II - L’EMPIRE BRITANNIQUE

6. L’EMPIRE COLONIAL BRITANNIQUE : ÉGYPTE ET PROCHE-ORIENT

Les régiments britanniques piègés par l’armée du Mahdi (« The Four Feathers » de Zoltan Korda, 1939)

6.2. Le soulèvement intégriste au SOUDAN oriental (1881 à 1898)

Le coup d’Etat militaro-nationaliste du colonel Ahmed Bey Urabi en Egypte, en septembre 1881, déclenche un vaste soulèvement islamiste au Soudan, une « guerre sainte » dirigée contre l’Empire britannique et ses alliés égyptiens et menée par Mohammed Ahmed ibn Abd Allah (1843-1885), un illuminé assoiffé de pouvoir qui se fait passer pour le « Mahdi » (le juge des derniers temps, selon l’eschatologie musulmane). Les insurgés s’emparent de Khartoum après dix mois de siège ; le général Charles Gordon, chargé par Londres de protéger et rapatrier les Européens, y trouve la mort (26 janvier 1885). Son assassinat est vengé par Lord Herbert Kitchener qui reprend Khartoum en 1898, écrase les troupes mahdistes à la bataille d’Omdourman et conquiert tout le Soudan, décrété désormais condominium anglo-égyptien.
Les dix-sept ans de conflit soudanais servent de cadre à plusieurs romans portés à l’écran, parmi lesquels « The Light Has Failed / La Lumière qui s’éteint » (1890) de Rudyard Kipling, « W pustyni i puszczy / Au Désert et dans la brousse » (1912) de Henryk Sienkiewicz, et tout particulièrement « The Four Feathers / Les Quatre Plumes blanches » d’Alfred Edward Woodley Mason (1902).
1916The Light That Failed (La Lumière qui s’éteint) (US) d’Edward José 
E. José Prod.-Pathé Exchange (Production Le Coq d’Or), 5 bob./1250 m. – av. Robert Edeson (Dick Hedlar), Jose Collins (Bessie Broke), Lillian Tucker (Maisie Wells). Claude Fleming (Torpenhow).
Blessé à la tête lors des combats au Soudan, le dessinateur de presse Dick Heldar retourne à Londres où il exerce le métier de peintre ; ses toiles chantent les exploits guerriers sous les ordres de Lord Kitchener. Réalisant que sa vue baisse irrémédiablement, il crée son chef-d’œuvre intitulé « Melancholia » pour lequel la prostituée amoureuse Bessie lui sert de modèle. Il devient aveugle, et, jalouse, Bessie détruit son tableau. Dick rejoint alors son régiment au Soudan où il est tué par une balle perdue en pleine bataille. Dans cette première adaptation du roman de Rudyard Kipling, Maisie, l’amie d’enfance de Dick, le rejoint au Soudan et meurt avec lui sous le feu des insurgés. Tourné en extérieurs sur Fayerweather Island à Bridgeport (Connecticut).
1917The Life of Lord Kitchener (GB) de Rex Wilson et W. Dane Stanton 
Windsor Pictures, 2021 m. – La carrière du maréchal Horatio Herbert Kitchener (1850-1916), membre de l’expédition de Khartoum pour sauver Gordon (1885), commandant en chef de l’armée d’ Egypte en 1892 chargé de venger la mort de Gordon au Soudan, vainqueur d’Omdourman, gouverneur du Soudan, adversaire des Français lors de la crise de Fachoda, et vainqueur de la Seconde Guerre des Boers (1899-1902). Le plus populaire des chefs militaires de l’Empire britannique.
1916Four Feathers (US) de James Searle Dawley 
Dyreda Art Film Corp.-Metro Pictures, 5 bob. – av. Howard Estabrook (capt. Harry Faversham), Edgar L. Davenport (gén. Faversham), Arthur Evers (capt. John Durrance), David Wall (Abou Fatma), Irene Warefield (Ethne Eustace), George Moss (Mr. Eustace), Fuller Mellish (lieut. Sutch), Ogden Child Jr. (Harry adolescent), David Wall.
Quoique destiné à la carrière militaire, Harry Faversham est un jeune homme sensible et réservé qui passe pour un lâche. En 1884, quand son régiment est envoyé au Soudan, il donne sa démission pour rester auprès de sa fiancée ; ses trois amis, Durrance, Trench et Castleton, lui envoient chacun une plume blanche, symbole de couardise. Sa fiancée lui tourne le dos, son père le rejette. Harry réagit en apprenant la disparition de Trench, capturé par les fanatiques du Mahdi. Il part incognito pour le Soudan, où, se faisant passer pour un indigène muet, il va sauver un à un ses camarades en mauvaise posture (captifs à Omdurman, Durrance rendu aveugle par le soleil) et servir glorieusement l’Empire. Première adaptation du roman de A. E. W. Mason, extérieurs tournés en Egypte.
1921The Four Feathers (GB) de René Plaissetty 
Stoll Picture Productions (Sir Oswald Stoll), 2040 m. – av. Harry Ham (Harry Faversham), Mary Massart (Ethne Eustace), Cyril Percival (John Durrance), Henry Vibart (gén. Faversham), Tony Fraser. – Première version britannique du roman (cf. 1916), tournée aux studios de Cricklewood et en extérieurs en France et en Algérie (Biskra).
1923The Light That Failed (US) de George Melford 
Famous Players-Lasky Corp.(Paramount), 70 min. – av. Percy Marmont (Dick Heldar), Jacqueline Logan (Bessie Broke), David Torrence (Torpenhow), Sigrid Holmquist (Maisie Wells), Mabel Van Buren (Mme Binat), Luke Cosgrave (Binat). – Le roman de Kipling (cf. 1916).
1929*The Four Feathers (Les Quatre Plumes blanches) (US) de Merian C. Cooper, Ernest B. Schoedsack, Lothar Mendes 
Schoedsack-Cooper/Paramount Pictures (Zukor-Lasky), 8 bob. – av. Richard Arlen (Harry Faversham), Fay Wray (Ethne Eustace), Clive Brook (John Durrance), William Powell (capt. William Trench), Noah Beery (marchand d’esclaves), Theodore von Eltz (lieut. Castleton), Noble Johnson (Ahmed), George Fawcett (col. Faversham), E. J. Ratcliffe (col. Eustace), Augustin Symonds (col. Sutch), Philippe De Lacy (Harry jeune).
Créateurs de documentaires sensationnels fictionnalisés en Asie (« Grass », « Chang »), Schoedsack et Cooper se tournent pour la première fois vers la fiction (leur prochain film sera le mythique « King Kong »), dans cette ultime version muette du roman de Mason (cf. 1916), ornementée d’effets sonores et d’une partition musicale. Tournage dans le désert près de la Mer Rouge (Wadi Rum) avec plusieurs milliers de figurants, en Afrique centrale (la charge des hippopotames, le feu de brousse, le soulèvement de tribus noires), aux Buttercup Dunes (Imperial County, Calif.), à Cathedral City près de Palm Springs (le fort anglais) et aux studios Paramount. Le jeune David O. Selznick, superviseur de la production, charge Lothar Mendes de réaliser diverses scènes additionnelles violemment contestées par Schoedsack-Cooper.
1938/39***The Four Feathers (Les Quatre Plumes blanches) (GB) de Zoltan Korda 
London Films (Alexander Korda), 129 min. – av. John Clements (Harry Faversham), Ralph Richardson (capt. John Durrance), C. Aubrey Smith (gén. Burroughs), June Duprez (Ethne Burroughs), Allan Jeayes (gén. Faversham), Jack Allen (lieut. Arthur Willoughby), Donald Gray (lieut. Peter Burroughs), Frederick Culley (Dr. Sutton), Archibald Batty (adjud. Lubbock), Derek Elphinstone (lieut. Parker), John Laurie (le Mahdi), Amid Taftazani (Karaga Pacha), Major John Knott (Lord Herbert Kitchener).
La plus célèbre des adaptations du roman de A. E. W. Mason (cf. 1916), filmée par les frères hongrois Korda (Alexandre, Zoltan et Vincent pour les décors), tous trois nostalgiques de l’ancienne gloire de l’Empire et séduits par des sujets exotiques. Le film est réalisé enTechnicolor (photo : Jack Cardiff) aux studios de Denham et en extérieurs au Soudan (Khartoum, rive orientale du Nil, gorge de Sabaloka), avec une figuration impressionnante ; André de Toth est assistant à la production. La grande bataille contre les Fuzzy Wuzzies restitue scrupuleusement les tactiques militaires d’antan (carrés de fusiliers, cavalerie au centre). Les images très spectaculaires tournées sur place seront réutilisés dans plusieurs autres films britanniques. Malgré son sujet « impérialiste » (le bon indigène a besoin de l’Anglais, tandis que les rebelles ne sauraient être que rusés, cruels, fanatiques religieux), le script très habile de R. C. Sherriff ne manque pas d’ironie (la caste des hauts gradés est joliment brocardée) et évite tout sous-texte trop ouvertement colonisateur : ce n’est pas par patriotisme que Faversham s’engage, mais pour prendre une revanche personnelle. Ces réserves mises à part, un grand film d’aventures, efficace, haletant, et un triomphe tant critique que commercial amplement mérité.
1939**The Light that Failed (La Lumière qui s’éteint) (US) de William A. Wellman 
Paramount, 98 min. – av. Ronald Colman (Dick Heldar), Walter Huston (Torpenhow), Muriel Angelus (Maisie Wells), Ida Lupino (Bessie Broke), Dudley Digges (Nilghai).
Dans cette version du roman mélodramatique de Kipling (cf. 1916), la plus fameuse, la plus poignante et sans doute la plus aboutie, Dick Helder, aveugle, de retour dans son régiment au Soudan, demande à son vieil ami Torpenhow de le hisser sur un cheval au moment de la bataille. Il est tué pendant la charge des lanciers contre les insurgés du Mahdi. Un des meilleurs rôles de Ronald Colman, avec une surprenante Ida Lupino (Colman voulait Vivien Leigh, mais son réalisateur s’y opposa, d’où un tournage orageux). Wellman filme ses batailles soudanaises au Nouveau Mexique (région de Black Mesa, Santa Fe, Espanola, Ghost Ranch à Abiquiu), le reste aux studios Paramount.
1949(tv) The Light That Failed (US) de Paul Nickell 
« Studio One » (CBS 10.10.49), 60 min. – av. Richard Hart (Dick Helder), Felicia Montealegre (Bessie Broke). – Le roman de Kipling (cf. 1916).
1953(tv) The Gathering Night (US) de James Sheldon 
John Haggott Prod., « Studio One » (CBS 24.8.53), 60 min. – av. Christopher Plummer (Dick Helder), Melville Cooper (Torpenhow), Gaby Rodgers (Bessie Broke), Margaret Phillips (Maisie Wells), Martyn Green. – D’après « The Light That Failed » de Kipling (cf. 1916).
Les troupes égypto-britanniques sont décimées par la révolte du Mahdi (« Kharthoum » de Basil Dearden, 1966)
1955*Storm over the Nile (Les Quatre Plumes blanches) (GB) de Terence Young et Zoltan Korda 
Zoltan Korda/London Film (Alexander Korda)-Big Ben Films Ltd., 107 min. – av. Anthony Steel (Harry Faversham), Laurence Harvey (John Durrance), James Robertson Justice (gén. Burroughs), Mary Ure (Mary Burroughs), Ronald Lewis (Peter Burroughs), Ian Carmichael (Tom Willoughby), Geoffrey Keen (Dr.Sutton), Michael Hordern (gén. Feversham), Christopher Lee (Karaga Pacha, le gouverneur).
Cette cinquième mouture de « The Four Feathers » (cf. 1916) reprend le scénario signé R. C. Sherriff du film de 1939 et la majorité des scènes de combat, mais elle est cette fois filmée en CinemaScope et Technicolor (tournage aux studios de Shepperton et au Soudan, de janvier à mars 1955). Un souffle indéniable, plus de réalisme et de crédibilité, notamment dans les scènes de désert (Laurence Harvey et Mary Ure, dont c’est le premier film, sont excellents). Quoique officiellement co-réalisateur, Terence Young regarde Zoltan Korda diriger une bonne partie du film (selon Christopher Lee).
1961(tv) The Light That Failed (US) de Marc Daniels
(CBS 16.3.61), 60 min. – av. Richard Basehart (Dick Heldar), Eric Berry (Torpenhow), Susan Harrison (Maisie Wells), Helena De Crespo (Bessie Broke), Edward Atienza (Kami), Joan Fontaine, George Turner. – Le roman de Kipling (cf. 1916).
1964East of Sudan (A l’Est du Soudan) (GB) de Nathan Juran 
Charles H. Schneer/Columbia-Ameran, 94 min. – av. Anthony Quayle (Richard Baker), Sylvia Syms (Margaret Woodville, la gouvernante), Jenny Agutter (Asua), Derek Fowlds (lieut. Murchison), Johnny Sekka (Kimrasi), Harold Coyne (major Harris).
En 1885, la lutte de Gordon contre l’esclavage provoque le soulèvement du Mahdi, dont les hommes détruisent la cité de Barash. Baker, un vétéran de l’armée britannique, et Murchison se chargent de sauver Asua, la fillette de l’émir local assassiné, ainsi que sa gouvernante. Leur descente du Nil est périlleuse, mais en arrivant en vue de Khartoum, assiégée par le Mahdi, ils se joignent aux renforts anglais fraîchement débarqués et libèrent la ville. (Une erreur grossière : les renforts arrivèrent trop tard, Khartoum ne fut repris par les Anglais que 13 ans plus tard.) Filmé en Techniscope et Technicolor aux studios de Shepperton avec un déluge de transparences et des emprunts massifs à « The Four Feathers » de Korda (1939). Nathan Juran dispose de quinze jour pour bricoler ce rafistolage en même temps que "Siege of the Saxons", autre production de Schneer qui pique, elle, ses scènes d'action à "The Black Knight" (1954) de Tay Garnett.
1966(tv) Gordon of Khartoum (GB) de Rudolph Cartier 
BBCtv « Play of the Month » (BBC 18.1.66), 90 min. – av. Alan Badel (gén. Charles Gordon), Charles Carson (William E. Gladstone), Peter Ashmore (W. T. Stead), Faith Hines (Mary), Dorothy Black (Augusta Gordon), Redmond Phillips (Headley), David Hutcheson (Gén. de Coetlogan), Ron Blackman (Khalil Orphali), John Franklyn-Robbins (col. J. D. H. Stewart), Dan Jackson (Faregh Bey), Gladys Spencer (la reine Victoria), Bruno Barnabe (Bordeini), Cyril Shaps (Herbin), Gregory Phillips (Willie Warren). – La mort du général Gordon en défendant Khartoum contre les derviches fanatiques du Mahdi.
1966***Khartoum / Battle for Khartoum (GB) de Basil Dearden [et Yakima Canutt, Eliot Elisofon] 
Julian Blaustein Prod.-United Artists, 134 min. – av. Charlton Heston (gén. Charles Gordon), Laurence Olivier (Muhammed Ahmed Ibn Allah, autoproclamé le Mahdi), Richard Johnson (col. J.D.H. Stewart), Ralph Richardson (William E. Gladstone), Alexander Knox (Sir Evelyn Baring), Michael Hordern (Lord Granville), Zia Mohyeddin (Zobeir Pacha), Nigel Green (gén. Lord Wolseley), Hugh Williams (Lord Hartington), Peter Arne (Lord Herbert Kitchener/Khedive Tawfiq Pacha), Douglas Wilmer (Khalifa Abdullah), Martin Benson (l’émir Abd El-Rahman).
En 1881, le Mahdi, chef charismatique et illuminé de l’insurrection soudanaise, a annihilé une armée égyptienne, puis massacré les huit mille hommes britanniques du colonel William Hicks à Obeid. Ne souhaitant pas embarquer le pays dans une aventure coloniale et opposé au lobby impérialiste, le Premier ministre Gladstone délègue inofficiellement le général Sir Charles Gordon (1833-1885), surnommé « le Chinois », héros national de la douteuse guerre de l’opium, à Khartoum pour y évaluer la situation. Mais celui-ci, une forte tête, reste sur place, fortifie la ville et décide de barrer la route aux cent mille hommes du Mahdi. Gladstone refuse d’envoyer une armée britannique sur place, alors que Gordon Pacha, militaire vaniteux, ambitieux, idéaliste et un peu mystique, réputé pour avoir mis fin à l’esclavage au Soudan, s’obstine à vouloir combattre l’avancée des fanatiques musulmans avec sa petite garnison de 13’000 hommes. Son adjoint Stewart tente d’évacuer les civils vers Le Caire, mais son bateau est intercepté sur le Nil par les rebelles et il est tué. Alertée, l’opinion publique en Grande-Bretagne bascule en faveur de Gordon et Gladstone se voit alors contraint d’envoyer les régiments du général Lord Wolseley à sa rescousse. Ils arrivent trop tard : après 317 jours de siège, les Soudanais ont envahi Khartoum, Gordon est transpercé par la sagaie d’un derviche. On apporte sa tête au Mahdi, qui voit la chose comme un mauvais présage… (il mourra cette même année).
Une superproduction de 6 millions de $ mise en chantier après le triomphe mondial du « Lawrence of Arabia » de David Lean, qui illustre avec un indéniable savoir-faire un chapitre peu flatteur de l’histoire anglaise. Le scénario de Robert Ardrey, intelligent, adroit, cumule les explications politico-stratégiques, inventant même deux tête-à-tête apocryphes entre Gordon et Gladstone d’une part, et entre Gordon et le Mahdi de l’autre. (Les détails de la mort de Gordon et sa décapitation sont également sujets à caution.) L’interprétation granitique de Charlton Heston ne fait pas justice à la nature complexe de Gordon (pédophile réprimé, religieux intégriste, dépressif et alcoolique), alors que Laurence Olivier, formidablement maquillé, campe un Mahdi impressionnant et forcément fanatique ... puisqu'il s'oppose à la présence "civilisatrice" des Anglais! Tout en questionnant plus d'une fois l'héroïsme sacrificiel de Gordon, dont l'entêtement fait des milliers de victimes, le film, par son panache spectaculaire, glisse insidieusement dans les clichés d'un certain cinéma colonialiste qui s'abstient de poser les questions de fond. Au final, Gordon est la victime "magnifique" de la politique pragmatiste de Londres comme Custer (à Little Big Horn contre les Sioux) celle de ses chefs corrompus à Washington. Le rôle de Gordon a d’abord été offert à Burt Lancaster, la réalisation à Lewis Gilbert, puis à Carol Reed, mais la situation politique incertaine au Soudan a retardé le tournage qui s’effectue en Ultra Panavision et Technicolor en Egypte (Al Minyal, Masshoona, Le Caire), à Londres (Marylebone Station) et aux studios de Pinewood et de Shepperton. Les remarquables séquences de batailles sont dirigées par Yakima Canutt avec 2500 soldats de l’armée égyptienne, les scènes d’introduction par Eliot Elisofon. Un joli succès en Grande-Bretagne, un accueil plus tiède aux Etats-Unis où le public n’est d'une part guère familier avec le sujet et d'autre part ébranlé par la guerre du Vietnam, donc moins réceptif à l'idéalisation manichéiste qu'offrent les grandes fresques épiques ("Laurence d'Arabie", justement, a introduit l'anti-héros dans le genre). Nominé à l’Oscar 1976 du meilleur scénario et au BAFTA Film Award (Ralph Richardson, décors).
1967(tv) Slatin Pascha (DE) de Wolfgang Schleif
(ZDF 19+20.5.67), 2 x 75 min. - av. Christian Ghera (Slatin Pacha), Kurd Pieritz (major Hunter), Günther Kieslich (colonel Wingate), Herbert Weicker (le Mahdi Muhammed Ahmed), Abach Antar (Zogal Bey), Fritz Schubert (le père Ohrwalder), Hermann Kiessner (Gordon Pacha / gén. Charles Gordon), Lutz Moik (Dr. Zurbuchen), Inge Osterloh (Khalifa), Ingo Osterloh (Khalifa), Stanislav Ledinek (Hamada Effendi), Helmut Hildebrand (Messedaglia), Jalal Bourgiba (Sultan Harun), Wolfgang Gunther (Hudson), Heinrich Gies (Lord Herbert Kitchener).
Les exploits de l'Anglo-Autrichien Rudolf Carl von Slatin, dit Slatin Pascha, cf. docu-fiction de 2017.
Churchill (Simon Ward) aux côtés de Lord Kitchener (John Mills) qui venge la mort de Gordon à Kharthoum (« Young Winston », 1972)
1970(tv) The Two and a Half Feathers (GB) de David Croft
série "Dad's Army" (saison 4, épis. 8) (BBC 13.11.70), 30 min. - av. Arthur Lowe (cpt. George Mainwaring), John Le Mesurier (sgt. Arthur Wilson), Clive Dunn (cpr. Jack Jones), John Laurie (James Frazer), ArnoldRidley (Charles Godfrey), Ian Lavender (Frank Pike), Wendy Richard (Edith), James Beck (Joe Walker). - Variante cynique du roman "The Four Feathers".
1972® Young Winston (Les Griffes du lion) (GB) de Richard Attenborough
– av. Simon Ward (Winston Churchill), Robert Shaw (Lord Randolph Churchill), John Mills (Lord Herbert Kitchener). – Fougueux, ambitieux et indiscipliné, le jeune Churchill s’illustre à la bataille d’Omdourman, le 2 septembre 1898, sous les ordres de Lord Kitchener qui le déteste. 8000 Britanniques et 16’000 supplétifs égyptiens y font face à 60’000 derviches. Une belle charge de cavalerie filmée au Maroc. Le film omet toutefois de préciser que la bataille ne fut pas un corps à corps furieux dans lequel se seraient illustrés les lanciers britanniques (comme le présentèrent les gravures de propagande), mais une boucherie sans gloire occasionnée par les mitrailleuses Maxim, qui ne firent pas moins de 11’000 tués et autant de blessés chez les mahdistes (ils ne purent même pas approcher les lignes ennemies) et seulement 48 tués dans le camp de Kitchener. En vérité, ce fut plus une exécution mécanique qu’une bataille. – cf. Angleterre : reine Victoria (3).
Le jeune Winston Churchill participe à la bataille décisive d’Omdurman en 1898 (« Young Winston », 1972)
1973(ciné+tv) W pustyni i w puszczy [A travers déserts et jungles] (PL) de Wladyslav Slesicki 
Film Polski, 190 min. (2 parties), 195 min. – av. Tomasz Medrzak (Stas Tarkowski), Monika Rosca (Nel Rawlison), Edmund Fetting (George Rawlison), Stanislaw Jasiukiewicz (Wladyslaw Tarkowski), Emos Bango (Kali), Malija Mekki (Mea), Ahmed Marei (Chamis), Zygmunt Maciejewski (Linde), Ahmed Hegazi (Gebhr), Ibrahim Shemi (Idris), Abdel Menam Abu El-Fatouh (le Mahdi), Jerzy Laskowski (Wladyslaw Tarkowski).
La traversée du Soudan par deux enfants, Stas, un petit Polonais et Nel, une Anglaise, enlevés pendant le soulèvement du Mahdi, 1883-1885. Gardés en otage, ils parviennent à s’évader et à rejoindre leurs parents, après mille aventures (d’après le roman de Henryk Sienkiewicz). Tourné en Bulgarie, en Egypte et au Soudan.
1978(tv) The Four Feathers (Les Quatres Plumes blanches) (GB/US) de Don Sharp 
Rosemont-Trident (NBC 1.1.78), 105 min. – av. Beau Bridges (Harry Feversham), Robert Powell (John Durrance), Simon Ward, Jane Seymour (Ethne Eustace), Harry Andrews (gén. David Feversham). – Sixième version, télévisée cette fois, du roman de Mason (cf. 1916), filmée en Espagne, à Almeria (Las Salinillas).
2001(ciné+tv) W pustyni i w puszczy / In Desert and Wilderness (PL) de Gavin Hood 
Waldemar Dziki/Vision Film Prod.-Telewizja Polska (TVP) (TVP 10.11.02), 111 min./tv : 3 x 45 min. – av. Adam Fidusiewicz (Stars Tarkowski), Karolina Sawka (Nel Rawlison), Mzwandile Ngubeni, Artur Zmijewski (Wladyslaw Tarkowski), Andrzej Strzelecki (George Rawlison), Krzysztof Kowalewski (Kalioupoli), Agnieszka Pilaszewska (Mme Olivier), Krzysztof Kolberger (Linde), Konrad Imiela (Chamis), Lingile Shongwe (Mea), Mzwandile Ngubeni (Kali). – Tourné en Namibie, en Afrique du Sud et en Tunisie d’après le roman de Henyk Sienkiewicz, cf. supra (1973).
Les Britanniques face aux armées du Mahdi au Soudan (« The Four Feathers » de Shekhar Kapur, 2002)
2002***The Four Feathers (Frères du désert / Les Quatre Plumes) (GB/US) de Shekhar Kapur 
Jaffilms-High Command-Miramax-Paramount, 132 min. – av. Heath Ledger (Harry Faversham), Wes Bentley (Jack Durrance), Djimon Hounsou (Abou Fatma), Kate Hudson (Ethne Eustace), Alex Jennings (col. Hamilton), Michael Sheen (William Trench), Rupert Penry-Jones (Tom Willoughby), Kris Marshall (Edward Castleton), Tim Pigott-Smith (gén. Faversham), Medhi Ouzzani (Hassan).
Septième version du roman surrané de Mason (cf. 1916), sérieusement retravaillée par le cinéaste indo-pakistanais Kapur (Oscar 1998 pour « Elizabeth »). Celui-ci lorgne vers le classicisme d’antan, mais dans une perspective révisionniste brocardant le racisme et le complexe de supériorité d’une classe amidonnée dans ses préjugés et son sens de l’honneur délicieusement poussiéreux. Kapur et son scénariste Hossein Amini confrontent le point de vue du colonialisme anglais et celui des anciens colonisés. Faversham s’engage non pour laver son honneur bafoué, mais pour sauver des amis. Sa traversée du désert ne lui rend pas seulement dignité, fiancée et amis, mais un frère de couleur nubien, superbement interprété par Djimon Hounsou. Une reconstitution très réaliste (la captivité dans la Maison de Pierre, les combats d’Abou Klea), sans esbroufe ni effets numériques, aux images souvent saisissantes. Kapur transforme la bataille d’Abou Klea (17 janvier 1885) où un corps expéditionnaire britannique de 1400 hommes parti à la rescousse de Gordon à Khartoum est attaqué par douze mille derviches du Mahdi en une défaite désastreuse pour les Anglais, alors que ce fut une victoire : 74 tués anglais contre 1100 tués soudanais en seulement un quart d’heure de combat. (L’uniforme britannique n’était du reste pas rouge, mais kaki, et bleu pour la cavalerie.) Filmé au Maroc (montagnes de Fint, Aït Ben Hobdou transformé en forteresse d’Abou Klea) et en Grande-Bretagne, aux studios de Shepperton, à Bledlow (Buckinghamshire), Blenheim Palace à Woodstock, à Highclere Castle (Berkshire) et à Londres (Greenwich, Old Royal Naval College, The Reform Club, Victoria and Albert Museum) pour un budget important de 80 millions de dollars.
2017(tv) Ein Wiener in der Wüste - Rudolf Slatin und der Aufstand des Mahdi / Aufstand in der Wüste: Die Herrschaft des Mahdi (La Révolte du Mahdi) (AT) de Robert Schotter
Série "Universum History", Uli Veith, Bernd Wilting/Taglicht Media-ORF-ZDF-Arte (ORF2 - 15.12.17 / ZDF 11.2.18) / Arte 17.10.20), 52 min. - av. Felix Phönix Lehmann (Rudolf Slatin dit Slatin Pacha), Eskindir Tesfay (Muhammed Ahmed ibn Allah dit le Mahdi).
Docu-fiction sur l'Anglo-Autrichien Rudolf von Slatin (1857-1932, anobli par François-Joseph en 1899) qui fit carrière dans l'armée britannique et fut nommé en 1881 gouverneur de la province de Darfur (au Soudan), puis fut réduit en esclavage après la chute de Khartoum. Il renia le christianisme, se fit musulman et parvint à s'échapper douze ans plus tard. Son récit (Fire and Sword in the Sudan. A Personal narrative of Fighting and Serving the Dervishes, co-écrit avec le major Francis Reginald Wingate, 1896) servit de justification pour une nouvelle campagne des Britanniques au Soudan en 1898 à laquelle il participa et qui s'acheva par la victoire d'Omdurman qui anéantit les mahdistes. Le film établit des parallèles avec Daech et les islamistes fanatiques du moment.