Ia - NAPOLÉON ET L'EUROPE

15. DÉCLIN ET EXIL

15.1. Campagne de France, première abdication et exil à l’île d’Elbe (1814)

La campagne de France, ultime chapitre de la guerre liée à la Sixième Coalition, dure de janvier à avril 1814. Tentant d’éviter ou d’arrêter l’invasion du territoire national, Napoléon y déploie un art de la stratégie que beaucoup d’historiens considèrent comme le sommet de sa carrière militaire. Mais les pertes de l’Empire en Russie et en Allemagne en 1812/13 ne peuvent plus être compensées, de nombreuses troupes sont restées en garnison à Hambourg ou ailleurs, et les jeunes conscrits inexpérimentés de 1814 (les « Marie-Louise ») ne sont pas à la hauteur de leurs glorieux aînés. C’est donc à la tête de 360 000 hommes, dont 70 000 combattants réels, que Napoléon doit affronter simultanément les trois armées de la Sixième Coalition totalisant un million de soldats sous le commandement suprême de Blücher (armée prusso-russe de Silésie), de Schwarzenberg (armée austro-russe de Bohême) et de Bernadotte (armée russo-prusso-suédoise du Nord) dans l’Est du pays ; peu enclin à participer à l’invasion de sa patrie d’origine, Bernadotte reste partiellement en retrait. Dans le Midi, les régiments de Soult tentent vainement de freiner la progression de Wellington (armées anglo-hispano-portugaises), venant d’Espagne.
Le 31 décembre 1813, les coalisés ont franchi le Rhin par le pont de Bâle et sous Mayence. En janvier-février, Napoléon parvient à infliger plusieurs revers à ses ennemis – à Brienne-le-Château, Champaubert, Montmirail, Montereau, sept batailles en huit jours, toutes gagnées – sans pouvoir ni les exploiter ni réellement reprendre l’initiative en raison de son infériorité numérique. Cinq victoires supplémentaires (au total douze sur quatorze engagements) déstabilisent passagèrement la coalition. Déjouant de justesse le piège que Napoléon leur a tendu à Saint-Dizier, les Alliés menés par le tsar Alexandre et le roi de Prusse arrivent devant Paris qui capitule le 30 mars et où l’envahisseur est accueilli en libérateur par les tenants de la monarchie. Les cosaques bivouaquent sur les Champs-Élysées. Marie-Louise, proclamée régente, et le Roi de Rome ont quitté la capitale la veille sur ordre impérial, afin qu’ils ne tombent pas en des mains étrangères. Le 2 avril, le Sénat (dirigé dans les coulisses par Talleyrand) prononce la déchéance de Napoléon. Ce dernier, replié sur Fontainebleau, dispose encore de 60 000 hommes prêts à marcher sur Paris, mais face à l’opposition de ses maréchaux – Marmont, Ney, Berthier, Lefebvre –, il abdique le 6 avril pour ne pas laisser une guerre civile se développer. Sur insistance de Talleyrand (qui a gagné à sa cause le tsar Alexandre), le Sénat invite le comte de Provence, revenu d’Angleterre, à monter sur le trône sous le nom de Louis XVIII. Le 15 avril, lorsque Napoléon demande à son épouse de le rejoindre, il est trop tard : Metternich a déjà donné l’ordre de conduire Marie-Louise et le Roi de Rome à Rambouillet, auprès de François Ier. Le piège se referme.
Le tsar a garanti à son impérial adversaire un établissement hors de France qui soit digne de lui, contre l’avis des autres coalisés. Il envisage d’abord la Corse (territoire français, trop proche) ou la Sardaigne (propriété de la Maison de Savoie), puis opte pour l’île d’Elbe, une dépendance de la Toscane érigée en principauté. Napoléon la reçoit en pleine souveraineté, ainsi qu’une rente annuelle de deux millions de francs promise par le gouvernement français. Le 20 avril, Napoléon se résigne à partir, après avoir pris congé de sa Garde dans la cour du château de Fontainebleau. La flotte française étant aux ordres de Talleyrand, l’Empereur, méfiant, effectue la traversée vers l’île d’Elbe sur un navire de guerre britannique. Escorté par les Anglais, il débarque à Portoferraio le 4 mai – le jour où Louis XVIII fait son entrée à Paris – accompagné d’une suite d’une cinquantaine de personnes. Un mois plus tard, un bataillon d’infanterie de la Vieille Garde fort de 700 hommes, en majorité des Corses sous les ordres du général Cambronne, le rejoignent. Le traité de Fontainebleau du 11 avril 1814 stipule qu’il garde son titre d’empereur ; Marie-Louise devient duchesse de Parme, Plaisance et de Guastalla, cités voisines de l’île d’Elbe où elle pourra, lui dit-on, se rendre à volonté – un leurre, car Metternich a précipité l’ex-impératrice dans les bras de Neipperg. Elle retourne à Vienne avec son fils, sans répondre désormais aux lettres que lui adresse son époux. Tout en les attendant avec impatience, Napoléon s’installe dans le petit palais des Mulini où le rejoignent Madame Mère (Laetitia) et sa sœur Pauline qui s’ingénient toutes deux à reconstituer un simulacre de cour, avec festivités et bals ; parmi les visiteurs (surtout anglais), on compte Maria Walewska et son fils Alexandre. Débordant d’activité, l’Empereur réorganise l’administration de l’île (37 000 habitants), réforme douanes et hôpitaux, améliore les conditions d’hygiène, élève des fortifications, aménage le réseau routier, développe l’industrie minière et le commerce viticole, exploite les carrières de granit et de marbre, entreprend la construction d’un théâtre, etc.
Un réseau d’informateurs le tient toutefois au courant de la situation sur le continent. De Vienne, il apprend que Talleyrand a présenté le 13 octobre au Congrès un projet visant à le déporter aux Açores, à Sainte-Hélène ou à Sainte-Lucie dans les Antilles ; d’entente avec les Britanniques, il envisagerait, à défaut, son assassinat par le chevalier Louis de Bruslart, un ancien Chouan en relation avec les pirates barbaresques. Outre ces rumeurs inquiétantes d’enlèvement ou d’attentat, il y a plus grave : Louis XVIII refuse d’honorer la rente octroyée par le traité de Fontainebleau, ce qui place Napoléon dans une situation précaire. Il risque en effet d’être acculé à la banqueroute et à un licenciement de ses soldats qui mettrait en cause sa propre sécurité. D’ailleurs, les Français qui l’accompagnent perdront leur nationalité française s’ils restent plus de trois ans auprès de lui et, en raison de l’hostilité de ses voisins en Corse, à Gênes, à Milan et à Livourne, l’île d’Elbe ne peut commercer librement.
La « trahison » de Marie-Louise (rapportée par Cipriani) dispense François Ier de l’obligation de protéger son gendre en cas d’atteinte à sa personne. En France même, la situation politique s’est détériorée. Louis XVIII ignore la Constitution à l’anglaise souhaitée par le Sénat (des bourgeois qui ont profité de la Révolution) et impose une Charte proclamant la souveraineté du monarque, non celle du peuple. La politique maladroite du Bourbon mécontente à la fois les ultras royalistes, l’armée et les libéraux, réveillant l’hostilité pour l’ancienne dynastie : l’armée murmure devant les renvois ou placements en demi-solde (état proche de la mendicité) et s’irrite des promotions réservées aux seuls officiers du roi ; les paysans qui ont acquis des biens nationaux sont en butte aux revendications des anciens propriétaires revenus de l’émigration ; les ouvriers sont condamnés au chômage depuis la suppression du blocus continental qui ouvre les portes aux produits anglais manufacturés. Dans une partie de l’Hexagone, le drapeau blanc et le drapeau tricolore s’opposent ouvertement.
Le 26 février 1815, après dix mois d’exil dans son minuscule royaume méditerranéen où son avenir semble compromis, Napoléon fausse compagnie aux Anglais et retourne en France à bord de « L’Inconstant », encadré d’une petite flottille de six vaisseaux. L’aventure des Cent-Jours, téméraire et insensée, commence.
1909L’Estafette de l’Empereur (FR) de Victorin-Hippolyte Jasset
Société Française des Films Éclair (Paris), 218 m./700 ft. – Synopsis : Au printemps 1814, dans les plaines de Champagne. Poursuivie par l’ennemi, une estafette est contrainte de s’arrêter dans la cour d’une ferme, son cheval étant blessé. Le jeune fils du fermier le cache sous la paille, mais l’officier allié lui promet une montre s’il lui révèle la cachette et l’enfant cède à la tentation. Il est réprimandé par son père, tandis que l’estafette est capturée. Plein de remords, l’enfant obtient du prisonnier l’important message, l’aide à s’évader par la cheminée, puis traverse au péril de sa vie les lignes ennemies pour parvenir jusqu’au camp français. Napoléon, mis au courant de son acte héroïque, l’en récompense sur le champ en lui donnant un tambour d’honneur et en l’enrôlant dans la Grande Armée. – US : The Emperor’s Staff Officer.
1909[Fidèle à Napoléon (FR) Établissements Gaumont S.A. (Paris). – Le capitaine Franville écrit à l’Empereur exilé pour lui signaler que tout est prêt pour un retour de l’île d’Elbe, « le faible Louis XVIII fuira comme un lapin devant vos aigles victorieuses ». Olympe, son épouse, laisse traîner la lettre sur un guéridon où un ancien prétendant éconduit, M. de Valbrun, la trouve et l’empoche après une dispute avec les Franville. Valbrun alerte Louis XVIII aux Tuileries, Franville est arrêté et condamné à mort, le roi refuse sa grâce. Olympe prend la place de son époux en prison, qui s’évade, déguisé en femme. Napoléon, de retour, décore le capitaine qui peut serrer son épouse dans ses bras. – Un démarquage de la fameuse évasion du comte de Lavalette après les Cent-Jours. Film annoncé par Gaumont, mais peut-être jamais tourné.]
1909Et budskab til Napoleon paa Elba (Un message à Napoléon sur l’île d’Elbe) (DK) de Viggo Larsen
Ole Olsen/Nordisk Films Kompagni, 264 m./14 min. – av. VIGGO LARSEN (Napoléon), Sufus Wolder (le messager), August Blom (maréchal Lefebvre), Hertha Strandvold (la fille de l’aubergiste), Axel Schultz, Gudrun Kjerulf, Edmund Österby.
Synopsis : Des bonapartistes envoient un messager secret à l’île d’Elbe avec des plans pour permettre à Napoléon de s’enfuir. Un traître dénonce les conspirateurs à la police du roi et celle-ci cherche à intercepter le messager en lui tendant un piège dans une auberge. La fille de l’aubergiste, fidèle à l’Empereur, avertit le courrier, qui s’échappe et trouve refuge dans une ferme, où un autre sympathisant lui procure des habits de paysan. En mer, son embarcation est détruite par une tempête, il atteint les rives de l’île à la nage ; une sentinelle le blesse d’une balle à l’épaule. Il trouve finalement Napoléon en train de scruter l’horizon et ce dernier, ému et reconnaissant, l’embrasse. Tournage aux studios de Valby, près de Copenhague. – DE : Botschaft an Napoleon auf Elba, US : A Message to Napoleon.
1910Mil huit cent quatorze / Napoléon en 1814 (FR) de Louis Feuillade
Établissements Gaumont S.A. (Paris), 225 m. – av. Alice Tissot (Mme Lapière). – Synopsis : Dans le domaine des Lapière à Tonnerre (Yonne), Pierre, le seul de la famille à avoir survécu aux guerres du passé, est enrôlé de force, laissant sa mère sans moyens de subsistance. Il est blessé le 25 mars 1814 à la bataille de Fère-Champenoise contre les armées russo-prussiennes du tsar Alexandre et ne peut accompagner ses camarades dans leur retraite. Marchant à la rescousse de Mortier et de Marmont pour défendre Paris, Napoléon se repose le temps d’une nuit dans la villa des Lapière. La maîtresse de maison, persuadée que l’Empereur a envoyé son fils à la mort, décide de le poignarder pendant son sommeil, mais un grognard l’en empêche. Réveillé en sursaut, Napoléon la fait relâcher et offre sa poitrine pour le coup fatal. La femme s’apprête à frapper, mais elle est impressionnée par la force et la compassion qu’elle lit sur le visage de l’Empereur, hésite, lâche son arme, tombe à genoux et implore son pardon. Pierre, toujours blessé, entre dans la pièce ; Napoléon se montre généreux, relève la mère et fait démobiliser le fils. – US : Napoleon in 1814.
1911Il debito dell’Imperatore (La Dette de l’Empereur) (IT) de Luigi Maggi
S.A. Ambrosio, Torino (« serie d’Oro »), 388 m. – av. Alberto A. Capozzi (Fanfan), GIUSEPPE GRAY (Napoléon), Norina Rasero (Nanette), Clementina Gray (la mère de Fanfan), Oreste Grandi, Carlo Campogalliani, Luigi Maggi, Paolo Azzurri.
Le film de Maggi évoque le quotidien et les exploits des soldats napoléoniens pendant la campagne de France en 1814 à travers les lettres qu’un jeune artilleur de la Grande Armée, Fanfan, envoie régulièrement aux siens. Ses descriptions sont transposées à l’écran : la conscription et la séparation d’avec sa mère et sa sœur, le grand défilé devant l’Empereur à Châlons-en-Champagne, la marche sur Laon à travers la neige, enfin la bataille de Bar-sur-Aube (27 février 1814) entre les Français du général Macdonald et les Autrichiens, Bavarois et Russes commandés par le prince de Schwarzenberg, affrontement inégal qui se termine sur une victoire alliée. Un jour, Fanfan sauve la vie de Napoléon en se jetant devant lui lorsqu’un baril de poudre explose à proximité. Laissé pour mort alors qu’il n’est que blessé, Fanfan est soigné par un berger, puis il rentre chez lui. Sa mère, ruinée, est sur le point de céder leur maison aux créanciers. En apprenant le passage de Napoléon, il revêt son uniforme pour l’acclamer. Napoléon reconnaît son sauveur, paie les dettes familiales et nomme Fanfan lieutenant. – GB, US : The Emperor’s Debt, DE : Die Schuld des Kaisers.
1911L’ultimo regno di Napoleone (Isola d’Elba) (IT)
Latium Film (Roma), 122 m. – Aucune autre information ne subsiste sur ce film, dont le titre peut tenir lieu de résumé : « Le dernier règne de Napoléon (L’île d’Elbe) ».
1911The Price of Victory (Le Prix de la victoire) (FR) d’Edwin S. Porter
Thomas A. Edison/Edison Manufactoring Co. (New York), 1000 ft./291 m. – av. Edwin Clarke (Jean Daudet, le tambour). – Synopsis : Dans le sud de la France, début 1814. L’aubergiste Daudet, un royaliste, doit se séparer de son fils Jean, 18 ans, qui, enthousiaste, est enrôlé comme tambour dans la Grande Armée. Quelque temps plus tard, l’aubergiste récupère le cadavre de Jean sur un champ de bataille voisin et l’étend sur la table de la taverne, entouré de deux bougies. Au soir, Napoléon et son état-major font une halte dans sa maison pour y rédiger le bulletin de la victoire. Le vieux Daudet se jette sur l’Empereur avec un poignard, la Garde intervient, sabre au clair. Napoléon écarte calmement les lames de part et d’autre, épingle sa Légion d’honneur sur le corps du jeune tambour et le couvre du drapeau impérial pour lequel il est mort.
1912Le Mort vivant (FR) de Louis Feuillade
Établissements Gaumont S.A. (Paris), 950 m. – av. René Navarre (ltn. Lesparre), Renée Carl (la mère Barsac), Paul Manson (cantinier Barsac), Henri Jullien (ltn. Gérard), Jean Ayme (le procureur général), Yvette Andreyor (sa fille), Marthe Vinot, Sylvette Fillacier, Jeanne-Marie Laurent.
Synopsis : En février 1814 à Vauchamps, Napoléon brise l’avance de l’armée de Silésie commandée par Blücher. Les lieutenants Lesparre et Gérard, officiers de la Grande Armée, sont ensevelis sous les décombres du champ de bataille et passent pour morts. Mais Lesparre n’est que blessé ; alors qu’il se penche sur son camarade pour lui fermer les yeux, il découvre dans sa poche un document de notaire lui signalant qu’il hérite d’une fortune considérable. La tentation est trop forte, Lesparre échange son identité avec celle de Gaspard et capte frauduleusement l’héritage. Mais Gérard survit à ses blessures et lorsqu’il proclame son identité, nul ne le croit. Il pénètre dans son château qu’occupe l’imposteur ; celui-ci l’emprisonne dans le donjon. Grâce à l’appui fidèle de ses amis, le lieutenant Gérard parviendra à recouvrer son identité et ses biens.
Un drame historique (viré et teinté) qui préfigure les fameux sérials de Feuillade tels que Fantômas (1913), également interprété par René Navarre et Renée Carl. Comme le signale Francis Lacassin, les mésaventures de Gérard présentent de nombreuses analogies avec celle de l’horloger prussien Karl-Wilhelm Naundorff que Feuillade tenait pour le véritable Louis XVII, le dauphin rescapé de la prison du Temple en 1795. – US : Written in Blood.
1912Δ Monte Cristo (US) de Colin Campbell. – av. Hobart Bosworth (Edmond Dantès), GEORGE HERNANDEZ (Napoléon). – Le roman d’Alexandre Dumas. En février 1815, en revenant d’un long séjour en mer, le lieutenant Edmond Dantès est chargé par son capitaine mourant de transmettre un message à Napoléon sur l’île d’Elbe. Dénoncé à son retour à Marseille, il sera arrêté et incarcéré pendant quinze ans au château d’If.
1913/14La cavalcata della morte (La Chevauchée de la mort) (IT)
Aquila Films, Torino, 390 m. – Bazoches (Bourgogne), en mars 1814, pendant la campagne de France. Lieutenant de la Garde impériale, Briançon aime Élise de Villeroy. Il sauve la vie du capitaine Dorignac, assailli par des brigands, et les deux deviennent les meilleurs amis. Au cours d’une fête, Dorignac s’éprend d’Élise, ignorant qu’elle est la fiancée de son ami. Un ordre de l’Empereur le charge de la défense du château de Bazoches où il résiste avec peine aux assauts des régiments russes. Briançon lui transmet l’ordre de tenir jusqu’à l’arrivée des renforts. Bazoches est sauvé de justesse, mais lorsque Dorignac découvre une lettre d’amour qu’Élise a envoyée à son fiancé, il cherche et trouve la mort au combat, en chargeant les cosaques du général Tchernitcheff.
1914-17Δ Monte-Cristo (FR) d’Henri Pouctal. – av. Léon Mathot (Edmond Dantès), MAXIMILIEN CHARLIER (Napoléon). – Cf. supra (film de 1912).
1915The Face in the Moonlight (US) d’Albert Capellani
William A. Brady Picture-World Film Corporation, 1518 m./5 bob. – av. Robert Warwick (Victor/Rabat), Stella Archer (Lucile), H. Cooper Cliffe (Munier, son oncle), Montague Love (le baron Ambrose, père de Victor et de Rabat), Dorothy Fairchild (Jeanne Mailloche, mère de Rabat).
Synopsis : Au chevet du baron Ambrose, son père mourant, Victor, un jeune aristocrate rallié à Louis XVIII, apprend qu’il a un demi-frère illégitime, Rabat, fruit d’un amour coupable de son géniteur. Les deux demi-frères se ressemblent comme deux gouttes d’eau. Rabat, un criminel recherché par la police, assassine et détrousse un courrier secret de la faction bonapartiste qui prépare l’évasion de l’Empereur de l’île d’Elbe, un coup auquel participe Munier, l’ex-secrétaire du baron. Lucile, la nièce de Munier et la fiancée de Victor, a été témoin de l’assassinat au clair de lune et croit ce dernier coupable. Victor est accusé du crime et condamné à être fusillé, mais Lucile apprend la vérité sur les deux frères et cherche à retarder l’exécution. Entre-temps, Napoléon est revenu de l’île d’Elbe. Les bonapartistes, prenant Rabat pour Victor, font arrêter le criminel comme ennemi politique. Les deux demi-frères attendent leur exécution. Lucile contraint son oncle d’intercéder auprès de Napoléon et libérer son fiancé innocent. L’Empereur gracie Victor qui obtient l’autorisation de rencontrer pour la première et dernière fois son demi-frère en prison et de le consoler avant d’affronter la guillotine.
La guerre en Europe ayant complètement paralysé l’industrie cinématographique française, Albert Capellani, rendu inapte au service après une année à l’armée, est invité aux États-Unis suite au succès phénoménal remporté par Les Misérables (1913). Pour son premier film américain, Capellani choisit un sujet bien français, tiré d’une pièce éponyme de Charles Osborne (1871) et tourné aux studios Peerless-World à Fort Lee, New Jersey. La critique est impressionnée par le savoir-faire de Capellani, son goût (cadrages, décors) et son habileté technique (double exposition). – DE : Das Gesicht im Mondschein.
1922Δ Monte Cristo (US) d’Emmett J. Flynn. – av. John Gilbert (Edmond Dantès), GEORGE CAMPBELL (Napoléon). – Cf. supra (film de 1912).
1929Devil-May-Care (Lieutenant Sans-Gêne / La Bataille des dames) (US) de Sidney A. Franklin
Albert Lewin/Metro-Goldwyn-Mayer, 110 min. – av. Ramon Novarro (ltn. Armand de Tréville, dit lieutenant Sans-Gêne / Charles Rambeau, un valet), Marion Harris (la comtesse Louise de Lunéville), Dorothy Jordan (Léonie de Beaufort, sa nièce), John Miljan (cpt. Lucien de Grignon), WILLIAM JONATHAN HUMPHREY (Napoléon), Clifford Bruce (Gaston), Ann Dvorak (Chorine), George Davis (le valet), Lionel Belmore (l’aubergiste), John Carroll et Bob Kortmann (des conspirateurs bonapartistes).
Synopsis : Le 20 avril 1814, dans la cour du château de Fontainebleau, Napoléon fait ses adieux aux soldats de la Garde. Le porte-étendard Armand de Tréville, un Gascon, peut à peine dissimuler ses larmes. Tandis que l’Empereur s’éloigne vers l’île d’Elbe, ses partisans n’ont plus qu’une pensée : celle de préparer son retour. Mais la Terreur blanche s’installe, et Armand échappe de justesse au peloton d’exécution commandé par le capitaine royaliste Lucien de Grignon. Il se terre dans la chambre de Léonie qui, royaliste elle aussi, cherche maladroitement à le livrer à ses poursuivants. Armand se présente le lendemain sous une fausse identité au château voisin de Balbec. La châtelaine, Louise de Lunéville, le reconnaît et, ayant un faible pour lui, l’engage comme faux valet. Léonie, nièce de la châtelaine, séjourne chez sa tante où elle finit par s’éprendre d’Armand, ignorant sa véritable identité et ses convictions. Le capitaine Grignon, le prétendant de Léonie, a découvert la cachette du dangereux bonapartiste et s’apprête à l’arrêter ; après quelques coups de sabre, Armand prend la fuite, ses adversaires étant trop nombreux. Léonie est horrifiée d’apprendre que son amoureux est un ennemi du roi. Entre-temps, Napoléon a débarqué à Golfe-Juan et Armand, redevenu le lieutenant Sans-Gêne, parvient à empêcher le mariage de Léonie et de Grignon – qui s’éclipse devant la rapière trop agile de son rival. Les convictions politiques de Léonie fondent dans les bras du beau sabreur.
Un divertissement léger, léger mais de luxe, « starring » Ramon Novarro, célèbre pour avoir interprété Ben-Hur en 1927, et qui fait ici ses débuts dans le parlant (système Movietone) ; son d’Artagnan napoléonien accomplit des prouesses cabriolesques et se met quatre fois à pousser la chansonnette, histoire de fidéliser ses fans. Tournée aux studios MGM à Culver City avec de brèves parties en Technicolor, la production est très soignée (décors de Cedric Gibbons, costumes d’Adrian) et la mise en scène de Sidney Franklin (The Good Earth/Visages d’Orient, Oscar 1937) inhabituellement fluide pour un film du début du sonore. Le sujet est tiré de La Bataille des dames, ou Un duel en amour, une comédie en 3 actes d’Eugène Scribe et Ernest Legouvé (1851), d’où le titre de travail de Battle of the Ladies ; Hanns Kräly, le scénariste attitré d’Ernst Lubitsch, brutalise cependant un peu la pièce qui se déroule, elle, à Lyon en octobre 1817, c’est-à-dire dans un tout autre contexte (Napoléon se morfondant alors à Sainte-Hélène). Le héros, Henri de Flavigneul, y est un comploteur bonapartiste de vingt-cinq ans qui a été condamné à mort, réussit à s’échapper et finit amnistié grâce à l’intervention des dames qui rivalisent pour son amour. La pièce de Scribe est souvent diffusée à la télévision (cf. chap. 15.5). – IT : Il tenente di Napoleone, DE : Der jüngste Leutnant, AT : Der Leutnant des Kaisers, ES : Monsieur Sans Gêne.
1934Δ The Count of Monte Cristo (Le Comte de Monte-Cristo) (US) de Rowland V. Lee. – av. Robert Donat (Edmond Dantès), PAUL IRVING (Napoléon). – Cf. supra (film de 1912).
1953Δ Le Comte de Monte-Cristo/Il conte di Monte Cristo – 1. La Trahison/Il tesoro di Monte Cristo (FR/IT) de Robert Vernay. – av. Jean Marais (Edmond Dantès), Temerson (Louis XVIII), JULIEN BERTHEAU (Napoléon), Pierre Morin (gén. Henri Gatien Bertrand). – Cf. supra (film de 1912).
1953(tv) The Abdication of Napoleon, March 21, 1814 (US) de Sidney Lumet
Série « You Are There » no. 32, William Dozier Prod. (CBS 8.11.53), 30 min. – L’événement reconstitué avec des comédiens anonymes, est représenté comme un reportage du téléjournal de la CBS, commenté en direct par le journaliste vedette Walter Cronkite.
1954/55Los hermanos corsos (Le Serment de l’épée) (AR) de Leo Fleider
Dimas Garrido/Argentina Sono Film SACI, 94 min. – av. Antonio Vilar (Mario Franchi/Luciano Franchi), Maruja Monte (Mme Dumas), Amalia Gadé (Irène), Tomás Blanco (le comte de Chateaulière), Francisco López Silva (Marcel Berthier), Fina Wasserman (Norma), Pedro Hurtado (le préfet de Paris), Néstor Deval, Héctor Armendáriz.
Alors que le roman Les Frères corses d’Alexandre Dumas (1844) situe son action pittoresque en 1841, sous Louis-Philippe, cette version fabriquée à Buenos Aires d’après un scénario d’Ariel Cortazzo débute en 1790 et se plaît à rappeler que la Corse est d’abord la terre natale de Napoléon ! Ceint de l’épée qu’il portait lors de la prise de la Bastille, le patriarche pro-français des Franchi est assassiné par un membre du clan ennemi des Orlandi à l’instant où naissent deux jumeaux, Mario et Luciano. Le premier devient un avocat idéaliste et révolutionnaire à Paris, le second vit pour la vendetta et les jupons sur l’île de Beauté. Après l’abdication de Napoléon et le retour des émigrés, les Corses sont mal vus dans la capitale, tous étant – cela va de soi – des bonapartistes qui rêvent de « sauver la France » sous la direction de leur chef, Berthier. En février-mars 1815, Mario s’infiltre à la cour de Louis XVIII pour espionner l’adversaire, mais il est démasqué et tué en duel par le comte de Chateaulière, un Orlandi royaliste qui fait arrêter tous les conspirateurs préparant le retour de l’Empereur déchu. Luciano, qui a « senti » à distance la mort de son frère jumeau, arrive de Corse, sauve ses compatriotes condamnés à mort et, lors d’un duel au sabre, venge son frère quelques instants avant l’entrée de Napoléon à Paris. Le peuple défile joyeusement dans les rues en chantant la Marseillaise et en criant « Vive l’Empereur ! ». Le film se garde bien de signaler que les festivités dureront à peine cent jours ...
Une curiosité plutôt farfelue, tournée en mai-juillet 1954 aux studios Argentina Sono Film à Buenos Aires et en extérieurs à Ascochinga, dans la province de Córdoba, et sortie en février 1955. Précisons que le chef des bonapartistes Berthier n’a aucun rapport avec le maréchal d’Empire du même nom, qui, devenu royaliste, suivit Louis XVIII à Gand lors du retour de Napoléon. (C’est l’unique version des Frères corses qui donne au récit un contexte politique bien précis.) – BE : La Vengeance des frères corses, DE : Blutrache auf Korsika, IT : Le spade dei Montreal, GB : The Corsican Brothers.
1956Δ (tv) The Count of Monte Cristo : The Island (GB/US) de Charles Bennett (ATV 6.8.56). – av. George Dolenz (Edmond Dantès), MICHAEL MELLINGER (Napoléon). – Cf. supra (film de 1912).
1965*(tv) Gaspard des Montagnes (FR) de Jean-Pierre Decourt
Parties : 1. La Nuit terrible2. L’Enfant de l’ombre
Claude Santelli/ORTF (TF1 30.12.65-2.11.66), 123 + 100 min. – av. Bernard Noël (Gaspard), Francine Bergé (Anne-Marie Grange), Lucien Barjon (Grange, son père), Claire Vernet (Pauline Grange, sa sœur cadette), Jean Topart (Monsieur Robert), Gérard Dournel (Le Nanne), Cécile Vassort (Zulime), Jacques Balutin (Plampougnis), Michel Beaune (Valentin Verdier), Jean Lescot (Jeuselou), Jacques Mauclair (Maître Chargnat), Jeanne Herviale (la mère de Gaspard), Régis Outin (le curé de Marsac), Claude Santelli (narration).
Synopsis : Pendant la campagne de France, en Auvergne au début de 1814. Dans la ferme isolée des Grange, à l’orée de la forêt de Chênerailles, au cœur des Dômes, Anne-Marie Grange, la fille aînée, seule dans la maison, surprend un homme qui tente de voler le plan d’un trésor enfoui jadis dans les montagnes par le vieux Jérôme, un oncle qui a fait fortune en Guadeloupe. D’un coup de couteau, elle tranche deux doigts de la main de l’intrus qui disparaît en jurant de se venger. Quand il rentre de la ville, le père Grange refuse de mêler la police à cette affaire. Des ombres rôdent autour de la maison. Gaspard, le cousin et amoureux d’Anne-Marie, veut retrouver l’inconnu avec l’aide de ses compagnons Valentin, Plampougnis et Jeuselou, mais il est enrôlé dans la Grande Armée au tirage au sort des conscrits. Un certain Monsieur Robert, riche propriétaire terrien qui n’ôte jamais ses gants noirs, s’attire la reconnaissance d’Anne-Marie pendant que Gaspard guerroie pour l’Empire. Il l’épouse et lui donne un fils, Henri. Mais Robert n’est autre que l’intrus mutilé ; il tente d’assassiner la jeune femme et disparaît après avoir fait enlever le petit Henri dans son berceau. Quand Gaspard revient de Waterloo, en automne 1815, il trouve Anne-Marie désespérée et son pays occupé par des cosaques dont il ne supporte pas la présence. Il entre dans le maquis avec ses compagnons et, républicain fervent, combat la Terreur blanche instaurée par les Bourbons. Au fil des ans (le récit s’achève en 1820), le justicier hors-la-loi, devenu le héros d’une paysannerie auvergnate opprimée par l’ordre postrévolutionnaire et le rétablissement des privilèges de la noblesse, sauve le père Grange de la ruine et la sœur d’Anne-Marie d’un mariage odieux, retrouve le petit Henri (prisonnier dans un souterrain, puis revendu à un mendiant), enfin démasque Robert, un psychopathe, comme le véritable coupable de tous ces malheurs. Avant de périr, ce dernier tue son propre fils et blesse sa femme, que Gaspard peut enfin serrer dans ses bras.
La matière éminemment feuilletonesque de ce surprenant téléfilm en deux parties provient de l’œuvre éponyme de l’écrivain auvergnat Henri Pourrat, Prix Goncourt, très attaché à son terroir et à son folklore. Le récit couvre quatre volumes parus chez Gallimard entre 1921 et 1931, le premier récompensé par le Prix littéraire du Figaro et l’ensemble du cycle par le Grand prix du roman de l’Académie française. Certes, le contexte historique n’y est qu’effleuré, mais Pourrat comme Claude Santelli (le producteur-adaptateur) et Jean-Pierre Decourt, téléaste chevronné, dressent un portrait très circonstancié des campagnes françaises de l’époque et des bouleversements qu’ont entraînés l’épopée napoléonienne, suivie de la Restauration. Tous les éléments du roman populaire, la peur et le rire, les actions des preux et des maléfiques, chevauchées, duels au sabre avec l’occupant russe, enlèvements et mystères, sont respectés, soutenus par la musique très suggestive de Georges Delerue. Homme de gauche, Santelli veut illustrer à travers cet envoûtant « roman paysan » (une rareté en soi) « l’écroulement de la légende napoléonienne », qui se confond pour les paysans avec les légendes de toujours, les superstitions du terroir et les faits divers insolites. Un « western montagnard » tourné sur place – au Moulin Richard de Bas à Ambert, à Saint-Bonnet-le-Chastel, à l’étang de Riols à Marsac-en-Livradois (Puy-de-Dôme) – et qui constitue une des belles réussites de l’ORTF.
1974(tv) Schulmeister, l’espion de l’Empereur – 6. Avant les 100 Jours (FR) de Jean-Pierre Decourt
Cyril Grize/ORTF-Société nouvelle Pathé-Cinéma (1re Ch. 8.4.74), 52 min. – av. Jacques Fabbri (Karl Ludwig Schulmeister), Roger Carel (Hammel), Henri Virlojeux (Joseph Fouché), Françoise Giret (Maria Walewska), William Sabatier (Anne-Jean Savary, duc de Rovigo), Andrée Boucher (Suzel Schulmeister), Howard Vernon (Sir Horace Mill), Georges Claisse (Tchernitchef), Pierre Hatet (col. Karl Justus Gruner), Claudine Collas (Adeline), Patrick Préjean (Bajou), Jean-Pierre Bouvier (Gérard de Blanzy), Raoul Billerey (le maître de poste).
Synopsis : En revenant de l’île d’Elbe où il a vu Napoléon, Schulmeister est arrêté par les agents de Fouché, ex-ministre de la Police qui continue à être indispensable en raison des dossiers embarrassants qu’il détient. Fouché lui interdit toute activité, devinant que Napoléon a chargé Schulmeister de lui faire un rapport sur le climat politique et l’accueil que lui réserveraient les Français s’il rentrait au pays. L’espion lui fausse compagnie en se faisant remplacer par Hammel, son bras droit, et revoit Savary, duc de Rovigo. Celui-ci craint que Metternich ne prépare un coup fumeux : le duc de Reichstadt, fils de Napoléon, 3 ans, serait nommé empereur et Fouché régent, avec la caution de l’impératrice Marie-Louise ainsi que l’approbation et le contrôle de l’armée autrichienne stationnée en France.
Traumatisé par la campagne de Russie, Schulmeister reste dubitatif quant aux chances de Napoléon si d’aventure il revenait (« à sa seule vue, les estropiés de la Bérézina jetteraient leurs béquilles et retrouveraient leurs jambes ? »). Son intuition lui dit que quelque chose de très grave se prépare. Il rend visite à Maria Walewska, qui revient également d’une visite sur l’île d’Elbe, où elle a persuadé Napoléon que la France l’attendait. Schulmeister découvre que la Polonaise a été dupée par ses ennemis, les espions Sir Horace Mills de Londres, Tchernitchef de Moscou et Gruner de Berlin : ils l’ont manipulée pour qu’elle encourage l’Empereur à revenir afin de mieux l’anéantir. « Les services secrets alliés se sont mis à votre école », dit Fouché, sombre, à Schulmeister, « et c’est nous qui sommes tombés dans le piège. Le piège est en train de se refermer, j’ai bien peur que ce soit le commencement de la fin ... » Un messager annonce le débarquement de Napoléon à Golfe-Juan.
Le rôle des services secrets alliés mis à part, cet épisode de la deuxième saison des aventures de Schulmeister (la première date de 1971, cf. p. 155), tourné en couleurs, est partiellement authentique ; le maître-espion de Napoléon fit effectivement, comme Maria Walewska et son fils (septembre 1814), un séjour sur l’île d’Elbe et fut chargé de préparer le terrain en France en vue d’un éventuel retour. Un scénario plus ingénieux que d’habitude.
1979(tv) La Lumière des Justes / Das Licht der Gerechten (FR/AT/DE/BE/CH) de Yannick Andreï
Claude Désiré/TF1-Maintenon Films (Paris)-Neue Delta (Wien)-ZDF-RTBF-ORF-TSR/SSR (TSR 2.12.78 / TF1 22.3.-7.6.79 / BR 4.81 / NDR-RB-SFB 8.1.86), 14 x 52 min. – av. Chantal Nobel (Sophie de Champlitte-Lambrefoux), Michel Robbe (Nicolaï Mikhaïlovitch Azarjow/Nicolas Ozareff), Jean Deschamps (le comte de Lambrefoux), Gisèle Casadeus (la comtesse de Lambrefoux), Jean Davy (Poitevin), Lucienne Legrand (Mme Poitevin), Axelle Abadie (Delphine de Charlaz), Stefan Paryla (Hippolyte), Jean-Paul Tribout (le libraire Vavasseur), Jean Rupert (son portier), Mike Marshall (le tsar Alexandre Ier).
Synopsis des épisodes 1 et 2 (sur 14) : Le 31 mars 1814, alors que Napoléon s’est retranché au château de Fontainebleau, Paris capitule après une résistance de 24 heures. Nicolas Ozareff, jeune officier de l’armée impériale russe, entre dans la capitale avec les troupes d’occupation alliées et loge chez un vieux monarchiste, le comte de Lambrefoux. Il flirte avec la belle Delphine de Charlaz, mais c’est finalement la fille de Lambrefoux, Sophie, qui gagne son cœur. Jeune veuve acquise aux idées républicaines par son premier mari, elle ne voit d’abord en cet officier russe que le sujet de la plus barbare de toutes les monarchies européennes. Puis elle lui fait découvrir les cercles républicains de Paris dont les opinions avancées le surprennent et le séduisent. Le 3 juin, l’armée russe reçoit l’ordre d’évacuer Paris. Avant d’abandonner Sophie, Nicolas lui avoue son amour et obtient l’assurance qu’il en est aimé. Treize mois plus tard, en juillet 1815, les troupes alliées réinvestissent Paris, Napoléon était définitivement vaincu après les Cent-Jours. Blücher veut faire sauter les ponts d’Iéna et d’Austerlitz sur la Seine, mais, alerté par Wellington qui s’y oppose, le tsar Alexandre intervient pour l’en empêcher. Les officiers russes sont choqués par la versatilité idéologique des Parisiens qui ont tous tourné casaque en moins de trois semaines et se font passer pour de parfaits patriotes. Soupçonnée de menées révolutionnaires par la seconde Restauration, Sophie a dû se réfugier à la campagne, à Brie, où la rejoint Nicolas. Ils décident de se marier et Nicolas demande officiellement la main de Sophie au comte. La jeune femme est revenue à Paris quand un de ses amis, le libraire républicain Vavasseur, est arrêté. Et lorsque Nicolas revient de la grande revue des troupes russes devant le tsar, il apprend que Sophie a été, elle aussi, arrêtée – et que son propre père lui refuse l’autorisation de se marier. Une fois libérée, Sophie épouse Nicolas qui l’emmène avec lui en Russie ...
Cet impressionnant mégafeuilleton européen de 12 heures d’antenne adapte avec faste La Lumière des justes de l’écrivain franco-russe Henri Troyat, de l’Académie française, une série romanesque parue en 5 volumes, de 1959 à 1963. Le premier volume, Les Compagnons du coquelicot (1959), contient la matière des deux premiers épisodes du feuilleton, qui se déroulent à la fin de l’Empire. Une époque peu glorieuse, rarement évoquée à l’écran dans l’Hexagone, ce qui est déjà le premier mérite de cette série adaptée par Jean Cosmos et Jean Châtenet. Les 12 épisodes suivants se jouent en Russie, sous le tsar Alexandre Ier (jusqu’en 1825), sous le dictatorial Nicolas Ier (jusqu’en 1855), avec un très bref retour en France sous Napoléon III. Pris tous deux dans la tourmente de l’histoire et les conséquences de leur engagement politique, Nicolas et Sophie, les héros, se rallieront aux conspirateurs décembristes, des libéraux opposés au servage, ce qui leur vaudra d’être déportés en Sibérie. Ils seront grâciés à l’avènement d’Alexandre II. Le début « napoléonien » de la série est tourné à Senlis, à Thiers-sur-Thève (Oise) et dans la région parisienne (les scènes de Russie sont réalisées en Autriche) par un des meilleurs téléastes de l’ORTF, Yannick Andreï, auquel on doit une remarquable Dame de Monsoreau d’après Alexandre Dumas en 1971. La très belle chanson du générique, Être, est composée et chantée par Charles Aznavour.
1982[(tv) L’Agonie de l’Aigle / Napoléon, la fin de l’épopée – 1. Croire encore ... à l’île d’Elbe – 2. Espérer ... à Waterloo – 3. Mourir ... à Sainte-Hélène (FR) de René Chanas ; FR3 6.+13.+20.8.82), 3 x 55 min. – Documentaire : évocation ample, épique mais parfois un peu grandiloquente des dernières semaines de pouvoir, puis de l’exil à Saint-Hélène, sous forme de documentaire (images prises sur les lieux historiques) et d’extraits du Colonel Durand (1948) du même René Chanas. Le premier épisode s’achève sur la victoire passagère à Ligny, le 16 juin 1815, puis montre le Corse en lutte contre un destin implacable.]
2002Δ The Count of Monte Cristo (La Vengeance de Monte-Cristo) (US/GB/IR) de Kevin Reynolds. – av. Jim Caviezel (Edmond Dantès), ALEX NORTON (Napoléon). – Cf. supra (film de 1912).
2005/06**N (Io e Napoleone) / Napoléon (et moi) /N : Napoleón y yo (IT/FR/ES) de Paolo Virzì
Mario Chimenz, Gianni Nunnari, Giovanni Stabilini, Riccardo Tozzi/Cattleya-Babe Film-Alquimia Cinema-Medusa Emotion Picture-Sky-MIBAC, 100 min. – av. DANIEL AUTEUIL (Napoléon), Elio Germano (Martino Papucci), Monica Bellucci (la baronne Emilia Speziali), Sabrina Impacciatore (Diamantina Papucci), Valerio Mastandrea (Ferrante Papucci), Francesca Inaudi (Mirella), Massimo Ceccherini (Cosimo Bartolini), Omero Antonutti (maestro Fontanelli), Margarita Lozano (Pascalina), José Angel Egido (Louis-Joseph Marchand, valet de chambre de Napoléon), Fausto Caroli (Ali, le Mamelouk), Achille Brugnini (col. Sir Neil Campbell, commissaire anglais chargé de la surveillance de l’Empereur), Vincent Lo Monaco (gén. Antoine Drouot, gouverneur de l’île d’Elbe), Vincenza Scotto (Madame Mère, Laetitia Bonaparte-Ramolino), Vittorio Amandola (le syndic Egisto Lonzi Tognarini), Emanuele Barresi (le secrétaire communal), Carlo Monni (le notaire Bonci Bacelli).
Synopsis : Portoferraio, île d’Elbe, le 4 mai 1814. Ce que Martino Papucci, instituteur jacobin, déteste le plus au monde, c’est Napoléon : il rêve toutes les nuits qu’il tue l’« immonde bête sanguinaire, objet de sa très sainte haine ». Alors, lorsque l’Empereur débarque soudain sur l’île, Martino y voit un signe du destin ... et graisse déjà son vieux pistolet. Tandis que Martino est chassé de l’école pour ses propos insultants sur le nouveau souverain de l’île, ce dernier, débarquant en pompe du trois-mâts anglais « HMS Undaunted », est acclamé par la population en liesse. Martino est tellement pris dans sa détestation obsessionnelle qu’il se dispute avec sa sœur et ses deux frères aînés et ne voit pas combien Mirella, la servante, l’adule. Chassé de la maison familiale, il dort chez sa maîtresse, l’enivrante et infantile baronne Emilia, qui se console passagèrement d’un mari octogénaire et impuissant à Naples. Par l’intercession du maire, Martino, un des rares lettrés de l’île, est bombardé bibliothécaire et mémorialiste personnel de l’Empereur. Désemparé, il consulte son maître à penser Fontanelli, l’ancien instituteur, un irréductible révolutionnaire dont le fils est tombé à Marengo ; Fontanelli lui déconseille de risquer sa vie pour abattre le despote et Mirella, qui a découvert le journal intime de son idole, dérobe son pistolet pour l’empêcher de commettre une bêtise. Le contact avec l’Empereur déchu déstabilise le jeune homme : il découvre un être humain hélas attachant, qui sourit et sait se moquer de son image (« entre nous, ce regard d’aigle, je crois ne l’avoir jamais eu »). Il parcourt l’île à ses côtés, entouré de concitoyens ridicules à force de flagornerie, assiste à l’organisation très efficace de l’administration et au développement ingénieux des routes côtières, l’éclairage des rues, le ramassage des ordures (du jamais vu), note les propos du « Petit Caporal » (« un trône n’est qu’une simple estrade recouverte de velours » ou « c’est la peur qui nous oblige à penser à la victoire ») tout en attendant l’occasion de frapper – qu’il rate régulièrement, au bord d’une falaise, à la chasse aux sangliers, pendant la sieste, etc.
Parfois, Napoléon devient philosophe, quand il regrette son enfance (« le jour où nous ne prenons plus de plaisir à chercher des coquillages survient la passion pour nous-mêmes, qui nous emporte jusqu’à la vanité – et jusqu’à la mort ... »), propos que l’impérial histrion fait consigner et qu’il ressert dans la conversation en société. Puis il se mêle à ses sujets, fait le marché, s’agenouille devant Pasqualina, sa vieille nourrice d’Ajaccio qui se remémore le « petit garçon très gentil et tellement triste » qu’il fut à dix ans. Il verse une larme en écoutant l’ Eroica comme j’ai été fier quand les gens m’ont dit que Beethoven l’avait composée pour moi ... après, je sais, il a changé d’idée, comme tant d’autres, comme tant d’autres ... »), et fait également consigner pour les générations futures ce moment de repentir passager – avant de penser, la voix étranglée, au sort de son fils de trois ans, le roi de Rome. Martino, son « bon ami », hésite de plus en plus, laisse passer des occasions, se punit en plongeant sa main « coupable de lâcheté » dans le feu. Un soir, il alarme les sentinelles : une ombre dans le jardin. C’est son maître à penser, Fontanelli, qui cherchait à tuer le Corse et qui est appréhendé. Napoléon promet à Martino qu’il ne lui arrivera rien, « la guerre est finie ». Pourtant, le lendemain, Fontanelli est fusillé – par ses propres ex-élèves en uniforme. Furibond, Martino s’introduit la nuit suivante dans les appartements impériaux et poignarde ... un coussin : Napoléon s’est enfui, au nez et à la barbe de tout le monde ! Et en emmenant avec lui la baronne Emilia que lui avait présentée son bibliothécaire. « J’ai été conquise, comme toi », lui écrit-elle. Pendant les Cent-Jours, Martino épousera Mirella qui finira par lui rendre son pistolet. Après l’ultime bain de sang à Waterloo, le commentaire final : « Martino enterra l’arme à côté de la tombe de Fontanelli, puis, changeant d’avis, la déterra, embrassa sa famille et partit pour Sainte-Hélène. Mais il arriva trop tard. »
Cinéaste plusieurs fois récompensé à la Mostra de Venise (en 1995 et 1997) pour ses précédents longs métrages, Paolo Virzì réussit une comédie ironique à la fois intelligente, amusante et émouvante, souvent très juste dans son évocation des 300 jours de l’exil impérial à Portoferraio, avec un remarquable travail sur les décors (le vieux port, les réceptions, le concert auquel assistent Laetitia et Pauline Bonaparte), l’ambiance et la couleur locales. On n’oublie même pas le prétentieux Sir Neil Campbell, commissaire anglais chargé de la surveillance de l’Empereur, dont « l’envol de l’Aigle » restera le drame de sa vie (sauf que, dans les faits, la nuit du 26 février 1815, il ne dormait pas dans la pièce jouxtant celle de l’exilé, comme dans le film, mais chez sa maîtresse italienne à Livourne). Virzì adapte très librement le roman N. d’Ernesto Ferrero (2000), Prix Strega, un roman historique traduit dans une dizaine de langues que lui avait signalé Roberto Benigni ; les scénaristes Furio Scarpelli (collaborateur fidèle de Totò et de Mario Monicelli), son fils Giacomo et Francesco Bruni introduisent l’élément décisif : la confrontation entre le bibliothécaire-poète romantique et l’homme de pouvoir malicieux et désenchanté. Leur Martino est l’idéaliste sympathique mais éternellement dupé, risible, aveugle dans sa haine comme dans sa faiblesse envers Napoléon. Prenant l’accent corse, Daniel Auteuil fait un Empereur vieillissant (il se teint les cheveux) et grassouillet, mais pas invraisemblable : le comédien lui confère une certaine chaleur, le montrant en fanfaron mégalomane, à la fois touchant et séducteur roué, tantôt sentimental, tantôt secret (« je ne te permets pas de t’occuper de mes tourments ! »). Ce Napoléon a intuitivement saisi l’hostilité de son mémorialiste et prend la pose pathétique du héros au crépuscule de sa vie. Virzì traduit la fascination du pouvoir en mode comique, tout en laissant ouverte la question de savoir s’il eût fallu « éliminer le tyran pour les bains de sang dans lesquels il a plongé l’Europe, pour s’être imposé en médiocre idole à la vénération ou à la haine de chacun de nous, et pour avoir trahi les patriotes italiens » (selon la formulation de Martino). La capitulation de la bourgeoisie et de la noblesse (la baronne Emilia) est, elle, flagrante et peu flatteuse : l’arrivée de Napoléon, pensent-ils, signifie un miracle économique pour l’île.
Le tournage se fait en Toscane, essentiellement près de Livourne : à Piombino (port), Campiglia marittima, Suvereto, au parc national Arcepelago Toscano, dans l’Azienda vinicola Mazzocchi, à Campo nell’Elba, Cala Violina et dans la région de Pise (Terricciola, Palaia, Borgo Villa Saletta, Montefoscoli). Le budget est important (7,6 millions d’euros), mais les recettes domestiques en Italie sont décevantes (un peu plus d’un millions d’euros). Le film décroche 6 nominations au prix David di Donatello 2007 (V. Mastandrea, S. Impacciatore, photo, décors, costumes, effets visuels), Virzì reçoit le prix du Ft. Lauderdale International Film Festival 2007, le Globe d’Or Italie 07 et le Syndicat national des journalistes de cinéma prime Elio Germano. – DE : N – Napoleon, GB/US : Napoleon and Me.
2014[(vd) Napoléon : Le diable et les traîtres (FR) de Jean-Louis Molho et Thierry Lentz ; Doc Story-Fondation Napoléon-France Télévisions-Conseil général de l’Aube, 52 min. – Documentaire sur la campagne de France, de janvier à avril 1814 : Après les défaites en Russie, en Allemagne et en Espagne, Napoléon doit à présent défendre ce qu’il appelle le « sanctuaire national », S’il ne peut remporter une victoire totale, au moins pourra-t-il faire douter ses adversaires afin de les forcer à négocier avec lui ... ce qu’ils ont décidé de ne pas faire. Napoléon face à la défaite, aux faiblesses et aux trahisons des hommes.]
2014Δ Elba : l’eredità di Napoleone / Elba : Napoleon’s Legacy (IT) d’Alessandro Izzo ; VisitElba-I licaoni Production, 38 min. – av. Marguerita Coppola (Sara), Guglielmo Favilla (Leonardo), FEDERICO MARIOTTI (Napoléon), Ilaria Di Luca (Thesan). – Petit film promotionnel (web et YouTube) tourné à l’occasion du bicentenaire du séjour impérial, notamment dans les résidences au palais des Mulini à Portoferraio et à San Martino. Le récit suit la mode des récits fantastiques d’un Dan Brown (Da Vinci Code) : en juin 1814, dans les salons de sa nouvelle résidence, Napoléon est approché par un moine encagoulé, messager du Tyran, démon aveuglé par la soif de conquêtes et terré dans les entrailles de l’île, qui lui fait remettre un médaillon magique. Deux siècles plus tard, Sara et Leonardo, deux jeunes guides touristiques, tentent de sauver l’île de l’emprise du Tyran qui cherche à s’enfuir de sa prison spatio-temporelle pour détruire l’univers. Napoléon, qui s’est passagèrement réincarné dans Leonardo, leur donne un coup de main... Affligeant. – Nota bene : En mai 2014, pour commémorer ce même bicentenaire, quelque 400 figurants en costumes d’époque (sociétés internationales de reconstitution) se réunissent sur les sites historiques de Portoferraio autour d’un Napoléon joué par l’Italien Roberto Colla.
2019/20(tv) L'esilio dell'aquila (L'Exil de l'Aigle) (IT) de Stefano Muti
Paolo Maria Spina/Revolver Film-Cosmomedia (Portoferraio)-Regione Toscana-Toscana Film Commission-Via Stella TV (FR: Toute l'Histoire+FR3 Corsica 5.11.21), 69 min./56 min. - av. ERIC FRATICELLI (Napoléon), Chiara Conti (Maria Walewska), Paola Gassman (Maria Laetizia Ramolini), Marcello Mazzarella (Antoine Drouot), Paola Pessot (Pauline Bonaparte), Marcello Mazzarella (Antoine Drouot), Vanni Bramati (Neil Campbell), Franco Boschian (Pierre Cambronne), Franco Giannoni (Pietro Traditi), Luca Bellosi (Bernotti), Francesco Acquaroli (André Pons), Vanni Bramati (Neil Campbell), Rosa Pianeta (Popolana). Docu-fiction : Napoléon dix mois en exil sur l'île d'Elbe, de son arrivée en mai 1814 à sa fuite en février 1815: ses méditations sur la fuite, sa nostalgie de la Corse, se dépression après la défaite, ses relations problématiques avec les puissants de l'île, ses rapports avec les femmes et ses dernières maîtresses mais aussi ses nombreuses activités pour l'île elle-même (routes, ports, mines, eau potable, etc.). Tournage sur place dès 2014, avec la collaboration du cinéaste Krzysztof Zanussi, marié à la dernière descendante de Maria Walewska, et en réutilisant des costumes du Waterloo de Bondartchouk pour Dino De Laurentiis. - Titre internat.: The Exile of the Eagle.