Ia - NAPOLÉON ET L'EUROPE

8. NAPOLÉON REDESSINE LA CARTE D’ITALIE

8.4. « La Tosca » de Victorien Sardou et G. Puccini

Drame en cinq actes de Victorien Sardou (1887) et opéra de Giacomo Puccini (1900), sur un livret de Giuseppe Giacoca et Luigi Illica. – Tragédie d’amour et de trahison située les 17/18 juin 1800, au lendemain de la victoire de Napoléon à Marengo (14 juin), dans une Rome pontificale qui sort de deux années d’occupation (et de pillages) par les troupes françaises du Directoire. Depuis la reconquête de la ville par la coalition alliée en été 1799, l’Urbs est provisoirement gouvernée par les souverains bourbons de Naples, Ferdinand IV et Marie-Caroline de Habsbourg. Le pape déposé, Pie VI, est mort en exil en France ; le nouveau pape, Pie VII, élu à Venise le 14 mars, va faire un retour triomphal à Rome le 3 juillet. – Le proscrit jacobin Cesare Angelotti, jadis ardent défenseur de la République parthénopéenne, s’évade de la prison du Château Saint-Ange (Castel Sant’Angelo) et trouve refuge dans l’église de Sant’Andrea della Valle où son ami, le peintre Mario Cavaradossi, termine la décoration d’une fresque. Noble de convictions libérales, ce dernier est l’amant de la célèbre cantatrice Floria Tosca, que convoite le ministre de la police pontificale, le baron Vittelio Scarpia, tortionnaire lubrique. Cavaradossi est arrêté comme complice du fugitif, incarcéré et supplicié. En entendant les cris de son amant, la Tosca révèle la cachette d’Angelotti, qui se suicide. Au palais Farnèse, Scarpia exerce un chantage sur la Tosca : si elle devient sa maîtresse, Cavaradossi aura la vie sauve. La Tosca feint d’accepter le marché ; Scarpia promet que l’exécution ne sera qu’un simulacre et signe le sauf-conduit des deux amants. Mais devant l’aversion de la jeune femme, il se rétracte et donne secrètement un contrordre. La Tosca poignarde le tyran (« voilà le baiser de Tosca ! »), puis se précipite à Saint-Ange afin de rassurer son amant. Mais les fusils sont déjà chargés, à balles réelles. La mort de Scarpia est découverte, Cavadarossi passé par les armes. La Tosca se jette dans le vide.
Nota bene : quoique condamnation de la monarchie absolue et de l’Ancien Régime, l’opéra de Puccini escamote toutes les références historiques et politiques que contient, en abondance, la pièce de Sardou : le soir du drame, Sa Majesté Napolitaine, la reine Marie-Caroline, venue de Livourne et en route pour Vienne, donne une grande fête au palais Farnèse en l’honneur de la victoire autrichienne et de la reddition de Masséna à Gênes. On croit toujours Bonaparte à Milan ou noyé en Égypte ; la rumeur qu’il aurait traversé les Alpes avec ses canons fait rire tout le monde. Le comte Angelotti, le fugitif, est un ancien amant de Lady Hamilton, etc.
La liste des captations télévisuelles de l’opéra de Puccini n’est pas exhaustive.
1908Δ La Tosca – Dronningens Kaerlighed (L’Amour de la reine) (DK) de Viggo Larsen; Ole Olsen/Nordisk Films Kompagni, 184 m./env. 7 min. – av. Carl Alstrup. – Une transposition libre du drame de Sardou. – US : The Queen’s Love.
1908La Tosca (FR) de Charles Le Bargy et André Calmettes
Le Film d’Art (Paris), env. 12 min. – av. Sarah Bernhardt (Floria Tosca), Lucien Guitry (Mario Cavaradossi), Edouard de Max ou André Calmettes ou Paul Mounet (le baron Vittelio Scarpia).
Le drame de Victorien Sardou adapté par Henri Lavedan. Probablement inachevé (en raison de l’agenda de Mme Bernhardt), ce film tourné au studio des Pyrénées (Film d’Art) à Neuilly sort néanmoins brièvement à la salle Charras à Paris en décembre 1908, avant d’être remplacé l’année suivante (cf. infra) par une autre version avec un casting différent. Sardou tailla le personnage de la Tosca à l’intention de Sarah Bernhardt, qui l’interpréta d’abord à Paris, au Théâtre de la Porte Saint-Martin (24.11.1887), à Milan où Puccini fut bouleversé (1889), ensuite en tournée aux États-Unis, etc., enfin une dernière fois à Paris au Théâtre Sarah Bernhardt en mai 1909. Selon certaines rumeurs, le film aurait été détruit à la demande de la vedette. Mystères de la résurrection : il est pourtant distribué en octobre 1912 aux États-Unis par Universal Features dans une version de 2 bobines, soit d’environ 25 minutes, avec Edouard de Max en Scarpia, Georges Deneubourg en Cavaradossi et G. Maury en Angelotti (cf. The Moving Picture World, 19.10.12). Un casse-tête pour historiens.
1909La Tosca (FR) de Charles Le Bargy
Charles Jourjon/Le Film d’Art-Pathé Frères S.A. (Paris), 380 m./1 bob./env. 15 min. – av. Cécile Sorel (Floria Tosca), Charles Le Bargy (le baron Vittelio Scarpia), René Alexandre (Mario Cavaradossi), Charles Mosnier (Cesare Angelotti). – La trame de Sardou enregistrée en janvier 1909 au théâtre du Film d’Art à Neuilly avec des artistes de la Comédie-Française, en remplacement du film précédent.
1915Δ The Song of Hate (US) de J. Gordon Edwards ; William Fox, J. Gordon Edwards/Fox Film Corp., 6 bob./ 70 min. – av. Betty Nansen (Floria Tosca), Arthur Hoops (baron Scarpia), Fritz de Lindt (Mario de Campo/Maurice Saranof), Dorothy Bernard (Marie), Claire Whitney. – La trame de Sardou est transposée dans le milieu de l’espionnage en Europe en 1914/15, scénario de Rex Ingram.
1917Δ The Chalice of Sorrow (US) de Rex Ingram ; Universal Bluebird Photoplays Inc., 5 bob. – av. Cleo Madison (Lorelei), Wedgewood Nowell (gouv. Francisco de Sarpina)., John McDermott (Clifford). – Première réalisation d’Ingram à Hollywood. La trame de Sardou est déplacée au Mexique.
1918Tosca (IT) d’Alfredo De Antoni
Caesar-film Roma, 2105 m. – av. Francesca Bertini (Floria Tosca), Gustavo Serena (Carlo Cavaradossi), Alfredo De Antoni (le baron Vittelio Scarpia), Olga Benetti (la marquise Attavanti), Luigi Cigoli (le sacristain), Vittorio Bianchi, Franco Gennaro.
Basé sur Sardou, le film évoque en un bref prologue la chute de la République romaine. En Italie, seule la superdiva Francesca Bertini est jugée capable de faire oublier Sarah Bernhardt dans le rôle-titre.
1918La Tosca (US) d’Edward José
Adolph Zukor/Famous Players-Lasky Corp.-Paramount Pictures, 5 bob. – av. Pauline Frederick (Floria Tosca), Frank Losee (le baron Vittelio Scarpia), Jules Raucourt (Mario Cavaradossi), Henry Hebert (Cesare Angelotti), W. H. Forestelle (brigadier Spoletti).
Le drame de Sardou adapté par Charles E. Whittaker, tourné à grands frais aux studios de Marathon Street à Hollywood, à Jacksonville et à Fort Marion, en Floride, avec d’impressionnants décors. Pauline Frederick émeut en amoureuse passionnée, mais déçoit dans les scènes de tragédie. Edward José, réalisateur-acteur d’origine belge, la dirige cette même année également dans Résurrection d’après Tolstoï et dans Fédora de Sardou.
1940/41*Tosca (IT) de Carl Koch [et Jean Renoir]
Michele Scalera, Angelo Rizzoli/Scalera Films-ERA Film, Roma (Vittorio Mussolini), 105 min. – av. Imperio Argentina [voix : Mafalda Favero] (Floria Tosca), Rossano Brazzi [voix : Ferruccio Tagliavini] (Mario Cavaradossi), Michel Simon (le baron Vittelio Scarpia), Adriano Rimoldi (comte Cesare Angelotti), Carla Candiani (la marquise Attavanti, sa sœur), Nicolas Diaz Perchicot (le brigadier Sciarrone), Armando Petroni (Cecco), Juan Calvo (le brigadier Spoletta), Massimo Girotti (Massimo, un conspirateur), Olga Vittorio Gentillin (Marie-Caroline de Habsbourg, reine de Naples), Nicola Maldacea (le peintre de la cour), Claudio Ermelli (maestro Paisiello), Pina Piovani (Angela), Liana Del Balzo (la dame de compagnie de la marquise Attavanti), Renato Gabrielli (le garçon de l’église), Memmo Carotenuto (le coiffeur de la reine), Enzo Musumeci Greco (l’officier de la reine).
La participation de Jean Renoir, alors au sommet de sa carrière, à cette production d’un pays fasciste allié à Hitler choque les amis du grand cinéaste et déconcerte la profession, ce d’autant plus que La Grande Illusion (1937) vient d’être interdite en Italie. De surcroît, Renoir a longtemps flirté avec le parti communiste français (La Vie est à nous en 1936, La Marseillaise en 1938). Le projet de La Tosca est annoncé par la ERA-Film (président : Vittorio Mussolini, fils du Duce) en septembre 1938 déjà, d’abord mis en scène par Geza von Bolvary, avec Martha Eggerth, Jan Kiepura et Raoul Aslan, sans suite (script de Giuseppe Adami, Georg C. Klaren, Mario Soldati et Renato Castellani). Carmine Gallone prend la relève, avec, cette fois, Viviane Romance, Georges Flamant et Ermete Zacconi, mais Vittorio Mussolini courtise discrètement Renoir depuis le printemps 1937 et espère séduire l’artiste pour une coproduction de prestige avec la France. Renoir, plus apolitique qu’on ne le croit (« mon pays est celui qui me donne à bouffer ! »), n’est pas insensible à son offre, le sujet de la Tosca lui paraissant donner matière à « un extraordinaire film policier, avec poursuites et tout ... ». Les polémiques et l’accueil glacial qui entourent la sortie de La Règle du jeu dans l’Hexagone (début juillet 1939), mais sans doute aussi un certain opportunisme, incitent Renoir à changer d’air, en dépit du « pacte d’acier » existant entre Mussolini et Hitler et les menaces d’un conflit européen imminent.
Un premier séjour à Rome pour la rédaction du scénario (le drame de Sardou, et non l’opéra de Puccini) à la mi-août 1939 est interrompu par la mobilisation, et Renoir, lieutenant de réserve, est incorporé au Service cinématographique de l’armée. Mais le projet d’une « liaison cinématographique Paris-Rome » reste d’actualité, et le gouvernement français y est plutôt favorable, Mussolini n’ayant pas encore déterré la hache de guerre. Renoir envisage diverses réalisations à Rome pour l’été 1940 tels que « Beatrice Cenci » et un « Madame Sans-Gêne » d’après Sardou. En décembre 1939, le cinéaste retourne à Rome, où il s’occupe des repérages et termine le scénario avec Alessandro De Stefani, son assistant et ami allemand Carl Koch et le jeune Luchino Visconti, son assistant de Les Bas-fonds et Partie de campagne ; parallèlement, il prodigue des cours au Centro Sperimentale di Cinematografia. Le casting (essentiellement français) est long à mettre au point. Renoir songe à Michèle Alfa, puis à Micheline Presle (Tosca), à Louis Jourdan (Cavaradossi) et à son frère Pierre Renoir (Scarpia) – mais les acteurs choisis n’obtiennent pas l’autorisation de quitter leur pays, la situation étant devenue trop tendue. Le 6 mai, premier tour de manivelle, la nuit dans le palais Farnèse et sur le pont du château Saint-Ange (ouverture du film), une chevauchée et un enchaînement compliqué de travellings et de panoramiques qui suit deux officiers de la reine de Naples venus annoncer la prétendue défaite de Napoléon à Marengo. Le 19, trois semaines avant la déclaration de guerre de l’Italie à la France, Renoir est rappelé à Paris après avoir été bousculé par des fascistes dans un restaurant. La Scalera ne pouvant abandonner le film qui a déjà englouti une fortune, « Carlo » Koch est désigné pour succéder à Renoir sur le plateau ; sa femme, la réalisatrice Lotte Reiniger (auteur de merveilleux films d’animation) et Visconti sont bombardés « collaborateurs artistiques » ; le tournage reprend le 12 juin aux studios romains de la Scalera, soit le surlendemain de l’entrée en guerre. La production se détourne des acteurs français envisagés. Renoir n’aura tourné que le début du prologue et n’aura eu l’occasion de travailler avec aucun acteur. Imperio Argentina, vedette espagnole née en Argentine, reprend le rôle de la Tosca, Rossano Brazzi, jeune beau qui monte, celui de son amant. Michel Simon, citoyen suisse qui séjourne justement à Rome pour La Comédie du bonheur de Marcel L’Herbier, se glisse sous la perruque de Scarpia et son bigot sadique est mémorable (même si sa voix est doublée).
Mal vu dans le Reich en raison de sa proximité avec Brecht et la gauche, Carl Koch passe ces années ballotté entre Paris, Rome, Londres et Berlin. En reprenant La Tosca à son compte, il se conforme aux intentions du maître, dont il est un collaborateur très proche depuis La Grande Illusion (1937). L’action de ce mélo spectaculaire n’est plus confinée aux trois lieux classiques de l’opéra, mais ajoute une scène à la cour de Marie-Caroline où la Tosca doit se produire (la reine recommande à Scarpia de manger le sorbet à la pistache avant celui au citron tandis qu’un peintre bouffon immortalise Sa Majesté en vainqueur de la Révolution jacobine), une autre dans une villa de la campagne romaine au milieu des ruines antiques où Angelotti se cache dans le puits et des plans de diverses rues de la capitale (les conspirateurs aident Angelotti à s’enfuir, les barrages de la police). Seuls trois airs de Puccini sont intégrés dans l’action ainsi que certains motifs de la partition arrangés par Umberto Mancini. Le résultat, fluide, splendidement photographié (Ubaldo Arata, chef opérateur de Rossellini pour Rome, ville ouverte en 1945), est plus qu’honorable. Cette approche avortée du baroque italien (que Renoir reprendra avec Le Carrosse d’or), loin de tout excès de théâtralité, pourrait bien avoir influencé la mise en scène de Visconti par son « hyperréalisme concentré sur le détail en apparence anecdotique et sa direction d’acteurs antihéroïque, mettant en lumière la fragilité des personnages » (Claude Rieffel). – US : The Story of Tosca (1947).
1946Δ Davanti a lui tremava tutta Roma (Devant lui tremblait tout Rome) (IT) de Carmine Gallone ; Excelsa Film, 110 min. – av. Anna Magnani (Ada [Tosca]), Tito Gobbi (Marco [Cavaradossi]), Hans Hinrich (l’officier allemand [Scarpia]), Gino Sinimberghi (Frank, le parachutiste anglais). – Version moderne : Rome sous l’occupation nazie.
1952(tv-mus) Tosca (GB) de George R. Foa
(BBC 18.5.54), 105 min. – av. Victoria Elliott (Floria Tosca), Kenneth Neate (Mario Cavaradossi), Roderick Jones (le baron Vittelio Scarpia).
Production de télévision en noir et blanc de l’opéra de Puccini enregistrée en live, avec le London Symphony Orchestra sous la direction musicale de Charles Mackerras.
1953(tv-mus) Tosca (US) de Samuel Chotzinoff (th) et Kirk Browning (tv)
NBC Opera Theatre (NBC 23.1.55), 120 min. – av. Leontyne Price (Floria Tosca), David Poleri (Mario Cavaradossi), Josh Wheeler (le baron Vittelio Scarpia).
Production télévisée américaine en noir et blanc de l’opéra de Puccini, interprété par le Symphony of the Air Orchestra sous la direction de Peter Herman Adler. Le premier grand rôle de la cantatrice noire Leontyne Price, film interdit de diffusion sur certaines chaînes racistes des États du sud.
1955(tv-mus) Tosca (IT) de Silverio Blasi
Radio-Televisione italiana (RAI 24-9-55), 113 min. – av. Renata Heredia (Floria Tosca), Franco Corelli (Mario Cavaradossi), Carlo Tagliabue (le baron Vittelio Scarpia), Antonio Sacchetti (Cesare Angelotti).
Captation de l’opéra de Puccini, joué par l’orchestre et le chœur de la RAI à Milan sous la direction d’Antonio Votti.
1956Tosca (IT) de Carmine Gallone
Produzioni Gallone, Roma (C. Gallone, Giulio Fiaschi, Manlio Morelli), 110 min. – av. Franca Duval [voix : Maria Caniglia] (Floria Tosca), Franco Corelli (Mario Cavaradossi), Afro Poli [voix : Gian Giacomo Guelfi] (le baron Vittelio Scarpia), Antonio Sacchetti (Cesare Angelotti), Vito De Taranto (le sacristain), Aldo Corelli (brigadier Sciarrone), Ferdinando Alfieri.
Une fastueuse transposition de l’opéra à l’écran – spécialité du vétéran Gallone – enregistrée à Cinecittà en CinemaScope et en Eastmancolor par le chef-opérateur Giuseppe Rotunno, le légendaire collaborateur de Fellini et Visconti. Renzo Rossellini arrange et dirige la musique de Puccini.
1959(tv) A Tosca (BR) de Wanda Kosmo
Série "Grande Teatro Telespark" (Rio de Janeiro) (TV Tupi 16.2.59), 105 min. - av. Sérgio Cardoso, Wanda Kosmo.
Dramatique d'après Victorien Sardou adapté par Wanda Kosmo.
1961(tv-mus) Tosca (DE) de Werner Dobberin
Süddeutscher Rundfunk-Staatsoper Stuttgart (SDR 1961), 126 min. – av. Renata Tebaldi (Floria Tosca), George London (le baron Vittelio Scarpia), Eugene Tobin (Mario Cavaradossi), Gustav Grefe (Cesare Angelotti), Hubert Buchta (brig. Spoletta), Siegfried Fischer-Sandt (brig. Sciarrone), Heinz Cramer (le sacristain).
Captation de l’œuvre de Puccini à l’Opéra de Stuttgart, direction musicale de Franco Patané.
1973*Tosca (Une Tosca pas comme les autres) (IT) de Luigi Magni
Franco Committeri, Ugo Tucci/Quasars Film Company-UTI Produzioni Associate, 103 min. – av. Monica Vitti (Floria Tosca), Vittorio Gassman (le baron Vittelio Scarpia), Luigi Proietti (Mario Cavaradossi), Umberto Orsini (Cesare Angelotti), Marisa Fabbri (Marie-Caroline de Habsbourg, reine de Naples), Aldo Fabrizi (le gouverneur de Rome), Fiorento Fiorentini (brigadier Spoletta), Gianni Bonagura (brigadier Sciarrone), Ninetto Davoli (Ussano Nero), Goffredo Pistoni (le sacristain), Ninetto Davoli (un hussard), Franca Sciutto, Lorenzo Piani.
La Tosca en mode comique, respectant toutefois scrupuleusement le déroulement connu et la fin tragique du drame : à la fois reconstitution historique très soignée et insolente revue musicale brechtienne, le film se veut une relecture politique en dialecte romain, tantôt ironique, tantôt grotesque de la pièce de Victorien Sardou. L’entreprise, à moitié réussie mais bienvenue, a été imaginée et écrite par Luigi Magni (également auteur des textes des chansons populaires d’Armando Trovajoli, en remplacement des arias de Puccini). Son humour n’évite pas toujours la facilité, la narration souffre de ruptures incongrues de ton (dues en partie au mélange de chanteurs professionnels tels que Gigi Proietti et d’amateurs), mais le message caustique dénonce sans ambage le pouvoir en place, bien plus que des individus, un ramassis de pantins au service d’égoïstes cyniques. La Tosca elle-même est ici une artiste irresponsable dont la jalousie (elle craint, bien à tort, que la marquise Attavanti soit l’amour secret de Cavaradossi) entraîne la perte d’Angelotti et l’arrestation du peintre. L’action a lieu le 14 juin 1800, le jour même de la bataille de Marengo, et à l’église de Sant’Andrea, le pape Pie VII, obèse et stupide, supplie le Christ (en mauvais vers) de provoquer la défaite de l’horrible Bonaparte ; sa supplication est interrompue par une nouvelle merveilleuse : les Autrichiens ont gagné à Marengo, les prélats entament en chœur l’« Alleluïa »... L’anticléricalisme viscéral de Magni n’est plus à démontrer, lui qui s’est fait une spécialité de traiter en farce iconoclaste l’histoire de la Rome pontificale pendant le Risorgimiento (Nell’anno del Signore en 1969, In nome del Papa Re en 1977). La photo en Technicolor de Franco Di Giacomo (l’opérateur de Bertolucci, Comencini, Bolognini, des frères Taviani) est superbe, et Gassman fait un Scarpia hilarant d’hypocrisie et de monstruosité poudrée. Un échec public total. – Adaptation scénique en mars 2011 par Luigi Magni et Renato Greco (« Theatro Greco » à Rome).
1976(tv-mus) Tosca (IT/DE) de Gianfranco De Bosio
UNITEL, 117 min. – av. Raina Kabaivanska (Floria Tosca), Plácido Domingo (Mario Cavaradossi), Sherill Milnes (le baron Vittelio Scarpia), Giancarlo Luccardi (Cesare Angelotti), Alfredo Mariotti (le sacristain), Mario Ferrara (brigadier Spoletta), Bruno Grella (brigadier Sciarrone), Domenico Medici (geôlier), Plácido Domingo Jr. (un berger).
Une captation de la mise en scène de Gianfranco De Bosio, également cinéaste (Le Terroriste, 1963) et téléaste (Moïse avec Burt Lancaster, 1974), soutenue par le New Philharmonic Orchestra sous la direction de Bruno Bartoletti. Visuellement magnifique grâce à un tournage partiel dans les décors baroques authentiques (l’église de Sant’Andrea, le palais Farnèse, le château Sant’Angelo). Le Scarpia du baryton américain Sherill Milnes sort du lot, bel homme, encore jeune et élégant, homme du monde et serpent malfaisant à la fois.
1981(tv-mus) Tosca (FR) de Jésus Etcheverry (th) et Pierre Cavassilas (tv)
France 3 Marseille-Opéra de Nice (FR3 18.4.81), 110 min. – av. Montserrat Caballé (Floria Tosca), José Carreras (Mario Cavaradossi), Juan Pons (le baron Vittelio Scarpia), Sergios Kalabakos (Cesare Angelotti), Orazio Mori (le sacristain), Alfred Navello (brig. Spoletta), Patrick Rocca (brig. Sciarrone).
Captation de l’œuvre de Puccini à l’Opéra de Nice, avec l’Orchestre philharmonique de Nice sous la direction de Jésus Etcheverry.
1982(tv-mus) Tosca (FR) de Jean-Claude Auvray (th) et Dirk Sanders (tv)
Opéra de Paris-Antenne 2 (A2 1982) 118 min. – av. Kiri Te Kanawa (Floria Tosca), Ernesto Veronelli (Mario Cavaradossi), Ingvar Wixell (le baron Vittelio Scarpia), Antonio Zerbini (Cesare Angelotti), Philippe Duminy (le sacristain), Robert Dumé (brig. Spoletta), Joean Soumagnas (le geôlier).
Captation de l’opéra de Puccini joué par l’Opéra national de Paris au Palais Garnier. Sur scène (22 mars-12 juillet 1982), le rôle-titre est interprété en alternance par Gwyneth Jones, Maria Slatinaru et Kiri Te Kanawa.
1984(tv-mus) Tosca (IT) de Sylvano Bussotti (th) et Brian Large (tv)
RAI-Arènes de Vérone, 125 min. – av. Eva Marton (Floria Tosca), Jaume Aragall (Mario Cavaradossi), Ingvar Wixell (le baron Vittelio Scarpia), Alfredo Giacomotti (Cesare Angelotti), Graziano Polidori (le sacristain), Giuseppe Zecchillo (brig. Sciarrone), Mario Ferrara (brig. Spoletta).
Captation de l’opéra de Puccini dans les Arènes de Vérone, sous la direction musicale de Daniel Oren.
1985*(tv-mus) Tosca (US) de Franco Zeffirelli (th) et Kirk Browning (tv)
Metropolitan Opera Association (PBS 27.3.85), 127 min. – av. Hildegard Behrens (Floria Tosca), Plácido Domingo (Mario Cavaradossi), Cornell MacNeil (le baron Vittelio Scarpia), James Courtney (Cesare Angelotti), Italo Tajo (le sacristain), Russell Christopher (brig. Sciarrone), Anthony Laciura (brig. Spoletta), Richard Vernon (le geôlier).
Captation mémorable de la mise en scène de Zeffirelli au Metropolitan Opera House à New York, récompensée d’un Emmy Award.
1992(tv-mus) Tosca nei luoghi e nelle ore di Tosca / Tosca : In the Settings and at the Times of Tosca (IT) de Giuseppe Patroni Griffi
Andrea Andermann/RAI 1-Rada-Linea A2-ARD-ZDF-BBC-Channel Four (RAI 11.-12.7.92), 195 min. – av. Catherine Malfitano (Floria Tosca), Placido Domingo (Mario Cavaradossi), Ruggero Raimondi (le baron Vittelio Scarpia), Giacomo Prestia, Giorgio Gatti, Mauro Buffoli, Silvestro Sammaritano, Franco Federici, Simone Scatarzi.
Scénariste (La Fille à la valise de Valerio Zurlini, 1961), auteur dramatique, metteur en scène et réalisateur napolitain, Giuseppe Patroni Griffi réunit une affiche exceptionelle (Malfitano, Domingo, Raimondi) pour le premier spectacle musical de la RAI conçu selon une formule originale : l’opéra de Puccini tourné en direct, en temps réel et en Mondovision sur les lieux authentiques de l’action à Rome (Sant’Andrea della Valle, château Sant’Angelo, palais Farnèse), tandis que Zubin Mehta dirige l’orchestre de la RAI dans l’auditorium du Conservatoire de Santa Cecilia. L’audimat bat tous les records avec une diffusion dans 107 pays de 5 continents. Lauréat de 3 Emmy Awards en 1992.
2001*Tosca (FR/IT/GB/DE/CH) de Benoît Jacquot
Daniel Toscan du Plantier/Euripide Productions (Paris)-France 3 Cinéma-Integral Film (Dagmar Hürler)-Veradia Film-Télé+ (Alessandro Verdecchi)-Seven Stars Systems-Axiom Films London (Douglas Cummins), 126 min. – av. Angela Georghiu (Floria Tosca), Roberto Alagna (Mario Cavaradossi), Ruggiero Raimondi (le baron Vittelio Scarpia), David Cangelosi (brigadier Spoletta), Sorin Coliban (brigadier Scriarrone), Enrico Fissore (le sacristain), Maurizio Muraro (Cesare Angelotti), Gwynne Howell (le geôlier).
Le dernier des grands films-opéras de la prestigieuse série lancée par Toscan du Plantier (Don Giovanni de Joseph Losey, 1979, La Traviata de Franco Zeffirelli, 1982, Carmen de Francesco Rosi, 1984, La Bohème de Luigi Comencini, 1988, Boris Godounov d’Andrzej Zulawski, 1989, et Madame Butterly de Frédéric Mitterrand, 1995). Le tournage s’opère avec une des premières caméras numériques dans un studio de la banlieue de Cologne (des immenses décors à l’échelle réelle construits à Rome et transportés par avion) et dans la capitale italienne pour les vues historiques. La musique est enregistrée à Londres (Abbey Road Studios) par les solistes, les chœurs et l’orchestre de Covent Garden, dirigés par Antonio Pappano. La réalisation de Benoît Jacquot est à la fois sensuelle, chromatiquement séduisante et rigoureuse (avec insertions infographiques d’images en noir et blanc où l’on voit inopinément l’orchestre ou les chanteurs en studio) : l’interprétation en play-back autorise des mimiques en gros plan rarement vues dans ce type de films, voire des passages murmurés que l’on entend en même temps chantés en fond sonore. Complété par ces artifices de distanciation proprement cinématographiques, le résultat, plus original que convaincant, s’approche parfois du clip psychédélique, mais les amateurs d’opéra n’ont pas à se plaindre : Georghiu et Alagna (mariés dans la vie) sont saisissants. Avant-première mondiale au festival de Venise 2001, puis au festival de Toronto.
2020(tv) Tosca / Scarpia, fantôme de la nuit (FI) de Christof Loy (th) et Hannu Kamppila (tv)
Opéra National de Finlande/Finlands nationalopera, Helsinki (Arte 5.4.20), 125 min. - av. Ausriné Stundité (Flora Tosca), Andrea Carè (Mario Cavaradossi), Tuomas Pursio (le baron Vittelio Scarpia), Tapani Plathan (Cesare Angelotti), Matias Haakana (Spoletta), Nicholas Söderlund (Sciarrone), Heikki Aalto (le sacristain), Henri Uusitalo, Iitu Pelo.