III - L’ITALIE

8. LE MONDE DES ARTS

8.3. Michel-Ange

Michelangelo Buonarroti (1475-1564), peintre et sculpteur toscan.
1909Rolla e Michelangelo (IT) de Romolo Bacchini
Vesuvio Films, Napoli, 250 m. - av. Cattaneo (Michelangelo), Egidio Rossi (le sculpteur Luigi Rolla), Tina Somma (Stefana, fille du sénateur Costa), Mimi Fiore (le frère de Rolla), Assunta Somma (Eleanora).
À Florence, Michel-Ange découvre le talent exceptionnel sculpteur Luigi Rolla, qui a créé une statue de Stefana, la fille du sénateur Costa. Ce dernier estime toutefois sa famille offensée et envoie la soldatesque pour s'emparer et détruire le chef-d'oeuvre que Michel-Ange a fait transporter dans son propre atelier. Rolla s'oppose à cette mainmise et en meurt. - Un scénario d'après l'opéra lyrique en un acte Michelangelo e Rolla de Crescenzo Buongiorno (mus.) et Ferdinando Stiatti, ou Luigi Rolla e Michelangelo, mélodrame tragique en 3 actes de Federico Ricci (mus.) et Salvadore Cammarano (1841).
1936® The Cardinal (GB) de Sinclair Hill. - av. Wilfred Fletcher (Michelangelo). - cf. Rome, chap. 5.1.
1953(tv) The Recognition of Michelangelo - January 1504 (US) de Sidney Lumet
Série " You Are There " no. 33, CBS News New York (CBS 15.11.53), 30 min. - av. James Lipton (Michelangelo), Walter Cronkite (le journaliste tv). - Sidney Lumet (qui fera sensation au cinéma avec son premier film, Twelve Angry Men / Douze Hommes en colère en 1957) signe 14 épisodes de la fameuse série " You Are There ". On y confronte des personnalités ou événements marquants du passé avec les médias modernes : un journaliste présente Michel-Ange et sa sculpture de David, enfin terminée après trois ans et placée sur insistance de l'artiste devant le Palazzo Vecchio à Florence pour symboliser la détermination d'une jeune république face au tyran, sous-entendu les Médicis (l'adolescent et son lance-pierre face à Goliath). Un scénario d'Abraham Polonsky ; l'auteur blacklisté par le maccarthysme signe ici sous le pseudonyme de Jeremy Daniel.
1963® Il magnifico avventuriero (IT/ES/FR) de Riccardo Freda. - av. Andrea Bosic (Michelangelo). - cf. chap. 8.5
Gian Maria Volonté en Michel-Ange dans « Vita di Michelangelo » (tv 1964) de Silverio Blasi.
1964(tv) Vita di Michelangelo - 1. Il David - 2. La Sistina - 3. Il Giudizio (La Vie de Michel-Ange - 1. Le David - 2. La Sixtine - 3. Le Jugement dernier) (IT) mini-série de Silverio Blasi
RAI Radiotelevisione Italiana, série " I grandi personaggi " (Rete Nazionale 13-20.12.64), 3 parties : 83, 75 et 81 min. - av. Gian Maria Volonté (Michelangelo), Fosco Giachetti (Lodovico Buonarroti), Mario Colli (Donato Bramante), Umberto Orsini (Tommaso de Cavalieri), Lydia Alfonsi (Vittoria Colonna, marquise de Pescara), Carlo D'Angelo (Lorenzo de' Medici), Andrea Lala (Michelangelo jeune), Andrea Cecchi (Francesco Strozzi), Franco Balducci (Leonardo da Vinci), Antonio Crast (le pape Jules II), Vittorio Batarra (Raffaello), Lydia Alfonsi (Vittoria Colonna), Giuseppe Caldini (l'architecte Francisco de Holanda), Gino Rumor (le pape Clément VII), Giovanni Dolfini (le pape Paul III), Guido Bertone (Buonarroto), Alberto Marescalchi (Giovansimone), Antonio Battistrella (Pier Soderini), Massimo Foschi (Piero Torrigiani), Gianni Simonetti (Giuliano de Sangallo), Pierluigi Zollo (Leonardo), Loris Gizzi (le marchand), Augusto Mastrantoni (Bertoldo), Nino Scardina (le héraut), Alberto Ceceini (un gamin), Gino Donato (Paolo Rucellai), Loris Gafforio (Jacopo Galli), Riccardo Cucciolla (narration).
Une production atypique de la RAI mise sur pied pour célébrer les 500 ans de la mort de l'artiste, à cheval entre le documentaire et la fiction didactique. L'ingénieuse scénographie mise au point par Maurizio Mammi permet de multiples modifications des lieux sur un même plateau auxquels Gian Maria Volonté, fascinant, sait donner vie. À ses côtés, Lydia Alfonsi, beauté racée et grande comédienne de théâtre (notamment chez Giorgio Strehler), campe Vittoria Colonna, épouse de Fernando de Avalos, marquise de Pescara, femme de lettres, aristocrate et amie proche de Michel-Ange. Silverio Blasi, un des pères des premières grandes séries dramatiques de la télévision italienne, fera à nouveau appel à Volonté pour le rôle-titre de la mini-série Caravaggio - genio e sregolatezza (1967, cf. infra). - DE : Das Leben des Michelangelo.
1965* The Agony and the Ecstasy (L'Extase et l'Agonie) (US) de Carol Reed
Carol Reed, Elmo Williams, Darryl F. Zanuck/International Classics Inc.-20th Century-Fox Film Corp., 138 min. - av. Charlton Heston (Michelangelo), Rex Harrison (le pape Jules II), Diane Cilento (Contessina Antonia Romola de' Medici, dite Tessina), Harry Andrews (l'architecte Donato Bramante), Adolfo Celi (Giovanni de' Medici, futur pape Léon X), Tomas Milian (Raffaello), Venantino Venantini (Paride de' Grassi, maître des Cérémonies pontificales), Alberto Lupo (Francesco Maria della Rovere, duc d'Urbino), John Stacy (l'architecte Giuliano da Sangallo), Alec McCowen (un cardinal), Fausto Tozzi (un contremaître), Lars Bloch (le baron Kaspar von Silenen, capitaine de la Garde pontificale), Paolo Mapagalotti, Furio Meniconi, Adolfo Pezzini, Amerigo Santarelli, Maxine Audley, Richard Pearson, Marvin Miller (narration).
Synopsis : Rome en 1508. Revenant de livrer bataille à la tête de son armée contre les États voisins qui contestent son autorité, le " pape guerrier " Jules II charge Michel-Ange d'abandonner la sculpture des quarante statues qu'il lui a commandées pour son tombeau et de décorer le plafond de la nouvelle Chapelle Sixtine. Prétextant qu'il n'est pas peintre, Michel-Ange refuse d'abord, se soumet ensuite, puis découragé par la médiocrité de ses premières esquisses, il les détruit en s'enfuit. Caché dans les carrières de Carrare, il échappe aux soldats lancés à ses trousses, mais un soir lors d'un éclatant coucher de soleil, il a une vision de la Genèse. Il implore le Saint Père en fureur de lui pardonner ses défaillances et se remet au travail contre un salaire dérisoire. Ses premières fresques font scandale (" un étalage de nudités digne d'un temple grec ") parmi les prélats conduits par Donato Bramante, l'architecte officiel du Saint-Siège, mais, quoique de plus en plus impatient, le pape le défend contre tous ses ennemis. Tantôt saisi par une passion fébrile, puis par le découragement, victime d'une cécité temporaire suivi d'une chute accidentelle, le peintre est soutenu par la sœur de l'évêque Giovanni, la comtesse Antonia Romola de Médicis, mariée mais amoureuse sans espoir de Michel-Ange (insensible à ses avances). Irrité par les absences du peintre, le pape feint un temps d'embaucher Raphaël pour achever son travail. En 1512, Jules II revient de la guerre battu et blessé, son entourage le dit mourant. Michel-Ange lui redonne courage en lui montrant son œuvre presque achevée ; à bout de forces, le pape se lève, dit la messe sous le plafond de " sa " Chapelle Sixtine, puis ordonne à l'artiste de terminer son tombeau - dont il aura bientôt besoin.
Le scénario de Philip Dunne repose sur le roman The Agony and the Ecstasy (La Vie ardente de Michel-Ange, 1961) de l'Américain Irving Stone, déjà auteur en 1934 de Lust for Life (La Vie passionnée de Vincent van Gogh) dont Vincente Minnelli tira un beau film en 1956 ; le livre décrit toute la vie de l'artiste (décédé à l'âge de 89 ans), le film n'en reprend qu'un chapitre de quatre ans. Darryl F. Zanuck à la 20th Century-Fox en acquiert les droits en 1962 et approche plusieurs réalisateurs, notamment Fred Zinnemann qui envisage Burt Lancaster en Michel-Ange et Spencer Tracy ou Laurence Olivier en pape, puis Luchino Visconti et Peter Glenville, avec Richard Burton ou Marlon Brando. Finalement, c'est Charlton Heston (Ben Hur, El Cid) qui est retenu et la mise en scène confiée à Sir Carol Reed, cinéaste britannique de prestige, responsable de plusieurs classiques, dont l'incontournable The Third Man (Le Troisième homme) en 1949, mais depuis quelque temps en perte de vitesse. Le sujet étant voué aux superlatifs et bien décidée à en mettre plein les yeux, la 20th Century-Fox opte pour un tournage intégral en Italie, comme pour le Cléopâtre de Mankiewicz deux ans auparavant, fresque colossale dont on reprend la vedette Rex Harrison (payé un demi million de $), le chef-opérateur Leon Shamroy, le décorateur John De Cuir, le costumier Vittorio Nino Novarese et le compositeur Alex North. Robert D. Webb dirige la seconde équipe, responsable des déploiements d'armées. Le tournage en Todd-AO 70 mm et couleurs De Luxe s'étire de juin à septembre 1964. Les peintures de la Chapelle Sixtine ne supportant pas la chaleur des sunlights, la Fox inaugure les tout nouveaux studios de Dino De Laurentiis, alors les plus vastes d'Europe, baptisés Dinocittà, sis à Via Pontina aux abords de Rome, où est reconstruit l'intérieur de la Chapelle Sixtine en grandeur nature ; ce sera longtemps le plus grand intérieur jamais reconstitué en studio (22 mètres de hauteur, coûts : 9 millions de $) ; des scènes complémentaires sont enregistrées à Cinecittà et en extérieurs à Todi (Ombrie) pour les guerres de Jules II et la place St. Pierre, puis à Rome, Carrare, Florence, Monterano et Bracciano (château Orsini-Odescalchi).
Bramante, le pape Jules II et Michel-Ange dans " The Agony and the Ecstasy " (1965).
 Après dix minutes de documentaire expliquant à M. Tout-le-Monde " qui était l'immortel Michel-Ange et ce que l'humanité lui doit " (images assemblées par un factotum), la séquence initiale - une bataille féroce dans un vaste champ de maïs - nous précipite dans l'Histoire avec panache et témoigne d'un sens particulier de l'espace et des compositions chromatiques que l'on va retrouver dans les intérieurs au Vatican, entre échafaudages vertigineux et détails techniques d'un intérêt didactique certain. Mais aux yeux de la production, outre son opulente reconstitution et son aspect visuel d'une indéniable qualité, le principal attrait du film réside dans les éclats de tempérament entre Charlton Heston et Rex Harrison, un antagonisme orageux et une irascibilité qui se prolongent aussi hors-caméra, car les deux vedettes oscarisées se détestent cordialement. Heston, qui ne s'est jamais remis d'avoir joué Moïse, arbore - en surjouant parfois - son habituel faciès de titan tourmenté, suant et barbouillé de peinture, tandis que Harrison ressert César, sardonique, cette fois en pharaon du Saint-Siège, mécène avare, impatient, persécuteur, belliqueux (et père de trois filles) ! Le premier a accepté de se mettre une tige en plastique dans le nez afin d'accentuer sa ressemblance avec Michel-Ange, le second refuse obstinément de porter une barbe comme Jules II en avait une. Plus à l'aise sous une armure que sous la tiare et soucieux de consolider ses États pontificaux menacés de dislocation, ce Saint-Père réannexe à la tête de son armée dès 1504 la Romagne et les autres possessions de César Borgia, dont Bologne et Pérouse, puis se heurte à Venise et à la France. Le pape appelle Michel-Ange " Buonarroti " et se moque de son acharnement (" ce qui coule dans vos veines, c'est de la peinture ! ") tandis que ce dernier le traite, dans un sonnet, de " méduse " et de " brigand ". Le peintre hésite à entrer au service du Grand Turc à Istanbul, le pontife menace à deux fois de le faire pendre. Pour rassurer censeurs et instituteurs, Hollywood a rajouté une présence féminine en la personne d'une obscure comtesse Médicis qui, à en croire les historiens, aurait " probablement rencontré Michel-Ange "... À l'écran, le peintre explique à son admiratrice qui vient de poser un chaste baiser sur ses lèvres que Dieu exige de lui qu'il " remplace l'art de l'amour par l'amour de l'art " et lorsque la soldatesque le recherche dans un bordel, les prostituées hurlent de rire, car " c'est le dernier endroit où vous le trouverez " (dans son autobiographie In the Arena (1995), Heston, vexé, tentera de refuter avec véhémence l'idée que Michel-Ange était homosexuel).
En fait, le principal problème du film est son scénario, car les affres de la création sont difficiles à représenter à l'écran et il ne suffit pas d'annoncer l'inspiration par des cumulus suggestifs accompagnés de chœurs célestes vibrants. Le décor, en revanche, parvient à suggérer concrètement l'immensité de la tâche auquel ce génie peu commode, facilement méprisant, égomaniaque, voire parfois paranoïde doit faire face. Reed semble à la fois fasciné par la richesse visuelle à disposition de sa caméra et paralysé par son adulation du créateur en qui il reconnaît peut-être ses propres interrogations ; son obsession pour les âmes tourmentées, déchirées entre idéalisme et réalités terrestres est un motif récurrent dans sa filmographie (An Outcast of the Islands, Odd Man Out, etc.). Mais le dialogue abondant, solennel, ampoulé, et les clichés sur la sublimité de l'art n'arrangent rien : son mastodonte cinématographique traîne sérieusement en longueur, dégageant peu de réelle émotion et de chaleur. Le film obtient le prix David di Donatello 1966 pour la " meilleure production étrangère ", cinq nominations à l'Oscar (photo, décors, costumes, son, musique) et deux au Golden Globe Award (Harrison, Dunne), mais commercialement, c'est un lourd échec, avec une perte sèche de 8 millions de $ sur les 12 millions investis. Ainsi qu'ironise la presse internationale, les producteurs de la Fox récoltent plus d'agonie que d'extase ! - IT : Il tormento e l'estasi, DE : Michelangelo - Inferno und Ekstase, ES : El tormento y el éxtasis.
1970® (tv-df) Upon This Rock / Su questa roccia (US) de Harry Rasky. - av. Orson Welles (la voix de Michelangelo). - cf. chap. 5.1
1971® (tv) La vita di Leonardo da Vinci (IT/FR/ES) de Renato Castellani. - av. Bruno Civino (Michelangelo). - cf. chap. 8.2
1979® Margherita, épisode de Les Héroïnes du mal (FR) de Walterian Borowczyk. - av. Roger Lefrère (Michelangelo). - cf. chap. 8.4
1986® (tv) Le Printemps (FR) télésérie de Pierre Cavassilas (TF1 23.7.-13.8.86), 4 p. - av. Robert Condamin (le pape Jules II), Patrick La Mauff (Michelangelo). - Fresque couvrant l'Europe des années 1527 à 1541 (d'après Denis Guénoun) - cf. chap. 8.2
1989(tv) A Season of Giants / Michelangelo's Spring / Michelangelo the Last Giant / La primavera di Michelangelo / Michelangelo - Aufbruch eines Genies / Michelangelo - Genie & Leidenschaft (Michel-Ange) (US/IT/GB/DE/AT/ES) mini-série de Jerry London
Francesco Fantacci, Carlo Alberto Fantacci, Marco Olivieri, Rizia Ortolani/RAI Radiotelevisione Italiana-Turner Network Television Inc.-Telepool GmbH-Consolidated Ltd.-Tiber Cinematografica (RAIuno 4.11.-18.11.90), 3 x 90 min./274 min. - av. Mark Frankel (Michelangelo), John Glover (Leonardo da Vinci), F. Murray Abraham (le pape Jules II), Stephen Berkoff (Girolamo Savonarola), Ornella Muti (la courtisane Onoria), Ian Holm (Lorenzo de' Medici), Vanni Corbellini (Giovanni de' Medici), Andrea Prodan (Raffaello), Pierluigi Misasi (Piero de' Medici), Ricky Tognazzi (Niccolo Machiavelli), Tony Vogel (Donato Bramante), Mattia Sbragia (Lorenzo Di Pierfrancesco), Alex Serra (père Nicolini), John Steiner (le cardinal Riario), Franco Trevisi (Paris De Grassis), Venantino Venantini (le cardinal Jean de Lagraulas), Francesco Carnelutti (Lazzaro de Pavie), Juliette Caton (Contessina di Lorenzo de' Medici), Geoffrey Copleston (Taddeo Taddei), Vernon Dobtcheff (Jacobo Galli), Alessandro Gassmann (le peintre Francesco Granacci), Danja Gazzara (Lucrezia Borgia), John Hallam (Lodovico Buonarroti), Donald Hodson (Baldassare), Angelo Infanti (Jacopo di Fiesole), Anna Kanakis (sœur Ilaria), Marne Maitland (Romolino), Giancarlo Prete (le poète Angolo Poliziano).
Synopsis : Florence en avril 1492. Michel-Ange, 15 ans, fait ses débuts à la cour de Lorenzo de' Medici où il apprend les secrets de la sculpture et rencontre Léonard de Vinci, son futur rival, tandis que dans les rues, les sermons de Savonarole enflamment le peuple. Les Médicis s'enfuient et l'artiste est chassé de la ville, à présent sous le joug d'un dictateur puritain hostile à toute imagerie. Michel-Ange gagne Bologne où il s'éprend de la courtisane Onoria, mais son amour pour l'art l'emporte sur le stupre (sic) et, ayant sculpté le " David " et la " Pietà ", il s'attaque en 1508 à la Chapelle Sixtine à la demande du Vatican. - Cette mini-série sur la jeunesse du génie confiée à l'Américain Jerry London (le téléaste émérite de la série Shôgun, 1980), s'inspire librement de l'ouvrage Una stagione di giganti. 1492-1508. Michelangelo, Leonardo, Raffaello de Vincenzo Labella (1990) ; Labella, qui a co-écrit le scénario, connaît la matière à fond, étant né dans la Cité du Vatican où son père était fonctionnaire de l'État pontifical, ce qui lui a donné l'occasion d'étudier tout le contexte historique dans la bibliothèque vaticane. Michel-Ange est interprété par Mark Frankel, un acteur de théâtre britannico-indo-irakien âgé de 27 ans dont c'est la première apparition à la télévision (il se tuera sur sa Harley Davidson sept ans plus tard) ; il est encadré par F. Murray Abraham (le pathétique Antonio Salieri d'Amadeus) qui fait un Saint-Père dictatorial et vaniteux, par l'irrésistible Ornella Muti en courtisane et plus de 400 figurants. Les extérieurs sont filmés au château d'Odescalchi à Bracciani et à Caprarola (Viterbe), tandis qu'on reconstruit à Cinecittà les salles du Palazzo della Signoria à Florence avec des sculptures de Michel-Ange réalisées à partir de moulages des originaux. Hélas, la facture du téléfilm n'est pas à la hauteur des ambitions affichées, et Michel-Ange comme Léonard semblent ne pas vieillir ni changer de costumes pendant les seize ans qu'englobe le récit, tandis que leurs créations se concrétisent en un rien de temps. Diffusée aux États-Unis sur TNT Cable, la série passe quasiment inaperçue.
1999® Sofies verden (NO) d'Erik Gustavsson. - av. Eindride Eidsvold (Michelangelo).
2003® (tv) Leonardo Da Vinci Dangerous Liaisons (GB) de Sarah Aspinall, Tim Dunn. - av. Adam Croasdell (Michelangelo). - cf. chap. 8.2
2004(tv-df) The Divine Michaelangelo (Le Divin Michel-Ange) (GB) mini-série de Tim Dunn et Stuart Elliott
BBCtv-Discovery Channel-Open University (BBC 29.2.-7.3.04), 2 x 55 min. - av. Stephen Noonan (Michelangelo), Roy Holder (le pape Jules II), Remo Masini (Girolamo Savonarola), Alessandro Riccio (Lorenzo de' Medici, dit le Magnifique), Daniele Favili (Pietro Torrigiano), Andrea Pericoli (Leonardo da Vinci), Massimo Ali (Asacanio Dondivi), Maurizio Bartoli (Donato Bramante), Roberto Maltagliati (Tommaso de' Cavalieri), Susannah York (narration).
Docu-fiction avec l'acteur shakespearien Stephen Noonan, filmé en Toscane, à Rome et à Florence. - DE : Der göttliche Michelangelo.
2004® (tv) Raphael. A Mortal God (GB) de John Holdsworth. - av. Robert Willox (Michelangelo). - cf. chap. 8.4
2005(tv) Michelangelo Superstar (Michel-Ange, une vie de génie) (DE) de Wolfgang Ebert et Martin Papirowski
ZDF (Arte 15.10.05), 52 min. - av. Dan Baradu (Michelangelo), Jan Haiduk (Jules II). - Docu-fiction réalisé au château de Honedoara en Transsylvanie (recréation de l'atelier de Michel-Ange à Florence et de la Chapelle Sixtine avec effets numériques). Une tentative laborieuse et décevante de raconter l'itinéraire du génie. Des séquences jouées racontent quelques épisodes-clé de son existence, les dialogues appuyant avec insistance sur l'enfance, les conflits avec son père et le caractère sombre de l'artiste, ainsi que sa passion et son insatisfaction perpétuelle face à son œuvre.
2011® (tv) Leonardo (GB) de Beryl Richards, Luke Watson e.a. - av. Kyle Grant (Michelangelo). - cf. chap. 8.2
2011-2014® (tv) Borgia (FR/DE/IT/CZ) d'Oliver Hirschbiegel, etc. - av. Danny Szam (Michelangelo). - cf. chap. 5.2
2017(tv) Les Démons de Michel-Ange (FR) de Benjamin Lehrer (fict.) et Benjamin Jankowski (doc.)
Série " Secrets d'histoire " présentée par Stéphane Bern (saison 11, épis. 3), Jean-Louis Remilleux/Société Européenne de Production-France Télévisions (FR2 13.7.17), 100 min. - av. Sébastien Degut (Michelangelo), David Palatino (le pape Jules II), Mathieu Lardier (Leonardo da Vinci), Julien Delanoé (Tommaso Cavalieri), Anne Paris (Vittoria Colonna).
Docu-fiction tourné sur les lieux historiques, avec reconstitutions.
2017® Raffaello : Il Principe delle Arti - in 3D (IT) de Luca Viotto. - av. Ludovico Caldarera (Michelangelo). - cf. chap. 8.4
2017/18Michelangelo - Infinito (IT) d'Emanuele Imbucci
Magnitudo-Sky Italia-Vatican Museums and Galleries, 97 min. - av. Enrico Lo Verso (Michelangelo), Ivano Marescotti (Giorgio Vasari). - Vasari raconte la vie de Michel-Ange (semi-documentaire).
2019*** Il peccato. La furore di Michelangelo / Grekh / Sin (Michel-Ange) (RU/IT) d'Andreï Kontchalovski
Alisher Usmanov, Elda Ferri, Andreï Kontchalovski, Paolo Del Brocco, Olesya Gidrat, Mauro Calevi/Andrei Konchalovsky Studios-Jean Vigo Italia-RAI Cinema, 134 min. - av. Alberto Testone (Michelangelo), Nicola Adobati (Lorenzo de' Medici, duc d'Urbino), Nicola De Paola (le cardinal Giulio de' Medici), Massimo De Francovich (le pape Jules II della Rovere), Simone Toffanin (le pape Léon X de' Medici, son successeur), Glen Blackhall (Raffaello), Yuliya Vysotskay (la Dame à l'hermine), Adriano Chiaramida (Lodovico Buonarroti), Gianluca Guidi (Egidio da Viterbo), Orso Maria Guerrini (le marquis Alberico Cybo-Malaspina), Anita Pititto (la marquise Elisabetta della Rovere, son épouse), Jakob Diehl (Peppe, apprenti), Francesco Gaudiello (Pietro, apprenti), Antonio Gargiulo (Francesco Maria della Rovere), Roberto Serpi (Giovan Simone Buonarroti), Salvatore Pulzella (Buonarroto Buonarroti), Alessandro Pezzali (Lionardo Buonarroti), Federico Vanni (le sculpteur Jacopo Sansovino), Riccardo Landi (le Syrien Al-Farab, homme de main des Médicis), Daniele Ferretti et Mauro Pirovano (les notaires), Tony Pandolfo (Dante Alighieri).
Synopsis : En 1512 sur une route de Toscane, Michel-Ange marmonne en haillons, insulte la cité de Florence, " ville de trahison " qui a banni Dante, et admoneste père et frères dépensiers auxquels il a acheté une vaste demeure et une ferme, leur reprochant de vivre à ses crochets alors qu'il n'a rien pour s'habiller et tout juste de quoi manger. À Rome, " cité de prêtres, de pèlerins et de prostituées ", le pape Jules II lui doit toujours de l'argent pour le plafond de la Chapelle Sixtine, des fresques que Michel-Ange estime inachevées (" il faut tout refaire ! ") et auxquelles il souhaite encore travailler un an avant de s'attaquer aux 40 sculptures du tombeau papal dans la basilique St. Pierre, dont seul le " Moïse " est achevé. Furieux, le pape le bastonne et, une fois de plus, menace de le faire remplacer par Raphaël, son rival détesté. Les proches du pontife et les pères dominicains de l'Inquisition le chassent de la chapelle (" va te laver, tu pues ! ") et démontent les échafaudages. Lorsque Jules II meurt en 1513, son neveu, Francesco Maria della Rovere, lui accorde trois ans pour compléter la tombe, après l'avoir traité de " canaille divine ". Michel-Ange réalise qu'il est espionné de partout, que ses moindres écarts sont rapportés au Vatican et qu'il y a même des délateurs parmi ses apprentis (dont certains ont été torturés par des clercs). Soucieux de trouver le marbre le plus pur, il se rend dans les carrières de l'Altissimo près de Carrare où il est frappé par la beauté de Maria, la fille du chef des marbriers. Il visite le marquis et la marquise de Malaspina, propriétaires de la carrière et dans le château desquels le divin Dante Alighieri, chassé de Florence, à séjourné jadis. Rejoint par ses deux apprentis, il choisit un gigantesque bloc de marbre baptisé " le monstre " qu'il parvient à subtiliser à son rival Jacopo Sansovino, à hisser par d'énormes palans, à déplacer avec une cinquantaine de Carrarais, à descendre à flanc de montagne sur des poutres de bois et à faire transporter jusqu'au port, opération terriblement périlleuse qui coûte la vie à un ouvrier. Au Vatican, Léon X, le nouveau pape, est à présent l'homme le plus puissant d'Italie, préoccupé surtout par les guerres qui engloutissent les trésors de l'Église. C'est un Médicis pervers, obèse et mielleux, issu de la famille ennemie des Della Rovere et qui exhibe un éléphant d'Asie dans ses jardins. Léon X exige de Michel-Ange qu'il renonce au tombeau du pontife décédé et termine la façade de la basilique Saint-Laurent à Florence (accolée aux chapelles des Médicis). Michel-Ange se jette à ses pieds, jurant sur la Sainte Vierge que ni lui ni sa famille n'ont jamais dit un mot contre les Médicis. Puis, ne sachant où donner de la tête, pris en tenaille, tiraillé entre les intérêts des Della Rovere à Rome et ceux des Médicis à Florence, l'artiste est contraint d'accepter l'offre de ces derniers (" toute cette beauté... pour ces fornicateurs, ces tyrans, ces assassins ! Ils ne méritent pas mes créations, et je ne suis qu'un vieux monstre "). À Florence, constatant que son atelier romain est fermé, les Della Rovere le traitent d'imposteur, tandis qu'au Vatican, des cardinaux Médicis le soupçonnent de tromper la Curie et l'envoyent visiter leurs propres carrières de marbre à Pietrosanta (Apuane), dont le pape lui a promis une part. De retour à Carrare où le " monstre " de marbre a été séquestré, le vieux marquis de Malaspina met Michel-Ange en garde : il est compromis, la région le considère désormais comme un traître et les Carrarais ne pardonnent pas. Son fidèle apprenti Peppe vient d'épouser Maria, qui est enceinte. Michel-Ange a protégé et doté le couple, mais au lendemain de la nuit de noces, il retrouve les jeunes mariés dans une mare de sang, vengeance probable des Della Rovere. Rongé par la culpabilité, réfugié dans une grotte des monts de la Lunigiana, Michel-Ange demande conseil au fantôme de Dante, son idéal sur le chemin de la création. " Je pensais avancer vers Dieu, comme toi, murmure-t-il, mais je ne faisais que m'éloigner toujours plus. Je voulais trouver Dieu, mais j'ai seulement trouvé l'Homme. Mes créations sont belles, je le sais, les gens les admirent, mais personne ne prie devant. Ils n'ont que des pensées impies. Je comprends qu'on ne puisse pas prier devant elles. Elles n'ouvrent pas la voie vers Dieu. Je me suis perdu, montre-moi le chemin ". Dante murmure " attends ", se détourne de lui et s'enfonce dans la nuit caverneuse.
Le pape mourant et l’ange. – Michel-Ange dessine sa Vierge à partir de la jeune Maria (« Il peccato »).
 Il est intéressant de constater que ces ultimes propos, d'une inflexible lucidité (et qui documentent incidemment le naufrage spirituel de l'Église catholique romaine aux XVe-XVIe siècles), ont été rédigés et dirigés par celui qui fut le scénariste d'Andreï Roublev (1966), le film sublime d'Andreï Tarkovski consacré au peintre d'icônes orthodoxes du XVe siècle. Passé à la réalisation, le cinéaste moscovite Andreï [Mikhalkov-]Kontchalovski - frère aîné de Nikita Mikhalkov - s'attache à nouveau, cinquante ans plus tard, à un immense artiste dont il illustre une tranche de vie, de 1513 à 1519. Les deux portraits se font écho en quelque sorte, car Roublev représente l'art sacré (l'icône à charge symbolique), Michel-Ange l'art religieux profane (la fresque naturaliste). Or s'ils ne servent pas la même cause, tous deux ont eu maille à partir avec pouvoirs politiques et/ou puissances d'argent, à l'instar d'une majorité d'artistes et en particulier de Kontchalovski lui-même, ainsi qu'en témoigne sa carrière en zigzag entre les diktats idéologiques de l'URSS et ceux, commerciaux, d'Hollywood. Contrairement à The Agony and the Ecstasy, la spectaculaire et flamboyante hagiographie de Michel-Ange signée Carol Reed dont il prend l'exact contre-pied (cf. supra, 1965), Il peccato est axé sur la personne plus que sur l'artiste (qu'on ne montre jamais en train de sculpter, processus " ennuyeux " estime le cinéaste, et dont on voit à peine les œuvres : son travail reste dans l'ombre). Fini le génie idéaliste et idéalisé, hissé au niveau surhumain : il s'agit de le grandir en l'humanisant dans toute l'ambivalence de sa mélancolie, entre productivité et inertie, bassesse et grandeur. Son Michel-Ange est tourmenté par une incoercible rage intérieure, toujours en déplacement, angoissé, en proie à des visions bizzares (le décès de Léon X assisté d'un angelot ailé, la griffe d'une sorcière), malmené par une époque chaotique et des commissionnaires brutaux alors qu'il aspire à une sublimité assimilée aux envolées métaphysiques de Dante (le fait est documenté). C'est un vagabond en robe de bure usée qui vit dans un cloaque, un va-nu-pieds voûté, boitillant, miséreux et puéril, solitaire, vénal et colérique, capable de mentir, de voler, de trahir pour survivre, et qui trouve de rares instants de joie et de répit dans les hauteurs de Carrare, parmi les marbriers illettrés, joviaux et simples dont la compagnie contraste avec l'univers tantôt mortifère, tantôt grotesque de la Curie. Kontchalovski le montre courroucé, déchiré entre la fidélité à sa famille de parasites, sa générosité, sa cupidité et sa peu reluisante mesquinerie envers ses confrères qu'il jalouse (Léonard, Raphaël) : lui-même se désigne un " mélange d'idéal et de fange ". Aucune précision n'est donnée quant au " péché " du titre, mais ce pourrait bien être l'orgueil que lui reprochent les deux papes et dont le gigantesque bloc de marbre constitue probablement la représentation matérielle : Michel-Ange se sait un génie, se place au-dessus de ses semblables et se fixe des tâches surhumaines, irréalistes, voire jamais réalisées (la façade de Saint-Laurent). Cet artiste prométhéen est incapable de conclure, et s'il vénère autant les blocs de marbre, c'est peut-être qu'ils représentent la force et la grandeur qu'il ne possède pas en lui. Pour l'incarner, Konchalovski a choisi un quasi inconnu, Alfonso Testone, dont la ressemblance avec le sculpteur fantasque et terreux (selon le portrait de son contemporain Daniele da Volterra, v. 1544) est frappante. Testone, ex-dentiste et comédien romain, est l'auteur d'un documentaire sur la vie de Pier Paolo Pasolini (Fatti corsari, 2012) et, en sosie parfait, il a aussi campé le poète-cinéaste provocateur dans Pasolini, la verità nascosta de Federico Bruno (2013). Les autres comédiens sont choisis dans la rue ou parmi de véritables artisans toscans, selon les traits de leurs visages, qui doivent " parler " sans paroles.
Loin de toute provocation, Il peccato est une œuvre très personnelle, d'une beauté rude, âpre sans virer à l'austérité, mais qui n'a rien de plaisant ni de superficiellement séduisant. Le film " n'a pas pour thème la puissance et la gloire, résume fort justement Yves Hersant, mais la difficile gestation des chefs-d'œuvre, et son réalisateur préfère la prose de la fabrique à la poésie de la création " (Positif no. 727, sept. 2021). Le film montre la Renaissance sous un jour sinon sombre, du moins plus authentique que ne l'a jamais fait le cinéma auparavant (avec l'exception du Métier des armes d'Ermanno Olmi, 2001) : la splendeur des costumes et tentures, la pureté et l'éclat du marbre blanc y voisinent avec les rues jonchées d'immondices, la sueur, le vomi, le sang et l'eau souillée jetée par les fenêtres, au point où le spectateur a l'impression d'en sentir les odeurs. Derrière la statue du David face au Palazzo Vecchio se balance le cadavre d'un pendu. Kontchalovski souligne la dichotomie entre la recherche de la beauté et la sordide réalité du quotidien pour révéler " l'humanité derrière la légende ". Seule la nature, superbe, est préservée de la petitesse de ce monde-là. Cette optique n'exclut pas une certaine préciosité dans la composition des tableaux, mais afin d'en évacuer tout caractère épique, le cinéaste a opté pour un format d'image 1:33 et des couleurs plutôt ternes (beige, gris, bleu clair). En référence au néoréalisme d'un De Sica ou Rossellini, Kontchalovski a scrupuleusement reconstitué à l'identique les techniques d'extraction dans les carrières, encadré en cela par des professionnels et la figuration de la région. Miracle : un projet commercialement aussi insensé n'a pu se concrétiser qu'avec le soutien d'un richissime homme d'affaires russe, Alisher Usmanov (" mon Laurent de Médicis à moi " dixit le cinéaste), qui l'a financé à 70% sans regarder à la dépense ni interférer dans la réalisation ; la radiotélévision italienne (RAI) a mis le reste. Le tournage s'est fait à Florence, Arezzo, Montepulciano, Montalcino (pour le palais Médicis), Massa (Castello Malaspina), Carrare et dans le Latium (Rome, Tarquinia), tandis qu'une trentaine d'artisans et des ateliers romains et vénitiens reconstituaient la Chapelle Sixtine à l'échelle en studio à Cinecittà.
La presse spécialisée salue un film d'auteur d'une exceptionnelle originalité, le portrait d'un immense artiste esclave de son temps, tout en regrettant quelques maladresses dans le montage, surtout dans le premier tiers (en famille à Florence). Lors de sa visite officielle au Vatican en juillet 2019, Vladimir Poutine offre une copie du film en cadeau au pape François et l'œuvre, sortie en novembre 2019, est projetée dans divers festivals (Moscou, Rome, Sofia, Le Caire, Istanbul, Lisbonne, Belgrad, Toronto, Montélimar). En salle, toutefois, sa carrière est de courte durée en raison de la crise du Covid et le public doit se contenter d'un transfert numérique sur DVD.
2021® Leonardo (IT/US) de Daniel Percival et Alexis Cahill. - av. Pierpaolo Spollon (Michelangelo). - cf. chap. 8.2