven, neveu du musicien), Dagny Servaes (Johanna van Beethoven-Reiss, sa mère), Ivan Petrovich (le prince Carl Alois Lichnowsky), Ludmilla Hell (la princesse Christine Lichnowsky), Hans Krassnitzer (Carl Amenda), Richard Eybner (Schuppanzigh), Alfred Neugebauer (l’organiste Johann Georg Albrechtsberger), Auguste Pünkösdy (la gouvernante), Erik Frey et Hans Hais (des officiers français).
Synopsis : Le 13 novembre 1805, le bal du prince Lichnowsky, principal mécène de Beethoven, est interrompu par l’arrivée d’une estafette : Napoléon et sa Grande Armée s’approchent de Vienne. Beethoven, jacobin dans l’âme et fervent partisan des idées de la Révolution française, apprend la nouvelle avec enthousiasme et quitte ses amis au café pour composer chez lui une symphonie « de la Puissance, de la Grandeur et de la Gloire » qui deviendra l’ Éroïca ou la Troisième Symphonie. Désertée par son souverain, la capitale autrichienne est investie par les troupes du général Masséna tandis que l’empereur François I er est parti se réfugier auprès de son allié de la Troisième Coalition, le tsar Alexandre. Après le triomphe de sa symphonie, deux messagers impériaux sollicitent Beethoven pour assister à une réception donnée par Napoléon à Schönbrunn. Mais le musicien reçoit des consignes vestimentaires si contraignantes que, choqué par la mondanité de son idole, il rature férocement la dédicace de son chef-d’œuvre qui reçoit le sous-titre de « Grande Symphonie Héroïque pour célébrer le souvenir d’un grand homme »...
Un des rares biopics sur Beethoven qui se réfère concrètement à Napoléon à Vienne (outre le téléfilm britannique Eroica de 2003, cf. infra). Par la suite, le film reprend les étapes rabâchées à l’écran : Beethoven se réfugie en Hongrie chez son élève Thérèse de Brunswick et sa cousine frivole Giulietta Guicciardi (inspiratrice de la sonate Clair de Lune), dont il s’éprend et à laquelle il doit renoncer. Suivent les démêlés avec son voyou de neveu Karl – joué par un tout jeune Oskar Werner (Jules et Jim) – et les premiers tourments dus à son audition défaillante. Pilier du prestigieux Burgtheater, Ewald Balser (un peu le Harry Baur germanique) campe un Beethoven d’une ressemblance physique stupéfiante dans cette première réalisation, honorable, retenue et très soignée de Walter Kolm-Veltée (fils des cinéastes pionniers Anton Kolm et Luise Fleck). Filmée aux ateliers Wien-Sievering, dans la région viennoise et le Burgenland, la production se profile comme un des plus éclatants succès du cinéma autrichien, avec une première mondiale au festival de Salzbourg 1949 et, cette même année, une présentation au festival de Cannes.
Précisons que la Troisième Symphonie, dédiée au « général Napoléon Bonaparte » (en qui Beethoven voyait le sauveur de la Révolution) fut écrite entre 1802 et 1804, avant le couronnement de Napoléon qui fut à l’origine du rejet. Sa création publique eut lieu le 7 avril 1805. Enfin, ce que le film ne dit pas : La victoire subséquente d’Austerlitz entraîne la rupture entre Beethoven et le prince Lichnowsky qui menace de le faire arrêter, le musicien ayant refusé de jouer du piano pour des officiers français stationnés dans son château en Silésie, région occupée par les armées napoléoniennes. En 1808, Beethoven reçoit de Jérôme Bonaparte, roi de Westphalie, la proposition alléchante du poste de maître de chapelle à sa Cour à Kassel. Pour ne pas laisser filer leur « musicien national », l’archiduc Rodolphe de Habsbourg et les princes Kinsky et Lobkowitz s’allient afin d’assurer à Beethoven une rente royale s’il reste à Vienne ; se croyant ainsi définitivement à l’abri du besoin, Beethoven accepte, mais la reprise des hostilités contre la France au printemps 1809 remet tout en question : les Habsbourg sont contraints de quitter Vienne, occupée pour la deuxième fois ; la grave crise économique qui s’empare de l’Autriche après sa défaite à Wagram et le traité de Schönbrunn imposé par Napoléon ruinent l’aristocratie et rendent caduc le contrat passé avec Beethoven – qui finira ses jours dans la pauvreté. Il sera exalté avec tapage comme musicien national lors du Congrès de Vienne en 1814/15, mais de plus en plus ignoré par les Viennois eux-mêmes. Le durcissement de la dictature réactionnaire de Metternich aidant, les convictions démocratiques de Beethoven (comme sa sympathie retrouvée pour Napoléon) lui vaudront une surveillance accrue de la police politique. – DE : Ludwig van Beethoven – Eine deutsche Legende (« Eroica ») (dvd).
1951Δ Posel úsvitu [= Le Messager de l’aube] (CZ) de Václav Krska ; Studio Barrandow, 113 min. – av. Vladimir Ráz (Josef Bozek), Hana Kavalirowa (Joséphine Bozek, sa femme), Jiri Plachy (prof. Gerstner), Vladimir Hlavaty. – Le début de ce « biopic » consacré à l’inventeur tchèque Josef Bozek (1782-1835), qui mit au point la première machine à vapeur de l’Empire autrichien, se déroule en décembre 1805, sur le champ de bataille d’Austerlitz et dans la ville de Brno occupée par Napoléon.
1955® Napoléon (FR) de Sacha Guitry. – av. Maria Schell (l’archiduchesse Marie-Louise), Erich von Stroheim (Ludwig van Beethoven), O[tto] W[ilhelm] Fischer (Klemens Wenzel von Metternich), Fernand Fabre (l’empereur François Ier), Paul Dupuis (Adam Albert von Neipperg). – Février 1810, dans le salon de musique à Schönbrunn. Devant la cour réunie, Beethoven attaque la 3 e Symphonie (Eroica). Marie-Louise s’indigne que l’on puisse jouer cette œuvre « qui évoque et qui glorifie les victoires remportées sur l’Autriche par cet aventurier, voleur et assassin », mais se tait stupéfaite lorsque son père lui annonce que Napoléon l’a demandée en mariage. À Berthier, Beethoven explique qu’il a rayé le nom de Bonaparte de sa composition, rebaptisée Symphonie Héroïque pour un grand homme : « Comme cela, on devine que c’est pour lui – c’est mieux. »
1956® War and Peace / Guerra et pace (Guerre et Paix) (IT/US) de King Vidor et Mario Soldati. – av. Oscar Homolka (gén. Koutouzov), HERBERT LOM (Napoléon), Tullio Carminati (prince Kouragine), Savo Raskovitch (tsar Alexandre Ier), Clelia Matania (la comédienne Mlle George), Andrea Fantasia (Constant, serviteur de Napoléon). – Brève reconstitution de la bataille d’Austerlitz par Mario Soldati (cf. p. 554).
Pierre Mondy fait un Napoléon ressemblant et souvent assez crédible dans Austerlitz, la fresque du vétéran Abel Gance (1960).
1960*Austerlitz / Napoleone ad Austerlitz / La battaglia di Austerlitz / Austerlic (FR/IT/YU/LI) d’Abel Gance [assisté de Nelly Kaplan, Roger Richebé]
Alexandre et Michel Salkind/Société Cinématographique Lyre (Paris)-Compagnie Française de Production Internationale (Paris)-Galatea Film (Milano)-Dubrava/Jadran Films (Zagreb)-Michael Arthur Films (Vaduz), 166 min. – av. PIERRE MONDY (Napoléon), Rossano Brazzi (Lucien Bonaparte), Claudia Cardinale (Pauline Borghese), Martine Carol (Joséphine de Beauharnais), Leslie Caron (Élisabeth Le Michaud d’Arçon de Vaudey), Vittorio De Sica (Pie VII), Anna-Maria Ferrero (Élisa Bonaparte), Ettore Manni (Joachim Murat), Jean Marais (Lazare Carnot), Georges Marchal (Jean Lannes), Jean Mercure (Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord), Anna Moffo (Giuseppina Grassini), Jack Palance (gén. Franz von Weyrother), Elvire Popesco (Madame Mère, Laetitia Bonaparte-Ramolino), Daniela Rocca (Caroline Bonaparte), Michel Simon (le grognard Alboise de Pontoise de Seine-et-Oise), Orson Welles (Robert Fulton), Roland Bartrop (Lord Horatio Nelson), Jean-Marc Bory (gén. Jean-de-Dieu Soult), Jacques Castelot (Régis de Cambacérès), Claude Conty (prince Vassily Dolgoroukow), David D’Auerstadt [= Guy-Marie Davout] (Louis-Nicolas Davout), Jean-Louis Horbette (Louis Constant), André Oumansky (Claude François de Ménéval), Nelly Kaplan (Juliette Récamier), Polycarpe Pavloff (gén. Mikhaïl Koutouzov), Lucien Raimbourg (Joseph Fouché), Maurice Teynac (l’huissier privé Frioul alias l’espion Karl Ludwig Schulmeister), Jean-Louis Trintignant (gén. comte Philippe-Paul de Ségur), J. Squinquel (comte Louis-Philippe de Ségur, son père), Janez Wrhovec (François Ier d’Autriche), André Randall (Lord Charles Whitworth, ambassadeur d’Angleterre), Anthony Stuart (Sir William Pitt), Claude Carliez (gén. Pierre Margaron), Pierre Tabard (gén. Alexandre-Louis Andrault de Langeron), Henri Vidon (Charles James Fox), Hugues Wanner (gén. Charles Cornwallis), Antoine Baud (gén. Jean-Baptiste Bernadotte), Jean Berger (Gabriel de Hédouville), Raoul Billeret (Anne-Jean Savary), André Certes (Louis-Alexandre Berthier), Jean Roger Caussimon (Pierre-François Réal), Sophie Daria (Germaine de Staël), Guy Delorme (Rémy Exelmans), Pierre Demas (gén. Pierre Daumesnil), Lucien Eymond (Charles-François Lebrun), F. Fabre (Pierre-Louis Roederer), Guy Haurey (gén. Louis Friant), H. Huet (le peintre Jean-Baptiste Isabey), Hubert de Malet (Claude Ambroise Régnier), P. Marteville (Joseph Bonaparte), Jean-François Remy (Michel Duroc).
Le film commence le 27 mars 1802 avec la signature du traité de paix d’Amiens et finit sur le champ de bataille en Moravie, au soir du fameux 2 décembre 1805 qui met fin à la Troisième Coalition antifrançaise. Il marque le retour en force – et attendu avec impatience – de l’ancien prodige du cinéma français, alors âgé de 70 ans, et pratiquement au chômage depuis plusieurs années (il a signé un seul film en dix-sept ans). Lorsque Abel Gance met en chantier son célèbre Napoléon, en 1924, l’œuvre comporte sur le papier pas moins de sept volets, sept longs métrages dont, faute d’argent, il ne réalisera que le premier (cf. p. 6). Le troisième volet est intitulé « Austerlitz (1804-1808) » et parle de l’établissement de l’Empire, du sacre au traité de Tilsit. Le projet disparaît dans les tiroirs pour plusieurs décennies. En 1958, Gance, remis en selle grâce au succès public de La Tour de Nesle (1954), confie aux producteurs Michel et Alexandre Salkind son intention de réaliser « D’Austerlitz à Sainte-Hélène », soit, grosso modo, le pan manquant de sa légendaire fresque muette ; le sujet est à nouveau beaucoup trop ample pour un seul long métrage, mais Gance trouve néanmoins les fonds indispensables à Austerlitz, à filmer en Dyaliscope et Eastmancolor, avec un défilé de grandes vedettes internationales pour les moindres rôles, en application du procédé et parfois un peu de l’esprit de Sacha Guitry : Jean Marais, Claudia Cardinale, Orson Welles, Vittorio De Sica, Rossano Brazzi, Jack Palance, et, en fin de carrière, Martine Carole (« capricieuse et caractérielle, elle incarne Joséphine tout en se prenant pour Cléopâtre », dixit Nelly Kaplan), etc. Lilli Palmer (Marie-Louise) et Laurence Olivier (Nelson) se désistent au dernier moment.
Comme trop souvent, l’arrangement financier du clan Salkind est, au mieux, boiteux et leurs garanties sont du vent. Le tournage dure d’octobre 1959 à janvier 1960 dans des conditions épouvantables, trois mois en Yougoslavie pour la partie guerrière du film (Boulogne, Moravie, Schönbrunn, Paretz), puis, pour la première partie (Paris, Fontainebleau, Saint-Pétersbourg, Londres), aux studios de Cinecittà et de Joinville où l’on reconstruit la Grande Salle des Tuileries pour le bal de nivôse 1802. À Zagreb, Gance ne dispose pour tout studio que de deux grandes halles de la foire locale, Machinograd et le Pavillon d’exposition chinois occupant une surface de 9000 m2. L’ensemble est très sommairement aménagé, sans chauffage et sujet à de constantes pannes d’électricité, car il faut 36 000 ampères pour illuminer le plateau ; les installations techniques sont vétustes et régulièrement défectueuses. Des pluies torrentielles clouent l’équipe sur place, de sorte que (à l’exception de la charge des hussards de Kellermann et de la cavalerie de Murat enregistrées avec 300 cavaliers de l’armée yougoslave sur les hauteurs bucoliques de Cmrok près de Tuskanac, au nord de la capitale croate) tout le déroulement de la bataille doit être reconstitué en atelier à Machinograd avec force bombes fumigènes, effets pyrotechniques, machines à brouillard aléatoires et effectifs réduits (au total guère plus de 500 fantassins et cavaliers meublent le plateau).
Hélas, tout cela se voit et dérange quelque peu. La recréation de la bataille elle-même, dont la géniale stratégie est enseignée aujourd’hui encore dans les écoles militaires du monde entier, aurait demandé non de faux extérieurs mais de grands espaces et une profondeur de champ qui permettent d’en comprendre le déroulement tactique complexe, afin de saisir de visu le génie de Napoléon dont Gance se veut le héraut. Rien de cela ici : l’alternance de studio et d’extérieurs réels dérange, les scènes de masse n’obéissent à aucune logique narrative – Gance s’en est visiblement désintéressé (les batailles n’étaient déjà pas son point fort dans sa fresque muette de 1927) – , ce sont des images d’affrontements qui se succèdent dans le chaos, le spectateur ignorant où se passe l’action et qui se trucide sous ses yeux. Pour simuler à l’écran ce « combat de titans » entre 160 000 hommes et trois empereurs, la production avait promis 5500 soldats et 3600 chevaux de l’armée, mais ce sont quelques camions d’étudiants affamés et ne sachant même pas monter à cheval qui les remplacent. Peu de grands panoramas martiaux, donc, mais une mosaïque de moments plus ou moins forts, tels que l’escalade du plateau de Pratzen dans la brume hivernale ou la noyade des troupes austro-russes dans les étangs gelés du Goldbach et du lac Satschan, dont la couche de glace a cédé sous l’artillerie française (les 10 000 noyés sont une légende tenace, mais fausse selon l’historiographie moderne qui en estime le nombre à 3000 au plus). Le spectacle est interrompu par diverses explications tactiques, Napoléon dévoilant à ses maréchaux les phases successives de son plan à mesure que la situation évolue (ce qu’on apprend mais ne voit guère) : l’Empereur donne l’impression d’inventer sa stratégie sur le moment alors qu’il l’a longuement préparée. Pour conclure, Gance recrée le tableau héroïsant de François Gérard montrant le général Rapp, cheval cabré, qui annonce la défaite du tsar à l’Empereur (1810) : c’est avouer à quel niveau se situe la vérité du film ainsi que son degré très relatif d’authenticité. On oublie, en passant, de préciser que les Français ne firent aucun prisonnier au cours des combats. En revanche, les unités qui se rendirent à la fin furent relâchées sur ordre de Napoléon (« Je ne veux avoir devant moi que des hommes libres ! »). Enfin, considérant qu’il était de son devoir de veiller sur le sort des familles, l’Empereur adopta par décret du 7 décembre 1805 tous les enfants des généraux, officiers et soldats français morts à Austerlitz.
Le film se divise clairement en deux époques. Si la deuxième est exclusivement consacrée à la chose militaire, la première montre – non sans longueurs – comment et pourquoi le Premier Consul se fait sacrer empereur (affirmant ainsi sa légitimité face aux royalistes et empêchant le retour des Bourbons), puis pourquoi – véritable jouet de la fatalité – il est acculé à la guerre par la perfide Albion qui ne tient pas ses engagements d’Amiens (Pitt refuse d’évacuer Malte). Gance entremêle oppositions politiques (Cadoudal, Pichegru et les complots d’assassinat anglo-royalistes, le républicain intègre Carnot), conflits internationaux (la rupture avec Londres), épisodes d’alcôve avec Joséphine, Elisabeth de Vauday et la diva Giuseppina Grassini, intrigues familiales (Caroline fait des siennes), l’enlèvement du duc d’Enghien (dont l’exécution est présentée comme une tragique méprise). Les propos orageux avec le pape Pie VII (« comediante, tragediante ! ») au Louvre sortent de Servitude et grandeur militaires (1935) d’Alfred de Vigny, même s’ils furent vraisemblablement inventés par l’écrivain. Puis vient l’instant solennel du choix de la signature : Napoléon décide subitement de signer ses papiers officiels avec son prénom. Napoléon intime, dans sa baignoire, en pantoufles, tel que l’ont vu son valet Constant ou son secrétaire Ménéval. Le scénario révèle un cinéaste follement érudit et passionné de son personnage, qu’il souhaite cette fois également présenter sous un jour plus familier, à la manière des lucratives vignettes en costumes de Guitry. Le tout aboutit à une curieuse synthèse de boulevard et d’épopée, de patriotisme et de burlesque (le savoureux grognard de Michel Simon, « Alboise de Pontoise, Seine-et-Oise », qui perd sa deuxième oreille au feu, ou ce pauvre Constant, condamné à « briser » les nouveaux bicornes et chaussures de son maître).
À la suggestion de Nelly Kaplan, Gance confie le rôle de l’Empereur à Pierre Mondy, un comédien de tempérament sanguin qui possède de surcroît la taille et la rondeur du visage requises pour le Napoléon de 1805. Tout en forçant un peu le trait, Mondy le joue débordant, carrément épuisant d’énergie, mais aussi pétri de contradictions : hyperthymique fougueux, téméraire, homme à femmes, mesquin en affaires, tricheur et farceur, colérique et despotique (en vrai militaire, il « confond commander et gouverner », lui reproche Carnot lors d’une splendide estocade oratoire), à la fois tyrannique et généreux, capable d’initiatives étonnantes comme de funestes erreurs (le refus des inventions proposées par l’Américain Fulton qui, avec son application de la vapeur dans la navigation, aurait peut-être permis de tenir en échec la Royal Navy). Enfin, indifférent à la vie de ses hommes (« la saignée entre dans les combinaisons de la médecine politique », admet-il avec un cynisme machiavélien). À l’occasion, Mondy surjoue, faisant son « p’tit tondu » criseux, aboyant des ordres en continu, mais globalement, Austerlitz offre un Napoléon cinématographique assez vraisemblable et captivant, le regard de Gance n’étant en outre pas dépourvu d’ironie (« Quelle est cette petite dinde endimanchée ? Je plains l’imbécile qui l’épousera ! », s’esclaffe l’Empereur devant un tableau peu flatteur de Marie-Louise à Schönbrunn). Rompu aux comédies franchouillardes, Mondy peut, grâce à la prestigieuse parenthèse de ce film, montrer une facette plus dramatique de son talent.
Mais si le cinéaste détruit le portrait mythifiant de Bonaparte que véhiculait son chef-d’œuvre de 1927, il ne reste pas moins prisonnier d’une certaine imagerie populaire, enjoliveuse sinon idolâtre, truffée de « mots célèbres », théâtrale et, à l’occasion, outrageusement cocardière (l’ennemi est ridiculisé à chaque occasion). Ceci vaut en particulier pour la deuxième partie, où Gance emprunte facilement à la légende. À la fin du film, l’Empereur verse quelques larmes de crocodile sur les agonisants, puis fait sa fameuse proclamation à la Grande Armée (« Soldats, vous avez à la journée d’Austerlitz décoré vos aigles d’une gloire immortelle », etc.) tandis que résonne pompeusement la Marseillaise... Ce dernier point constitue d’ailleurs un amusant non-sens, puisque Napoléon et Rouget de l’Isle se détestaient (Rouget avait été un des amants de Joséphine pendant la campagne d’Italie) et que l’Empereur s’efforça de faire oublier la Marseillaise durant son règne. Le compositeur de l’hymne national se vengea en se ralliant avec éclat à Louis XVIII en 1814 (cf. à ce sujet Jean Tulard, Napoléon et Rouget de l’Isle, Paris, 2000). Les deux ennemis ne se rencontreront publiquement qu’une seule fois, et sur les écrans : dans le Napoléon muet tourné 33 ans plus tôt, comme de bien entendu. Notons en passant que la maîtresse du Premier Consul, Elisabeth de Vaudey (jouée par Leslie Caron), demoiselle d’honneur de l’impératrice Joséphine, figure également dans le chef-d’œuvre muet sous les traits de Georgette Sorelle.
Gance cherche surtout à infirmer la caricature d’un aventurier sans scrupules, d’un insatiable conquérant, uniquement avide de puissance et de carnages telle que la propagent les détracteurs de l’Empire. « Je n’ai pas arrêté de me défendre ! » lance-t-il à ceux qui l’accusent d’agression, ce qui n’est pas entièrement faux. Cependant, ce souci louable de psychologie et d’authenticité (doublé de justifications politiques parfois contestables) ne s’accorde pas toujours avec le tempérament naïf du cinéaste. Privé d’élan romantique, d’envolée hugolienne, et de surcroît sans grandes prouesses d’écriture cinématographique, son film est à l’arrivée un reflet assez pâle de ses ambitions premières. Trop de compromis en catastrophe, trop de promesses de producteurs non tenues l’ont handicapé. Budgeté à 480 millions de francs anciens, il dépasse le milliard en cours d’élaboration et Gance frôle plus d’une fois l’arrêt des travaux (cf. le journal de bord de Nelly Kaplan, Le sunlight d’Austerlitz, Plon, Paris, 1960). La séquence du sacre doit être sacrifiée faute d’argent, mais Gance a l’idée de la remplacer de manière originale : ce sont des employés qui en racontent le déroulement aux fameux absents, Laetitia Bonaparte en tête. Contre une participation financière, Roger Richebé exige même de figurer au générique comme collaborateur à la réalisation alors qu’il n’a pas tourné un mètre de film ! L’avant-première mondiale se tient le 15 juin 1960 en Corse, dans la ville natale du Petit Caporal à Ajaccio, au cinéma « Empire » (sic) et en présence du prince Napoléon Murat, producteur de films (si, si).
Si cet Austerlitz alourdi par un côté télévision scolaire est une demi-victoire du point de vue artistique, c’est un Waterloo sur le plan des recettes : en dehors de l’Hexagone (où il atteint tout de même un score fort honorable de 334 000 spectateurs après 42 semaines d’exclusivité), le film n’attire pas grand monde – dans l’Allemagne d’Adenauer comme en Grande-Bretagne, il récolte surtout des ricanements, la presse étrangère s’amuse de tant de chauvinisme – et conduit les Salkind au bord de la faillite. Au moment où triomphe sur les écrans la modernité d’un Truffaut, Godard, Chabrol ou Antonioni, la fresque didactico-démagogique de Gance relève d’un essai de spectacle « auteuriste » téméraire et émouvant. Elle reflète à son niveau cette nostalgie qu’a la France en crise de 1959/60 d’une forme d’unanimité nationale, de l’unité faite homme, et qui est en train de se concrétiser sur le plan politique par l’arrivée salutaire du général de Gaulle. – DE : Austerlitz – Glanz einer Kaiserkrone, GB : Austerlitz, US : The Battle of Austerlitz.
1961Karolina Rijecka (Caroline de Rijeka) (YU) de Vladimir Pogacic
Avala Films, 87 min. – av. Ann Aubrey, Bernard Lajarrige, Nikola Popovic, Olga Spiridonovic, Antun Nalis. – En 1813, dans l’Adriatique du nord (Croatie), l’épouse d’un marchand se donne à l’amiral de la flotte britannique afin qu’il ne bombarde pas sa ville occupée par les Français. D’après la pièce de Dragutin Gervais (1952).
1964/65*Háry János (HU) de Miklós Szinetár
Mafilm 4-Játékfilmstúdio, 113 min. – av. Adám Szirtes (Janos Hary), Mária Medgyesi (Örzse, sa fiancée), GYULA BODROGI (Napoléon), Teri Torday (l’impératrice Marie-Louise), Samu Balazs (l’empereur François Ier d’Autriche), Manyi Kiss (impératrice Marie-Thérèse de Bourbon-Naples, son épouse), László Bánhidi (Öreg Marci, le cocher impérial), László Márkus (le chevalier Ebelasztin), László Misoga (Kocsmáros), László Keleti (gén. Krucifix), Lajos Cs. Németh (Jóska), Gábor Koncz (Diák), Sàndor Tompa, Sándor Peti, Endre Harkányi.
Les souvenirs fantasques d’un Münchhausen magyar, rival de Napoléon pour les faveurs de l’impératrice Marie-Louise (entre 1804 et 1814). Un film musical tiré de la comédie lyrique de Zoltán Kodály et tourné en couleurs aux studios 4 de la Mafilm à Budapest (cf. supra, film de 1941). À noter dans le rôle de Marie-Louise, la sexy Teri Torday, qui fera une petite carrière dans le cinéma érotique de la RFA, notamment en Sexy Susanne dans les comédies napoléoniennes de la série des Frau Wirtin de 1969/70 (cf. p. 395). Nota bene : en 1983, Zsolt Richly réalise un film d’animation de 60 minutes d’après Háry János pour Pannónia Filmstúdió.
1965-1967® Vojna i mir (Guerre et paix) – 1. Andrej Bolkonskij / Austerlitz (SU) de Sergueï Bondartchouk. – av. Boris Zakhava (gén. Mikhail Koutouzov), Gyuli Chokhonelidze (gén. Piotr Ivanovitch Bagration), V. Murganov (tsar Alexandre Ier), VLADISLAV STRZELICHIK (Napoléon), D. Eizentals (Carl von Clausewitz), Boris Molchanov (maréchal Louis-Nicolas Davout), V. Sofronov (François Ier d’Autriche), Nicolaï Bubnov (gén. Freiherr Karl Mack von Leiberich). – Reconstitution détaillée des batailles de Schöngraben/Hollabrünn (où le prince Bagration se fit surprendre par l’avant-garde de Lannes et de Murat, le 13 novembre 1805) et d’Austerlitz (2 décembre 1805) (cf. p. 361).
1966(tv) Metternich (ES) de Cayetano Luca de Tena
Série « Estudio 1 » (TVE 27.7.66), 89 min. – av. Carlos Ballesteros (le prince-chancelier Klemens Wenzel von Metternich), Gemma Cuervo (Dorothea von Benckendorff, princesse de Lieven), Ana María Vidal (Laura Junot), Carmen de la Maza (Marie-Louise d’Autriche), Andres Mejuto (Talleyrand), Carmen Nevado (Julia), Conchita Cuetos (Caroline Bonaparte, grande-duchesse de Berg), Ricardo Merino (Laibach), Manuel Salguero (comte Witzna), Roberto Llamas (Woronieff), Montserrat Julio (Mme Duroc), Jacinto Martín (Gentz), Angelines Puchol (Mme Champagny), Concha Bañuls, Mario Alex, Rafael Gil Marcos, José Tain, José Abolafía, J. Félix Bresso, Fernando de Anguita, Francisco Taure, Augustín Bescós.
Synopsis : Ambassadeur d’Autriche à la cour de Napoléon, Metternich utilise les femmes dont il s’entoure exclusivement pour collecter des renseignements confidentiels sur le Corse. Ayant perçu à jour sa stratégie, une Française dont il est tombé amoureux l’éconduit. À la chute de Napoléon, Metternich se console auprès de sa maîtresse, la princesse Dorothea von Lieven, épouse d’un général russe ; mais un malentendu entre eux provoque la rupture : Metternich est cette fois la victime innocente de ses propres jeux politiques et de l’image de ministre froid et calculateur qu’il s’est lui-même forgée.
Adaptation de Metternich, el ministro mariposa le ministre papillon »), une comédie en vers en 5 actes rédigée par l’auteur franquiste José María Pemán. La pièce est sortie le 11 décembre 1942 à Madrid et contient diverses allusions voilées à Hitler et au destin funeste du Troisième Reich à travers la description des erreurs de Napoléon, et préconise, à l’instar de Metternich, l’utilisation de la négociation plutôt que celle de la force.
1969® (tv) Jean-Roch Coignet (FR/BE/IT/CH/CA) de Claude-Jean Bonnardot (TF1 27+30.12.69), épisodes 3 et 5. – av. Henri Lambert (sgt. Jean-Roch Coignet), Pierre Santini (Gervais), François Dyrek (La Franchise), Max Vaille (Godaille), Mirko Kraljev (gén. Jean Dorsenne), Enrico Salvatore (cpt. Renard), Jacques Mondain (Benoît), Gabriella Giorvelli (Margot-la-Joie), Gabriella Farnon (Mizzi). – Grenadier à pied (plus tard capitaine) de la Garde impériale, Coignet a participé à toutes les campagnes napoléoniennes depuis 1799, sans jamais avoir été blessé. Une partie des épisodes 3 et 5 de cette télésérie en couleurs tirée des fameux Cahiers du capitaine Coignet (1833) relate ses expériences durant les campagnes en Autriche contre la Troisième et Cinquième Coalition (au total 15 et 18 minutes). 3e épisode : Fin septembre 1805, Jean-Roch et 200 000 hommes de la Grande Armée quittent le camp de Boulogne en direction du Rhin, effectuant des marches forcées de 50 à 80 km par jour. Ulm est encerclée, les 40 000 Autrichiens de Mack capitulent. à Vienne, le grenadier passe avec la blonde Mizzi une soirée de danse champêtre, plaisir vite interrompu par un nouvel ordre de marche ... sur Austerlitz. A la veille de la bataille, à la lueur des torches, Napoléon harangue les grenadiers de sa Garde, et au soir de la victoire, Jean-Roch et ses camarades affamés volent un cochon aux cuisines de l’Empereur (15 min.).
5 e épisode : Après le traité de Tilsit et la paix avec la Russie, le général de division Dorsenne nomme Coignet caporal et lui ordonne d’apprendre à lire. Au retour d’Espagne, en avril 1809, la Grande Armée marche vers Augsbourg, puis sur Vienne. Jean-Roch et ses amis montent la garde au château de Schönbrunn où s’est installé « le Petit Tondu » (11 mai) ; ils bivouaquent dans la cour, dorment sur les pavés, passent leur temps libre dans les cafés dansants. Jean-Roch retrouve sa Mizzi et passe une nuit avec elle sur les rives du Danube. Le 19 mai débute la bataille indécise d’Aspern-Essling. Lannes et Masséna ont franchi le Danube et tiennent péniblement la rive gauche contre les 100 000 hommes de l’archiduc Charles ; la Garde impériale vient en renfort (elle jette ses bicornes à l’eau, lui préférant le bonnet noir en poil d’ours). Mortellement blessé, le maréchal Lannes confie à l’Empereur sa femme et ses enfants (« Je meurs pour toi, pour ta gloire, tu seras trahi, abandonné, je t’en conjure, hâte-toi de finir cette guerre ... »). La Franchise est amputé, Jean-Roch gagne ses galons de sergent à Wagram (6 juillet). L’Autriche demande la paix, mais c’est une victoire au goût amer : la campagne a fauché 200 000 hommes (18 min.). (Commentaires généraux, cf. p. 153). – Nota bene : Jean-Roch Coignet apparaît également dans le docu-fiction anglais The Campaigns of Napoleon : 1805 – The Battle of Austerlitz de Graham Holloway en 1993 (cf. infra).
1972® (tv) War & Peace (Guerre et Paix) – 5. Austerlitz (GB) de John Howard Davies. – av. Frank Middlemass (gén. Mikhail Koutouzov), DAVID SWIFT (Napoléon), Donald Douglas (tsar Alexandre Ier), Michael Mulcaster (gén. Karl Mack von Leiberich), Tenniel Evans (gén. Piotr Ivanovitch Bagration), Michael Beint (gén. Franz von Weyrother), John Cazabon (maj.-gén. Michel Barclay de Tolly), Arthur Blake (François Ier d’Autriche), Gerald Hely (maréchal Joachim Murat), Alan Dobie (prince André Bolkonsky). – Reconstitution phénoménale de la bataille d’Austerlitz (cf. p. 566).
1974(tv) Schulmeister, l’espion de l’Empereur – 7. Un village sans importance (FR) de Jean-Pierre Decourt
André Deroual, Cyril Grize/ORTF-Société nouvelle Pathé-Cinéma (1re Ch. 4.3.74) saison 2, 1er épisode, 52 min. – av. Jacques Fabbri (Karl Ludwig Schulmeister), Roger Carel (Hammel), Andrée Boucher (Suzel Schulmeister), Gabriel Cattand (col. Wend), Maurice Chevit (le père Heinrich), William Sabatier (Anne-Jean Savary, duc de Rovigo), André Thorent (gén. Karl Mack von Leiberich), Raoul Billerey (Maréchal), Michel Fortin (von Graffenberg), Guy Delorme (le vicomte), Guy Fox (Pignier), Rico Lopez (Tulipe), Jean-Pierre Decourt (la voix de Napoléon).
Un épisode passablement romancé des exploits du grand espion badois Schulmeister (1770-1853), qui entra au service de Napoléon en 1805, sous les ordres directs de Savary, chef de police, et en qui Jean Tulard voit « le véritable vainqueur d’Ulm ». Le 26 septembre 1805, après avoir passé le Rhin, Napoléon fait croire au général Karl Mack von Leiberich, son adversaire autrichien, que la Grande Armée va atteindre Ulm par le Danube (Murat effectue une manœuvre de diversion dans ce sens) et le surprend sur ses arrières, empêchant sa retraite. Les 25 000 hommes de Mack se retranchent dans la ville d’Ulm, espérant être bientôt secourus par l’armée russe de Koutouzov. Mais celui-ci, en Galicie, croit que Napoléon est encore à Boulogne ! Napoléon décide de ne pas attaquer la ville pour épargner des vies. A court de nourriture, Mack livre la place forte le 20 octobre. (Mack sera condamné à mort par l’empereur d’Autriche, mais il sera emprisonné deux ans puis tombera en disgrâce.) – Dans ce feuilleton, Savary a envoyé Schulmeister et une dizaine de compères dans la ville plusieurs jours avant l’arrivée de Napoléon. L’espion fait porter à ses hommes des uniformes fantaisistes pour simuler la présence inattendue des troupes du maréchal Ney, contraint Mack à se replier dans la cité, puis l’empêche de rejoindre Koutouzov en lui racontant que l’Empeureur a dû rebrousser chemin pour faire face à une insurrection royaliste à Paris. Une fois la ville encerclée, il obtient la capitulation de l’armée autrichienne. Napoléon décide alors d’affronter les Russes dans un « village sans importance » du nom d’Austerlitz (Commentaires généraux, cf. p. 155).
1974(tv) Schulmeister, l’espion de l’Empereur – 8. La Dame de Vienne (FR) de Jean-Pierre Decourt
André Deroual, Cyril Grize/ORTF-Société nouvelle Pathé-Cinéma (1re Ch. 11.3.74), saison 2, 2e épisode, 52 min. – av. Jacques Fabbri (Karl Ludwig Schulmeister), William Sabatier (Anne-Jean Savary, duc de Rovigo), Claude Degliame (comtesse Rittenberg), Pierre Hatet (col. Karl Justus Gruner), Roger Carel (Hammel), Andrée Boucher (Suzel Schulmeister), Gérard Bayle (chambellan), Jean-Pierre Decourt (la voix de Napoléon).
Autre épisode consacré au maître-espion du Premier Empire (cf. film précédent) : en novembre 1805, Napoléon s’apprête à occuper Vienne. Cependant, Karl Justus Gruner (1777-1820), le chef des services secrets prussiens, met sur pied un plan pour tuer l’Empereur. La comtesse Rittenberg, une Autrichienne qui a perdu son enfant et son mari à la guerre, est chargée de l’approcher et de le tuer avec une épingle à cheveux empoisonnée. Schulmeister tente de faire échouer l’entreprise en empruntant l’habit et l’identité d’un jésuite italien, le père Rossi, et en pénétrant jusqu’au Conseil autrichien où Gruner, mis en confiance, lui révèle son plan criminel. Mais Schulmeister est démasqué, incarcéré dans la citadelle de Vienne et condamné à mort. L’entrée des Français dans la capitale lui sauve la vie. Il change le lieu du rendez-vous de Napoléon avec la comtesse, confond celle-ci et l’évacue galamment en Italie (Commentaires généraux, cf. p. 153).
1974[(tv) La bataille d’Austerlitz, 1805 (FR) de Daniel Costelle; série « Grandes Batailles du passé » d’Henri de Turenne et D. Costelle ; ORTF-Pathé Cinéma (FR3 27.11.74), 53 min. – Documentaire comprenant des extraits de Guerre et Paix de Sergueï Bondartchouk (1967).]
1974(tv) Szép maszkok (= Beaux masques) – 3. Minden út hozzád vezet (= Tous les chemins mènent vers toi) (HU) de Tamás Rényi
Magyar Televizió (MTV), 53 min. – av. Teri Tordai, István Dégi, Gábor Koncz, János Körmendi, Dezsö Garas, Gyula Buss, Adám Szirtes, István Holl, László Horvàth. – La Hongrie pendant les guerres napoléoniennes : dans une auberge enfumée, une actrice se confie à un beau hussard. Un épisode d’une télésérie en cinq parties imaginée par Péter Müller.
1977(tv) Császtárlátogatás [= Visite impériale] (HU) de Miklós Hajdufy
Magyar Televizió (MTV)-Mafilm, 91 min. – av. SANDOR LUKACS (Napoléon), Zoltán Benköczy, Teréz Bod, Gabriella Borbás, László Csákányi, Iván Darvas, Teri Földi, Antal Konrád, Tibor Kun, Tamás Major, Sándor Makay, László Mensáros, Zsuzsa Málnay, Károly Mécs, Gábor Nagy.
Dans la ville hongroise de Györ, le 15 juin 1809. Francophile de longue date, la famille Lehner se prépare à recevoir chez elle l’Empereur, qui a remporté la veille à Raab une victoire importante sur les Autrichiens. L’affrontement décisif à Wagram est imminent. Nommé commandant militaire de la cité, le général comte Louis de Narbonne propose au père Lehner, un riche propriétaire terrien, et à son fils adoptif Pali, déserteur de l’armée monarchique par admiration des idées révolutionnaires, de coopérer avec l’occupant et promouvoir les intérêts de l’Empire. Il s’agit de rallier à sa cause des notables du pays, tel le comte Eszerhàzy que Lehner fréquente, et d’infiltrer les campements militaires et les esprits. Les habitants de Györ se font, bon gré mal gré, aux décrets de l’envahisseur, l’évêque dit la messe pour une victoire française à Wagram. C’est un Napoléon épuisé par ses batailles qui se repose dans une chambre que Lehner a mis à disposition dans son palais ; il dédaigne la fête qui se tient au salon, privant de sa présence les membres de la haute société qui se sont réunis pour le voir. Lehner lui envoie sa fille dont la ressemblance frappante avec la comtesse Walewska aurait tout pour lui plaire ... Peine perdue, l’Empereur la met à la couture dans un coin de la pièce pendant qu’il reçoit l’implacable Metternich qui lui annonce sa déconfiture certaine dans la gestion d’un territoire aussi vaste que disparate. La seule voie hégémonique praticable serait à ses yeux une union avec la couronne des Habsbourg. Le Corse congédie le trop hardi conseiller. La soirée touche à sa fin quand Pali est neutralisé par les vigiles : il s’apprêtait à assassiner l’Empereur. Secrètement amoureux de la fille de Lehner, il ne pouvait tolérer l’idée qu’elle ait été jetée en pâture à cet homme dont, de surcroît, les positions contre-révulutionnaires et l’autoritarisme politique contreviennent aux idéaux qu’il s’était naïvement forgés au sujet de la France. Napoléon ordonne son exécution, puis, harassé, il lève le camp, abandonnant la Hongrie à sa tutelle autrichienne. La messe est dite, célébrant à nouveau les Habsbourg.
L’intrigue de cette dramatique aussi intéressante que désillusionnée de György Száraz (publiée en 1984) est située avant plusieurs événements marquants de la campagne de 1809 auxquels elle fait allusion : la victoire décisive de Napoléon à Wagram (6 juillet), la nomination du prince Metternich comme chancelier d’Autriche (8 juillet), l’armistice signé avec l’empereur François I er au lendemain de la bataille à Znaïm (12 juillet) et le traité de paix de Vienne (14 octobre). Enfin, le 29 novembre, Metternich propose au chargé d’affaires français à Vienne un mariage entre Marie-Louise d’Autriche et Napoléon. Rappelons que le 15 mai, Napoléon avait lancé une proclamation aux Hongrois afin de les inciter à se débarrasser des Habsbourg et à organiser une assemblée nationale selon les traditions de leurs ancêtres pour choisir un roi sur le champ de Rákos, proclamation demeurée sans écho. La bataille de Györ (Raab), le 14 juin 1809, qui opposa l’armée d’Italie du vice-roi Eugène de Beauharnais aux troupes levées par les nobles hongrois et les forces impériales et royales sous le commandement de l’archiduc Jean d’Autriche, a marqué profondément la conscience collective hongroise. Elle marque l’échec cuisant de l’insurrection nobiliaire hongroise, ancienne institution magyare à laquelle Vienne fit souvent appel dans le passé et qui sera définitivement dissoute au mois de novembre.
1978® Der Schneider von Ulm (DE) d’Edgar Reitz. – av. Tilo Prückner (Albrecht Berblinger), Karl Augusta (le roi Frédéric Ier de Wurtemberg). – À la mi-octobre 1805, Albrecht Berblinger, pionnier de l’aviation établi à Ulm, est témoin du siège de la ville que défendent les régiments autrichiens du général Mack. Soumis au feu nourri de l’artillerie française, Ulm capitule, tandis que Napoléon poursuit sa route vers Austerlitz (cf. p. 400).
1980(tv+ciné) A névtelen vár (= Le Château sans nom) (HU) d’Éva Zsurzs
Budapest Filmstúdió-Mafilm-Magyar Televízió (MTV), 6 x 65 min. / cinéma : 116 min. – av. Gabor Koncz (le comte Vavel), Gyula Benkö (Vavel père), Vera Pap (Marie de France, fille de Louis XVI), Tordai Teri (Mme Thémire ou Katalyn/Catherine, l’espionne française), Sándor Szabo (marquis Bartholomé de Pervians), Henriette Királyházi (Amélie), Laszlo Inke (Bernath), Ildiko Pécs (Judy), Hyacinth Shepherd (Satan Laci), Gyula Buss (Henry), Zenthe Francis (Matthias), János Gálvölgyi (révérend), Lászlo Márkus (marquis de Cambray).
Les espions de Napoléon pourchassent la dauphine de France, réfugiée à la frontière entre l’Autriche et la Hongrie, dans un mystérieux château sur les rives du lac de Neusiedl (Fertö) entre 1804 et 1809. Un feuilleton télévisé en couleurs tiré du roman d’aventures romantiques de Mór Jókai (1877), remake du film éponyme de 1920 (synopis et commentaires, cf. supra).
Episodes : 1. « A menekülés (La Fuite) » – 2. « Az adomák hazája (La Cachette) » – 3. « A csapda (Le Piège) » – 4. « A párviadal (Le Duel) » – 5. « Katalin-vagy-Themire » (Catherine ou Thermia) » – 6. « A történet vége (Dans les marais) ». – DE-RDA : Die namenlose Burg (tv).
1986Akli Miklós (HU) de György Révész et László Bánk
Mafilm Budapest, Filmstúdiói-Magyar Televízió Müvelödési Föszerkesztöség (MTV), 93 min. – av. István Hirtling (Miklos/Nicolas Akli), ISTVAN MIKO (Napoléon), Marianna Moór (Marie-Louise), Gábor Reviczky (Fritz Bratt), László Helyey (François Ier d’Autriche), György Cserhalmi (baron Istvan Szepessy), István Kovács (col. Smith), Eva Vejmelková (Ilonka Kóvacs), Kornél Gelle (comte Stadion, chancelier impérial), Miklós Benedek (Kolowrat), Lászlóp Csákányi (Lauber), Judit Hernádi (Klementine Velmand).
Synopsis : Bouffon du Prince Électeur de Bavière, Nicolas Akli, un jeune Hongrois, n’épargne personne avec ses plaisanteries acides et la cour est soulagée lorsque le souverain en fait cadeau à l’empereur d’Autriche. À Vienne, le comte Stadion, chancelier impérial, donne l’ordre au chef de la police de faire disparaître l’importun dès son arrivée. Peine perdue, car François I er est séduit par son amabilité et lorsque Akli lui sauve la vie lors d’un attentat organisé pendant une chasse en province, il devient son homme de confiance. L’aide de camp, le colonel Kóvacs, a été tué à la place de l’empereur. Akli est chargé de veiller sur les orphelins qu’il laisse, l’adolescente Ilonka et son petit frère Gyuri. Les années passent. Le 13 mai 1809, Napoléon fait son entrée à Vienne. Devenue une belle jeune femme, Ilonka est éprise d’Akli, mais la police jette celui-ci en prison pour avoir manifesté dans un écrit de la sympathie envers Napoléon. Ilonka et son frère parviennent à prouver à François I er que le document incriminé, fourni par le baron Szepessy (un ennemi du bouffon), ne chantait pas les louanges du Corse, mais en prédisait la chute. Szepessy cherchant à s’emparer d’Ilonka dans son pensionnat, Akli réussit à lui faire croire que la personne qu’il veut faire enlever n’est autre que la fille de l’empereur d’Autriche, l’archiduchesse Marie-Louise, cachée sous un nom d’emprunt parce que son père ne veut pas la donner à Napoléon, qu’il méprise. Dupé, Szepessy renonce à son projet, mais lorsque Akli est sur le point de se marier avec Ilonka, il le blesse d’un coup de pistolet. L’affaire parvient aux oreilles de Napoléon, qui ne sait plus s’il a bien épousé l’archiduchesse ou un sosie. Pour rassurer son gendre français, François autorise le mariage d’Ilonka et du bouffon hongrois.
Une comédie satirique en Eastmancolor tirée du roman de Kálmán Mikszáth (1903), un hobereau désargenté, membre libéral du Parlement hongrois, bouleversé par la trahison des idées révolutionnaires de 1848. Auteur et journaliste très populaire, souvent porté à l’écran, Mikszáth dépeint avec une lucidité impitoyable et une ironie empreinte de cynisme la grande cuisine politique.
1993[(tv) Napoleon Bonaparte and the Battle of Austerlitz (Napoléon Bonaparte et la bataille d’Austerlitz) (GB/US/AU) de Phil Grabsky ; série « Great Commanders », BBC-Seventh Art-Channel Four, 60 min. – Documentaire.]
1993(vd) The Campaigns of Napoleon : 1805 –The Battle of Austerlitz (Les grandes batailles de l’Histoire : Napoléon – Austerlitz) (GB) de Graham Holloway
Bob Carruthers/Cromwell Films Ltd. (Stradford u. Avon), 55 min. – av. Simon Kirk (major-général Karl Freiherr von Stutterheim), Dominique Carrara (cpt. Jean-Roch Coignet), Brian Blessed (narration). – Docu-fiction britannique extrêmement élogieux à l’égard de Napoléon (script de Steve Gillham et Bob Carruthers), avec des scènes reconstituées en Roumanie, des extraits de divers longs métrages (Guerre et Paix de Sergueï Bondartchouk, 1967, I Remember Nelson de Cecil Clarke, 1982) et des commentaires d’historiens tels que David Chandler. Le fameux capitaine Coignet, de la Vieille Garde, intervient pour faire part de ses expériences (cf. supra, la télésérie Jean-Roch Coignet de Claude-Jean Bonnardot, 1969). – US : Austerlitz 1805 – Napoleon’s Greatest Triumph.
1996[(tv) Austerlitz 1805 (FR) de Jacques Dupont ; série « Les grandes batailles du passé », Henri de Turenne, Danielle Costelle (FR5 7.6.96), 55 min. – Documentaire avec extraits de films de fiction.]
2002(tv-mus) Háry János (FR) de Jean-Paul Scarpitta
Opéra national de Montepellier (Mezzo 9.11.02), 119 min. – av. Gérard Depardieu (Háry János parlé), Vladimir Petrov (Háry János chanté), Nora Gubish (Ilke [= Örzse], sa fiancée), YOURI KISSIN (Napoléon), Anne-Sophie Schmidt (l’impératrice Marie-Louise), Denia Mazzola-Gavazzeni (l’impératrice d’Autriche Marie-Thérèse de Bourbon-Naples), Vincent Le Texier (Marci, le cocher), Micha Lescot (l’étudiant).
Pendant les années 1804 à 1814, les souvenirs fantasques d’un Münchhausen magyar, rival de Napoléon pour les faveurs de l’impératrice Marie-Louise (cf. supra, film de 1941). Captation de la comédie lyrique de Zoltán Kodály mise en scène par Scarpitta à l’Opéra Berlioz-Le Corum de Montpellier, sous la direction musicale de Friedmann Layer (Festival de Radio France et de Montpellier Languedoc-Roussillon, 15.7.02). Un spectacle « intello » avec un Depardieu beuglant en pyjama qui dénature l’œuvre originale.
2003(tv) Eroica (GB) de Simon Cellan Jones
Liza Marshall/BBCtv (BBC2 4.10.03), 129 min./84 min. – av. Ian Hart (Ludwig van Beethoven), Tim Pigott-Smith (le comte Dietrichstein), Jack Davenport (prince Franz Lobkowitz), Fenella Woolgar (la princesse Maria Lobkowitz), Claire Skinner (comtesse Josephine von Deym), Lucy Akhurst (comtesse Therese von Brunswick), Frank Finlay (Joseph Hadn), Leo Bill (Ferdinand Ries), Peter Hanson (Wranitzky), Robert Glenister (Gerhardt), Anton Lesser (le copiste Sukowaty), Trevor Cooper (Otto Fischer), Victoria Shalet (Kirsten), Jonathan Aris (Paul Dorfmüller), Ian Thompson (Albrecht Dorfmüller).
Deuxième biopic sur Beethoven mis en relation directe avec Napoléon (cf. supra, Eroica de W. Kolm-Veltée en 1949). Vienne, le 9 juin 1804, au palais du prince Lobkowitz, un des mécènes de Beethoven. Le grand compositeur, ombrageux, rageur, difficile d’approche, présente sa Troisième Symphonie, dite l’ Éroïca ; les musiciens sont déstabilisés, terrorisés. Pendant le concert, Beethoven cherche vainement à persuader sa maîtresse, la comtesse Josephine von Deym, une veuve, de l’épouser ; mais celle-ci refuse son offre pour pouvoir conserver la garde de ses enfants. Joseph Haydn, vieux, affaibli, entend les derniers mouvements de la symphonie et exprime son désarroi admiratif. À la fin du concert, Beethoven réalise qu’il devient sourd. Une projection dans l’avenir montre le compositeur à table avec son disciple Ferdinand Ries ; il apprend que Napoléon vient de se faire couronner empereur. Furieux par ce qu’il considère comme une trahison des idéaux républicains, Beethoven modifie le titre de sa symphonie, initialement intitulée Bonaparte.
Des télescopages en série dans cette production à la fois typique et ambitieuse de la BBC, écrite par Nick Dear, filmée à Londres (Chiswick House, Witanhurst House) et à Isleworth (Osterley Park House), et couronnée du Prix Italia à Turin en 2004. La direction musicale est en main de Sir John Eliot Gardiner (Orchestre Révolutionnaire et Romantique, Londres) ; il s’agit en fait d’une collaboration étroite entre les départements dramatique et musical de la BBC, et une version longue du film permet d’entendre la répétition difficile suivie de la représentation entière de la symphonie.
20051805. Une chronique napoléonienne (FR) de Jan Belletti
Alain et Jan Belletti/Every Pictures, 93 min. – av. Alain Belletti (Edouard Jeanville), Eric Belletti (Alexandre Reynaert), Thierry Convert (le déserteur), FRANK SAMSON (Napoléon), Franck Gaillard, Delphine Gayraud.
Démobilisé et convalescent, Edouard Jeanville, un soldat de la Grande Armée qui a subi de sérieuses blessures en Italie et en Égypte, travaille dans une ferme en Bresse. Malgré ses sentiments pour la jolie fermière, il réintègre son régiment dans l’espoir de retrouver son frère cadet, Etienne, disparu depuis neuf ans et qui se serait engagé dans les hussards. Son périple lors de la campagne de 1805 s’achève en novembre à Austerlitz. – Un travail d’amateur tourné en vidéo haute définition avec des moyens réduits, mais non dépourvu d’une certaine rigueur historique. Tourné en collaboration avec diverses associations historiques, cette chronique se veut une commémoration de la vie des soldats de la Grande Armée à l’occasion du bicentenaire de la bataille d’Austerlitz.
2005[(vd) Austerlitz (CZ) (tv : 2.+4.12.05), 46 min. – av. MARK SCHNEIDER (Napoléon), John Norris (Joachim Murat), Oleg Sokolov (Jean-de-Dieu Soult). – Une reconstitution transmise par la télévision tchèque à l’occasion du bicentenaire de la bataille. Trois mille reconstituants en tenues militaires d’époque, venus du monde entier (dont le Cercle Austerlitz hexagonal), se sont donnés rendez-vous sur place à Slavkov u Brna (République tchèque), sur un tapis de neige. Ils y miment les combats avec 300 chevaux et 50 canons, devant quelque 30 000 spectateurs assemblés sur la colline de Zuran. L’Américain Mark Schneider, vieil habitué de ce type de spectacle, incarne l’Empereur ; Soult est interprété par le président de l’Association russe d’Histoire militaire.]
2006*(tv) Austerlitz, la victoire en marchant / Austerlitz, Napoleons langer Marsch zum Sieg (FR/DE/AT/BE) de Jean-François Delassus
Point du Jour Prod. (PDJ) (Luc-Martin Gousset, Han Ziy)-Arte-NDR-ORF-Editions Montparnasse-RTBF-Tarantula (Arte 11.6.06), 92 min. – av. BERNARD-PIERRE DONNADIEU (Napoléon), Julien Collard (Garnier), Romain Reidler (cpt. Putigny), John Dobrynine (Talleyrand), Marc Shatten (cpt. Yermolov), Gauthier de Fauconval (le prince Dolgorouki), Jonathan Sawdon (William Pitt), John Boyle (Charles James Fox), Marcel Dossogne (maréchal Berthier), Xavier Dujardin (maréchal Soult), Jean Knepper (maréchal Lannes), Fabrice Boutique (Murat), Alexei Lurakov (Pamfil), Sasha Oskar-Weiss (Franz Grabner), Nicolas Taïeb (narration).
Un docu-fiction à grand spectacle intéressant, réalisé en partie sur les lieux historiques en alternant séquences jouées avec le soutien des Associations de reconstitution napoléonienne, des extraits du Guerre et paix soviétique de Sergueï Bondar- tchouk (1967) et des explications savantes de spécialistes. « Pour gagner, il faut marcher vite, et avoir de bonnes chaussures », disait Napoléon. La stratégie de la célèbre bataille, étudiée dans toutes les écoles militaires, est disséquée, mais ce que Delassus veut illustrer de prime abord, c’est comment, après trois mois d’une marche de 1700 kilomètres – une des plus longues et des plus rapides de l’histoire militaire – Napoléon et la Grande Armée sont parvenus à battre des troupes fraîches et supérieures en nombre. Donnadieu est physiquement peu ressemblant, mais son Empereur goguenard et éructant finit par convaincre, notamment quand il piège le jeune prince Dolgorouki, envoyé par le tsar la veille de l’affrontement, en feignant le découragement et la lassitude. Indirectement, à travers les discussions avec Talleyrand, Delassus cherche aussi à montrer comment, à cause d’Austerlitz, la volonté hégémonique et l’appétit de victoires ont peu à peu aveuglé Napoléon et l’ont conduit à sa perte. Tournée à Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais), au Moulin du Berceau à Saint-Aubin-Châteauneuf (Yonne) et en Tchéquie.
2021(tv) Napoleon - Metternich: Der Anfang vom Ende / Napoléon - Metternich: le commencement de la fin (DE/FR) de Mathieu Schwartz et Christian Twente
Arte-ZDF-Tournez S'il Vous Plait-Gruppe 5 Filmproduktion (Arte 8.5.21), 90 min. - av. DAVID SIGHICELLI (Napoléon), Pierre Kiwitt (Klemens Wenzel von Metternich), Theresa Grieve (l'impératrice Marie-Louise), Johannes Olivier Hamm (l'empereur Franz Ier), Edouard Michelon (Joachim Murat), Louis von Bismarck-Osten (Friedrich Staps), Cédric Zimmerlin (Jean Rapp), Thomas Allhaud (Claude François de Méneval), Léa Schwartz (Caroline Murat), Laurent Lafuma (Jean-Nicolas Corvisart), Charlotte Krenz (une villageoise allemande), Charles Morillon (le contrebandier), Philippe Torreton et Hansi Jochmann (narrateurs).
Dresde, 26 juin 1813, au Palais Brühl-Marcolini à Ostra.