Ia - NAPOLÉON ET L'EUROPE

6. L’EMPIRE FRANÇAIS (1804 à 1815)

6.1. Faits et gestes divers du PremIer Empire

1897Napoléon et la sentinelle (FR) de Georges Hatot
Etablissements Frères Lumière (série « Vues historiques et scènes reconstituées »), catalogue no. 673, 15 m. (40 sec.) – Trouvant un de ses grenadiers endormi, Napoléon prend son fusil et monte lui-même la garde, puis réprimande le soldat. Un « tableau » filmé par Alexandre Promio en septembre 1897, devant un décor de Marcel Jambon.
Le sujet, qui a fait souvent l’objet de gravures au XIX e siècle (notamment par Grenier de Saint-Martin), fait partie de la légende dorée de l’Empire. Il se réfère en réalité à Arcole, pendant la campagne d’Italie (17 novembre 1796). Après la bataille, Bonaparte, déguisé, aurait inspecté le camp et découvert une sentinelle endormie. Il aurait pris alors son fusil et fait la faction durant près de deux heures. À son réveil, le général aurait dit au soldat terrorisé par la sanction qui pouvait le châtier : « Rassure-toi mon camarade ; après tant de fatigues, il est bien permis à un brave comme toi de s’endormir ; mais une autre fois, choisis mieux ton temps. » Commentant cette anecdote apocryphe dans Le Mémorial de Sainte-Hélène de Las Cases (1822/23), futur bréviaire du bonapartisme, Napoléon remarque : « Cette idée est sans doute d’un bourgeois, d’un avocat, peut-être ; mais sûrement pas d’un militaire. L’auteur me veut du bien, nul doute, et j’imagine rien de plus beau dans le monde que ce qu’il me fait faire. Il a certainement écrit cela pour me faire honneur ; mais il ignorait que je n’étais guère capable d’un tel acte ; j’étais trop fatigué pour cela ; il est à croire que j’étais endormi avant le soldat dont il parle. » (août 1816). Cf. aussi film Pathé de 1905 (infra). – DE : Napoleon I. und der Wachtposten.
1903Napoléon et le grognard (FR) d’Alice Guy
Établissements Gaumont S.A. (Paris). – Le sujet extrait de la légende dorée napoléonienne pourrait se référer à une autre anecdote propagée par l’iconographie du XIX e siècle, celle de l’Empereur qui remet sa pelisse à un grognard grelottant de froid (un vétéran de la Vieille Garde) pendant le retraite de Russie.
1905La Sentinelle endormie (FR)
Pathé Frères S.A. (Paris), 20 m. – av. MAXIMILIEN CHARLIER (Napoléon). – Nouvelle version de l’anecdote apocryphe traitée par Lumière en 1897 (cf. supra). Maximilien Charlier, chronologiquement le tout premier Napoléon identifié de l’écran, revêt l’uniforme du « Petit Caporal », rôle qu’il a déjà tenu deux ans auparavant dans L’Épopée napoléonienne de Lucien Nonguet, également pour Pathé (cf. p. 138). – US : Napoleon and the Sentry.
1908Una congiura contro Napoleone I (IT)
Itala Film, Torino, 210 m. – Fourbu par la bataille, Napoléon est hebergé par un pauvre paysan, qui le supplie de l’enrôler comme grenadier dans la Grande Armée ; l’Empereur lui accorde cette faveur et il lui fait cadeau d’une bague. Plus tard, le grenadier découvre une conspiration royaliste qui cherche à poignarder son bienfaiteur dans son cabinet de travail. Il arrive à temps pour se jeter sur le conspirateur, mais périt d’un coup de couteau. Napoléon va personnellement consoler la mère du jeune héros auquel il doit la vie. – DE : Eine Verschwörung unter Napoleon.
1908Une plaisanterie de Napoléon Ier (FR)
Henri Joseph Joly/Société des Phonographes & Cinématographes Lux, 174 m. – Une anecdote imaginée par Serge Basset, filmée dans les studios Lux à Gentilly. – DE : Episode aus dem Leben Napoleons.
1909Trait de bonté de Napoléon Ier / Le Lieutenant Georges et l’Empereur (FR) de Louis Feuillade
Établissements Gaumont S.A. (Paris), 98 m./304 ft. - De garde, le jeune lieutenant Georges lutte contre le sommeil dans le château où Napoléon a installé son état-major. Il écrit une lettre à sa mère dans laquelle il regrette d’apprendre qu’elle est dans la misère, tout comme sa sœur, et dit qu’il a l’immense honneur de servir comme sentinelle de l’Empereur. Puis il s’endort, terrassé par la fatigue. Napoléon entre dans la pièce, trouve le lieutenant affalé, lit sa lettre et en est ému. Lorsque Georges se réveille, il découvre une bourse de pièces d’or à côté de sa missive. L’Empereur surgit, le tance pour avoir failli à son devoir de sentinelle, puis fait ajouter sur la lettre un post-scriptum : « L’Empereur Napoléon vous salue, Madame, et vous félicite pour votre fils. Je le nomme capitaine de la Garde. » – US : An Emperor’s Generosity / A Generous Emperor, DE : Napoleon I. und der wachthabende Offizier.
1909I due sergenti (Les Deux Sergents) (IT)
Itala Film, Torino, 269 m. (12 tableaux). – En 1805, deux sergents de la Grande Armée sont accusés d’avoir désobéi aux ordres, puis grâciés par l'Empereur. Adaptation du vieux mélodrame en 3 actes de Théodore Baudoin d’Aubigny et Auguste Maillard (1823), porté également à l’écran en Italie en 1909, 1922 et 1936 (voir le synopsis de ces deux dernières moutures). DE : Die beiden Sergeanten, GB+US : The Two Sergeants.
1910Napoleon og hans lille Trompetist / Napoleon og den lille Hornblaeser (Napoléon et le petit cornet / Napoléon et le petit clairon) (DK) de Viggo Larsen
Ole Olsen/Nordisk Films Kompagni, Koebenhavn, 169 m. – av. VIGGO LARSEN (Napoléon). – Un jeune cornet prisonnier parvient à alerter Napoléon d’une attaque imminente et meurt ; l’Empereur lui décerne une décoration posthume. Tournage aux studios de Valby. – DE : Napoleon und der kleine Hornist.
1910Adriana di Berteaux (Un duello sotto l’Impero) (Adrienne de Berteaux) (IT) d’Enrico Guazzoni
Società Italiana Cines, Roma, 309 m./20 tableaux. – av. Orlando Ricci. – Adriana, la fille du maréchal d’Empire Berteaux (personnage fictif), aime le comte de Clariveaux, mais son géniteur la destine au duc de Chaumont ; ce dernier surprend les amants, provoque son rival en amour et le tue au pistolet dans un duel truqué, la seule arme chargée étant la sienne. – DE : Adriane von Bertaux.
1910Tontolini granatiere napoleonico (Tontolini grenadier de Napoléon) (IT)
Società Italiana Cines, Roma, 158 m. – av. Ferdinand Guillaume (Tontolini). – Comédie burlesque : Tontolini, sentinelle de la Grande Armée, s’est endormi et se couvre de gloire en rêve, tandis que deux garnements lui volent son fusil et le remplacent par un balai. Le réveil est brutal.
1910La Dot de l’Empereur (FR) de Gérard Bourgeois
Société des Phonographes & Cinématographes Lux (Paris).
1910Le Déjeuner de l’Empereur (FR)
Société Française des Films Eclair, 215 m. – av. Marcel Lapierre.
1910Il conte di Montravers (Le Comte de Montravers) (IT)
Società Italiana Cines, Roma, 278 m. – Avant de partir à la guerre avec Napoléon, le comte de Montravers contracte une sérieuse dette pour assurer le confort de sa bien-aimée, une danseuse, et s’engage par testament à léguer à l’usurier son épée et toutes ses décorations s’il ne revenait pas. Gravement blessé à la bataille, il perd partiellement la mémoire, oublie sa dette et évite de justesse le déshonneur en sauvant la fille de son usurier, violentée par des malfrats. – GB : Count Montravers.
1910La cantiniera (La Cantinière de l’époque de Napoléon) (IT)
Società Italiana Cines, Roma, 248 m. – Afin de suivre son fiancé Gaston à l'armée, Margot devient cantinière dans le même régiment. Ému par ces amoureux inséparables, Napoléon assigne Margot au transport des blessés qui suit la troupe à la bataille. Gaston est tué en voulant transmettre un message urgent à Napoléon, Margot prend la relève et, blessée à son tour par la grenaille ennemie, meurt aux pieds de l’Empereur. Son corps est enseveli dans le drapeau du régiment. – GB : The Cantiniere, DE : Die Marketenderin.
1910Il disertore (Le Déserteur / La Vivandière amoureuse) (IT) de Vittorio Rossi Pianelli
Società Italiana Cines, Roma, 287 m. – av. Amleto Novelli, VITTORIO ROSSI-PIANELLI (Napoléon), Maria Gasparini. – Un sergent décoré des grenadiers de la Garde impériale apprend que sa vieille mère est mourante, mais ses supérieurs refusent de lui donner un congé pour la rejoindre. Il s’enfuit de la caserne et assiste à ses derniers instants. Lorsqu’il réintègre son régiment, il est arrêté comme déserteur et condamné à mort. Sa fiancée, une vivandière, parvient à fléchir Napoléon et à obtenir sa grâce en montrant les décorations obtenues sur le champ d’honneur. – GB, US : The Deserter.
1911La Carpe de l’Empereur (FR)
Établissements Gaumont S.A. (Paris), 208 m. – Farce grotesque : un ambassadeur étranger pêche une carpe énorme dans un étang du parc impérial à Saint-Cloud ; il a juste le temps de la dissimuler sous son manteau lorsque survient l’Empereur pour faire un brin de causette. L’ambassadeur peine à cacher son poisson qui gigote, gagne sa chambre où la carpe continue à se démener dans la baignoire, inondant le sol juste au-dessus du cabinet de travail où Napoléon dicte son courrier à Ménéval ; des gouttes tombent du plafond. L’ambassadeur cache le poisson sous son duvet et un grenadier rapporte à l’Empereur amusé que son invité doit s’y ébattre avec une dame. Finalement, l’ambassadeur fait cuire la carpe dans une bassine d’eau bouillante dans sa cheminée et s’offre un délicieux déjeuner.
1911D’ordine dell’Imperatore (Ordre de l’Empereur) (IT) de Giuseppe De Witten
Unitas Film, Torino, 175 m. – av. Cesare Zocchi (le maréchal Joachim Murat), Lita Lorini (Laetizia, la fille de Murat), Gerardo De Sarro (le fils de Murat), ANGELO FOFFANO (Napoléon).
Murat, maréchal d’Empire, découvre un complot contre Napoléon auquel est mêlé son propre fils ; il le fait emprisonner, mais l’Empereur, magnanime, le grâcie. N’importe quoi : les deux fils de l’authentique Murat, les princes Achille et Lucien, avaient respectivement 13 et 11 ans quand Napoléon abdiqua en 1814 !
1911Picciola, or The Prison Flower (La Fleur du prisonnier) (US)
Vitagraph Co. of America, 305 m. – av. Mabel Normand (Picciola), William Humphrey (M. de Charney). – Prisonnier politique de santé fragile, le comte de Charney est guéri par les vertus d’une plante médicinale découverte entre les pierres de la cour de prison. Napoléon lui-même est rendu attentif à la chose et ordonne de protéger et cultiver cette plante ; il accorde son pardon à Charney qui peut épouser Picciola, la fille d’un de ses codétenus également libéré sur ordre de l’Empereur. – IT : Il fiore del prigioniero.
1911The Profligate [= Le Débauché] de Francis Boggs
William Nicholas Selig/Selig Polyscope Company (Chicago-Los Angeles), 1000 ft./305 m. – av. Hobart Bosworth (cpt. Paul Dubois), Eugenie Besserer (Pauline Revère), Fred Huntley (Lamotte, le maître d’armes), Betty Harte (Mercédès Revère, sœur de Pauline), le comte Alberti (George Revère), GEORGE HERNANDEZ (Napoléon), Frank Richardson (gén. Jean-Baptiste Favart), Herbert Rawlinson (cpt. Lafayette), Tom Santschi (ltn. Jarbeau), Nick Cogley (le propriétaire), Leo Pierson (le garçon).
Synopsis : Alors qu’elle suit des leçons d’escrime à Paris, Pauline, la fille aînée de M. Revère, s’éprend du capitaine des hussards Paul Dubois, qu’elle épouse. Mais le bonheur du couple est de courte durée, Dubois doit regagner son régiment. Grièvement blessé à la guerre, sous les yeux de l’Empereur, il est soigné avec tendresse par l’infirmière Mercédès, qui ignore qu’il est son beau-frère. Ils s’aiment. Mercédès écrit à sa sœur Pauline qu’elle se réjouit de rencontrer son mari et, par la même occasion, de lui présenter le sien. Mais lorsqu’elle découvre la vérité, elle perd la raison. Pauline jure de la venger et, déguisée en hussard, le visage caché sous un masque, elle provoque son époux en duel. Elle le tue d’un coup de sabre ; le moribond a le temps de reconnaître Pauline avant de rendre l’âme.
1911Un cœur de père (FR)
Société Française des Films Éclair (Paris), 260 m. – Un lieutenant de la Grande Armée insulte l’épouse d’un jeune grenadier. Celui-ci le frappe, il est arrêté et condamné à mort pour offense à un supérieur. Son père, un vieux grognard de la Garde arborant la Légion d’Honneur, parvient à convaincre le général de sauver son fils. – US : A Just General.
1911The Sentinel Asleep [= La Sentinelle endormie] (US) de Thomas H. Ince
Independent Moving Pictures Co. of America (IMP), 1 bob. – av. Mary Pickford (Joséphine). – Napoléon tombe sur une sentinelle endormie et s’apprête à la frapper de son sabre quand il l’entend murmurer « Joséphine » dans son rêve. Ému, l’Empereur le laisse dormir et prend la garde à sa place. La bien-aimée arrive et Napoléon lui fait croire qu’il est la sentinelle.
1912La Flétrissure – un sombre épisode du Premier Empire (FR) de Georges-André Lacroix
Établissements Gaumont S.A. (Paris), 641 m. – av. HENRI DUVAL (Napoléon), Mlle Aylac (Gervaise), M. d'Auchy (le comte Maximilien de Chambert), Mario (Jérôme, le forgeron).
Synopsis : Les clubs royalistes n’ont pas pardonné au jeune et brillant général corse sa fortune rapide et son arrivée au pouvoir ; des complots d’assassinat se trament dans l’ombre. Le comte Maximilien de Chambert présente à ses complices une nouvelle recrue, un officier chargé de poignarder le Premier Consul. Un espion de Fouché ayant assisté à la séance, Napoléon ordonne l’arrestation et la mise à mort de Chambert. Celui-ci s’enfuit, trouve réfuge chez Jérôme, un forgeron, mais séduit son épouse, la frivole Gervaise, un amour de jeunesse. Pour se venger, le forgeron le marque à l’épaule, au fer rouge, de la fleur de lys des criminels. Pris pour un forçat évadé, Chambert est enfermé au bagne de Toulon – un sort cruel mais plus enviable que le peloton d’exécution. Il croupit en prison pendant l’Empire et ne parvient à s’évader que douze ans plus tard, alors que Napoléon est à Sainte-Hélène. Chambert recherche Jérôme, son bourreau. Il le trouve dans sa maison en flammes et le sauve ; la brûlure du feu ayant effacé la trace d’infamie, les deux hommes se réconcilient. – US : The Convict’s Brand.
1912Une conspiration contre Napoléon (FR)
Société générale des cinématographes éclipse (Paris), 325 m. – Une maîtresse de l'Empereur est chargée de le tuer, mais elle est démasquée par une jeune sentinelle (film tourné dans les studios éclipse de Courbevoie). – DE : Verschwörung gegen Napoleon, US : The Sentry on Guard.
1912The Emperor's Messenger (GB) de Hay Plumb
Cecil Hepworth/Hepworth Manufacturing Co. (Walton-on-Thames), 2 bob. - av. Jack Hulcup (ltn. Rentz), Claire Pridelle (Bessie), JOHNNY BUTT (Napoléon), Harry Royston (l'aubergiste). - La fille d'un aubergiste sauve un messager de Napoléon poursuivi par des cosaques.
1912Pro patria mori / Fede di soldato (L’Honneur au temps de l'Empire) (IT) d’Enrico Guazzoni
Società Italiana Cines, Roma, 737 m./2 bob./40 min. – av. Amleto Novelli (le maréchal Guizot), Gianna Terribili-Gonzales (Louise Guizot), Gustavo Serena (le maréchal Vidard), VITTORIO ROSSI-PIANELLI (Napoléon), Ignazio Lupi.
Synopsis : En 1796, pendant la campagne d’Italie (fiction). Séduite et abandonnée par le sous-lieutenant Vidard, Louise s’éprend du sergent Guizot et lui confie sa mésaventure ; celui-ci l’épouse et l’envoie à Paris habiter chez sa mère. Huit ans plus tard, lors d’une réception à Fontainebleau, Guizot, devenu maréchal d’Empire, présente Louise à Napoléon, puis à son meilleur ami, le maréchal Vidard, en qui elle reconnaît celui qui l’avait déshonorée. Guizot le provoque en duel, mais Napoléon, averti par Fouché, intervient à temps, interdit à ses deux maréchaux de se battre pour des raisons privées et leur ordonne de se serrer la main. Au soir d’une grande victoire remportée par l’Empereur, Guizot, blessé, est soigné par son épouse. Il lui demande de pardonner à Vidard, qui vient de lui sauver la vie et agonise sur une civière voisine.
Guazzoni, pilier artistique et pionnier de la cinématographie italienne, a une prédilection pour les sujets napoléoniens : il a signé cette même année une Giuseppina Beauharnais (la diva Gianna Terribili-Gonzales dans le rôle-titre) et enchaînera, dans la même veine napoléonienne, avec Scuola di eroi en 1914. Sa fresque plastiquement assez ambitieuse, mise en scène aux studios de la Via Appia Nuova à Rome, est un succès international qui est accueilli avec enthousiasme en France (on y acclame « le meilleur film italien jamais vu »), mais aussi en Grande-Bretagne et aux états-Unis. – DE : Das Leben dem Vaterland, GB : Death of Glory – A Story of Napoleon, US : At Napoleon’s Command, ES : Por la patria morir.
1912Il Maresciallo (Epopea napoleonica) (IT) de Giuseppe De Witten
Centauro Films, Torino, 355 m. – av. Cesare Zocchi (le maréchal Bon), Gerardo De Sarro (son fils), Lita Lorini (sa belle-fille), ANGELO FOFFANO (Napoléon).
Synopsis : Entouré de l’affection de son fils, sous-lieutenant dans l’armée impériale, de sa belle-fille et de ses deux petites-filles, le maréchal Bon (fictif) coule des jours paisibles dans une villa non loin du château où séjourne Napoléon. Ce dernier a appris l’existence d’un complot contre lui et charge le maréchal de l’arrestation des coupables. Bon reconnaît son propre fils à la tête des conspirateurs ; il le fait arrêter et dégrader. Le peloton d’exécution l’attend, mais Napoléon, attendri par les supplications de la belle-fille et des fillettes, mais aussi en récompense à la fidélité de son maréchal, suspend personnellement l’exécution et accorde son pardon. – ES : El mariscal.
1912The Bogus Napoleon (Le Sosie de l’Empereur) (US) de Charles Kent ou William J. Humphrey (?)
J. Stuart Blackton, Albert A. Smith/Vitagraph Co. of America, 1000 ft./305 m./1 bob. – av. WILLIAM JONATHAN HUMPHREY (Napoléon), Charles Kent (son sosie), John Bunny, Ralph Ince, Edwin R. Phillips, William Shea, Charles Chapman, Morris McGee, Edward Lee, Richard C. Travers, Herbert L. Barry, Harry T. Morey.
Comédie : parti en mission secrète, Napoléon a laissé la clé de son cabinet privé à son chancelier. Deux courtiers, des conspirateurs royalistes, ont observé la chose et cherchent un sosie de l’Empereur qui puisse s’emparer de la clé, ce que la police de Fouché a tôt fait de découvrir. Un de ses agents répond à leur offre, imite à satisfaction le grand Corse, puis, se faisant passer pour malade, propose à l’Empereur lui-même de jouer son propre rôle. Napoléon se prête à cette mascarade et les deux royalistes tombent dans un piège. En plus de les faire arrêter, Napoléon exige d’eux un salaire pour son « interprétation » si convaincante ! – IT : Il sosia dell’imperatore.
1913Hearts of the First Empire (US) de William Jonathan Humphrey
J. Stuart Blackton, Albert A. Smith/Vitagraph Co. of America, 2 bob./610 m. – av. WILLIAM JONATHAN HUMPHREY (Napoléon), Edith Storey (Marie-Louise d’Autriche), Harry T. Morey (Roustam Raza, le mamelouk), Leah Baird (Béatrice Dupreil), Earle Williams (comte de Mauperg [= Adam Adalbert von Neipperg]), William Shea (Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord), Harry Northrup (duc de Beaufort).
Synopsis : Au printemps 1810, craignant que l’Autriche ne prépare une nouvelle guerre, Napoléon fait détenir en otage à Paris le comte de Mauperg, un proche de la cour impériale viennoise. En promenade dans les quartiers pauvres de la capitale, l’impératrice Marie-Louise prend Béatrice sous sa protection, une jeune paysanne battue par sa patronne, la mère Pignone. Promue demoiselle d’honneur, Béatrice est présentée à l’Empereur qui est séduit par sa fraîcheur et son naturel, tout comme Mauperg et le duc de Beaufort, un courtisan. Six mois passent. Béatrice, éduquée, est devenue une des beautés de la cour. Beaufort a appris que Mauperg a reçu l’ordre d’assassiner Napoléon avant de repartir pour Vienne et, en route pour l’arrêter, il tente de violer Béatrice ; elle le tue d’un coup de rapière et, revêtissant son uniforme, elle aide Mauperg, qu’elle aime, à s’évader. Les amoureux ayant quitté la France, Napoléon pardonne.
Après avoir joué Napoléon d’innombrables fois sur scène et à l’écran (pour la première en 1909 dans Napoleon, the Man of Destiny, une production Vitagraph (cf. p. 3), William Humphrey passe derrière la caméra et se dirige lui-même, en gardant le bicorne sur la tête. Titre alternatif : Napoleon, Emperor of France, or the Heart of a Great Empire.
1913His Life for His Emperor (US) de William Jonathan Humphrey
J. Stuart Blackton, Albert A. Smith/Vitagraph Co. of America, 1 acte/305 m. – av. WILLIAM JONATHAN HUMPHREY (Napoléon), Earle Williams (Joachim Murat), Harry T. Morey (cpt. Lacroix), Leo Delaney (Pierre Duchesne), Flora Finch (Flora), Dallas Wilford (l’aubergiste), William Shea, Harry Northup.
Dégradé par Napoléon, le capitaine Lacroix est contacté par des espions anglais pour assassiner l’Empereur. Fonctionnaire impérial déchu, Duchesne surprend la conversation des comploteurs. Lacroix invite Napoléon à se rendre seul dans un estaminet pour obtenir des plans militaires secrets d’un officier renégat. Duchesne avertit l’Empereur et, revêtu de sa fameuse redingote et du bicorne, il se rend à l’auberge à sa place où il est poignardé. Des soldats s’emparent des conspirateurs, Napoléon s’agenouille devant la dépouille du valeureux Duchesne et l’embrasse.
1913Un traditore (Un traître) (IT)
Aquila Films, Torino, 616 m. – Le grenadier Rambaut, plusieurs fois décoré sur le champ de bataille, rêve de gloire et de la main de la cantinière Renise. Mais cette dernière refuse de l’épouser. Rambaut noie son chagrin dans l’alcool et son comportement d’ivrogne entraîne la perte de ses galons. Dégradé, dépité, il passe à l’ennemi et se venge en dirigeant une embuscade qui coûte la vie à plusieurs Français. La nuit venue, il surprend Renise qui cherche à récupérer le drapeau du régiment parmi les morts, et saisi d’un ultime élan patriotique, il l’incite à fuir. Il tombe sous les balles ennemies en protégeant la fuite de la cantinière et meurt le sourire aux lèvres. – DE : In den Tagen Napoleons.
1913I due sergenti (Les Deux Sergents) (IT) d’Ubaldo Maria Del Colle
Pasquali e C., Torino-Roma, 2200 m./1651 m. – av. Alberto A. Capozzi (cpt. Derville/sgt. Guglielmo), Ugo Pardi [= Umberto Paradisi] (sgt. Roberto), Orlando Ricci (le maréchal d’Empire), Egidio Candiani (Valentino), Giovanni Cuisa (sgt. Tomasso), Giovanni Enrico Vidali (adj. Valmore), Michele Cuisa (Gustavo), Maria Gandini (Mamma Pia), Cristina Ruspoli, Laura Darville, Emilia Vidali.
En 1805, deux sergents de la Grande Armée sont accusés d’avoir désobéi aux ordres, puis grâciés par l'Empereur. Adaptation du vieux mélodrame en 3 actes de Théodore Baudoin d’Aubigny et Auguste Maillard (1823), porté également à l’écran en Italie en 1909, 1922 et 1936 (voir le synopsis de ces deux dernières moutures).DE : Die beiden Sergeanten vom Sanitätscordon von Port Vandré, ES : Los dos sargentos, US : The Two Sergeants.
1914The Man of Destiny (US) de Walter Edwin
Thomas A. Edison Manufactoring Co., 304 m. – av. CHARLES SUTTON (Napoléon), Marc MacDermott (comte de Passy), Mary Fuller (Cécilie de Cloche Forêt), Harry Beaumont (François), William Bechtel, Edward O’Connor, Harry Eytinge, Mrs. William Bechtel.
Synopsis : Dans son testament, Laporte souhaite que six de ses meilleurs amis se revoient chaque année pour un dîner servi par François, le garçon du bistrot. Parmi ces amis, en majorité d’arrogants aristocrates, se trouve un obscur et pauvre lieutenant d’artillerie du nom de Bonaparte. Ce dernier désarme en duel le comte de Passy dont il a eu l’audace de courtiser la fiancée, Cécilie. La Révolution bouleverse tout, les têtes roulent. Seuls survivent Passy, devenu balayeur de rues, et Napoléon, à présent maître de l’Europe ; François, lui, a été promu général. Napoléon se rend au dîner annuel en croyant qu’il est l’unique rescapé du groupe, mais Passy, ayant surpris des conspirateurs royalistes qui se préparaient à assassiner l’Empereur, l’a précédé. Il provoque la mort de leur chef et l’arrestation de ses complices, puis révèle son identité à son ancien ennemi. Reconnaissant et ému, Napoléon trinque avec le comte ruiné, tandis que le général François endosse sa livrée de garçon et leur sert un repas.
Un scénario curieux de Preston Kendall – qui se présente dans la publicité comme « A True Incident in the Life of Napoleon » – , filmé aux studios Edison à Bronx Park (Decatur Avenue), New York City. Le film reprend le titre de la pièce de G. B. Shaw sur Napoléon, sans qu’il y ait une parenté quelconque (cf. chap. 8.2). Charles Sutton a déjà interprété Napoléon (à Sainte-Hélène) dans The Prisoner of War de J. Searle Dawley, pour Edison.
1916Il vetturale del Moncenisio (IT) de Leopoldo Carlucci
Milano-film/Armando Vay, 1811 m. – av. Achille Majeroni (Jean-Claude Thibaut), Lina Millefleurs (Giannetta Thibaut, sa fille), Elda Bruni de Negri (Ginevra/Geneviève Thibaut, sa femme), Tranquillo Bianco (le sacristain), Luigi Serventi (cpt. Enrico), Agostino Borgato (Morel), Bonaventura Ibañez (col. Roger), M. Prisco (Ludovico, comte d’Arezzo), M. Cesari (De Solaris).
Première adaptation de l’inusable mélo populaire Jean le Cocher de Joseph Bouchardy, un drame en cinq actes créé le 11 novembre 1852 au Théâtre de l’Ambigu-Comique à Paris, et dont les principaux épisodes se déroulent durant le Directoire, puis sous l’Empire. Pour le synopsis, cf. infra, versions de 1927 et de 1954/55.
1917Il caporal Simon (IT) de Giovanni Casaleggio
Oreste Bachi/Edison Film, Torino, 1456 m. – av. Serafino Renzi (caporal Simon), Letizia Quaranta (Minna von Ratzenburg), Lydia Richard (Ermellina), Francesco Casaleggio (Roquebert), Leo Garavaglia (Frochard), Leo Trofarelli (Ricard), U. Furlan (Taverny), Giuseppe Zaccaria.
Les aventures d’un caporal de la Grande Armée au cœur d'or, plus empressé à réconcilier ses proches qu'à partir en guerre (comédie).
1917The Fortunes of Fifi (US) de Robert G. Vignola
Famous Players Film Co.-Paramount Pictures, 5 bob. – av. Marguerite Clark (Fifi), William Sorelle (Cartouche), John Sainpolis (Duvernet), Yvonne Chevalier (Julie), Kate Lester (Mme Bourcet), Jean Del Val (Louis Bourcet), J. K. Murray (le général).
Synopsis : Cartouche, un grognard de la Grande Armée, aime la comédienne Fifi. Ayant gagné le gros lot à la loterie grâce à un ticket que lui a donné son amoureux, Fifi décide d’acquérir de l’éducation au sein de la famille des Bourcet. Elle y oublie passagèrement son grognard et se laisse courtiser par Louis Bourcet, un avocat qui vise son argent. Désillusionnée, elle retourne auprès de Cartouche qui, s’estimant trop âgé pour elle, refuse de l’épouser. Bon enfant, Napoléon s’en mêle et ordonne à son grenadier de convoler avec Fifi. – Une bluette tirée d’un roman de Molly Elliot Seawell (1903) et filmée aux studios Famous Players de Marathon Street à Hollywood.
1921Die Schauspieler des Kaisers [= Les Comédiens de l'Empereur] (AT) de Hans Otto Löwenstein
Astoria-Film Wien, 4 actes/2200 m. – av. Nora Gregor (Manon de Cherval), KARL ETLINGER (Napoléon), Franz Herterich, Armin Seydelmann, Willy Schmidt, Werner Schott, Paul Askonas, Alfred Schreiber, Julius Strobl, Olaf Fjord.
Synopsis : Royaliste opposé à Napoléon, le marquis de Cherval vit retiré dans son château non loin de Paris avec sa progéniture, Edmond et Manon, et Florence, une enfant adoptée, amoureuse d’Edmond. Encouragée par Urbain, un jeune saltimbanque de passage, Manon rêve de se produire au théâtre. Des soldats prennent quartier dans le château ; leur commandant, le marquis Armand de Caulaincourt, est un ancien camarade de classe de Cherval qui sert dans l’état-major de Napoléon. Le soir, Manon lui récite un texte. Avant de repartir, Caulaincourt, admiratif, l’encourage à développer son don. Un employé l’ayant dénoncé à la police de Fouché, Cherval se suicide avant d’être arrêté ; ses enfants s’enfuient, Edmond jure de venger son père. Deux ans plus tard, Manon de Cherval, protégée par Caulaincourt, est devenue une vedette choyée de la Comédie-Française, brillant dans les pièces de Racine et de Corneille ; elle retrouve Urbain parmi les figurants. Entre-temps, Edmond revient secrètement d’Angleterre avec la mission d’assassiner Napoléon. Parvenu dans le cabinet privé de l’Empereur, il hésite à le frapper, est arrêté et condamné à mort. Le lendemain, Manon doit interpréter Sémiramis de Voltaire pour la cour impériale ; Caulaincourt lui conseille d’en profiter pour remettre à l’Empereur une demande de grâce en faveur de son frère. Remplaçant au dernier moment la vedette masculine absente, Urbain, quoique très affaibli par les privations, lui donne la réplique. La représentation est un triomphe, Napoléon cède aux supplications de Manon. Edmond est sauvé de l’exécution au dernier moment, tandis qu’Urbain, épuisé, rend l’âme dans les bras de la tragédienne. – Un scénario feuilletonesque de Julius Ludassy porté à l’écran par un pionnier du cinéma muet autrichien, Hans Otto Löwenstein, déjà responsable d’un biopic sur l’Aiglon, Der Herzog von Reichstadt (1920).
1922I due sergenti (Au temps des grognards) (IT) de Guido Brignone
Rodolfi-Film, Torino, 1820 m. – av. Vasco Creti (cpt. Devers/sgt. Jean Bernard [v.f. cpt. Louis Derville/sgt. Guillaume Larive]), Giovanni Cimara (sgt. Robert Gérome), Mercedes Brignone (Claudie Devers [v.f. Sophie Derville]), GIOVANNI CIUSA (Napoléon), Armand Pouget (major Tébor [v.f. Valmore]), Lola Romanos (Alice Debin [v.f. Laurette Fracasse]), Giuseppe Brignone (caporal Debin, son père [v.f. caporal Fracasse]), Ria Brune (Sylviane, la danseuse [v.f. Sary]), Bicchi (ltn. de Brévonnes [v.f. ltn. Charles Blinvalle]), Giovanni Cimara, Liliana Ardea, Cesare Gani Carini, Vittorio Pieri, Luigi Stinchi.
Synopsis : Décoré à Austerlitz et promu capitaine en 1805, Devers fait la fierté de sa femme Claudie et de ses enfants. Son colonel lui confie la caisse du régiment. Le lieutenant Blinvalle, cousin de Claudie, aide Devers dans l’expédition des affaires, mais il succombe aux charmes de la danseuse Sylviane et file avec la caisse. Accusé du vol, Devers s’enfuit après avoir adressé une supplique à l’Empereur qui confie à Fouché, ministre de la Police, le soin d’instruire l’affaire. Devers s’enrôle comme sergent à Port-Vendres sous le faux nom de Bernard ; il se lie d’amitié profonde avec un autre sergent, Robert Gérome, l’amoureux d’Alice jalousé par le perfide major Tébor. Les deux sergents sont responsables du cordon sanitaire établi autour de Port-Vendres, où sévit une dangereuse épidémie. Pris de compassion, ils laissent passer une malheureuse affamée et Tébor les dénonce, trop heureux de se débarrasser d’un rival en amour. Ils sont arrêtés, Bernard est condamné à mort, Robert à la réclusion. Bernard obtient l’autorisation de prendre congé de sa famille sur l’île voisine de Rosey, mais s’il n’est pas de retour à l’aube, son ami Robert sera fusillé à sa place. Tébor tente de l’empêcher de rentrer à temps, mais Napoléon, de visite sur les lieux, intervient au dernier moment ; il reconnaît en Bernard le héros innocent d’Austerlitz, et récompense le courage et la droiture de deux amis.
Vraisemblablement la plus fidèle des adaptations de Les Deux Sergents, vieux mélodrame en trois actes de Théodore Baudoin d’Aubigny et Auguste Maillard (1823), porté également à l’écran en 1909, 1913 et 1936, toujours en Italie. Dans son dernier tiers, la trame reprend le motif de Die Bürgschaft, une ballade de Friedrich Schiller (1798) elle-même inspirée du récit des deux pythagoriciens Damon et Pythias, modèles de l’amitié indéfectible dans l’antiquité gréco-romaine. Pour le reste, on applique les clichés des Deux orphelines d’Ennery et autres drames misérabilistes. L’adaptation est de Giovacchino Forzano, dramaturge fasciste et grand admirateur de Napoléon qui s’évertue à rappeler les victoires de la Grande Armée et mobilise l’Empereur lui-même à l’écran, d’où une surdose de pathos, d’honneur et de gloire dans les intertitres ronflants. Le film sort en salle un mois après la marche sur Rome de Mussolini – un hasard ? Précisons que sur scène comme dans les autres versions cinématographiques, ce n’est qu’un quelconque maréchal d’Empire qui fait le deus ex machina. GB : The Flame of Honour.
1923/24Le Comte de Griolet (FR) de Jacques Isnardon et Raoul Grimoin-Sanson
Société générale des cinématographes Eclipse, 1500 m./ 54 min. – av. Pierre Bertin (Raymond de Griolet), Mme Isnardon, Jacques Isnardon, Amaury.
Synopsis : En juillet 1793, le comte et la comtesse de Griolet périssent sous les coups des révolutionnaires, leur château est incendié. La nourrice sauve leur fils, Raymond, un nouveau-né à peine baptisé, et le fait passer pour son propre enfant. Vingt ans plus tard, en 1813, Raymond est un jeune peintre de talent. Chargé de décorer le nouveau château de Griolet, il tombe amoureux d’Adèle, la fille du régisseur. Celui-ci refuse de donner sa fille à un artiste, jusqu’au jour où la nourrice révèle la véritable identité de Raymond qui, grâce à l’amnistie décrétée par Napoléon, rentre en possession de ses biens.
Un opéra comique en trois actes et un prologue de l’inventeur-musicien Raoul Grimoin-Sanson, tourné dans les studios de Courbevoie et au château des Roches à Oissel, près de Rouen (propriété du compositeur). Grimoin-Sanson utilise un nouveau procédé de synchronisme musical avec accompagnement de chœurs, solos et orchestre. Présentation en juin 1924 au Musée Galliera à Paris pendant l’exposition « l’Art et le cinéma français ».
1927® Il vetturale del Moncenisio (Le Postillon du Mont-Cenis) (IT) de Baldassare Negroni. – av. Bartolomeo Pagano (Jean-Claude Thibaut), Rina De Liguoro (Genoveffa Thibaut), CARLO VALENZI (Napoléon). – Jean-Claude Thibaud, voiturier du Mont-Cenis, est impliqué malgré lui dans la campagne d’Italie, est trahi par un rival qui épouse sa fiancée, se couvre de gloire dans la Grande Armée, fait justice et retrouve sa petite famille à la chute de Napoléon. Le drame Jean le Cocher de Joseph Bouchardy (1852), déjà porté à l’écran en 1916 (cf. supra et remake parlant en 1954/55), est ici radicalement italianisé et transposé de Paris à Milan (cf. p. 212).
1928[*] Napoleon’s Barber [= Le Barbier de Napoléon] (US) de John Ford
William Fox/Fox Film Corp.-Movietone, 3 bob./32 min. – av. OTTO MATIESEN (Napoléon), Frank Reicher (le barbier), Natalie Golitzen (Joséphine de Beauharnais), Helen Ware (la femme du barbier), Philippe De Lacy (son fils), D’Arcy Corrigan (le tailleur), Russ Powell (le forgeron), Michael Mark (paysan), Buddy Roosevelt, Ervin Renard, Youcca Troubetzkov, Joseph Waddell (officiers français).
Synopsis : Dans une localité française, un barbier anarchiste qui hait l’Empereur et l’Empire se vante à qui mieux mieux de ce qu’il ferait à Napoléon s’il le tenait à portée de son rasoir ... Entre-temps, Napoléon survient dans le village avec son état-major, la population l’acclame. Fourbu après une longue cavalcade, il savoure un verre de vin, donne des ordres à ses officiers (on fusille un traître) et, se souvenant qu’il a urgemment besoin d’un rasage, s’installe incognito dans la boutique du barbier. Nullement impressionnée par les discours incendiaires de son mari, la femme du barbier lui signale que « la révolution peut attendre, mais pas la clientèle ! ». Tandis que Napoléon se fait savonner le menton impérial, Figaro donne libre cours à ses phobies politiques. Son auguste client lui signale amusé qu’il connaît personnellement le « Petit Caporal » et le prie de ne surtout pas oublier quelques poils insolents près de sa carotide, là et là. Puis, immobilisé, il doit subir la lecture assommante de vers concoctés par son bourreau. La besogne achevée, l’Empereur avoue au barbier en partant qu’il peut à la rigueur encaisser un révolutionnaire ou un mauvais barbier, mais au grand jamais un mauvais poète ! Le premier film sonore du grand John Ford (aujourd’hui perdu), enregistré aux studios Fox de Western Avenue avec le nouveau système Movietone, est l’adaptation d’un vaudeville du scénariste et auteur dramatique d’origine roumaine Arthur Caesar ; ce dernier intercale dans son récit des scènes illustrant les pensées de Napoléon, où apparaît notamment Joséphine. (Visiblement influencé par G. B. Shaw, le sketch semble avoir servi de prologue à l’une de ses pièces.) La critique de l’époque relève unanimement la subtilité toute européenne de la satire – pendant quelques minutes, un obscur barbier tient le sort des nations entre ses mains – et souligne la remarquable prestation de l’acteur danois Otto Matiesen qui fait un Napoléon placide et humain, un rôle qu’il a déjà tenu avec beaucoup de naturel en 1923 dans Vanity Fair et en 1828 dans le sketch The Lady of Victories. – IT : Il barbiere di Napoleone.
1929El barbero de Napoleón (US) de Sidney Lanfield
John Stone/Fox-Movietone, 3 bob./32 min. – av. JUAN ARISTI EULATE (Napoléon), Manuel Paris (le barbier), Nelly Fernández (Joséphine de Beauharnais).
[Version espagnole du film précédent] – Lanfield reprend tous les décors de John Ford, mais réalise sa version de manière indépendante, une fois le travail de Ford achevé. Les dialogues en espagnol sont rédigés par Manuel París ; le film (également perdu) est exploité en Espagne et en Argentine.
1936I due sergenti (Les Deux Sergents) (IT) d’Enrico Guazzoni
Pietro Mander/Manderfilm Produzione (Roma), 93 min. – av. Gino Cervi (cdt. Federico Martelli / sgt. Guglielmo Salvoni), Mino Doro (sgt. Robert Magni), Luisa Ferida (Laurette Fracasse), Ugo Ceseri (caporal Fracasse), Evi Maltagliati (la comtesse Marilyn Gould), Antonio Centa (ltn. Charles Duval/col. Georges Masson), Lamberto Picasso (Lacroix), Nella Maria Bonora (Anna Martelli), Vera Dani (Pia Martelli), Margherita Bagni (Louisa), Enzo Biliotti (Howe), Tatiana Pavoni (Mme Jeanette), Valentino Bruchi (Gravel), Emilio Petacci (le colonel), Umberto Casilini (Ferroni, notaire), Matilde Casagrande, Ivana Diani, Titti Leinmüller, Alida Valli (une vendeuse à « Au Bon Marché »).
Synopsis : À Paris en 1805, la comtesse Marilyn Gould, une espionne britannique, envoûte le lieutenant Duval et le pousse à dérober des documents secrets de la marine française, puis l’abandonne à Dieppe. Plein de rancœur et de remords, Duval s’engage sous un nom d’emprunt dans l’Armée des Flandres pour se réhabiliter. Accusé à tort de complicité, son supérieur et ami, le commandant Martelli, est obligé de disparaître et s’engage, lui aussi, comme simple soldat sous le nom de Salvoni dans la Grande Armée. Six ans passent, les deux sergents combattent côte à côte à Ulm, Austerlitz, Iéna, Friedland, Wagram. En 1811, ils sont stationnés dans la forteresse de Pont-Vendres (Pyrénées-Orientales). Le sergent Salvoni s’est lié d’amitié avec le sergent Robert, l’amoureux de Laurette. Cantonnés au poste de garde d’un cordon sanitaire établi pour isoler la localité de Bonvie contaminée par une grave épidémie de variole, les deux sergents sont attendris par une mère qui veut revoir ses enfants et la laissent passer en dépit des consignes. Lacroix, rival pour le cœur de Laurette, les dénonce. L’épidémie s’étant propagée, les deux sergents sont arrêtés, Salvoni sera fusillé. Ce dernier obtient toutefois la faveur d’aller prendre congé de son épouse et de ses deux enfants réfugiés dans une ville proche, pour autant que Robert se porte garant de son retour et prenne sa place comme otage dans sa cellule. Entre-temps, Duval, qui s’est racheté sur divers champs de bataille, retrouve la perfide Marylin, la supprime au milieu d’une brillante réception et innocente publiquement Martelli-Salvoni. Lacroix retarde ce dernier afin que Robert, son rival enfermé dans la forteresse, soit fusillé à sa place. Mais la femme de Martelli-Salvoni parvient à convaincre le général de l’innocence de son mari, d’autant plus qu’on ne peut punir un sergent qui n’existe pas légalement, puisqu’il s’agit d’une fausse identité. Robert échappe de justesse au peloton d’exécution. Napoléon, magnanime, réhabilite Duval et gracie les deux amis.
Prestigieux vétéran du muet, Enrico Guazzoni filme le roman I due sergenti. Romanzo dell’epoca napoleonica de Paolo Lorenzini (neveu de Carlo Collodi), un ouvrage paru en 1936 qui s’inspire de l’intrigue du drame de Théodore Baudoin d’Aubigny et A. Maillard (1823), portée à l’écran en 1909, 1913 et 1922 (cf. supra), toujours en Italie. La trame diffère sur certains points du texte original français et tous les noms sont modifiés (Nunzio Malasomma et Carlo Bernari signent l’adaptation), mais cela ne suffit pas à rendre ce gros mélo militaire, oublié depuis belle lurette dans l’Hexagone, plus digeste et plus actuel. Le gouvernement fasciste, en revanche, semble toujours avide de ce type d’intrigues populaires, orchestré avec savoir-faire (le film est projeté au Cine Roma à New York pour la colonie italienne, sans sous-titres) et chantant la vaillance de la Grande Armée. Guazzoni, qui offre ici sa chance à une ravissante débutante du nom d’Alida Maria Altemburger, future Alida Valli, tourne sa fresque aux studios Pisorno à Tirrenia et dans les paysages toscans. Il en signe également les décors avec Virgilio Marchi. Les diverses images de batailles victorieuses sont en fait celles de Waterloo empruntées à Campo di Maggio (Les Cent Jours) de Giovacchino Forzano (1935). Une prémonition ?
Nota bene : après les horreurs de la Seconde Guerre mondiale, il devient impossible de prendre pareil sujet au sérieux, et, en 1951, I due sergenti de Carlo Alberto Chiesa (avec Mario Carotenuto, Beniamino Maggio et Antonella Lualdi) n’en est plus qu’une parodie située au XX e siècle : deux comédiens jouant les « Deux Sergents » sont confondus avec deux voleurs et se déguisent en sous-officiers dans une caserne proche pour échapper aux gendarmes. – ES : Los dos sargentos, US : The Two Sergeants.
1937Δ [épisode:] Les Perles de la couronne (FR) de Sacha Guitry et Christian-Jaque ; Serge Sandberg/Impérial Films Production-Cinéas, 100 min. – av. JEAN-LOUIS BARRAULT / éMILE DRAIN (Bonaparte/Napoléon), Jacqueline Delubac (Joséphine de Beauharnais), Robert Pizani (Talleyrand), Laurence Atkins (Thérésa Tallien), Huguette Duflos (la reine Hortense de Beauharnais). – L’histoire des perles de la couronne d’Angleterre. Fin février 1796, lors d’une réception chez Barras, à la veille de partir pour l’Italie, le général Bonaparte prie Barras de le présenter à Joséphine de Beauharnais, dont il tombe amoureux. Barras lui remet une somme importante pour acheter des bijoux. Il lui achète une perle rare en guise de cadeau de mariage ... À Fontainebleau en été 1815, dans le bureau de l’Empereur. Napoléon fait cadeau de la perle (récupérée à la Malmaison) à la reine Hortense de Beauharnais afin que cette dernière la remette un jour à son propre fils, Louis-Napoléon, futur Napoléon III.
1938Δ [épisode:] Remontons les Champs-Elysées (FR) de Sacha Guitry ; Serge Sandberg/SEDIF, 100 min. – av. JEAN-LOUIS ALLIBERT / éMILE DRAIN (Bonaparte/Napoléon), Madeleine Foujane (Marie-Louise). – Sacha Guitry raconte à sa manière inimitable l’histoire des Champs-Élysées : les monarques défilent, de Marie de Médicis à Napoléon III. Le 9 novembre 1799 (18-Brumaire), Bonaparte se rend à Saint-Cloud pour renverser le Directoire. En 1805, l’Empereur descend les Champs-Élysées en calèche avec l’impératrice Joséphine, qui remonte seule en 1809 pour aller s’enterrer à la Malmaison. En 1810, l’Empereur descend les Champs-Élysées avec l’impératrice Marie-Louise, qui remonte cinq ans plus tard seule les Champs-Elysées pour retourner dans son pays. Guitry ne résiste pas à l’envie de confronter Bonaparte et Napoléon à la Malmaison, juste après Waterloo (« on a rarement vu deux êtres plus différents »), une séquence donnant lieu à quelques répliques savoureuses. Napoléon : « Ce général de vingt-huit ans ... » – Bonaparte : « ...devait donc finir caporal » – N : « Empereur ! » – B : « Hum ... tu ne l’es plus guère ! » – N : « Le lendemain de ma mort, je le serai pour toujours ! » – B : « Ce sera grâce à l’Angleterre. » – N : « On ne peut guère compter que sur ses ennemis. » – ( ...) N : « Si c’était à refaire, recommencerais-tu ? » – B : « Oh ! Pas pour un empire ! »
1942Notre-Dame de Paris (FR) de René Hervouin
André Paulvé Prod., 25 min. – av. Victor Vina (le pape Pie VII), ALBERT DIEUDONNÉ (Napoléon), Lise Donat (Joséphine de Beauharnais), le père Sanson. – L’historique de Notre-Dame de Paris comprenant une évocation reconstituée du sacre et du couronnement de Napoléon, le 2 décembre 1804 ... avec Albert Dieudonné, l’inoubliable Napoléon d’Abel Gance quinze ans plus tôt et qui, l’année précédente, a donné la réplique à Arletty dans Madame Sans-Gêne (cf. p. 174).
1948Le Colonel Durand (FR) de René Chanas
Armand Bégué/Acteurs et Techniciens Français (ATF), 110 min. – av. Paul Meurisse (col. Gérard Durand), Louis Seigner (cdt. Millot), Michèle Martin (Isabelle Patrizzi), Frédérique Nadar (Renée de Ponthiers), Robert Favart (Bertrand de Lormoy), Liliane Bert (Mme Hélié), Georges Grey (maréchal Jean Lannes, duc de Montebello), Rachel Devirys (Mme Nieburger), Albert Dinan (Raffart), Manuel Gary (Bontemps, colonel des dragons), Jean d’Yd (le père Kreutzer), Howard Vernon, Henri San-Juan, Guy Saint-Clair, Marcel Rouzé, Bernard Véron, Emile Chopitel, Roger Pierre.
Les amours d'un colonel d'Empire, d’après le roman éponyme de Jean Martet (1933) et le scénario qu’il en tire. Synopsis : Colonel à vingt-sept ans, décoré à Austerlitz, l’impétueux Durand aime le jeu, le vin et les femmes. Il a brisé l’amour de Bertrand de Lormoy pour Renée de Ponthiers en escaladant la fenêtre de la jeune femme mariée qu’il a séduite, puis a blessé Lormoy en duel. Gravement compromise et chassée par son mari, Mme de Ponthiers est entrée dans les ordres. En garnison à Strasbourg, Durand rencontre Isabelle Patrizzi, une riche veuve ; elle l’attire et le repousse, son amour pour elle n’en est que décuplé. Son ordonnance et vieil ami, le commandant Millot, veille sur lui pendant la campagne de Prusse, en automne 1806 ; dans ses lettres enflammées, Isabelle appelle Durand à déserter pour la rejoindre à Vienne. Millot s’y oppose et tire sur son ami plutôt que le voir déshonoré. Durand n’est que blessé et se couvre de gloire à la bataille de Iéna, où l’Empereur le fait général et l’envoie à Varsovie. Il veut retrouver Isabelle en faisant un détour par l’Autriche mais celle-ci le chasse, lui reprochant de sacrifier l’amour à l’honneur. Il apprend alors qu’elle est la sœur de Mme de Ponthiers et voulait la venger. Toutefois, leur passion mutuelle est plus forte, et tandis qu’il repart au feu, Isabelle, le mauvais génie devenu ange gardien, jure de l’attendre. Il la retrouvera après Waterloo, où Millot perd la vie.
Un film qui n’a pas laissé de souvenirs, malgré une interprétation turbulente de Paul Meurisse (dans son premier rôle en costumes) et ses exploits au sabre, malgré une reconstitution honorable et des batailles bien rendues (Napoléon n’y apparaît qu’en silhouette), quoiqu’en utilisant des images d’autres films sur l’époque. Le tournage a lieu aux studios François I er à Paris et aux studios de Boulogne-Billancourt, dans le Musée Marmottan et en extérieurs dans les environs de la capitale et à Strasbourg. – IT : Il colonello Durand.
1948Docteur Laënnec (FR) de Maurice Cloche
Films Maurice Cloche-Interfilm, 100 min. – av. Pierre Blanchar (René Laënnec), Jany Holt (Madeleine Bayle), Saturnin Fabre (Théophile Laënnec père), Pierre Dux (prof. Joseph Récamier), Geymond Vital (Dr. Pierre Bayle), Janine Viénot (Marie-Anne Laënnec), Florent Antony (Beaugendre), Mireille Perrey (Jacquemine d’Argout-Laënnec), Jean Toulot (Dr. Broussais).
Biographie de René-Théophile-Hyacinthe Laënnec (1781-1826), le fameux médecin, inventeur du stéthoscope et le fondateur de l’anatomo-clinique, mise en scène aux studios de Boulogne-Billancourt par un spécialiste français du biopic édifiant (il s’entoure de la même équipe technique avec laquelle il a tourné Monsieur Vincent en 1947), qui livre un travail honnête et, dans son genre, plutôt bien ficelé La première partie de cette production commercialement risquée montre Laënnec en activité durant les guerres napoléoniennes dès 1810, notamment à l’hôpital Necker à Paris où il enseigne la médecine, lutte contre la phtisie dont meurt son meilleur ami, le docteur Bayle, et découvre le principe de l’auscultation ; à la Salpétrière en 1813 où il ausculte des « Marie-Louise » blessés, les jeunes conscrits de la Grande Armée en pleine déroute. Extérieurs à Paris et dans le Finistère (Quimper, Douarnenez et surtout à Ploaré où est filmée la retraite des troupes impériales pendant la campagne de France en 1814).
1953Δ [épisode:] Si Versailles m’était conté (FR) Sacha Guitry ; Clément Duhour, Ignace Morgenstern, S. Guitry/Cocinex-C.L.M., 165 min. – av. EMILE DRAIN (Napoléon). – Napoléon paraît sur le seuil de la Chambre du Roi à Versailles, s’avance vers le lit de Louis XIV, devant lequel il se recueille, puis décide de passer la nuit à Trianon, où le Roi Soleil n’a jamais dormi. À la fin du film, Napoléon et des grenadiers de la Garde Impériale descendent les cent trois marches des escaliers du parc.
1953(tv) Conflict (US)
Série « Your Favorite Story », saison 1, épis. 22, ZIV Television Programs, Inc. (NBC 7.6.53), 30 min. – av. Adolphe Menjou (le chimiste / présentation), Gloria Talbott, Shepard Menken. – Un chimiste français refuse de divulguer à Napoléon la formule d’un explosif dévastateur que l’Empereur voudrait utiliser dans le cadre de ses campagnes militaires (story : Jack Rock).
1954(tv) Her Kind of Honor (US)
« Schlitz Playhouse of Stars », saison 3, épis. 29, Meridian Productions, Inc. (CBS 19.3.54), 30 min. – av. Pamela Mason (Joséphine de Beauharnais), Marjorie Lord, Hugh Marlowe, James Mason (présentation). – Accusé d’avoir eu une liaison avec Joséphine, un officier de Napoléon risque la peine de mort. Un épisode imaginé par Halsted Welles et Richard Wormser.
1954/55Il vetturale del Moncenisio / Le Voiturier du Mont-Cenis (IT/FR) de Guido Brignone
Produzioni Alberto Manca (PAM)-Radius Productions (Paris), 88 min. – av. Roldano Lupi (Jean-Claude Thibaud), Virna Lisi (Giovanna/Juliette Thibaud, sa fille), Elisa Cegani (Elena Thibaud, alias la comtesse Thérèse d’Aubigny), Arnoldo Foà (comte de Brissac), Jean Chevrier (le colonel Roger), Rosario Borelli (Henri Roger), Georges Bréhat (Morel), Checco Durante, Catherine Zago, Cristina Grado, Eugenio Maggi, Gustavo Serena, Enrica Dyrell, Maria Grazia Monaci, Renato Malavasi, Luciana Paoluzzi, Anita Durante, Luciano Fatur, Mirko Testi.
Synopsis : Pendant la campagne d’Italie, le colonel Roger doit impérativement traverser les Alpes du Nord, entre la Savoie et l’Italie, et passer les lignes autrichiennes pour porter un message au général Bonaparte. Jean-Claude Thibaud, voiturier du Val d’Aoste, vit sur l’alpe avec sa petite fille Juliette et son épouse Geneviève. Connaissant tous les sentiers de la région, Jean-Claude accepte d’accompagner l’officier, mais il est capturé par les Autrichiens et passé par les armes ; il n’est toutefois que grièvement blessé et survit à l’exécution ; les troupes françaises le sauvent. Entre-temps, sa femme, une enfant trouvée, a découvert qu’elle était comtesse d’Aubigny. Pour entrer en possession de sa fortune et se croyant veuve, Geneviève accepte d’épouser un cousin taré, le comte de Brissac, et s’établit à Paris. Jean-Claude, qui a trouvé à sa guérison son foyer vide, s’engage dans la Grande Armée où il se couvre de gloire. À la chute de l’Empire, il est mis en demi-solde et se fait conducteur de fiacre à Paris. Brissac dilapide la fortune de sa femme au jeu ; afin de couvrir ses exactions, il veut marier Juliette à un affairiste véreux, Morel, alors qu’elle aime le lieutenant Henri Roger, le fils du colonel qui fut fusillé jadis avec son père. Pour échapper à cette union, elle s’enfuit en banlieue, où, survivant aux assassins à la solde de Brissac, elle est sauvée par son propre père ; celui-ci l’a reconnue, mais garde héroïquement le silence. Roger tue en duel Morel qui lui remet avant de mourir une lettre faisant le récit des forfaits de Brissac. Celui-ci se suicide, et Geneviève, désormais libre et riche, peut retrouver son premier mari, qu’elle n’a jamais oublié, tandis que Juliette épouse Roger.
L’unique version parlée du supermélo Jean le Cocher de Joseph Bouchardy (1852), déjà porté à l’écran par les Italiens en 1916 et en 1927, sort en France en décembre 1956. Le scénario est, cette fois, très fidèle à l’original avec ses rebondissements et invraisemblances dignes de Ponson du Terrail. Tournée dans les studios Scalera-Titanus à Rome, la matière est ringarde au possible, mais, petite consolation, on y découvre une toute jeune Virni Lisi. – BE : L’Amour plus fort que la haine.
1955(tv) In the Service of the Emperor (US)
« The Conrad Nagel Theatre » no. 17 (Syndicated 15.5.55), 30 min. – av. Donald Buka (Jacques), Faye Marlowe (Madeleine), Tonio Selwart (Boiselaire), Peter Trent (Bonder). – Un paysan et sa fille cachent un grenadier de Napoléon recherché par des soldats anglais.
1955(tv) Legion of Honor (US) de William Berke
Série « I Spy », Edward J. Montagne/Rean Productions-Guild Films (Syndicated TV), 30 min. – av. Andrew Duggan (l’Alsacien [= Charles-Louis Schulmeister]), Staats Cotsworth (gén. Karl Mack von Leiberich), Maurice Burke (Anne-Jean Savary, duc de Rovigo), Harry Bannister (Auslein), Arthur Batanides (Doré), Fred Rolfe (Tobritch), Lee Bergere (d’Engheim), Angus Cairns (sergent), Raymond Massey (Anton the Spymaker, l’hôte).
En 1805, Schulmeister dit l’Alsacien se fait espion au service de l’Empire dans l’espoir d’obtenir la Légion d’honneur, instaurée par Napoléon en 1803, ouverte à tous et récompensant les mérites éminents rendus à la Nation. Il obtient la décoration après avoir dupé les Autrichiens du général Mack à Ulm et l’avoir contraint à la reddition.
1955Δ [épisode:] Si Paris nous était conté (FR) de Sacha Guitry et Eugène Lourié ; Clément Duhour/C.L.M-Gaumont-Franco London Films, 130 min. – av. LOPEZ (Bonaparte). – Vu à travers la baie vitrée d’un atelier de menuiserie, Bonaparte apparaît à la tête de ses troupes. Guitry filme les rues décorées de centaines de drapeaux tricolores après les victoires de Rivoli, de Marengo, d’Austerlitz, de Wagram. Les drapeaux disparaissent à l’évocation de Waterloo ...
1956(tv) The Abbe and the Nymph (US) de William Berke
Série « I Spy », Edward J. Montagne/Rean Productions-Guild Films (Syndicated TV), 30 min. – av. Florence Henderson (la nymphe), Luis von Rooten (l’abbé), Peter Fernandez (Pois), Leon Belasco (Philippe), Richard Newton (Morteau), Raymond Massey (Anton the Spymaker, l’hôte).
En 1805, deux royalistes français, un mystérieux abbé et une belle femme surnommée la nymphe, travaillent de concert avec les Anglais pour perdre Napoléon.
1958(tv) The Freedom of the Prisoner [= La Liberté du prisonnier] (GB) de Michael Lefston-Smith
(BBC 5.8.58). – av. Eric Lander (ltn. Pierre de Molart), Harold Kasket (Fauconnier), Trader Faulkner (Lucien), Roger Gage (le capitaine de la garde), Nigel Green (l’abbé), Wilfrid Brambell (Vergenne), David Garth (premier commissaire), Arthur Lowe (deuxième commissaire), Peter Sugden (commandant de la garde), Robert Harris (chapelain), John Gale, Robin Chapman, Otto Friese, Peter Jackson, Ivor Kimmel, Patrick Milner.
Printemps 1805 au camp de Boulogne-sur-Mer. Lieutenant dans l’armée d’Angleterre de Napoléon, Pierre de Molart s’éprend de la comtesse Hortense d’Anjou, une royaliste hostile à l’Empire. Soupçonné à tort de conspiration, trahi, Molart est arrêté par la police secrète de Fouché et incarcéré sans explications. La comtesse et un abbé complice veulent le faire évader, mais Molart a prêté serment à l’Empereur et refuse de les suivre, même s’il ne comprend pas ce qui lui arrive. – Le roman et la pièce Die Freiheit des Gefangenen (1950) de l’auteur allemand Edzard Schaper, adapté pour la télévision britannique par Frank Baker (première théâtrale à Cologne le 4.7.1953). Une transposition du vécu kafkaïen de Schaper, un écrivain chrétien persécuté par les nazis et les soviétiques en 1939.
1960® Austerlitz (FR/IT/YU/LI) d’Abel Gance [assisté de Nelly Kaplan, Roger Richebé], 166 min. – av. PIERRE MONDY (Napoléon), Claudia Cardinale (Pauline Borghese), Martine Carol (Joséphine de Beauharnais). – La fin du Consulat, le début de l’Empire : le film commence le 27 mars 1802 avec la signature du traité d'Amiens – qui instaure deux ans de paix en Europe – et finit, dans sa deuxième moitié, sur le champ de bataille en Moravie, au soir du fameux 2 décembre 1805 qui met fin à la Troisième Coalition antifrançaise (cf. p. 334).
1961The Piper’s Tune (GB) de Muriel Box
Robert Dunbar/Association of Cinema Technicians (A.C.T.) Films Ltd.-The British Children’s Film Foundation (C.F.F.), 62 min. – av. Mavis Ranson (Anna), Roberta Tovey (Suzy), Angela White (Maria), Malcolm Ranson (Thomas), Brian Wills (Paul), Graham Wills (Peter), Frederick Piper (Gonzales), Christopher Rhodes (capitaine). Charles Rolfe (Martinez), Harold Siddons (le sergent), Nora Gordon (Theresa), Syndey Bromley (le berger), Tony Thawnton (guide de montagne).
L’odyssée d’un groupe d’enfants traversant les Pyrénées pour fuir la dévastation et les guerres napoléoniennes. En route, ils hésitent à sauver un ennemi blessé qui pourrait les mettre en danger et se mesurent à un espion qui se fait passer pour un médecin. – L’avant-dernier film de la plus prolifique cinéaste de Grande-Bretagne, Muriel Box, s’adresse à un public jeune. Le sujet provient de Michael Barnes, adapté d’après un nouvelle de Frank Wells. Photographié en noir et blanc à Cregennan, dans le pays de Galles, et aux studios de Halliford à Shepperton pour la somme dérisoire de 22 000 £, il ne parvient pas à convaincre : les comédiens inexpérimentés et le manque flagrant de moyens font fuir le public.
1961*Les Comédiennes, épisode de Amours célèbres / Amori celebri (FR/IT) de Michel Boisrond
Gilbert Bokanovski/Générale Européenne de Films (GEF)-Unidex Productions (Paris)-Cosmos Film (Roma), 125 min. (tout le film). – av. Edwige Feuillère (Mlle Raucourt), Pierre Dux (François-Joseph Talma), Jean Desailly (le baron Adrien de Jonchère), Daniel Ceccaldi (Antonio Villa), Annie Girardot (Mlle Duchesnois), Marie Laforêt (Mlle George), Jean Ozenne (le marquis Stanislas), Héléna Manson (la duchesse), Hélène Duc (une marquise), Robert Lombard (un admirateur).
Synopsis : Paris en 1804. Comédienne célèbre de la Comédie-Française, Mlle Raucourt voit l’étoile de Mlle Duchesnois monter trop vite à son gré. Pis, cette dernière lui souffle son protecteur, le baron de Jonchère. Pour précipiter la chute de sa rivale, Mlle Raucourt crée de toutes pièces une nouvelle tragédienne, Mlle George que lance Talma. Mlle George les supplante toutes deux : le triomphe qu’elle obtient dans Bérénice ne laisse plus d’autre choix à sa créatrice que de s’allier avec son ex-ennemie pour comploter sa perte ...
Ce coup d’œil amusé derrière les coulisses du théâtre sous le Consulat et le Premier Empire ressuscite quelques gloires, notamment le grand Talma (1763-1826), l’acteur le plus prestigieux de son époque. Françoise-Marie-Antoinette Saucerotte, dite Françoise Raucourt (1756-1815), sociétaire de la Comédie-Française en 1773, était une protégée de Marie-Antoinette très opposée à la Révolution (elle subit six mois de prison sous la Terreur). La Raucourt fut richement pensionnée par Bonaparte, qui la chargea d’organiser les troupes de comédiens français qui devaient parcourir l’Italie à partir de 1799 ; lesbienne notoire qui affichait sans aucune gêne ses conquêtes féminines, elle est interprétée non sans malice ici par une consœur, Edwige Feuillère. Marguerite-Joséphine Weimer, dite Mademoiselle George (1787-1867) fut effectivement découverte en octobre 1801 à Amiens, sur les tréteaux paternels, par Mlle Raucourt. Frappée par sa beauté et la sûreté de ses gestes, elle se chargea de son avenir à Paris et en novembre 1802, Mlle George, qui n’avait pas encore seize ans, débuta à la Comédie-Française dans le rôle de Clytemnestre (Iphigénie en Aulide de Racine), en présence du Premier Consul et de Joséphine de Beauharnais. Soutenue par Talma, complimentée par Bonaparte, sa carrière est lancée. Elle aura une liaison avec Lucien Bonaparte et Napoléon lui-même, qui l’appelle Georgina (1803). Elle restera fidèle à l’Empire jusqu’à Waterloo. Quant à Mlle Duchesnois (Catherine-Joséphine Duchesnois, 1777-1835), protégée de Joséphine, elle fut la principale ennemie de Mlle George dans la Maison de Molière et monta une cabale contre elle qui divisa un temps les amateurs de théâtre de la capitale.
Troisième sketch d’un insigne et lourdingue divertissement costumé portant également sur Agnès Bernauer (la Bavière au Moyen Âge), le duc de Lauzun (sous Louis XIV) et la demi-mondaine Jenny de Lacour (Paris vers 1880), et animé par les vedettes les plus populaires du cinéma français (Brigitte Bardot, Alain Delon, Jean-Paul Belmondo, Dany Robin, Simone Signoret, Jean-Claude Brialy et Pierre Brasseur). Celui-ci s’avère en fin de compte le plus drôle, le mieux enlevé des quatre épisodes. L’interprétation d’Annie Girardot et d’Edwige Feuillère, brocardant les travers des deux thespiennes qui intègrent aux quolibets de leurs querelles quotidiennes les imprécations de leurs personnages sur scène, est jouissive. Le sketch a été écrit par France Roche et dialogué par Michel Audiard : on sourit à sa peinture d’une jalousie particulièrement inventive et des bassesses commises au nom d’une gloire des tréteaux bien éphémère (le rideau tombe trois fois sur la fin de Bérénice, créant un comique à répétition assez caricatural). Tourné en Dyaliscope et Eastmancolor aux studios de Boulogne, le film s’inspire des bandes dessinées historisantes de Paul Gordeaux parues dans France-Soir (c’est tout dire), et ni les dialogues de Marcel Achard ni ceux de Jacques Prévert ou Françoise Giroud dans les autres sketches rehaussent le niveau de cette production Gilbert Bokanovski, jadis le responsable de Si Versailles m’était conté (1953), de Napoléon (1954) et de Si Paris nous était conté (1955). Pas de doute : il eût fallu Sacha Guitry pour conférer à l’ensemble la verve, l’ampleur et l’esprit adéquats. Hélas, le Maître était mort depuis quatre ans. – DE, AT : Galante Liebesgeschichten.
1963(tv) La Conspiration du général Malet / L’Affaire Malet (FR) de Jean-Pierre Marchand
« La Caméra explore le temps » no. 36, Alain Decaux, André Castelot, Stellio Lorenzi/Radio-Télévision Française (RTF) (1re Ch. 23.2.63), 102 min. – av. François Maistre (gén. Claude-François de Malet), Alain Nobis (Anne-Jean Savary, duc de Rovigo), André Charpak (le préfet Pasquier), Jean Galland (le préfet Nicolas Frochot), JULIEN BERTHEAU (Napoléon), Jean-Pierre Lituac (gén. Maximin-Joseph Emmanuel Guidal), Yves Vincent (gén. Victor Lahorie), Henri Crémieux (Régis de Cambacérès), Jean-Laurent Cochet (Bault), Pierre Leproux (Desmarets), Alain Cuniot (l’abbé Lafon), Roger Crouzet (André Boutreux), Henri Nassiet (gén. Pierre-Augustin Hulin, gouverneur militaire de Paris).
Hostile au Consulat comme à l’Empire, le général jurassien Claude-François Malet (1764-1812) a été chassé de Rome, où il était gouverneur, par le prince Eugène de Beauharnais pour propagande républicaine et vol (trafic avec des maisons de jeu). Aigri, mis en retraite, puis interné à deux reprises pour complot en l’absence de Napoléon en Espagne (1808) et à Schönbrunn (1809), Malet s’échappe dans la nuit du 22 au 23 octobre 1812, répand la fausse rumeur de la mort de Napoléon (dont la France est sans nouvelles) en Russie et ourdit un coup d’État. Il parvient à libérer les généraux républicains Guidal et Lahorie, fait emprisonner de hauts dignitaires du pouvoir comme Savary par un détachement de gardes nationaux et, revêtu de son uniforme de général de brigade, forme un gouvernement provisoire. Tout près de la réussite, il échoue devant la résolution du chef d’état-major, le général Hulin, gouverneur militaire de Paris. Le complot se termine par un procès expéditif et, le 19 octobre, l’exécution de Malet et de douze autres conspirateurs dans la plaine de Grenelle. À son retour à Paris, le 18 décembre, Napoléon, furieux, houspille Savary et Cambacérès : « Treize exécutions pour un coupable ! Qui vous a permis de faire fusiller mes officiers ? Pourquoi m’avez-vous privé du plus beau droit du souverain, celui de faire grâce ; vous êtes bien coupable ! Vous me faites frémir pour l’avenir. »
Une tentative de coup d’État digne de Feydeau, un coup de force de pacotille, du vaudeville qui s’est terminé en tragédie et n’aura duré qu’une dizaine d’heures. Filmé en noir et blanc dans les studios ORTF des Buttes-Chaumont, le scénario d’André Castelot et Stellio Lorenzi s’interroge sur le rôle de l’abbé royaliste Lafon, membre de La Congrégation et partisan du retour des Bourbons sur le trône, qui aurait manipulé Malet. Pour Napoléon, l’affaire est surtout traumatisante dans la mesure où elle met en évidence la grande fragilité du régime impérial en l’absence du souverain dont seul le charisme personnel garantit le pouvoir (aucune des autorités en place n’a songé à désigner l’impératrice Marie-Louise comme régente). – Nota bene : Le coup d’État d’octobre 1812 a également fait l’objet d’un épisode du feuilleton Schulmeister, l’espion de l’Empereur intitulé La Conspiration Malet (cf. infra, 1971/72), avec Mario Pilar dans le rôle du général comploteur. En revanche, La Vengeance de Mallet (1918-1920) de Georges André Lacroix est une comédie sans rapport avec le sujet.
1964(tv) Une journée de l’Empereur (FR) de Jean Pignol
Série « L’Histoire pittoresque », Henri Kubnick/ORTF (2e Ch. 30.5.64), 44 min. – av. JEAN PIGNOL (Napoléon), Claude Nollier (Joséphine de Beauharnais), Charles Millot (Joseph Fouché), Alain Nobis (Régis de Cambacérès), Jacques Rispal (Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord), Denis Julien (François-Joseph Talma), Robert Drancourt (Michel Duroc, maréchal du palais), Jacques Grello (l’Historien), Jean-Louis Le Goff (Jean-Nicolas Corvisart, médecin), Claude Dasset (Louis Constant, le valet), Jacques Berger, Elisabeth Boda, Robert Blome, Jacques Bretonnière, Bernard Charnace, Claudine Dalmas, Michel Daquin, Louise Debrakel, Jacques Gallard, Marc Halford, Jean Mauvais, Maurice Pierrat, Paul Savatier, Françoise Seignier, Vandoude, Simone Vannier, Michèle Wargnier, Elisabeth Willie.
Une téléfiction scolaire mais divertissante et très instructive au cours de laquelle l’Historien convie le spectateur à suivre une journée type de Napoléon aux Tuileries, en avril 1806 ; Constant, le valet fidèle pendant quinze ans, sert de guide. Napoléon a passé 955 jours à Paris pendant dix ans de règne, soit moins de trois ans. Il dort dans la chambre qu’occupait jadis Louis XVI. Son Mamelouk est allongé devant sa porte. Il se couche vers 23-24 heures, se réveille entre 2 et 5 heures du matin, travaille, dicte des lettres à Ménéval et prend un bain bouillant pendant une heure. À 7 heures, Constant apporte le thé, allume le feu de cheminée (son maître est frileux), raconte les derniers ragots, tandis que l’Empereur se rase lui-même, reçoit Duroc (grand-maréchal du palais) et son médecin Corvisart, se laisse habiller, puis écoute amusé le comédien Talma qui lui rapporte les dernières querelles entre Mlles George et Duchesnois (cf. supra, Les Comédiennes, 1961). Napoléon lui donne des conseils sur son jeu de scène dans le rôle de César (« Vous fatiguez trop vos bras, avec César, un geste est un ordre »), avoue sa prédilection pour Corneille (« ses tragédies enseignent la noblesse et l’héroïsme »). « L’uniforme est un costume », avoue-t-il. « Je suis moi-même un personnage de théâtre, avec mon petit chapeau, ma redingote de bourgeois sur un uniforme de colonel ! » A 9 heures, il se présente au salon où l’attendent une dizaine de personnes, ordonne l’ouverture de lycées et d’universités, parle du tableau du couronnement avec David et donne des audiences particulières. à 9h30, déjeuner, il mange vite et peu, expédiant le repas en moins de 10 minutes. Il rend une courte visite à Joséphine dont il chasse la modiste ruineuse en lui faisant peur, puis reçoit Talleyrand et, à 11h., Fouché auquel il explique que s’il est lui-même économe, il tient à ce que l’on dépense de l’argent autour de lui. Cambacérès, archichancelier de l’Empire, se plaint des extravagances du clan Bonaparte, ce dernier admet : « J’ai plus de mal à gouverner ma famille que mon empire ! » Il voit son cordonnier, signe le courrier en faisant des taches d’encre sur son costume. Au soir, dîner avec Joséphine, suivi d’une violente douleur à l’estomac. Puis retour au cabinet de travail, où il aura passé 14 heures. Harassé, il jette ses vêtements au hasard et s’endort instantanément.
Jean Pignol, qui a écrit et dirigé l’épisode, campe un Napoléon passable ; il a joué dans une vingtaine de films au grand écran (pour Delannoy, Autant-Lara, Guitry) et est réalisateur à la tv du fameux magazine de reportage « Cinq colonnes à la une ».
1965/66La Sentinelle endormie (La Nuit de Champaubert) (FR/IT) de Jean Dréville
Henri Diamant-Berger/Le Film d’Art (Paris)-Flora Film (Roma), 92 min. – av. NOËL-NOËL (le docteur Mathieu / Napoléon), Pascale Audret (Mathilde Mathieu, sa fille), Alain Noël (Toni Mathieu, son fils), Francis Blanche (Constant, cuisinier de Napoléon), Michel Galabru (Florin), Raymond Souplex (Villeroy), Robert Party (Caulaincourt), Micheline Luccioni (Clémence), Jean Sobieski (Nicolas), Alexandre Rignault (Sylvain), Jean Ozenne (Queffelec), René Arrieu (col. Marton), Gérard Darrieu (Boissier), Carlo Nell (le général), Philippe Castelli (un grognard), Charles Charras (Saint-Breuil).
Synopsis : En mai 1812 à Champaubert. En route vers la Russie, les régiments de Napoléon défilent devant la maison du docteur Mathieu au moment où celui-ci, fervent républicain, complote avec les royalistes Villeroy et Queffelec un attentat contre l’Empereur dont on sait qu’il va dormir à Châlons-sur-Marne. Désigné pour accomplir l’attentat, le médecin confie à Clémence et à son mari Florin, ses domestiques, le soin de veiller sur la vertu de sa fille Mathilde, que courtise son cousin Nicolas, mobilisé pour la Russie. Ce dernier est un dessinateur de talent et un fervent bonapartiste, comme d’ailleurs le jeune Toni (fils de Mathieu). Et Florin, l’ancien grenadier qui, endormi lors d’une garde, fut réveillé par le « Petit Tondu ». Dans l’après-midi, la demeure du médecin à Champaubert est réquisitionnée pour y loger, dit-on, le maréchal Davout. En réalité, c’est l’Empereur qui a modifié le lieu de son étape en apprenant l’existence d’un complot. La maisonnée ignore l’identité véritable de son hôte, mais pas Villeroy qui dépose une bombe sur les lieux, dans la chambre des enfants. Horrifié d’apprendre que son pire ennemi dort dans son lit, mais révolté à l’idée de s’en débarrasser en risquant la vie d’innocents, Mathieu fait exploser la machine infernale dans son jardin et se voit décoré de la Légion d’honneur par l’Empereur reconnaissant. Lors d’une entrevue avec Napoléon, il obtient l’affectation de Nicolas dans l’Académie impériale de peinture et dérobe la tabatière de « Buonaparte ».
Filmée en Superpanorama 70 mm et Eastmancolor aux studios de Billancourt et en extérieurs à Milon-la-Chapelle (automne 1965), cette petite comédie ironique, joli divertissement de famille imaginé par Noël-Noël (en « Père Tranquille » premier empire), est le dernier film de Jean Dréville pour le cinéma. Il est mis sur pied grâce à l’aide d’André Malraux, alors ministre des Affaires culturelles, qui débloque à titre exceptionnel une avance sur recettes d’un million de francs (la moitié du budget estimé), permettant ainsi au producteur Diamant-Berger, qui vise le marché international, de tourner en 70 mm avec son stéréophonique – un format que Dréville juge superflu pour une comédie plutôt statique ; Napoléon, invisible mais très causant, marche de droite à gauche et le spectateur perçoit ses déplacements grâce à la stéréophonie. Il n’apparaît que dans les dernières minutes, de loin et de dos. Lorsqu’il se tourne vers la caméra, le visage figé ressemble à celui de l’Empereur, mais il s’agit de son masque ; le comédien qui le porte est Noël-Noël lui-même. La critique exécute le film en quelques lignes. Inédit hors de l’Hexagone, même en Italie, pays coproducteur.
1966(tv) Jacquard (FR) de Jean-Paul Carrère
Série « Hommes de caractère » (TF1 19.4.66), 95 min. – av. Jean Chevrier (Joseph-Marie Jacquard), René Dary (Galevard), Fernand Berset, André Thorent, Jacques Berthier (Lazare Carnot).
En 1801 à Lyon, Joseph-Marie Charles dit Jacquard (1752-1834) met au point un métier à tisser la soie semi-automatique, à l’aide d’un programme inscrit sur des cartes perforées. Le 12 avril 1805, Napoléon rencontre le tisseur lors d’un séjour à Lyon ; quatre mois plus tard, Jacquard reçoit de la part de l’Académie de Lyon le prix des inventeurs, et accumule par la suite prix d’honneurs et récompenses, mais s’attire aussi beaucoup d’ennemis. Son métier, qui marque les prémices de la révolution industrielle, va entraîner une restructuration sociale difficile et, en 1831, la révolte des Canuts (script de Michel Subiéla).
1967(tv) Le Sacre de Napoléon (FR) d’Alain Boudet
Série « Autour d’un tableau » (1re Ch. RTF 8.3.67), 25 min. – av. JULIEN BERTHEAU (Napoléon), Françoise Fabian (Joséphine de Beauharnais), Amarande, Yves Arcanel (Jacques-Louis David), Jacques Dennoville, Jean-Marie Fertey, Alain MacMoy, Philippe Mareuil. – Les démélés houleux du peintre David avec le clan Bonaparte à la veille de l’accrochage du tableau du sacre, en 1807/08 (scénario d’Alain Boudet et Pierre Miquel).
1969*(tv) Jean-Roch Coignet (FR/BE/IT/CH/CA) de Claude-Jean Bonnardot
ORTF-RTB-RAI-SSR-Technisonor-Société Radio-Canada (TF1 23.12.69-3.1.70), 7 x 52 min. – av. Henri Lambert (sgt./cpt. Jean-Roch Coignet), Pierre Santini (Gervais), François Dyrek (La Franchise), Max Vaille (Godaille), Enrico Salvatore (cpt. Renard), Anne Pauzé (Louison), Jacques Mondain (Benoît), Fabienne Mai (Mme Potier), Hervé Sand (M. Potier), Pascal Tersou (Palbrois), Jean Payen (le sergent écrivain), Gabriella Giorvelli (Margot-la-Joie), Gérard Chevalier (maréchal Jean Lannes), Milan Micie (maréchal Louis-Alexandre Berthier), Max André (maréchal Louis Nicolas Davout), Mirko Kraljev (gén. Jean Marie Dorsenne), Max Amyl (gén. Géraud Michel Duroc), Alexandre Bonnardot (Napoléon II, Roi de Rome), Ratko Buljan (maréchal Michel Ney), Jean Marconi (gén. Jacques Boudin), Pierre Plessis (Gustave Durut), Christian Delangre (Saint-Léger), Gilles Capelle (Tourville), Liliane Bel (Mme Renard), Anne Deren (Mlle Renard), Maurice Vallier (le bourgeois), Colette Lacoste (sa femme), Frank Estange (cpt. Merle).
L’odyssée phénoménale d’un soldat de la Grande Armée : Jean-Roch Coignet (1776-1860), qui termina sa carrière militaire comme capitaine de la Garde impériale et officier de la Légion d’honneur. Berger, charretier, enfin garçon de ferme pauvre et illettré, Coignet fut conscrit en 1799, à l’âge de vingt-trois ans, et participa à toutes les campagnes du Consulat et de l'Empire. Il parcourut à pied toute l'Europe – quarante mille kilomètres, les armes à la main, à travers la France, la Suisse, l’Italie, l’Espagne, le Portugal, l’Autriche, la Prusse, la Pologne et la Russie – et survécut sans une seule blessure à 16 campagnes et 48 batailles, de Montebello en 1800 à Waterloo en 1815. Il ne retint de cette formidable aventure que le fait d’avoir appris à lire et à écrire, à l’âge de trente-cinq ans, « quelque part entre Friedland et Wagram » (soit en 1808). Mis en demi-solde après les Cent-Jours, plus riche de souvenirs que d’argent, il se retira à Auxerre où il se maria et tint un bureau de tabac. Septuagénaire, Coignet commença à rédiger ses Mémoires (dans un français approximatif) après le décès de son épouse, entre 1851 et 1853 : un premier tirage intitulé Aux vieux de la vieille que le légendaire capitaine vendit directement à ses clients. En 1883, Lorédan Larchet révisa le style de l’auteur et publia de larges extraits de ses souvenirs sous le titre Les Cahiers du capitaine Coignet. Ces souvenirs, bientôt érigés en légende dorée, sont un document incomparable sur les quinze années pendant lesquelles les paysans de France sillonnèrent l’Europe sous les drapeaux de l’Aigle. Le capitaine Coignet servira de modèle pour le colonel fictif Pontcarral, héros bonapartiste du roman éponyme d'Albéric Cahuet – qui sera porté à l’écran en 1942 par Jean Delannoy (cf. p. 660). Enfin, le jeune Charles de Gaulle écrira en 1926-27 une pièce de théâtre intitulée Le Flambeau, qui met en scène les Mémoires du capitaine Coignet.
L’autobiographie de cet homme du peuple, fruste et modeste, loin de tout fanatisme belliciste, interpelle Claude-Jean Bonnardot, auteur en 1958 du magnifique Moranbong, un long métrage filmé en Corée du Nord qui s’attira les foudres de la censure pour atteinte à la politique étrangère de la France, malgré une projection au festival de Cannes et les éloges des Cahiers du cinéma et de Positif. Le comte Jean Dominique de La Rochefoucauld (scénariste, téléaste, précieux collaborateur de Roberto Rossellini pour La Prise de pouvoir par Louis XIV, Les Actes des Apôtres et ses incontournables biographies télévisées de Socrate, Pascal et Augustin d’Hippone, entre 1966 et 1972) lui sert de conseiller artistique : une caution de taille. Script et dialogues sont du romancier Albert Vidalie, qui fait de Coignet un camarade de bon aloi, honnête, plaisant aux femmes, un militaire discipliné et sans trop d’états d’âme, doté d’un mépris total du danger et d’une force peu commune. Le comédien-scénariste Henri Lambert, qui fut le colosse du mythique feuilleton Les Compagnons de Baal de Pierre Prévert (tv 1968), lui prête son physique un peu ingrat, jovial, trapu et musclé. (Élève de Françoise Rosay, il participait à des combats de catch pour payer ses cours de diction.) L’ORTF programme ce feuilleton de presque sept heures pour fin 1969, année du bicentenaire de la naissance de Napoléon. Bonnardot tourne en couleurs au château de Tanlay (Yonne) avec le concours de l’armée française, puis en ex-Yougoslavie (Croatie) avec les soldats du maréchal Tito, enfin dans les studios de la Jadran Film à Zagreb. Les moyens sont largement insuffisants pour restituer l’épopée militaire dans toute son ampleur, mais le spectateur se laisse émouvoir par l’humanisme fraternel du cinéaste. « J’ai fait un film qui n’est ni à la gloire des armées de l’Empire, ni à la gloire de la guerre, et où il n’est question que de loin de l’Empereur », prévient-il.
Sa chronique est intéressante à plusieurs niveaux : dépourvue de moments de tension artificiels, de romance comme de coups d’éclats, elle renseigne en priorité sur le quotidien éprouvant et souvent maussade du fantassin napoléonien, ses sacrifices personnels (et sentimentaux), sa subsistance aléatoire, ses gîtes improvisés (la terre ou la paille), son armement, la musique militaire, le roulement du tambour et les chants révolutionnaires censés lui donner courage et endurance au cours de marches forcées qui n’en finissent jamais, de bivouacs en casernes, etc., mais aussi la camaraderie qui aide à (sur)vivre. Bonnardot souligne la monotonie des semaines et des escarmouches qui se succèdent : la mitraille reste, seuls les paysages changent. Dans la perspective du simple grenadier, loin de l’éclat des états-majors (l’Empereur est toujours vu à distance ou de dos), la guerre n’est pas une aventure, mais une habitude acceptée avec fatalité par des hommes peu enclins à se poser des questions. Jusqu’au jour où le nombre des morts excède celui des vivants, où Coignet, héros abusé et bientôt désabusé, réalise combien les « soldats de la liberté sont devenus des bêtes de guerre » et que, parti pour apporter les idéaux de la République aux autres peuples européens, il a surtout été témoin des souffrances provoquées par les armées impériales. Pourtant, Napoléon reste intouchable à ses yeux et, quoique réduit à la mendicité en 1815 aux côtés de demi-soldes estropiés, il se montre prompt à corriger au sabre une poignée de jeunots royalistes trop arrogants ... avant de vendre ses souvenirs aux badauds « pour cinq francs ». Une fin amère, peu courante dans l’univers cathodique de l’époque.
Episodes 1 et 2 : Auxerre, le Grand-Saint-Bernard et Montebello, en Italie du Nord, où Coignet est cité pour un « fusil d’honneur », puis Marengo, 1799/1800 (cf. p. 218) et le Portugal. – Episode 3 : les conspirateurs autour de Cadoudal, le camp de Boulogne, Vienne et Austerlitz 1804/05 (cf. p. 339). – Episodes 4 et 5 : Napoléon décore Coignet de la Légion d’honneur, Eylau et Wagram. – Episodes 5 et 6 : la Moskova, la retraite de Russie (cf. p. 542) et l’Allemagne 1812/13. – Episode 7 : la campagne de France, les Cent-Jours et la Restauration.
Nota bene : Jean-Roch Coignet apparaît également dans le docu-fiction anglais The Campaigns of Napoleon : 1805 –The Battle of Austerlitz de Graham Holloway en 1993, interprété par Dominique Carrara (cf. p. 342), et André Dussollier lui prête sa voix dans le documentaire Napoléon de Jean-Louis Molho (tv 2012).
1969(tv) Un jour comme les autres sous l'Empire: Le Fantôme du portrait (FR) de Jacques R. Villa
série "Un jour comme les autres", ORTF (2e Ch. 4.12.69), 38 min. - av. Laurence Badie, Francine Olivier, William Sabatier, Dominique Blanchar, Jean-Pierre Herce, François Borel. - Une collection de faits-divers d'autrefois. Les Lenvoisié qui fêtent leurs 20 ans de mariage découvrent dans leur nouvelle demeure un tableau inconnu de Quentin de La Tour représentant Jean-Jacques Rousseau.
1970(tv) Der Polizeiminister Joseph Fouché, 1759-1820 (DE) de Günter Gräwert
Sator Film GmbH (Hamburg)-Studio Hamburg Film-produktion GmbH-ZDF (ZDF 6.11.70), 95 min. – av. Ferdy Mayne (Joseph Fouché), Wolfgang Büttner (Maurice Gaillard), FRANZ RUDNICK (Napoléon), Karin Anselm (Joséphine de Beauharnais), Paul Hoffmann (Talleyrand), Otto Kurth (Robespierre), Walter Richter (Barras), Jochen Schmidt (Tallien), Joachim Rake (Savary), Alexander Hegarth (le comte d’Artois, frère de Louis XVI et futur Charles X), Jochen Schmidt (Carnot), Ernst von Klipstein (Cambon).
Une dramatique écrite par Michael Mansfeld autour d’’un des personnages les plus controversés du Premier Empire : Joseph Fouché (1763-1820), le chef tout puissant de la police napoléonienne, inventeur de la police politique, régicide, féroce et sanguinaire bourreau de Lyon et de Nevers sous la Terreur, enfin bombardé duc d’Otrante avant de se placer au service de Louis XVIII à la Restauration. Cherchant le pouvoir à tout prix, ce précurseur de Béria et de Himmler se délecte à démêler les fils des intrigues jacobines ou royalistes sous le Consulat. Napoléon le disgrâcie à deux reprises pour infidélités répétées au régime. Fouché, c’est le prince de la politique, ce domaine du crime perpétré par des diplomates « aux mains prestes, aux mots vides et aux nerfs glacés » (Stefan Zweig).
1971Δ [épilogue:] Les Mariés de l'an II / Gli sposi dell’anno secondo / Mirii anului II (FR/IT/RO) de Jean-Paul Rappeneau ; Alain Poiré/Gaumont-Rizzoli-Bucuresti, 98 min. – av. Jean-Paul Belmondo (Nicolas Philibert), Marlène Jobert (Charlotte Philibert), Pierre Brasseur (Gosselin, son père), Laura Antonelli (Pauline de Guérandes), Michel Auclair (prince), Sami Frey (marquis Henri de Guérandes), Julien Guiomar (Jean-Baptiste Carrier, 1756-1794), Patrick Préjean (Saint-Aubin), Charles Denner (passager républicain), Jean-Pierre Marielle (narration). – Tribulations rocambolesques d’un candidat au divorce entraîné malgré lui dans la Révolution française en 1793 : émigré en Amérique du Nord, Philibert veut se remarier, mais doit auparavant obtenir le divorce de Charlotte à Nantes, où le couple chamailleur est ballotté entre Républicains guillotineurs et Vendéens rebelles, malmené, pourchassé et finalement réuni en rejoignant les soldats de l’An II. Après avoir combattu dans l'Armée du Rhin, Nicolas Philibert alias Belmondo fait carrière sous Napoléon (dont on ne voit que la statue équestre); tandis qu’il continue à se disputer amoureusement avec son épouse, dans un luxueux château, le commentaire précise: en 1809, le maréchal Philibert devient prince d’Empire. – Une des meilleures comédies en costume de l’Hexagone (« une épopée intimiste à cheval entre Mozart et Raoul Walsh » dixit Rappeneau), pétillante, mordante, irrespectueuse et très enlevée. Tournage aux châteaux de Compiègne (Oise) et Vaux-le-Vicomte (Seine-et-Marne), à Moret-sur-Loing et en Roumanie, aux studios Bucuresti (pour Nantes et environs). Rappeneau nominé à la Palme d’Or au festival de Cannes, un triomphe au box office.
1971-1974(tv) Schulmeister, l’espion de l’Empereur (FR/CA) de Jean-Pierre Decourt
ORTF-Société nouvelle Pathé Cinéma-Société Radio Canada (1re Ch. 23.12.71-24.1.72 et 4.3.-15.4.74), 13 x 52 min. – av. Jacques Fabbri (Karl Ludwig Schulmeister), William Sabatier (Anne-Jean Savary, duc de Rovigo), Roger Carel (Hammel), Henri Virlojeux (Joseph Fouché), Mario Pilar (gén. Claude-François de Malet), André Thorent (gén. Karl Mack von Leiberich), Françoise Giret (Maria Walewska), Georges Descrières (Louis Bonaparte, roi de Hollande), Philippe Nicaud (gén. Victor Lahorie), Alfred Adam (gén. Pierre Cambronne), Pierre Danny (gén. Charles Augereau), Charles Charras (gén. Pierre-Augustin Hulin), Michel Beaune (gén. Louis-Claude Monnet de Lorbeau), Jean Piat (le comte Marc-Antoine de Beaumont), Marcel Charvey (col. Gabriel Soulié), Nadine Alari (la générale Sophie Hugo), Annick Alane (Mme Bonne-Jeanne Fouché), Andrée Boucher (Suzel Schulmeister), Sacha Pitoëff (Dangberg), Howard Vernon (Sir Horace Mill), Georges Claisse (Tchernitchef), Pierre Hatet (col. Karl Justus Gruner), Claude Degliame (comtesse Rittenberg), Michel Fortin (von Grafenberg) et Jean-Pierre Decourt (la voix de Napoléon).
Une évocation passablement romancée des exploits du célèbre espion badois Charles Louis (Karl Ludwig) Schulmeister (1770-1853), qui entra au service de Napoléon en 1805, sous les ordres directs de Savary, chef de la Police. Il fut un des agents les plus représentatifs de la mise en coupe réglée de la société sous le Premier Empire. L’authentique Schulmeister – « un Alsacien mal degrossi » (Eugen von Czenin) – se livre d’abord à l’agriculture, puis à la contrebande sur le Rhin où il fait fortune, activité qui le mène progressivement à l’espionnage. En 1804, il est présenté à Napoléon, reçoit un grade dans l’armée et est attaché à Savary, séide et aide de camp de l’Empereur. Fin, rusé, totalement dévoué à son maître, il devient un des plus habiles et discrets agents de la police impériale, chargé des missions de confiance les plus secrètes. On met à son compte la capitulation et la capture du général autrichien Mack à Ulm en 1805, à la veille d’Austerlitz (relatée dans l’épisode Un village sans importance, cf. p. 339). Napoléon le nomme commissaire général de la police de Vienne en 1805/06. Quand il ne vit pas retiré dans son domaine au sud de Strasbourg (car sa collaboration au système policier de Savary rapporte gros), « Monsieur Charles » met son audace et son habileté à tromper l’adversaire dans le cadre des campagnes de Prusse et d’Autriche (il est blessé à Friedland en 1807). A l’entrevue d’Erfurt en 1808, il est chargé de la sécurité personnelle de Napoléon et du tsar Alexandre. En 1814/15, il complote pour le retour de l’Empereur de l’île d’Elbe et est arrêté par Blücher pendant les Cent-Jours. Fortuné, il se retire des affaires publiques à la Restauration et finit ses jours dans son manoir à Boissy-Saint-Léger.
Andrew Duggan fait Schulmeister dans un téléfilm américain de la série I Spy en 1955 (Legion of Honor de William Berke, cf. supra). C’est Maurice Teynac qui l’interprète, déguisé en huissier privé Frioul, dans l’Austerlitz d’Abel Gance en 1960. Une décennie plus tard, les aventures du Schulmeister télévisuel imaginées par Jean-Claude Camredon débutent à Strasbourg (juin 1803 ?), où Savary, alors aide de camp du Premier Consul, prépare la visite de ce dernier et engage un dénommé « maître d’école » (Schulmeister en allemand), autrefois contrebandier, pour le protéger des royalistes. D’abord homme de théâtre et d’opéra, Jacques Fabbri, trapu, taiseux et moustachu, fait assez bien ressortir le bon sens et la malice redoutable de ce Badois totalement dévoué à l’Empire (« j’ai la maladie de la fidélité »), qui se dit « soldat du mensonge » et estime que « titan et tyran » sont des mots qui se ressemblent. La majorité des épisodes sont inventés de toutes pièces (quoique truffés de personnages historiques, parmi lesquels on découvre même Sophie Hugo et son garçonnet, Victor Hugo). Flanqué de son adjoint Hammel, Schulmeister a surtout fort à faire pour déjouer les plans – forcément diaboliques – de ses trois confrères de la coalition ennemie, les maîtres-espions Sir Horace Mill (fictif ?), le Russe Tchernitchef (Tchernychov, Czernitchev) et le colonel prussien Karl Justus Gruner (authentiques, ces deux-là), tout en rassurant son épouse Suzel, inquiète de ses absences fréquentes et inexpliquées. Sans parler des espions royalistes français nichés à Londres ou en Normandie, de la société secrète allemande du « Tugendbund » (hostile à Joseph Bonaparte en Westphalie) et des agents de Fouché en lutte contre la police parallèle de Savary. Quelques épisodes se réfèrent toutefois à un contexte plus précis, comme Un village sans importance (signalé plus haut), L’Espion du tsar sur les préparatifs de la campagne de Russie (cf. p. 543), ou Avant les 100 Jours lorsque l'espion essaie en vain de contrer Marie Walewska qui aurait persuadé Napoléon – à en croire le scénario – de quitter l’île d’Elbe (cf. p. 586).
Dans La Conspiration Malet, qui se déroule à Paris le 23 octobre 1812, alors que la Grande Armée vient d’évacuer Moscou, le général républicain Claude-François de Malet annonce la mort de Napoléon et fomente un coup d’État ; Schulmeister, sur lequel repose une bonne partie de la sécurité de l’Empire, démasque et arrête les rebelles, qui sont fusillés (cf. supra, le téléfilm de « La Caméra explore le temps » en 1963). Dans Après les 100 Jours, l’espion, dépositaire de quinze ans de secrets politiques brûlants, est devenu un personnage encombrant qui sauve sa peau grâce à son ancien commando (cf. p. 666). Tournés en couleurs en 1971 aux studios éclair à épinay-sur-Seine et en extérieurs en Île-de-France (le budget est serré, et ça se voit), les six premiers chapitres de cet inoffensif divertissement cathodique font un si bon score à l’audimat que Decourt et l’ORTF lui donnent une suite en 1974, en reprenant les mêmes interprètes et en récoltant un succès identique.
Episodes de la première saison : 1. « Le Maître d’école » (21.12.71) – 2. « Le Petit Matelot » (1.1.72) – 3. « Schulmeister contre Schulmeister » (3.1.72) – 4. « Au pays de l’Eau Tranquille » (10.1.72) – 5. « Les Lys blancs » (17.1.72) – 6. « La Conspiration Malet » (24.1.72).
Deuxième saison : 7. « Un village sans importance » (4.3.74) – 8. « La Dame de Vienne » (11.3.74) – 9. « L’Affaire Adams » (18.3.74) – 10. « Un coup pour rien » (25.3.74) – 11. « L’Espion du tsar » (1.4.74) – 12. « Avant les 100 Jours » (8.4.74) – 13. « Après les 100 Jours » (15.4.74).
1972Δ Tajemství velikého vypravece (Le Secret d’un grand conteur) (CS) de Karel Kachyna. – av. VIKTOR MAURER (Napoléon), Helena Jehlicková (Madame Récamier). – Un biopic tchèque sur le romancier Alexandre Dumas (interprété par Martin Stepánek), dont le père, le général Thomas-Alexandre Dumas, servit sous Napoléon.
1973(tv) Les Mécontents (FR) de Bernard Guillou
ORTF (FR3 17.4.73), 45 min. – av. Anna Gaël (Mélanie, comtesse des Tournelles), Marcel Dalio (comte des Tournelles), Georges Beller (Edouard, marquis de Nangis), Fernand Berset (baron de Borredon), François Dyrek (marquis des Botterel), Francis Rousse (le Vidame), Georges Beauvilliers (Bertrand dit Sans-Peur, ancien officier vendéen), Danièle Richard (Françoise), Joé Davrey (le valet), Christine Fersen, Michel Charrel, Yvon Crenn, Serge Lanssen.
Synopsis : Au château des Tournelles, dans un département voisin de la Vendée en 1810, un groupe d’aristocrates couards, opportunistes et vélléitaires se réunit pour comploter contre « l’usurpateur » afin de « rétablir l’ordre légal » ainsi que leurs « glorieux privilèges », tout en tremblant devant la si redoutable police de Napoléon. La comtesse et le comte des Tournelles cherchent en particulier à gagner à leur cause leur cousin Edouard de Nangis, un lieutenant de hussards revenu de Wagram et sur le point de repartir pour l’Espagne, et qui pense que l’aventure impériale est encore le meilleur moyen pour l’aristocratie de ne pas dégénérer en une collection de « figures à mettre sous verre ». Les hobereaux royalistes n’ont que de la morgue pour Bertrand, un ancien chef chouan, et se « divertissent » à conspirer jusqu’au moment où l’arrivée d’un gendarme à cheval dans la cour du château sème la panique. Fausse alerte : le comte de Tournelles apprend qu’il a été nommé chambellan de l’impératrice et, flatté outre mesure, monte sur Paris avec son épouse. – Une satire dialoguée tirée des Mosaïques de Prosper Mérimée (1830) à travers laquelle l’écrivain règle ses comptes avec les Bourbons.
1974(tv) Mathieu Legros, de held van Austerlitz (BE) de Cas Baas et Robert Lussac
Belgische Radio en Televisie-Groot Limburgs Toneel (G.L.T.) (BRT 26.5.74). – av. Bert André (Mathieu Legros), Eddie Brugman (L’Anguille), Gaston van Erven (le comte), Wily Van Heesvelde (le pasteur), Lut Tomsin (la duchesse), Angélique Vos (P’tit Four), Raph Wolfs (Moeder), John Leddy (sergent), Franck Van Erven, Ellen Veger (Camille), Mark Andries, Hans Hoekman.
De retour en France, deux déserteurs de la bataille d’Austerlitz sont célébrés comme des héros par un préfet, un noble converti au bonapartisme et un curé égrillard. La comédie antimilitariste Mathieu Legros de Jean-Claude Grumberg, futur scénariste de Costa-Gavras (Amen, 2002, Le Capital, 2012) et de François Truffaut (Le Dernier Métro, 1980), a été créée par Jean-Paul Cisife au Théâtre de la Gaîté-Montparnasse à Paris en 1969, mais son comique vaudevillesque ne permet pas de démythifier l’épopée napoléonienne de manière conséquente. Traduction flamande de Thérèse Cornips.
1977***The Duellists (Duellistes) (GB/[US]) de Ridley Scott
David Puttnam/Enigma Production-National Film Finance Corp. (NFFC)-Scott Free Enterprises-[Paramount Pictures], 101 min. – av. Keith Carradine (Armand d’Hubert), Harvey Keitel (Gabriel Florian Féraud), Albert Finney (Joseph Fouché, duc d’Otrante), Edward Fox (le colonel), Cristina Raines (Adèle de Valmassigue-d’Hubert), Robert Stephens (brigadier-gén. Anne-François Trelliard), Tom Conti (le docteur Jacquin), John McEnery (chevalier), Diana Quick (Laura), Alun Armstrong (Lacourbe), Maurice Colbourne (le second), Gay Hamilton (la servante), Meg Wynn Owen (Léonie, sœur d’Armand), Jenny Runacre (Mme de Lionne), Alain Webb (chevalier de Rivarol), William Morgan Sheppard (le maître d’armes), Matthew Guinness (le neveu du maire de Strasbourg), Hugh Fraser, Peter Postlethwaite, Liz Smith, Neville Jason, Stacy Keach (narration).
Synopsis : Dans une garnison à Strasbourg en 1800. Le lieutenant Gabriel Féraud du 7 e régiment de hussards blesse grièvement en duel le neveu du maire de la ville, un civil. Un autre lieutenant, Armand d’Hubert du 3 e régiment de hussards, est alors chargé par ses supérieurs de procéder à l’arrestation de Féraud. Profondément vexé d’être interpellé en public, dans le salon huppé de la jolie Madame de Lionne, Féraud provoque d’Hubert à son tour en duel et sort blessé au coude de cette première rencontre. Dès lors, chaque fois que leurs chemins se croisent, les deux ennemis se livrent des duels acharnés à l’arme blanche, en 1801 à Augsbourg, en 1806 à Lübeck, etc. Tantôt l’un est blessé, tantôt l’autre, et toujours Féraud jure à d’Hubert de ne lui laisser aucun répit. En 1809, Féraud est éloigné pour guerroyer en Espagne et en 1812, pendant la retraite de Russie, les deux affrontent côte à côte des cosaques ; d’Hubert croit à une possible réconciliation. Promu brigadier-général, il se retire dans son domaine auprès de sa sœur Léonie à Tours pour guérir d’une blessure à la jambe reçue à Laon en mars 1814. Pendant les Cent-Jours, le maréchal Grouchy le sollicite pour rallier Napoléon, mais d’Hubert refuse et épouse une voisine royaliste, Adèle, nièce du chevalier de Rivarol. Apprenant cela, Féraud l’accuse faussement d’avoir toujours manqué de loyauté envers l’Empereur. Après Waterloo, d’Hubert apprend que Féraud, se clamant bonapartiste, a été condamné à mort pour trahison. Il obtient de Fouché la libération de son ennemi, « trop bête pour nuire à la cause du roi », et ce dernier le provoque encore une fois, la sixième en quinze ans. A l’issue de cet ultime affrontement, au pistolet, d’Hubert a le dessus et laisse la vie à son adversaire qu’il tenait pourtant à sa merci. Quoique sauf, Féraud est touché à mort dans son honneur et disparaît, définitivement humilié.
Pour son premier long métrage de cinéma, le téléaste et décorateur britannique Ridley Scott, 38 ans, jette son dévolu sur une nouvelle peu connue de Joseph Conrad intitulée The Duel : A Military Story (1908) et rebaptisée The Point of Honour aux états-Unis. Gerald Vaughan-Hugues lui livre un scénario d’une remarquable fidélité. Seul David Puttnam, un producteur indépendant qui n’a pas froid aux yeux (il parrainera par la suite Midnight Express, The Killing Fields et Mission), est séduit par le projet, mais le budget étriqué de 900 000 $ excluant le travail en studio, tout doit être photographié en décors naturels. Le tournage en Eastmancolor s’ordonne à partir d’automne 1976 en Dordogne (Sarlat, Sireuil, Vitrac, Tursac, aux châteaux du Repaire, de Commarque à Les Eyzies-de-Tayac et de Lacypierre à Saint-Crépin-et-Carlucet), en Ecosse pour la séquence russe (Aviemore près d’Inverness, Highlands) et à Londres (Simpson Restaurant dans le Strand). Il faut des semaines pour convaincre Harvey Keitel et Keith Carradine, tous deux magnifiques, de participer à cette insolite aventure. Albert Finney accepte d’interpréter Fouché contre une caisse de champagne. Puttnam et les techniciens sont mobilisés à tour de rôle pour faire de la figuration, les armes utilisées sont authentiques, des pièces de musée. En filmant dans le pays sarladais, Scott apprend que le récit de Conrad est fondé sur une histoire locale authentique dont le romancier anglo-polonais a juste modifié les noms propres : à partir de 1794, le général napoléonien Pierre Dupont de l’Étang (1765-1840) aurait affronté en duel à une vingtaine de reprises un autre officier, d’un tempérament particulièrement querelleur, François Louis, comte Fournier-Sarlovèze (1773-1827), né à Sarlat et surnommé « El Demonio » par les guérilleros espagnols, mais aussi « le plus mauvais sujet de l’armée ».
Conrad est attiré par les personnages obsédés jusqu’à la folie, une constante de son œuvre, et Ridley Scott conçoit donc son travail comme une « chorégraphie de ballet sur le thème d’une idée fixe, l’histoire fascinante de la violence de l’homme contre lui-même ». Ombrageux, féroce, sociopathe narcissique, Féraud est prisonnier de sa haine : il doit tuer ou être tué. Son adversaire d’Hubert est, lui, prisonnier d’un code d’honneur suranné et insensé qui le force, bien malgré lui, à croiser le fer avec un butor aussi dangereux que ridicule afin de ne pas être déconsidéré par sa caste. Ainsi, le rituel de mort s’installe, se répète, sans cesse prolongé jusqu’à la chute de l’Empire, alors que ses protagonistes ballottés à travers le continent montent simultanément en grade, passant tous deux de lieutenant à capitaine, colonel, brigadier-général. Au fil des ans, le prétexte de la querelle, si futile, est oublié. Féraud, le roturier, finit par en inventer un, moins inavouable : d’Hubert, le trop bien-né, aurait insulté l’Empereur. (Il oublie toutefois que Napoléon a interdit les duels dans l’armée.) Entre haine de classe incontrôlable, goût incoercible des armes, mascarade de l’honneur exacerbé ou besoin de défier la mort pour donner un sens à sa vie, nul ne peut donner de réponse. Ce conflit personnel est d’autant plus dérisoire qu’il se détache sur la grande boucherie des massacres de masse et que les seuls instants de paix entre les bretteurs sont paradoxalement les moments de guerre, car « les duels entre les nations ont l’absolue préséance », commente cyniquement un médecin. Le duel devient métaphore de l’absurdité de la guerre : plus il est vain, plus la vanité de ceux qui le pratiquent devient éclatante, et, pourrait-on ajouter, quand le conflit dure depuis trop longtemps, la haine se nourrit d’elle-même. Conrad comme Scott nuancent cependant leur dénonciation ironique par des touches psychologiques révélatrices : à la fin de la nouvelle, d’Hubert, d’entente avec son épouse, décide de subvenir discrètement et jusqu’à sa mort aux besoins de Féraud, à présent privé de pension. Quant au film, il illustre la vie privée, intime et sentimentale de d’Hubert, ses convictions humanistes et, en 1815, son refus de renier le passé : à sa belle-famille légitimiste qui voue « l’Ogre » aux gémonies, il continue de parler de « l’Empereur » et souligne avec une fine pertinence que la nouvelle armée des Bourbons compte « plus de réalistes que de royalistes »... Le film se clôt sur un panorama majestueux de la vallée de la Dordogne que Féraud, psychologiquement « mort », portant tricorne vétuste et redingote militaire, semble contempler en tournant le dos à l’objectif – une évocation des gravures montrant Napoléon solitaire et vaincu (ou plutôt de l’icône qu’en ont fait ses soldats), mais la silhouette renfrognée du malheureux n’a rien de l’aigle captif, comme le révèle le gros plan final : c’est une loque terrassée par son propre délire de ganache, abattue tel Javert à la fin des Misérables.
Visuellement, le cinéaste étaye son propos par une confrontation quasi permanente de la dérive humaine avec la paix lumineuse des paysages (le film s’ouvre sur une fillette et ses oies dans un champ, témoins effrayés du premier duel), appuyé en cela par la musique de Howard Blake, très inspirée de Haydn. La beauté plastique des compositions contrebalance l’aridité ou la sauvagerie du propos. De leur propre aveu, Scott et son opérateur Frank Tidy ont cherché à imiter la picturalité raffinée et les éclairages du Barry Lyndon de Stanley Kubrick (1975), en évitant teintes violentes, soleil et valeurs sombres. Mais outre un sens aigu de l’esthétisme et un don narratif manifeste, Scott enrichit son film par une reconstitution d’un réalisme vivant, d’une minutie et d’une rare justesse : « Kubrick copie à la perfection les peintres de l’époque, Scott semble copier la réalité même et inventer ses propres tableaux ... qui ne ressemblent pas à des œuvres de musée » (Claude-Marie Trémois, Télérama, 5.9.77). Les intérieurs sentent l’habité, les scènes de rues semblent prises au vol, les duels filmés caméra à l’épaule respirent la peur, l’incertitude, le fol espoir de rester en vie. L’économie de la mise en scène ne dérape jamais dans l’austérité ou la stylisation contraintes : ce qui n’est pas à l’image n’y manque pas, chaque cadrage se suffisant pleinement (les grappes fantomatiques de fantassins gelés dans les plaines blanches de Russie). Jean Tulard applaudit à « un des meilleurs films tournés sur l’époque napoléonienne ». C’est en tout cas un de ceux qui parviennent le mieux à restituer les mentalités, le vécu, les mœurs et l’esprit militaires du Premier Empire. À partir de 1979, Scott s’imposera comme un des plus brillants créateurs d’univers à l’écran, notamment dans le domaine de la science-fiction (Alien, Blade Runner) et de la fresque historique (Gladiator, Kingdom of Heaven). Un bémol : à ce jour, le film n’a pas couvert ses (modestes) frais, la Paramount n’ayant tiré que sept copies pour la sortie américaine ; l’exploitation aux États-Unis est restée confidentielle, et ailleurs, il n’a jamais quitté le circuit « art et essai ». Au festival de Cannes 1977, Scott récolte le Prix de la première œuvre ; le Prix David di Donatello qui lui est remis en 1978 récompense « le meilleur réalisateur étranger ». Son film est également nominé aux BAFTA Awards (Londres) de 1979 pour la photo et les costumes. – ES : Los duelistas, IT : I duellanti, DE : Die Duellisten.
1977/78[épisode :] Guerres civiles en France. Histoire d’un peuple – 2. Premier Empire (FR) de François Barat
Agnès Datin, Pierre Barat/Cinéma 9-Paris Inter Productions Audiovisuelles (P.I.P.A.), 135 min. – av. CHRISTIAN COLLIN (Napoléon), Colette Fellous (Pauline Bonaparte), Romain (soldat), Martine Bertrand (paysanne), Rosine Cadoret (aubergiste), Gilles Raab, André Valverde et Marc de Jonge (trois commissaires alliés), Nicole Hiss (la jeune femme), Didier Bezace (comédien), Alain Macé (comédien), Romain (le soldat), Jean-Loup Rivière (le barman).
De nos jours, un permissionnaire erre dans la gare de l’Est à Paris, dans l’attente d’un train qui le ramène dans sa caserne. Une femme, dont le passé est étroitement lié au souvenir du Premier Empire, erre dans les rues et pénètre dans divers lieux publics, se rend dans une église, une gare, un hôtel, au tombeau de l’Empereur aux Invalides puis dans un théâtre où des acteurs répètent une pièce sur Napoléon. Décrets et déclarations, passé et présent s’entremêlent. – Trois périodes historiques en confrontation avec le présent, vues par trois réalisateurs ; Alain Robbe-Grillet fonctionne comme conseiller technique. Autres épisodes: Babœuf ou Le Journal parlé (la Révolution française) réalisé par Vincent Nordon et La Semaine sanglante (la Commune de Paris 1871) par Joël Farges.
1981*(tv) Les Fiancées de l'Empire (FR/BE) de Jacques Doniol-Valcroze
Mag Bodard/Antenne 2-RTB-Cinémag-SFP (A2 2.-17.1.81), 6 x 70 min. – av. Yolande Folliot (Clarisse Duruy), Claude Giraud (col. Maxime d’Aurillac), Michel Vitold (Charles Duruy), Madelon Violla (Odile Duruy), François Perrot (Joseph Fouché), Yves Vincent (Régis de Cambacérès), Nicole Colbert (la générale Laure Junot, duchesse d’Arbrantès), Bruno Devoldère (Maurice), Jacques Duby (Amédée), Catherine LeCocq (Victoire), Francine Olivier (Henriette), Alain Douley (Le Hénin), Claude Gensac (Mlle de Croissy), Maaike Jansen (Else van Potter), Yves Gabrielli (Léonard), Annette Merchandou (Clémence), Gérard Lecouvey (Antiochus), André Geyre (Arsace).
Synopsis : En mars 1809, dans le petit château de Cordéran près d’Angoulême, tandis qu’une nouvelle campagne de Napoléon se prépare en Autriche. Logé dans la maison de l’ancien conventionnel Charles Duruy, le comte Maxime d’Aurillac, colonel de cavalerie, va partir rejoindre la Grande Armée en Allemagne. Duruy est veuf, son épouse ayant été guillotinée pendant la Terreur. Odile, la plus jeune de ses deux filles, est amoureuse du bel officier et demande à sa sœur aînée Clarisse d’intervenir en sa faveur auprès de Maxime. Celui-ci accepte de demander la main d’Odile en échange d’une nuit d’amour avec la belle Clarisse. Les deux vivent à Paris quelques jours de liaison orageuse : déçue par le comportement libertin du colonel, Clarisse raconte tout à Victoire, la maîtresse officielle de Maxime, et retourne en province. À présent fiancé à Odile, Maxime n’est pas pressé de tenir sa parole. La police de Fouché surveille la demeure de Duruy, soupçonné de sympathies royalistes. De passage, Maurice de Croissy s’éprend d’Odile, mais n’ose se déclarer. Après la victoire de Wagram, la paix signée à Vienne le 14 octobre met fin à la Cinquième Coalition ; l’Empire est à son apogée, mais la situation économique est mauvaise, les Français ont faim et soif. Le 12 mai 1810, Clarisse Duruy est enlevée par les sbires de Fouché. Affairé à sauver le père de Clarisse, Maxime s’embarque dans une mission secrète de Fouché pour négocier avec les Anglais à Amsterdam, à l’insu de Napoléon. Arrêté, il est sauvé de justesse par la disgrâce de Fouché, accusé de trahison et remplacé par Savary à la tête de la police (3 juin), mais aussi grâce à l’intervention de Régis de Cambacérès, archichancelier de l’Empire et duc de Parme, vieil ami de Duruy, qui lui fait donner un commandement en Espagne. Odile suit Maurice de Croissy à Milan, tandis que Maxime emmène Clarisse avec son régiment à Saragosse. Dury père retourne à ses travaux d’historien de la Révolution.
Cofondateur avec André Bazin et Lo Duca en 1951 des mythiques Cahiers du cinéma (dont il devient le rédacteur en chef), et de la « Quinzaine des réalisateurs » à Cannes en 1969, signataire du Manifeste des 121 pendant la guerre d’Algérie, Jacques Doniol-Valcroze s’est également imposé dans la cadre de la Nouvelle Vague en confectionnant deux charmantes comédies (L’Eau à la bouche, 1959, et Le Cœur battant, 1960). Avec ce feuilleton situé « entre Dumas et Stendhal » qu’il a adapté de son propre roman (Les Fiancées de l’Empire : les hauteurs de Wagram, paru en 1980 chez J. C. Lattès), Doniol-Valcroze souhaite montrer « l’incidence d’une époque bruissant de combats sur l’existence retirée d’une petite provinciale » (Télé 7 jours, 2.1.81) et brosse à cet effet une fresque romantique traitée sur le mode du marivaudage, de nombreux chassés-croisés à l’appui. Qualifié de « philosophe de l’amour, chantre d’un certain libertinage qui refuse le tragique de la vie » (René Prédal), le cinéaste cherche moins à reconstituer des événements (quoique le cadre historique ait fait l’objet de très sérieuses recherches) qu’à restituer un climat de confusion sentimentale par une mise en scène raffinée et des dialogues empreints de légèreté et de touches délicates. Ce qui en fait tout l’intérêt, car, par ailleurs, ces « scènes de la vie de province » sont un peu languissantes. Tourné dans les vieux quartiers de Bordeaux, à Paris (au Ministère de la Police de Fouché, quai Voltaire), Saint-Cloud, Rions (Porte de Lhyan), Saint-Germain, Bruges et aux studios de Billancourt. – Episodes : 1. « Les Demoiselles d’Angoulême » – 2. « Les Hauteurs de Wagram » – 3. « Les Idées claires » – 4. « L’Enlèvement » – 5. « Le Passage secret » – 6. « La Route d’Espagne ».
1981(tv) Anthelme Collet ou Le Brigand gentilhomme (FR) de Jean-Paul Carrère
TF1-SFP (TF1 9.-30.7.81), 6 x 55 min. – av. Bernard Crommbey (Anthelme Collet), Elisabeth Huppert (Francesca Alfieri), Catherine Salviat (Antonietta), Jacques Rispal (Angelo), Jacques Jouanneau (Austerlitz), Henri Genès (Pomponi), Alain Mottet (le ministre), Francis Lemarque (le chanteur des rues), Jacques Monod (l’abbé Fauh), Yves Vincent (l’évêque Montagne), Fernand Guiot (M. Roméo), Monique Lejeune (Mme Roméo), Louise Conte (la Mère supérieure), Hélène Duc (marquise d’Ébourifol), Margo Lion (Mme Euréka), Ange Louis Lucciardi (comte de Montempré).
Synopsis : Fringant jeune sous-lieutenant des armées napoléoniennes, Anthelme Collet a découvert que seul un titre nobiliaire permet d’être considéré et se fait donc passer pour le fils d’un marquis de Collet (« si la vertu est inutile, le titre est indispensable »). Blessé lors d’une escarmouche, il passe sa convalescence chez un curé, décide de se faire moine et donne des leçons à la ravissante fille d’un ministre, Antonietta. Il endosse ensuite l’identité du capitaine Tolosani, disparu en haute mer avec son navire, jusqu’au jour où il rencontre le véritable marin, toujours de ce monde. Il s’enfuit au château de Fantanarosa où, devenu baron von Tizbruck, il séduit la bonne société, puis, flanqué de sa compagne Francesca et de ses deux complices, Austerlitz et Angelo, il se transforme en abbé Glidi. Ses escroqueries le mènent ensuite en prison à Grenoble, puis à Savone, où il se fait passer pour le général Cruzeilles, ami personnel de Napoléon à la quête d’un manoir pour ses vieux jours. Sous l’identité de Mgr Pasqualini, évêque de Manfredonia et cousin du cardinal Fesch (l’oncle de Napoléon), il parvient à collecter auprès de jeunes et belles paroissiennes des fonds pour la reconstruction du Saint-Sépulcre à Nice et s’évapore avec le pécule.
Ainsi que le précise le scénariste Georges Coulonges, le sympathique brigand gentilhomme de ce feuilleton n’a rien à voir avec l’authentique Anthelme Collet (1785-1840), une crapule pédophile qui défraya la chronique criminelle de l’Empire et dont les Mémoires (parues en 1836) ont cependant servi de matière première. Déserteur de l’armée française après le siège de Gaète en 1806, il se fit passer successivement pour moine, pour marquis, pour un officier décoré de la Légion d’honneur et même pour un inspecteur général aux Armées. La majorité de ses victimes étaient des militaires, des ecclésiastiques et des banquiers. Il fut arrêté et condamné aux travaux forcés en 1820 et mourut seize jours avant d’être libéré. L’escroc aurait été un des modèles de Balzac pour son personnage de Vautrin. À la télévision, il n’est plus qu’un pittoresque mélange de Casanova et d’Arsène Lupin, héros d’une série au rythme trop langoureux pour séduire les spectateurs. En outre, Coulonges a retiré du texte d’origine les critiques de la guerre.
1984*(tv) Les Capricieux (FR) de Michel Deville
Charles Brabant/TF1-Hamster Production-SFP (TF1 14.4.84). – av. Nicole Garcia (Diane de Malicorne), Jean-Pierre Marielle (Simon, vicomte de Vimoutiers), Christian Benedetti (Jacques), Richard Fontana (Ludovic), Thierry Frémont (Gustave), Jean-Louis Grinfeld (M. Georges, policier), Rosette (Pazanne), Brigitte Rouan (Pélagie), Patrick Laval (le capitaine), Alain Lenglet (le soldat), Alain Spielvogel (le policier).
Synopsis : Normandie vers 1805. Voisins, Diane et Simon, deux aristocrates campagnards unis par une belle amitié amoureuse et préoccupés avant tout de jardinage, feignent l’insouciance tout en sachant leur bonheur sensuel et léger menacé : Napoléon point sous Bonaparte et c’est la fin de la douceur de vivre. Leur destin bascule avec l’arrivée de Ludovic, un révolutionnaire polonais qui complote contre l’Empire à Paris. Par jeu, ils le cachent, soignent ses blessures et conspirent à ses côtés, sans se douter que leur nouveau voisin, Monsieur Georges, est un agent de Fouché. À la fin d’un bel été, ces naufragés de l’Ancien Régime, « émigrés de l’intérieur », vont bravement à la mort – comme ils ont vécu : insouciants et étonnés, hors du temps, heureux d’avoir pu construire à deux un monde à l’abri de la bêtise et de l’avarice.
Un marivaudage doux-amer dans une Arcadie bocagère qui peut paraître comme une apologie de la monarchie et que Michel Deville (pour son premier travail à la télévision) et sa scénariste, Anne-Marie Damamme, illustrent en horticulteurs délicats, avec émotion et gravité, quitte à heurter quelques sensibilités républicaines. La mise en scène de Deville – orfèvre du superbe Raphaël ou le débauché en 1970, situé dans la France de la Restauration – en est aussi élégante que légère, même si « son bouquet si bien composé se révèle, au bout du compte, une couronne funéraire » (Gilbert Salachas, Télérama, 11.4.84). Filmé en extérieurs au manoir de Senneville (Amfreville-sous-les-Monts, Haute-Normandie).
1995(tv) Muz v pozadí [= L’Homme de l’ombre] (CZ) de Pavel Hása
Ceská Televize (CT 7.12.95), 308 min. / 4 x 77 min. – av. Frantisek Nemec (Joseph Fouché), VACLAV POSTRANECKY (Napoléon), Petr Kostka (Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord), Lenka Stopalová (Joséphine de Beauharnais), Milos Hlavica (Joseph Bonaparte), Ladislav Frej (Paul Barras), Josef Vinklár (Joseph Emmanuel Sièyes), Jan Novotny (Maximilien de Robespierre), Borivoj Navrátil (Anne-Jean Savary), Ttjana Medvecká (Bonne-Jeanne Fouché-Coignaud, l’épouse), Vladímir Javorsky (son fils), Barbora Lukesová (sa fille), Mahulena Bocanová (Dorothée von Biron, princesse de Courlande et duchesse de Dino), Jan Hartl (Philippe Ferney), Kamil Halbich (Edmond), Jiri Capka (Lambert), Radovan Lukavsky (le narrateur).
Un feuilleton télévisuel tchèque sur la vie du sinistre Fouché, duc d’Otrante, caméléon politique, bon élève de Machiavel, régicide, boucher de Lyon sous la Terreur, ministre intrigant de la Police durant le Consulat et l’Empire et ambassadeur de Louis XVIII. Le scénario de Frantisek Pavlicek s’inspire librement de la célèbre biographie de Stefan Zweig (1929) sur le fondateur de la police secrète moderne.
2000*Quills (Quills, la plume et le sang) (US) de Philip Kaufman
Fox Searchlight Pictures-Industrial Entertainment-Walrus & Ass., 124 min. – av. Geoffrey Rush (Donatien Alphonse François, marquis de Sade), Kate Winslet (Madeleine LeClerc), Joaquin Phoenix (l’abbé François Simonet de Coulmier), Michael Caine (Dr. Royer-Collard), Billie Whitelaw (Mme LeClerc), Amelia Warner (Simone Royer-Collard), Jane Menelaus (Renée-Pélagie de Sade), Stephen Moyer (Prouix), Stephen Marcus (Bouchon), RON COOK (Napoléon).
Les dernières années du marquis de Sade (1740-1814) – au stade terminal de ses frasques sado-maso – à l’asile d’aliénés de Charenton que dirige le bienveillant abbé Coulmier. Estimant que Justine ou Les Malheurs de la vertu est « le livre le plus abominable jamais écrit par un esprit dépravé », le Premier Consul fait emprisonner son auteur en 1801. À la demande de la famille, Sade est transféré à Charenton en 1803 et neuf ans plus tard, Napoléon ordonne son internement indéfini. Sade corrompt les plus vertueux, séduit Madeleine LeClerc, 14 ans. L’abbé lui-même finira interné après la mort du marquis, tandis que l’opportuniste Royer-Collard s’enrichira en publiant ses livres sulfureux. Philip Kaufman (L’Insoutenable légéreté de l’être, 1987) filme la pièce à succès de Doug Wright (aussi scénario) aux studios de Pinewood et dans l’Oxfordshire anglais (Royal Naval College de Greenwich, Mentmore Towers, Oxford), et, pour les extérieurs de l’asile de Charenton, au manoir de Luton Hoo (Bedforshire). Geoffrey Rush fait un Sade déjanté, perruque au vent et regard égrillard ; Ron Cook a déjà interprété Napoléon dans la série des Sharpe en 1994 (cf. p. 299). Sorti au festival de Telluride, le film est nominé trois fois à l’Oscar (Geoffrey Rush, décors et costumes).
2002(tv) La vie quotidienne sous Napoléon / La France étonnante de Napoléon (FR) de Philippe Allante
Magazine « E=M6 Histoire », VM Group-Métropole Télévision (M6 17.12.02), 120 min. – av. Mac Lesggy (présentation). – Le quotidien des Français sous l’Empire illustré de manière ludique par des reconstitutions avec comédiens anonymes, des extraits de films et des images de synthèse en 3D. Sujets abordés : la jet-set de l’Empire, les grands travaux d’urbanisme de Napoléon, épouses et concubines, Bonaparte au pays des pharaons, la vérité sur la campagne de Russie, Napoléon assassiné ? Avec la présence en plateau de Jean Tulard, Laurent Joffrin, Jean-Henri Servat, Pierre-André Hélène, Laetitia De Witt, Thierry Lentz, Oleg Sokolov, etc.
2005La Dictée à Daru (FR) de Vincent Lecrocq
Bernard Lecrocq/Yellow Spot Films, 9 min. – av. BABAK ESKINI (Napoléon), Tony Librizzi (le comte Pierre Daru), Christian Geffroy (Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord), Vincent Domenach (maréchal Louis-Alexandre Berthier), Samuel Paploray (gén. Armand de Caulaincourt), Thierry Caudron (officier de liaison).
France, le 13 août 1805. Napoléon est sur le point d’envahir l’Angleterre quand il apprend que sa flotte est bloquée par les Anglais à Cadix et que les armées austro-russes font mouvement vers la France. Forcé de modifier ses plans, il s’enferme dans son cabinet avec le comte Pierre Daru (1767-1829), intendant général de la Maison militaire de l’Empereur ; d’un seul trait, il lui dicte le plan de campagne qui doit permettre de faire « pirouetter » (selon son expression) toute l’armée de Boulogne et la stratégie qui aboutira à la victoire d’Austerlitz. – Sympathique travail d’amateur tourné à Paris (siège d’Aliaxis) et à Boulogne.
2006(tv) Napoleon : Steel Monster (US) de Penny Fearon et Mark Cannon
Série « Engineering an Empire » (saison 1, épis. 10), Penny Fearon, Randy Martin/KPI Prod.-Kraylevich Prod.-Mechanism Digital (History Channel 18.12.06), 44 min. – av. JOHN HILL (Napoléon), Ed Avila (Sébastien de Vauban), Sam Kalidi (Jean-Baptiste Colbert), J. D. Brown, Marc Charles Cancassi et Mitchell Speert (des grenadiers de l'Empire), Michael Carroll (narration), Peter Weller (présentation).
Docu-fiction : récit de la construction de l’Arc de Triomphe de l’Étoile. Au lendemain de la bataille d’Austerlitz, Napoléon ordonne par un décret impérial en date du 18 février 1806 la construction de ce monument consacré à perpétrer le souvenir des victoires des armées françaises. La construction sera interrompue pendant la Restauration, reprise par Louis XVIII en 1824 et achevé sous Louis-Philippe en 1836 ; ce dernier et Adolphe Thiers décident du choix des thèmes et des sculpteurs.
2010(tv) Les Méchantes (FR) de Philippe Monnier
Gérard Jourd’hui, Gaëlle Girre/France 2-France Télévisions-CNC-TV5 Monde (FR2 17.11.10), 90 min. – av. Marie-Anne Chazel (Mlle Lecomte, la comtesse), Evelyne Bouix (Mlle Léonide de Saint-Robert), Pierre Arditi (Claude), Régis Laspalès (M. Corcellet), Alain Doutey (Dazincourt, directeur du théâtre), Benjamin Lavernhe (M. de la Resnois), Juliette Roudet (Francine Jambe Légère), Blandine Bellavoir (Mariette), éRIC MOREAU (silhouette muette de Napoléon), Fred Bianconi (Georges), Alban Aumard (Gino), Valéry Schatz (l’officier de la Garde impériale).
Synopsis : En 1804, deux divas vieillissantes de la Comédie-Française, Mademoiselle de Saint-Robert et Mademoiselle Lecomte, cherchent à accroître leur pouvoir sur scène afin d’obtenir les faveurs de l’Empereur. Les représentations de l’ Horace de Corneille sont mouvementées, la lutte est sans merci, tous les coups bas sont permis les soirs où la rumeur prévoit la visite de Napoléon. Les deux harpies sont encouragées en cela par leurs clans respectifs et un public assidu que leurs affrontements incessants divertit. Elles vont ainsi favoriser involontairement l’ascension d’une jeune figurante ambitieuse qui finira par prendre leur place dans l’Andromaque de Racine – et dans le cœur de leur vieil amant et ami, Claude. Mais l’union faisant la force, elles finiront par se réconcilier pour mieux se venger de la donzelle.
Un sujet de comédie semi-bouffonne d’Anne Andréi et Gérard Jourd’hui, assez proche de celui de Les Comédiennes, le sketch tiré des Amours célèbres de Michel Boisrond en 1961 (cf. supra), et qui signale accessoirement la passion de Napoléon pour le théâtre classique ... et son goût pour les actrices. Tournage en décors naturels au Château de la Petite Malmaison, au Théâtre et au jardin du Palais Royal ainsi qu’au domaine national de Saint-Cloud.
2015® Francofonia (FR) d'Alexandre Sokourov; Idéale Audience-Musée du Louvre, 90 min. - av. VINCENT NEMETH (Napoléon). - Une promenade-découverte à travers le Musée du Louvre à Paris et l'histoire de la France, sur le modèle de L'Arche russe, aussi de Sokourov (2002). En 1940, Jacques Jaujard, directeur du musée, et le comte Franz von Wolff-Metternich, à la tête du Kunstschutz, unissent leurs forces afin de préserver les collections. Sélection officielle de la Mostra de Venise.
2015(tv) La Petite Histoire de France (FR) de Vincent Bergevin et Jonathan Barré
Jamel Debbouze, Olivier Rodot/De père en fils productions-Kissman Productions (W9 28.11.15 etc.). - av. David Salles (Jean Plancher, cousin par alliance de Napoléon), Karina Marimon (sa femme Renata Plancher, cousine de Napoléon). - En 1810, Jean Plancher et sa femme Renata tiennent une auberge, "Chez Bonaparte", avec leurs fils Baptiste à Paris, Faubourg Saint-Honoré. Renata est la cousine de l'empereur et Jean se plaint qu'une fois arrivé au pouvoir, Napoléon ait décidé de ne plus avoir aucun égard envers eux... Une suite de petites scènes humoristiques un peu trop répétitives (2 à 3 min.) se déroulant sur 241 épisodes, écrites par Debbouze, Laurent Thiphaine et Frank Cimière.
2017(tv) Napoleons deutscher 007 : Karl Ludwig Schulmeister (Charles Louis Schulmeister, maître-espion de Napoléon) (DE) d'Ute Bönnen et Gerald Endres
Jasmin Gravenhorst/doc.station-ZDF-Arte (Arte 8.10.17), 53 min. - av. Jörg Hartmann (narration). - Docu-fiction avec acteurs anonymes et des images des batailles d'Ulm et d'Austerlitz extraites du Napoléon d'Yves Simoneau (2002).
2018** Le Retour du héros (FR/BE) de Laurent Tirard
Marc Dujardin, Olivia Lagache/JD Prod-Les Films sur Mesure-StudioCanal, 90 min. - av. Mélanie Laurent (Élisabeth Beaugrand), Jean Dujardin (cpt. Charles-Grégoire Neuville), Noémie Merlant (Pauline), Evelyne Buyle (Mme Beaugrand), Christian Bujeau (M. Beaugrand), Fabienne Galula (Eugénie), Christophe Montenez (Nicolas Bonvallet), Féodor Atkine (le gén. Mortier-Duplessis [Édouard Mortier?]), Guillaume Denaiffe (son aide de camp), Laurent Bateau (M. Dunoyer).
De 1809 à 1814, les aventures et méfaits du capitaine des hussards Neuville, déserteur fanfaron et coureur de jupons adoré des femmes. L'intelligente Élisabeth est certaine que le fiancé de sa soeur, le capitaine Neuville, est un homme sans scrupules qui ne tiendra pas ses engagements ni sa promesse d'écrire à la jeune fille alors qu'il part en guerre en Prusse. Elle s'improvise donc Cyrano, écrit à la place du soldat, y prend goût, puis fait mourir sa créature épistolaire sur le champ d'honneur. Mais le vrai capitaine revient. Élisabeth est prise à son propre piège, dépassée par les événements. Commence alors un duel à fleurets mouchetés entre le lâche héros d'opérette et la femme de tête, jusqu'au moment où les troupes russo-autrichiennes envahissent la France et que Neuville se révèle plus courageux et malin que prévu; affrontant seul un régiment de cosaques, il parvient à les attirer sous le feu de l'artillerie française. C'est le héros du jour, mais lorsqu'il est remobilisé dans les hussards, il s'enfuit à la joie d'Élisabeth (scénario de Laurent Tirard et Grégoire Vigneron). "Un piquant marivaudage en costumes : d'un côté, un homme dans toute sa fausse splendeur, couard et prétentieux jusqu'au grotesque, de l'autre une femme bien plus moderne que ses dentelles d'époque. Ils cavalent de jardin en salons, dans une joute incessante de dialogues mordants, écrits avec une précision devenue rarissime dans les comédies actuelles" (Télérama, 19.12.18). Une comédie pas si romantique - dans la lignée du cinéma de Jean-Paul Rappeneau ou Philippe de Broca - qui suggère que rien ne vaut un bon partenariat en affaires ! Dujardin est impeccable dans son incarnation de militaire pleutre et vantard. Tournage en mai-juillet 2017 au château du Nandy près de Paris, aux château de Grosbois à Boissy-Saint-Léger, de Vaugien à Saint-Rémy-lès-Chevreuse, de Courances (Essonnes), au manoir des Carneaux à Bullion (Yvelines), à Gerberoy (Oise) et à Ambleville (Val-d'Oise). - US, GB: Return of the Hero, DE: Die Rückkehr des Heldens, IT: Il ritorno dell'eroe, ES: Un seductor a la francesa.