II - LE ROYAUME D’ANGLETERRE

19. CONTES, LÉGENDES ET RÉCITS sans références historiques précises

1901The King and the Jester [Le Roi et le bouffon] (GB)
Charles Urban/Warwick Trading Co. (London), 1 bob./16 m.
1909The Squire and the Noble Lord (US)
Charles Urban/Charles Urban Trading Company (New York)-Eclipse Film Company (Paris), 1 bob./436 ft.
Un chevalier et son amoureuse échappent à la convoitise d’un châtelain.
1909The Sword and the King (US)
Vitagraph Co. of America (New York), 293 m./302 m., 1 bob.
Un berger venge son père tué par le roi en s’emparant du trône de l’assassin.
1910The Cloister’s Touch (US) de David Wark Griffith
Biograph Company [American Mutoscope & Biograph Co.] (New York), 1 bob./993 ft./17 min. – av. Henry B. Walthall (le père), Marion Leonard (Elsa, la mère), Edith Haldeman (l’enfant), Arthur V. Johnson (le duc), Kate Bruce (la vieille femme), W. Chrystie Miller (le moine), Linda Arvidson, Verner Clarges, Mario Leonard, Frank Powell, Charles Craig, Frank Evans, Ruth Hart, Francis J. Grandon, Dell Henderson, Henry Lehrman, Owen Moore, Dorothy West.
Encouragés par le duc, des soldats enlèvent une jolie paysanne, Elsa, laissant l’époux et le fils en pleurs. Au château où le seigneur s’est emmouraché d’elle, Elsa peut avoir tout ce qu’elle veut et on l’autorise à chercher son enfant. Mais la ferme est désertée, le paysan a cherché refuge au monastère en emportant le petit. Elsa en perd la raison et meurt. Désespéré et écrasé par la culpabilité, le duc envisage le suicide, mais le poignard qu’il cherche se transforme en crucifix. Il décide de finir sa vie en pénitence au monastère. Il y retrouve le fermier, à présent son père confesseur qui, après un premier sursaut, lui pardonne chrétiennement. – Moralité filmée aux studios Biograph à East 14th Street avec la star Marion Leonard, surnommée « the Biograph Girl ».
1910The Call to Arms (US) de David Wark Griffith
Biograph Company [American Mutoscope & Biograph Co.] (New York), 1 bob./994 ft./17 min. – av. Henry B. Walthall (le Lord), Marion Leonard (Lady Regina, sa femme), Joseph Graybill (le cousin), Mary Pickford (le page), Alfred Paget (une sentinelle), Grace Henderson (une dame de la cour), Charles Arling, Linda Arvidson, Clara T. Bracy, William J. Butler, Verner Clarges, Edward Dillon, Francis J. Grandon, Owen Moore, Lottie Pickford, Mack Sennet (un soldat), Dorothy West (une tzigane).
Un seigneur féodal montre à son épouse, Lady Regina, et à son cousin un bijou de famille précieux provenant des Indes. Mobilisé dans l’armée du roi, il cache le bijou avant de partir à la guerre, mais le cousin, la convoitise attisée, en profite pour investir le château avec ses sbires ; Lady Regina envoie son page avertir l’époux du danger, mais le page perd du temps dans un camp tzigane et l’époux revient trop tard au château : enfermée dans le donjon et cherchant à échapper au félon, Lady Regina a fait une chute mortelle. Le cousin est à son tour tué par l’époux. – Tourné en juin 1910 dans le New Jersey à Lambert Castle, château tudorien érigé en 1892 par l’industriel Catholina Lambert à Paterson (Garret Mountain Reservation), avec la toute jeune Mary Pickford en page.
1911At Sword’s Point (US)
Adam Kessel, Charles O. Bauman/Reliance Film Co. (New York), 1 bob.
Une mère aide son fils à reconquérir le trône usurpé par son oncle.
1911The Black Knight (GB) de Charles Urban
Charles Urban Trading Company (London), 1 bob.
Deux chevaliers s’affrontent pour une damoiselle.
1912The Troubadour’s Triumph (US) de Lois Weber
William Swanson/Rex Motion Picture Company (New York)-Universal Film Mfg. Company, 1 bob. – av. Phillips Smalley (le troubadour), Cleo Ridgely (Lady Lilitha, la duchesse), William J. Sorelle (Sir Guy Lancaster), Wilbur Hudson (le bouffon).
Un troubadour sauve la vie du roi et de la duchesse Lilitha, attaqués par des brigands dans la forêt. Le roi invite son sauveur à la cour où Sir Guy Lancaster, amoureux éconduit de Lady Lilitha, le jalouse. Le chevalier découvre dans les affaires du troubadour une lettre de son propre frère adressée au roi et le dénonçant comme usurpateur : Lancaster s’est emparé des terres de son frère et celui-ci a chargé son fils déguisé en troubadour de dénoncer le félon et de remettre au roi divers bijoux de famille en guise de remerciements. Lancaster les confisque et les offre en cadeau nuptial à Lady Lilitha, mais le bouffon est témoin de ses manœuvres, remplace les bijoux par la lettre compromettante et la duchesse apprend ainsi toute la vérité ainsi que l’identité noble du troubadour qu’elle aimait sans espoir (film perdu). – Lois Weber, bientôt une des premières réalisatrices et scénaristes d’Hollywood (1879-1939), militante féministe, et son époux [Wendell] Phillips Smalley filment cette saynète médiévale en été 1912 aux studios Universal à Los Angeles. En 1914, Lois Weber sera la première cinéaste américaine à réaliser un long métrage (The Merchant of Venice, 1914, avec Smalley en Shylock) et affolera la censure locale avec Hypocrites.
La conversion d’un moine récalcitrant dans « The Vision Beautiful » (1912).
1912The Vision Beautiful (US) d’Otis R. Thayer
Colin Campbell, William Nicholas Selig/Selig Polyscope Co. (Los Angeles), 305 m. – av. Herbert Rawlinson (frère Paul), Tom Santschi (frère Pete), Hobart Bosworth (le Maître / le Christ), Betty Harte (une paysanne qui subit le fouet).
Un moine récalcitrant est confirmé dans sa voie spirituelle par la vision du Christ qui l’incite à persévérer dans l’aide qu’il apporte aux plus démunis et aux serfs malmenés de la paysannerie. Le poème The Theologian’s Tale : The Legend Beautiful de Henry Wadsworth Longfellow (1893) adapté par Eloise Bradshaw et filmé à Iverson Movie Ranch (Los Angeles).
1912The Knight and the Friar (US)
Harry Aitken/Majestic Motion Picture Co. (Los Angeles), 2 bob.
Au XIVe siècle, Sire Tristram fait la sérénade à Lady Alice, mais frère Tuck alerte le père de la belle qui appartient à une famille ennemie et il prend la fuite. Pour se venger, il s’empare de la bure du moine, entend la confession de Lady Alice amoureuse et force le moine à les marier.
1912The Legend of King Cophetua (GB) d’Elwin Neame
Elwin Neame, Cecil Hepworth/Ivy Close Films-Hepworth Manufactoring Company (Walton-on-Thames), 625 ft./200 m. – av. Ivy Close (la belle mendiante), Alec Worcester (le roi Cophétua).
Une ancienne ballade anglaise du XVIIe siècle (Crown Garland of Goulden Roses de Richard Johnson, 1612) : un roi s’éprend d’une mendiante et finit par l’épouser. L’épisode est mentionné dans cinq pièces de Shakespeare, chanté par Lord Alfred Tennyson (The Beggar Maid, 1833) et peint par l’artiste préraphaélite Edward Burne-Jones (King Cophetua and the Beggar Maid/Le Roi Cophetua et la Jeune Mendiante, 1884) ; il apparaît plus tard dans une nouvelle de Julien Gracq (recueil La Presqu’ile, 1970). L’actrice très populaire Ivy Close est l’épouse du fameux photographe, réalisateur et scénariste Elwin Neame ; ce sont les parents du cinéaste Ronald Neame, qui signera The Poseidon Adventure en 1972. – Nota Bene : The Beggar Maid / The Wolf’s Brush (US) de Bert Van Tuyle (1921, 27 min.) illustre comment Burne-Jones (Lloyd Peters) crée son célèbre tableau avec, pour modèle, la ravissante fille de son jardinier (Mary Astor).
1913Everyman (US) de David Miles
Kinemacolor Company (Hollywood), 2 bob. – av. Linda Arvidson (Everyman), William H. Brown, Clara T. Bracy, Omar Whitehead (la Mort).
La moralité attribuée au moine hollandais Peter van Diest (vers 1470) est construite sur des personnages allégoriques représentant l’humanité et ses choix pour atteindre le Salut : Everyman (Tout-le-monde) est chargé par Dieu de trouver des compagnons qui parcourront avec lui son chemin jusqu’à la tombe. L’adaptation moderne du texte par Peter Dorand date de 1901, due à l’Elizabethan Stage Society de William Poel (tournées en Angleterre, en Écosse et en Irlande, puis dès 1902 tournées aux États-Unis). La première adaptation au cinéma se fait avec le procédé bichrome Kinemacolor inventé par George Albert Smith à Brighton (pellicule noir et blanc projetée à travers des filtres rouge et vert). Avant d’être rachetée par David Wark Griffith, la succursale de Kinemacolor à Hollywood filme cette première version avec l’ex-épouse de Griffith, Linda Arvidson, à Iverson Ranch (Chatsworth, Los Angeles) et en intérieurs à Wattles Mansion (Hollywood).
1914Everyman (US) d’Arthur John Maude
Crawley-Maude Features (Los Angeles), 2 bob. – av. Constance Crawley (Everyman), Arthur John Maude (l’envoyé de la Mort). – cf. supra.
1914The Earl of Camelot (GB) de Henry Wilson
Claude Friese-Greene/Aurora British Natural Colour Films, 405 m. (couleur).
Au XIVe siècle, le comte de Camelot (sans rapport avec la légende arthurienne) est tué lors d’une bataille. Sir Michael Camelot, son cousin, devient le tuteur du jeune Frand, fils du décédé. Sir Michael convoite le domaine, mais la veuve du comte le repousse et celui-ci la fait assassiner. Clovis, un vieux serviteur, s’enfuit avec Frand, devient un pêcheur et élève l’enfant comme le sien. Devenu adulte, Frand révèle son identité grâce à un tatouage de l’écusson familial, élimine Sir Michael et récupère ses biens. – Unique film anglais fabriqué selon le procédé Biocolour, mis au point par le fils du pionnier William Friese-Greene. Le peu de succès du film et la déclaration de guerre mettent fin à l’entreprise d’Aurora Films.
1915A Game Old Knight (US) de F. Richard Jones et Mack Sennett
Mack Sennett/Keystone Film Company-Triangle Film Corp. (Culver City), 2 bob./20 min. – av. Louise Fazenda (la princesse Maggie), Harry Booker (le roi Mike Fitzgibbon XIII, son père), Cecile Arnold (la princesse Patricia), Charles Murray (le chevalier), Slim Summerville (son valet), Edgar Kennedy (le bourreau), Wayland Trask, Dixie Chene, William Hauber, Betty Marsh, Bobby Dunn, Ivy Crosthwaite.
Farce burlesque : un roi force un chevalier à épouser sa fille laide et qui échappe de justesse au bourreau après son refus.
1916The White Rosette (US) de Donald MacDonald
American Film Mfg. Co. (Santa Barbara, Calif.), 5 bob. – av. Eugenie Forde (Lady Elfrieda/Frieda Carewe), E. Forrest Taylor (Sir Errol/Thomas Eric), Helen Rosson (Lady Maud/Joan Long), Hary von Meter (le baron Edward/Thomas Eric), William Stowell (Lord Kerrigan)/Van Kerr), Richard La Reno.
Au XIe siècle, Lady Elfrieda jette son dévolu sur le chevalier Sir Errol, qui est au service de son époux, le baron Edward. Sir Errol aime cependant Maud, la dame de compagnie de la baronne, et cette dernière la bannit du château, puis planifie l’assassinat de son mari. Apprenant cela, Maud cherche à mettre en garde le baron Edward, mais elle est accidentellement tuée par Sir Errol. Celui-ci jure de venger sa bien-aimée, même s’il fallait attendre des siècles... Réincarné au XXe siècle, il fait justice.
1916When Knights Were Bold [Quand les chevaliers étaient audacieux] (GB) de Maurice Elvey
Maurice Elvey/London Film Company, 4 bob./1555 m. – av. James Welch (Sir Guy de Vere), Janet Ross (Lady Rowena), Gerald Ames (Sir Bryan Ballymore), Hayford Hobbs (Widdicombe), Gwynne Herbert (Isaacson), Philip Hewland (Barker), Bert Wynne (Whittle), Edna Maude (tante Thornridge), Marjorie Day (Alice, la servante), Douglas Munro.
Au XXe siècle, Guy de Vere, un officier en service aux Indes hérite d’un domaine avec château et d’une baronnie à Little Twittering où il rencontre des membres de sa famille excentriques et peu accueillants ; il aime sa cousine Rowena, mais elle voudrait un homme qui incarne les qualités d’autrefois. Guy reçoit un coup sur la tête et rêve qu’il est au Moyen Âge, au XVe siècle, où il accomplit de fabuleux exploits guerriers, se bat contre son rival, Sir Bryan Ballymore, et acquiert les qualités d’un vrai chevalier. Revenu dans le présent, il peut épouser Rowena. – Une farce adaptée de la comédie homonyme de Charles Marlowe alias Harriett Jay (1906) dont le titre est repris d’un poème de Chaucer. Pour les extérieurs médiévaux, Elvey filme au château de Warwick et dans les ruines de Kenilworth. En quelque sorte la variante britannique du roman satirique A Connecticut Yankee at King Arthur’s Court de Mark Twain (1889), cf. chap. 1.5.
1916Il cavaliere del silenzio (IT) d’Oreste Visalli
Aquila Films, Milano, 1180 m. – av. Jeanne Nolly, Giulio Del Torre, Claudia Zambuto, Sr. De Mori, Leo Ragusi, Gero Zambuto.
Version italienne de la comédie britannique When Knights Were Bold de Charles Marlowe alias Harriett Jay (1907), cf. film de 1916.
Stan Laurel dans une imitation burlesque de Douglas Fairbanks (1923).
1923When Knights Were Cold (US) de Frank Fouce
Broncho Billy Anderson/Quality Film Productions-Metro Pictures Corp., 2 bob./20 min. – av. Stan Laurel (Lord Helpus), Mae Laurel (le comtesse Out), Catherine Bennett (la princesse Elizabeth New Jersey), Billy Armstrong (le comte de Tabasco), Will Bovis (le duc de Sirloin), Harry De More (le roi Epsom), Scotty MacGregor (Sir Chief Raspberry), Stanhope Wheatcroft (le prince de Pluto), Dot Farley.
Tel Robin des Bois, Lord Helpus aide les pauvres en volant les riches, poursuivi par une armée de chevaliers sur des chevaux en bois et défaisant ses ennemis à l’épée comme Douglas Fairbanks, pour finalement épouser la princesse. – Stan Laurel, trois ans avant sa rencontre avec Oliver Hardy, dans un court métrage burlesque dont seule la deuxième moitié a survécu et qui est produit par Broncho Billy Anderson, le tout premier cowboy du cinéma (The Great Train Robbery, 1903).
1926Bodiam Castle and the Legend of Eric the Slender (GB) d’Albert Victor Bramble
Série « Haunted Houses and Castles of Great Britain », George Josiah Banfield/Cosmopolitan Productions, 2 bob./485 m. – av. Madge Stuart, Gladys Jennings.
Un fantôme hante le château de Bodiam, érigé en 1385 sous le règne de Richard II.
1926Guy of Warwick (GB) de Fred Paul
Série « Haunted Houses and Castles of Great Britain », Cosmopolitan Productions, 459 m. – av. Godfrey Tearle (Guy of Warwick).
Une légende du XIIIe siècle : tourmenté par son passé violent à la guerre, le chevalier anglo-normand Guy of Warwick (ou Gui de Warewic) quitte son épouse, Lady Phyllis, et se fait ermite.
1929When Knights Were Bold (GB) de Tim Whelan
Herbert Wilcox, C.M. Woolf/British & Dominions Film Corp., 7213 ft./2337 m. – av. Nelson Keys (Sir Guy de Vere), Miriam Seegar (Lady Rowena), Eric Bransby-Williams (Sir Bryan Ballymore), Wellington Briggs (Widdicombe), Lena Halliday (Lady Walgrave), Martin Adeson (Barker), Hal Gordon (Whittle), Edith Kingdon (tante Thornridge), Eli L. Frewyn (Dean), Fanny Wright, Harold Huth.
Une farce adaptée de la comédie homonyme de Charles Marlowe alias Harriett Jay (1906), cf. film de 1916. L’Américain Tim Welan, scénariste des comiques Harold Lloyd et Harry Langdon à Hollywood, co-dirigera en 1940 une partie de The Thief of Bagdad, signé Michael Powell et Ludwig Berger. Il tourne en août-septembre 1928 aux studios de la Stoll Films à Cricklewood (Camden) et en extérieurs, avec une vaste bataille, autour du château de Caldicot (South Wales). En 1931, il épousera la vedette du film, Miriam Seegar. Le Daily Express range le film parmi les douze meilleurs films britanniques de l’année (30.12.29). Jugé bien supérieur à la pièce dont il s’inspire, il récolte un grand succès populaire. Partiellement sonorisé en 1930.
Affiche espagnole de « When Knights Were Bold » (1936).
1936When Knights Were Bold (GB) de Jack Raymond
Max Schach, C.M. Woolf/Capitol Film Corporation, 76 min. – av. Jack Buchanan (Sir Guy de Vere), Fay Wray (Lady Rowena), Garry Marsh (Brian Ballymote), Kate Cutler (tante Agatha), Martita Hunt (tante Esther), Robert Horton (coousin Bertie), Aubrey Fitzgerald (Barker, le butler), Robert Nainby, Aubrey Mather, Moore Marriott (le vagabond), Charles Paton (la maire), Barry Fitzgerald, Terry-Thomas, Michael Wilding.
Une farce avec plusieurs numéros musicaux adaptée de la comédie homonyme de Charles Marlowe alias Harriett Jay (1906), cf. les films de 1916 et 1929. Importée d’Hollywood, la Canadienne Fay Wray (King Kong) en est la vedette féminine. L’extérieur du château devant lequel on réunit une importante figuration pour la bataille est reconstruit sur terrains du British & Dominions Studios à Elstree (Hertfordshire), scènes complétées par des vues et l’intérieur du château de Warwick. Réalisateur médiocre, Jack Raymond livre un produit décevant, malgré une tête d’affiche alléchante.
1948Fiddlers Three (US) de Jules White
Jules White/Columbia Pictures, 17 min. – av. Shemp Howard (Shemp), Moe Howard (Moe), Larry Fine (Larry), Vernon Dent (le roi), Virginia Hunter (la princesse Alisha), Philip Van Zandt (le magicien Murgitroyd).
Pitreries du trio comique des « trois Stooges » en troubadours à la cour d’un roi.
1956* The Court Jester (Le Bouffon du roi) (US) de Melvin Frank, Norman Panama [et Bernard McEveety]
Melvin Frank, Norman Panama/Dena Enterprises (Danny Kaye, Sylvia Fine)-Paramount Pictures, 101 min. – av. Danny Kaye (Hubert Hawkins, le bouffon), Glynis Johns (Maid Jean), Basil Rathbone (Lord Ravenhurst), Cecil Parker (le roi Roderick Ier), Angela Lansbury (la princesse Gwendolyn), Mildred Natwick (Griselda), John Carradine (Giacomo, le bouffon italien), Alan Napier (Sir Brockhurst), Michael Pate (Sir Locksley), Robert Middleton (Sir Griswold of MacElwain), Herbert Rudley (le capitaine des gardes), Edward Ashley (Black Fox, le Renard Noir), Lewis Martin (Sir Finsdale), Noel Drayton (Fergus), Richard Kean (l’archevêque), Billy Curtis (un nain de la troupe Hermine).
Synopsis : Le roi Roderick Ier, usurpateur du trône d’Angleterre, a fait massacrer toute la famille de son prédécesseur. Seul subsiste un nourrisson qui porte une marque de naissance, un « mouron pourpre », sur sa fesse gauche attestant son origine royale et qui est abrité dans la forêt par l’audacieux Renard Noir et ses hors-la-loi. Repéré, le brigand fait cacher l’héritier du trône au port de Douvres, sous l’escorte de Hubert Hawkins, chanteur de foire au carnaval, et de son amoureuse Jean. En cours de route, le groupe croise Giacomo, le nouveau bouffon du roi venant d’Italie ; Hubert l’assomme et prend sa place à la cour du tyran, avec l’idée d’y dérober la clé d’un passage secret qui permet d’entrer dans le château par la forêt. Le roi Roderick, qui cherche à s’allier les bonnes grâces de Sir Griswold, chef d’une redoutable armée, l’invite au château pour lui proposer sa fille Gwendolyn en mariage. Mais tout se complique : le vrai Giacomo est un espion de l’ambitieux Sir Ravenhurst, Gwendolyne ne veut pas épouser Griswold, sa servante Griselda (une magicienne) hypnotise Hawkins afin qu’il s’éprenne de la princesse, etc. Entretemps, aidés d’une armée de nains, les partisans du Renard Noir investissent le château. Échappant maintes fois à la mort grâce à la magie de Griselda et adoubé à la hâte, le faux bouffon élimine Sir Ravenhurst, catapulté dans la mer au cours d’un duel épique. Sur quoi, dénudant le postérieur du royal bambin, il fait reconnaître sa légitimité au trône. Repentis, Sir Griswold et Roderick lui jurent allégeance.
Une parodie musicale foldingue mais pleinement réussie des films de cape et épée du genre Robin Hood ou Zorro (Basil Rathbone y reprend son rôle de méchant dans une confrontation finale hilarante qui rappelle celle, plus sérieuse, menée contre Errol Flynn en 1938). Tourné en Technicolor bariolé et pimpant et en format large VistaVision aux studios Paramount à Melrose Avenue ainsi que dans la péninsule de Palos Verdes (Calif.), The Court Jester est alors la comédie la plus onéreuse jamais fabriquée à Hollywood. Elle est financée par Dina Enterprises, la société de Danny Kaye et de sa femme Sylvia Fine (auteure des chansons). Le tandem de scénaristes-producteurs-réalisateurs Frank & Panama maîtrisent tant bien que mal les diverses interruptions d’un travail qui s’étire du 22 novembre 1954 au 18 mars 1955 en grevant le budget (coûts finaux : 3,7 millions de $) et ils doivent faire appel à un troisième larron, Bernard McEveety, routinier des scènes d’action et de petits westerns, pour arriver au bout. Le résultat offre une surenchère de comique slap-stick, de renversements de situation burlesques, de staccatos de jeux de mots servis à une vitesse déconcertante et de virelangues intraduisibles (la virtuosité verbale est une des spécialités de Danny Kaye). La critique new-yorkaise sacre Kaye « star comique de l’année » et il reçoit une nomination au Golden Globe, tandis que l’American Film Institue placera son film dans la liste des « cent meilleures comédies du siècle ». The Court Jester fera partie de la sélection annuelle de 25 longs métrages dans le National Film Registry (Library of Congress à Washington) à sauver pour ses « qualités culturelles, historiques et esthétiques ».
DE, AT : Der Hofnarr, IT: Il giuliare del re, SP: El bufón de la corte.
Le sorcier (Basil Rathbone) défie le roi dans « The Magic Sword ».
1961The Magic Sword / St. George and the 7 Curses / The Seven Curses of Lodac (L’Épée enchantée) (US) de Bert I. Gordon
Bert I. Gordon Productions-United Artists, 80 min. – av. Basil Rathbone (le sorcier Lodac), Estelle Winwood (la magicienne Sybil), Gary Lockwood (Sir George), Anne Helm (la princesse Hélène), Liam Sullivan (Sir Branton), Danielle De Metz (Mignonette), Merrit Stone (le roi), Jacques Gallo (Sir Dennis de France), David Cross (Sir Pedro d’Espagne), John Mauldin (Sir Patrick d’Irlande), Taldo Kenyon (Sir Anthony d’Italie), Angus Duncan (Sir James d’Écosse), Leroy Johnson (Sir Ulrich d’Allemagne), Marlene Callah (la princesse Grace), Jack Kosslyn (l’ogre), Maila Nurmi (la sorcière).
Lodac, un féroce sorcier, a enlevé la princesse Hélène, la destinant à l’estomac de son dragon à deux têtes. Sir George, le fils adoptif de la magicienne Sybil, très amoureux de la dame disparue, se lance à l’assaut du château maudit de Lodac, accompagné de six anciens chevaliers. Sur leur route, les sept preux doivent affronter sept épreuves organisées par Lodac ; peu survivent aux ogres, fantômes et autres démons, tandis que George parvient à terrasser le dragon. Métamorphosée passagèrement en panthère noire, Sybil règle son compte au vilain sorcier.
Magie blanche contre magie noire, un petit nanar à l’imagination fertile et à l’humour bon enfant, bricolé de janvier à mars 1961 en Eastmancolor par un amoureux des grandes bestioles et artisan des effets spéciaux aux Samuel Goldwyn Studios (Hollywood) et à Bronson Canyon (Griffith Park, Los Angeles). Ce « Saint Georges et le dragon » à la sauce américaine et un des ancêtres cinématographiques du sous-genre Sword & Sorcery, le médiéval-fantastique tolkiénisant qui deviendra à la mode une décennie plus tard. – Nota bene : Les produits ultérieurs de cette catégorie de films ne sont pas retenus ici.
DE : St. Georg und der Drache; Ascalon, das Zauberschwert, IT : La spada magica, ES : La espada magica.
1977* Jabberwocky (GB) de Terry Gilliam
Sanford Lieberson, Julian Doyle, John Goldstone/Python Films-Umbrella Entertainment Productions, 105 min. – av. Michael Pain (Dennis Cooper), Max Wall (le roi Bruno le Contestable), Deborah Fallender (la princesse, sa fille), Harry H. Corbett (l’écuyer), John Le Mesurier (Passelewe, le chambellan), Warren Mitchell (le poissonnier Fischinger, le père de Griselda), Terry Gilliam (l’homme au caillou), Terry Jones (le braconnier), Bernard Bresslaw (le tavernier), John Bird (le premier héraut), Derek Francis (l’évêque), Neil Innes (le second héraut), Bryan Pringle (le garde à la porte de la cité), Simon Williams (le prince), Annette Badland (Griselda Fishfinger), Kenneth Colley (le premier fanatique), Brenda Cowling (Mme Fishfinger), Graham Crowden (le chef des fanatiques), Brian Glover (l’armurier), David Prowse (le chevalier en noir et rouge), Roger Pratt (l’homme vivant dans un tonneau).
Situé dans un Haut Moyen-Âge de légende, ce film marqué par l’esprit anarchiste des Monty Python se veut une satire du pouvoir et de l’oppression, un pseudo-conte parsemé de blagues grivoises et de salubres provocations. Inspiré d’un poème du même nom de Lewis Carroll (texte nonsensique en « mots-valise » que lit Alice à la fin du premier chapitre de Through the Looking Glass / De l’autre côté du miroir), il met en scène un tendre jeune homme, Dennis Cooper, fils d’un tonnelier qui l’a déshérité, contraint d’affronter Jabberwocky, une bête immonde qui ravage le royaume de Bruno le Contestable. Le monarque promet bien sûr la main de sa fille et la moitié du royaume à celui qui réussira à terrasser le monstre. Dennis n’en a cure, il aime Griselda, la fille grosse et vulgaire d’un poissonnier affairiste qui, lui, ne veut pas entendre parler du freluquet. La garde lui refuse l’accès à la ville, surpeuplée de réfugiés à cause de Jabberwocky. Le roi veut se débarrasser de la Bête en organisant un tournoi qui désignera un champion apte à sauver le royaume, mais il se heurte aux membres du Conseil, aux riches marchands, aux guildes et à l’évêque, car il ne faut surtout pas renvoyer les réfugiés qui font si bien marcher les affaires de la cité ! De son côté, l’Église est ravie de se voir inondée de dons par des paroissiens crédules et terrorisés. Dennis pénètre dans la ville par ruse et, après moult mésaventures, devient involontairement l’écuyer du champion du tournoi. Les marchands envoient contre ce dernier le féroce Chevalier noir. Celui-ci occit le champion du roi, mais il est tué par Jabberwocky qui s’empale à son tour accidentellement sur l’épée de Dennis. Devenu le héros de la cité, Dennis est contraint de renoncer à sa tonnellerie et d’épouser la princesse, contre son gré et au grand dam de la corpulente Griselda comme de ses géniteurs furieux.
Premier long métrage réalisé en solo de Terry Gilliam (cinéaste américain, mais Anglais d’adoption), entre Monty Python and the Holy Grail (1974) et Monty Python’s Life of Brian (1979) ; Gilliam s’est fermement opposé à ce que les distributeurs accolent le nom du fameux groupe au titre de son film (comme ce sera le cas aux États-Unis). Autant Holy Grail tenait encore du bricolage télévisuel de ses copains trublions, autant Jabberwocky s’acharne à montrer un univers médiéval cohérent, quoique non moins loufoque, souvent sale et répugnant : les images sont belles et soignées, mais tous les poncifs saccharinés sont subvertis (« Dennis se trompe de conte » dit Gilliam), le grotesque règne, le palais est sombre et décrépit, les donjons s’écroulent, les puissants sont ignobles et les pauvres sont si pauvres qu’ils en sont réduits à manger leurs orteils. Un film-fable foutraque, très inventif, mené avec entrain et irrespect par le génial auteur de cette dystopie orwellienne désespérée et désespérante que sera Brazil (1985), son chef-d’œuvre. Tournage en juillet 1976 dans le pays de Galles (châteaux de Chepstow et Pembroke, Bosherton Quarry), à Londres et aux studios de Shepperton (Surrey) pour la modeste somme de 500'000 £.
1983-1989(tv) Blackadder (La Vipère noire) (GB) série de Martin Shardlow [Mandie Fletcher, Richard Boden]
John Lloyd-BBCtv (BBC1 15.6.-20.7.83), 6 x 30 min. – av. Rowan Atkinson (Edmund Blackadder), Tony Robinson (Baldrick), Tim McInnerny (Lord Percy), Stephen Fry (Lord Melchett), Brian Blessed.
Ce premier épisode d’un sitcom à succès (il durera jusqu’en 1989) relate les exploits d’un jeune aristocrate pervers et méchant au Moyen Age, scènes de slapstick à l’appui. Blackadder se retrouve par la suite à la cour d’Elisabeth Ire (Black Adder II), pendant la Régence au XIXe siècle (Blackadder the Third), enfin en 1914-18 (Blackadder Goes Forth). Filmé aux studios 4 du Television Center à White City (West London).
1996The Midwife’s Tale (US) de Megan Siler
Megan Siler, Michael Lowe, Francesca Prada/Heresy Pictures, 75 min. – av. Stacey Havener (Lany Eleanor), Gayle Cohen (Gwenyth), Anthony Shaw Abaté (Lord William), Mitchell Anderson (Sir Giles), Antonia Kitto (Morgan), Ben Prager (le père Sumnor), Delbert Spain (le médecin), Jeanne Bascom (la vieille sage-femme), Keith Green (Sir Palamon), Heather Newville (Eleanor enfant), Paul W. Lancraft (l’inquisiteur), TJ Tolleson (le bourreau).
Dans l’Angleterre du XVIe siècle, Lady Eleanor, une jeune aristocrate à l’esprit indépendant et peu encline à la broderie, se voit contrainte d’épouser Lord William, obéissant ainsi à la volonté de son père défunt. William sait qu’il n’est pas un amant idéal, mais il est patient et bientôt Eleanor est enceinte. Son état la terrifie, car sa propre mère est morte en couches. Elle tente de se faire avorter par la vieille sage-femme locale, mais cette dernière est accusée de sorcellerie par Lord William et le prêtre de la paroisse, ennemis des festivités populaires. Son assistante, la jeune Gwenyth, tente vainement – et au péril de sa vie – de sauver la malheureuse du bûcher. Lady Eleanor prend la jolie faiseuse d’anges à son service, se fait avorter, se lie d’amitié et la séduit. Les deux amoureuses fuguent. – Un conte de fées médiévo-lesbien, production indépendante à l’exploitation confidentielle.

19.1. « King Lear » de William Shakespeare

Le roi LEIR est un souverain mythique de l’île de Bretagne à l’époque celtique précédant la conquête romaine. Il serait le fils du roi druide, philosophe et magicien Bladud (vers 850 av. JC) et Geoffrey de Monmouth en retrace la destinée dans son Historia regum Britanniae , chronique assez fantaisiste datant de 1139. Dans le Roman de Brut (1155), Wace fait de lui un personnages épique rattrapé par la tragédie. Selon Monmouth, le règne de Leir aurait duré 60 ans, il serait le fondateur de la ville qui porte son nom, Kaerleir (aujourd’hui Leicester). Contrairement à ses prédécesseurs, le monarque briton n’aurait pas eu de fils, mais trois filles : Gonorilla (épouse de Maglaurus, duc d’Albanie), Regau (épouse de Henvirus, duc de Cornouailles) et la cadette Cordeilla, qu’Aganippus, roi des Francs, épouse et emmène dans sa capitale à Karitia (Carice). Trahi par les époux de ses deux filles aînées, Leir s’enfuit en Gaule où Cordeilla le reçoit en pompe et le nomme régent. Elle envahit la Bretagne insulaire, écrase les armées de ses sœurs et rétablit son père sur le trône où il règne encore trois ans. Après son décès, Cordelia devient reine de Bretagne pendant cinq ans, mais ses neveux Cunedagius et Marganus refusent la souveraineté d’une femme. Après plusieurs batailles, Cordeilla est capturée et se suicide. Cette légende celte sert de canevas pour King Lear , tragédie en cinq actes particulièrement sombre et poignante qu’en tire Shakespeare : une litanie de trahisons, d’ingratitude et de folie qui finit en hécatombe. Le tout se déroule dans une Grande-Bretagne sans repères, un paysage universel. Par certains détails, le barde semble situer l’action dans un contexte médiéval du XII-XIIIe siècle (avec un roi de France, un duc de Bourgogne et la mention du port de Douvres), mais il maintient le flou quant au cadre géographique et historique général : on invoque Apollon et le bouffon déclare vivre en Albion « avant l’époque de Merlin l’Enchanteur » (III,2,9). Synopsis : Despote octogénaire et mal avisé, Lear, roi de l’île de Bretagne, souhaite renoncer à ses fonctions royales et interroge ses trois filles pour savoir laquelle a le plus d’affection pour lui et départager ainsi son royaume en fonction des réponses. Les deux plus âgées, l’aînée Goneril/Gonerille (duchesse d’Albany) et Regan/Régane (duchesse de Cornouailles) le flattent perfidement tandis que la cadette Cordelia, sa préférée, affectueuse mais intransigeante et sincère, refuse de participer à cet étalage hypocrite. Furieux, le vieillard la déshérite et l’éloigne pour être mariée sans dot au roi de France. Il bannit aussi le vieux comte de Kent qui a pris la défense de la malheureuse. Lear annonce qu’il vivra désormais alternativement sur les terres de ses deux filles aînées, entouré d’une suite de cent chevaliers. Mais à peine ont-elles pris le pouvoir que Goneril et Regan refusent à leur géniteur l’escorte promise et celui-ci, indigné, chassé, s’en va seul, errant dans la lande de Cornouailles et la fureur des tempêtes, réduit à l’extrême misère, avec pour seul compagnon temporaire son fidèle bouffon ; mais l’épreuve est trop dure, Lear fait l’expérience de la solitude absolue et perd la raison. Déguisé sous le nom de Caius, Kent conduit le vieillard égaré à Douvres où Cordelia le reçoit affectueusement. Au même moment, Edmund, le bâtard du comte de Gloucester (seul vassal fidèle à Lear), a monté son père contre son demi-frère Edgar, l’héritier légitime du comté qui a dû se terrer dans une chaumière en pleine lande pour éviter l’emprisonnement et qui simule la folie. Edmund accuse son géniteur de complicité avec les Français qui viennent de débarquer en Angleterre à la requête de Cordelia ; le duc de Cornouailles, mari de Regan, fait crever les yeux du vieux comte puis périt, mortellement blessé par un serviteur de ce dernier. Les deux sœurs s’éprennent d’Edmund, qui a hérité du comté, et Goneril se promet à lui en échange de l’assassinat de son propre mari, le duc d’Albany, un faible et « inepte crétin » à ses yeux. Par la même occasion, jalouse, elle empoisonne sa sœur Regan, à présent veuve et donc une rivale. Démasquée par son mari qui la fait mettre aux fers, Goneril se suicide. L’ignoble Edmund est accusé de trahison et tué par son demi-frère Edgar au cours d’un « jugement de Dieu » mais, vainqueur des Français sur le champ de bataille, le félon a auparavant donné l’ordre de pendre Cordelia, faite prisonnière, sous les yeux de son père rétabli. Le vieux Lear expire à son tour, terrassé par la douleur. Le duc d’Albany déclare un deuil général dans le royaume et confie le pouvoir à Kent et à Edgar. Ce dernier, qui s’était fait incognito le guide de son père aveugle et l’avait sauvé du suicide, est rétabli dans toutes ses dignités. Nota Bene : la liste des captations scéniques de la pièce de Shakespeare n’est pas exhaustive.
1909King Lear (US) de James Stuart Blackton et William V. Ranous
J. Stuart Blackton/Vitagraph Co. of America (New York), 293 m./16 min. – av. William V. Ranous (Lear, roi de Bretagne), Julia Arthur (Cordelia), Florence Turner/Auer (Goneril), Julia Arthur (Regan), Edith Storey, Mary Fuller, Maurice Costello, William Humphrey (le bouffon).
Une réduction considérable – bien sûr muette – du drame (d’une durée de plus de trois heures au théâtre et d’un quart d’heure à l’écran), tournée avec mimiques grimaçantes et gesticulations dans les petits studios Vitagraph de Flatbush à Brooklyn, N.Y.
Ermete Novelli et Francesca Bertini (en Cordelia, à dr.) dans la version colorisée de « Re Lear » de G. Lo Savio.
1910Re Lear / Le roi Lear (IT/FR) de Gerolamo Lo Savio
Gerolamo Lo Savio, Charles Pathé/Film d'Arte Italiana (FAI Roma)-Série d’Art Pathé Frères (SAPF Paris), 325 m./17 min. – av. Ermete Novelli (Lear, roi de Bretagne), Francesca Bertini (Cordelia), Giannina Chiantoni (Goneril, sa sœur), Olga Giannini Novelli (Regan, l’autre sœur).
Production de prestige colorée au pochoir du trust Pathé (Paris) sur le modèle des « Films d’Art » français, tournée aux studios romains de Porta Pia, dans le quartier romain de Nomentana, et dans la villa de l’acteur et dramaturge Ermete Novelli à Rimini. Une des premières apparitions de la diva assoluta du cinéma muet italien, « la Bertini » dans le rôle de Cordelia.
1910Re Lear (IT) de Giuseppe De Liguoro
Milano Films, 656 ft./200 m./version d’exportation anglaise : 366 m. – av. Giuseppe De Liguoro (Lear, roi de Bretagne), Carlo Campogalliani (son bouffon), Adolfo Padovan.
Filmé aux studios-verrière de la Via Farini à Milan, production rivale de la version du Film d’Arte Italiana, avec Carlo Campogalliani, qui deviendra de 1914 à 1961 un réalisateur suroccupé du cinéma populaire italien.
Frederick Warde (Lear) et son fils Ernest C. Warde (le bouffon) dans la version de 1916.
1916King Lear (US) d’Ernest C. Warde
Edwin Thanhouser/Thanhouser Film Corp. (New Rochelle, N.Y.), 5 bob./63 min. – av. Frederick Warde (Lear, roi de Bretagne), Ernest Warde (son bouffon), Ina Hammer (Goneril), Wayne Arey (le duc d’Albany), Edith Diestal (Regan), Charles Brooks (le duc de Cornouailles), Lorraine Huling (Cordelia), J. H. Gilmour (le comte de Kent), Boyd Marshall (le roi de France), Hector Dion (Edmund), Edwin Stanley (Edgar), Robert Whittier (Oswald).
Une adaptation assez fidèle et ambitieuse signée Philip Lonergan, tournée dans les studios Thanhouser à Jacksonville, en Floride, avec (à en croire la presse d’époque) d’impressionnantes scènes de bataille entre les troupes françaises de Cordelia et les armées anglaises de Goneril et Regan ; des gros plans des trois sœurs permettent de suivre les aléas de l’affrontement. L’acteur shakespearien anglais Frederick B. Warde (découvreur de Douglas Fairbanks) s’est illustré quatre ans plus tôt dans le Richard III de la même compagnie. Il confie la réalisation du film et le rôle du bouffon à son fils Ernest C. Warde, qui a dirigé dès 1909 « The Frederick Warde Institute of Oratory, Expression and Shakespearian Study » à North White Lake (New York).
1948(tv) The Tragedy of King Lear (GB) de Royston Morley
Royston Morley, Douglas Allen/BBC Television (BBC 22.+29.8.48), 110 + 90 min. – av. William Devlin (Lear, roi de Bretagne), Alan Wheatley (son bouffon), Rosalie Crutchley (Goneril), Reginald Tate (le duc de Cornouailles, son mari), Ursula Howells (Cordelia), Nicolette Bernard (Regan), Norman Claridge (le duc d’Albany, son mari), Cyril Conway (le duc de Bourgogne), Michael Ashwin (le roi de France), Patrick Troughton (Edmund, fils bâtard de Gloucester), Robert Harris (Edgar, fils de Gloucester), John Chandos (Oswald), Victor Platt (Curan/le héraut), Robert Sansom (comte de Kent), Archie Angus, Frederic Ross, Kenneth Brown, John Vere.
Premier Lear « parlant » à l’écran et première mise en scène du drame à la télévision, enregistrée live aux studios BBC d’Alexandra Palace (North London) avec l’acteur écossais William Devlin (Jamaica Inn de Hitchcock, 1939) dans le rôle-titre, un rôle qu’il avait déjà tenu avec succès sur scène au Westminster Theatre en 1933.
Orson Welles (Lear) et Natasha Perry (Cordelia) dans la dramatique tv de Peter Brook (1953).
1953* (tv) King Lear (US) de Peter Brook (th) et Andrew McCullough (tv)
Série « Omnibus » no. 29, Peter Brook, Fred Rickey/Columbia Broadcasting System (CBS)-Ford Foundation (CBS 18.10.53), 76 min. – av. Orson Welles (Lear, roi de Bretagne), Alan Badel (son bouffon), Beatrice Straight (Goneril), Natasha Perry (Cordelia), Margaret Phillips (Regan), Scott Forbes (le duc de Cornouailles), Bramwell Fletcher (le comte de Kent), Wesley Addy (le roi de France), Arnold Moss (le duc d’Albany), Fred Sadoff (le duc de Bourgogne), LeRoi Operti (le médecin), Micheál MacLiammoir (Tom o’Bedlam dit Poor Tom), Frederick Worlock (le comte de Gloucester), Lloyd Bochner, Chris Gampel, Larry Blyden, Alistair Cooke (le présentateur).
Cette version télévisée en direct (conservée sur kinéscope) marque la toute première apparition d’Orson Welles sur le petit écran, au lendemain de la sortie de son Othello cinématographique (Palme d’or à Cannes 1952). Expatrié en Europe depuis 1948, il retourne brièvement aux États-Unis pour une des premières dramatiques américaines vraiment ambitieuses, enregistrée en direct à New York dans une version adaptée et réalisée par le jeune metteur en scène britannique Peter Brook, invité spécial de la CBS ; filmé avec deux caméras et une esquisse de décor. Welles donne la réplique à Natasha Perry, l’épouse de Brook, et le consultant artistique de l’entreprise est le célèbre chef décorateur franco-russe Georges Wakhévitch (La Kermesse héroïque de Feyder, Les Visiteurs du soir de Carné). La durée de la pièce est sérieusement réduite, Brooks ayant éliminé toute l’intrigue secondaire entre Edgar et Edmond, les fils ennemis de Gloucester. La réception de la dramatique – diffusée sans publicité ! – est enthousiaste (« terriblement impressionnant » écrit The New York Herald Tribune, 22.10.53), mais reste sans lendemain malgré l’interprétation vraiment magistrale de Welles, avec faux nez et barbe épaisse. Le cachet du comédien endetté est immédiatement confisqué par le fisc américain qui le fait surveiller et lui interdit durant trois semaines de quitter sa chambre d’hôtel en dehors des répétitions aux studios CBS à Manhattan. Notons que Lear a longtemps été un des rôles favoris de Welles, joué à la radio (CBS Mercury Summer Theatre, 13.9.46) et en 1958 sur les planches du Civic Center à New York ; en 1983/84, il tentera en vain de porter la pièce à l’écran avec sa compagne Oja Kodar (Cordelia) et Mickey Rooney (le bouffon) à partir d’un aléatoire financement du Ministère de la Culture français (Jack Lang).
1956(tv) Re Lear (IT) de Franco Enriquez
Radiotelevisione Italiana, Roma (RAI 7.5.56), 148 min. – av. Renzo Ricci (Lear, roi de Bretagne), Giulio Oppi (comte de Kent), Anna Proclemer (Goneril), Eva Magni (Cordelia), Franca Nuti (Regan), Giorgio Albertazzi (le bouffon), Clauco Mauri (duc de Gloucester), Orazio Orlando (duc de Cornouailles), Gianni Galavotti (duc d’Albany), Davide Montemurri (Edgar), Giulio Bosetti (Edmund), Ruggero De Daninos (Oswald).
Reprise de la mise en scène du Teatro Politeama di Genova.
1960(tv) Re Lear (IT) de Sandro Bolchi
Série « I Classici del Teatro », Radiotelevisione Italiana, Roma (RAI 4.3.60), 196 min. – av. Salvo Randone (Lear, roi de Bretagne), Mario Ferrari (comte de Kent), Neda Naldi (Goneril), Wandisa Guida (Cordelia), Anna Miserocchi (Regan), Fosco Giachetti (comte de Gloucester), Nando Gazzolo (Edgar), Raoul Grassili (Edmund), Ottorini Guerrini (duc de Cornouailles), Luciano Alberici (duc d’Albany), Carlo Cataneo (roi de France), Daniele Tedeschi (duc de Bourgogne), Mario Bardella (le bouffon), Pietro Privitera (Oswald).
1965(tv) Le Roi Lear (FR) de Jean Kerchbron
ORTF (1e Ch. 13.2.65), 190 min. – av. Michel Etcheverry (Lear, roi de Bretagne), Paloma Matta (Cordelia), Dominique Vincent (Goneril), Silvia Monfort (Regan), Raoul Guillet (le duc d’Albany), Jean-Pierre Bernard (le duc de Cornouailles), Jean-Paul Moulinot (le comte de Gloucester), François Chaumette (le comte de Kent), Simon Eine (Edmond), Guy Piérauld (le bouffon), Pierre Tabard (Edgar), Clément Bairam, Mauice Coussonneau, Claude d’Yd, Claude Debord, Pierre Duncan, Bernard Garnier, Jean Sagols.
La tragédie dans une traduction française d’Yves Bonnefoix, enregistrée aux studios des Buttes-Chaumont à Paris.
1967(tv) König Lear (DE) d’Ulrich Erfurth
Bad Hersfelder Festspiele-Hessischer Rundfunk (Frankfurt) (HR3 20.9.67), 157 min. – av. Ewald Balser (Lear, roi de Bretagne), Hilde Weissner (Goneril), Gudrun Erfurth (Regan), Evelyn Balser (Cordelia), Volker Lechtenbrink (le bouffon), Günther Bauer (le roi de France), Felix Franchy (duc de Bourgogne), Hans Gerd Kübel (duc de Co Cornouailles), Hans Quest (duc d’Écosse), Ernst Mitulski (comte de Gloucester), Hannsgeorg Glaubenthal (comte de Kent), Willi Kowalj (Edgar), Frank Hoffmann (Edmund), Karl-Heinz Staudenmeyer (Curan).
Captation de la mise en scène dans la collégiale du festival de Bad Hersfeld (Hesse), dominée par l’interprétation du vétéran Ewald Balser (très connu en Allemagne et en Autriche pour ses interprétations à l’écran de Rembrandt en 1942, de Beethoven en 1949 et 1958, de l’archiduc François-Ferdinand en 1955, etc.) ; sa fille Evelyn Balser lui donne la réplique en Cordelia.
Les retrouvailles du père (Yuri Yarvet) et de sa fille préférée (Valentina Sendrikova) dans Korol’ Lear (1971).
1971*** Korol' Lir (Le Roi Lear) (SU) de Grigorij Kozintsev
Lenfilm (Léningrad), 141 min. (2 parties) – av. Yuri Yarvet [=Jüri Järvet] (Lear, roi de Bretagne), Elza Radzinya (Goneril), Valentina Sendrikova (Cordelia), Galina Volchek (Regan), Oleg Dahl (le bouffon), Kärlis Sebris (comte de Gloucester), Leonhard Merzin (Edgar), Regimantas Adomaitis (Edmund), Vladimir Yemelyanov (comte de Kent), Aleksandr Vokach (duc de Cornouailles), Donatas Banionis (duc d’Albany), Alexeï Petrenko (Oswald), Juozas Budraitis (le roi de France), Emmanuil Vitorgan (un serviteur).
C’est au cinéma soviétique qu’on doit la première transposition entièrement cinématographique du drame (le muet étant privé de la prose shakespearienne), la première aussi qui ne soit ni centrée sur le personnage de Lear ni portée en priorité par la prestation de son interprète principal – comme c’est le cas avec toutes les versions réalisées pour le petit écran. Grigorij Kozintsev a débuté au cinéma en 1924 en tandem avec Leonid Trauberg, fondant la FEKS (École du comédien excentrique), mouvement théâtral futuriste prônant l’excès, le music-hall et le cirque, puis en s’imposant à l’écran avec un féroce Manteau d’après Gogol (1926) et La Nouvelle Babylone (1929), fresque sarcastique aux recherches plastiques très originales sur la Commune de Paris. Dans les années 1940, à nouveau seul, il se tourne à plusieurs reprises vers Shakespeare au théâtre avant, une fois l’ère du réalisme prolétarien enterrée, de revenir au cinéma avec des adaptations littéraires de thèmes affleurant la folie comme son mélancolique Don Quichotte (1957) et un Hamlet/Gamlet (1964) impressionnant, mis en musique par Dimitri Chostakovitch. Le cinéaste a rassemblé ses réflexions à ce propos dans un précieux ouvrage traduit en anglais, Shakespeare, Time and Conscience (New York, 1966), analysant en sous-texte le rapport des Russes avec le dramaturge élisabéthain comme outil de dénonciation de la dictature stalinienne et du quotidien sous le régime soviétique. Il ne s’agit pas, proclame-t-il, d’adapter Shakespeare au cinéma, mais d’adapter le cinéma à Shakespeare, car tous les problèmes soulevés dans ses tragédies sont modernes et contemporains.
Kozintsev couronne sa carrière (c’est son dernier film) avec Korol’ Lir, œuvre méditative sur la vieillesse, une tragédie de l’aveuglement et de la solitude qu’il a déjà montée au Théâtre dramatique du Bolchoï « Maxim Gorky » (BDT) au printemps 1941. Il décide d’illustrer la solitude du monarque égaré non par l’épure mais, tout au contraire, par un univers grouillant et surpeuplé, sans toutefois que l’image ne glisse dans la gratuité du spectaculaire. Kozintsev nous donne à voir une suite d’horizons froids et lointains mobilisant des centaines de figurants et aux décors massifs et puissants tout en mettant l’accent sur l’authenticité des textures, des matériaux : pierre, bois, fer, toile de jute, étoffes. Son Lear est aussi proche des bruyères courbées par la tempête nocturne, des bois, de la mer et du feu, de la nature austère et menaçante, du vent mauvais qui font écho à son insensibilité initiale pour l’humanité tout en reflétant les cœurs desséchés de ses deux filles aînées. Mais le rapport de Lear avec la nature (les champs fleuris) annonce simultanément aussi sa régénération, tandis que Cordelia trouve ses correspondances dans les vagues et les mouettes. Comme pour le Hamlet de 1964, le scénario repose sur une traduction de Boris Pasternak (1949), le grand poète et romancier russe décédé en 1960 qui est depuis treize ans – avec la publication de son Docteur Jivago – un lauréat du « Prix Nobel » de littérature honni dans toute l’URSS. Sa traduction est à la fois libre et moderne, elle permet, affirme le cinéaste, une approche filmique réaliste tout en recréant les métaphores et les hyperboles shakespeariennes. Détail amusant : le roi de France ne parle pas anglais et se fait comprendre par un interprète. La musique lancinante, aux chœurs envoûtants, est à nouveau confiée à Chostakovitch (avec l’Orchestre symphonique de Leningrad) ; Kozintsev et ce dernier forment ainsi un tandem créatif qui n’est pas sans rappeler celui d’Eisenstein et de Prokofiev (Alexandre Nevski, Ivan le Terrible) ou de Gance et d’Honegger (Napoléon).
Un bouffon (Oleg Dahl) qui simule la folie entre son souverain déraisonnable et bientôt dément (Yuri Yarvet).
 Pour sa fresque paradoxalement épurée et fourmillante, Kozintsev choisit le noir et blanc au format large Sovscope. Le tournage à partir de l’été 1969 s’effectue aux studios de la Lenfilm, mais surtout en extérieurs souvent insolites. Après plusieurs semaines de repérages au Daghestan, en Ossétie du Nord, en Crimée et en Géorgie, Kozintsev décide d’utiliser pour les palais royaux divers pans de l’imposante forteresse du XVe siècle d’Ivangorod, à 160 km de Saint-Pétersbourg. Puis, assisté de Iosif Shapiro qui gère les foules, le réalisateur promène sa caméra dans toute la périphérie de Narva en Estonie (y compris dans les immenses dépôts cendreux de schiste de Pribaltiyskaya GRES), à Novosibirsk en Sibérie occidentale et dans la station balnéaire de Palanga (Lituanie) sur la mer Baltique.
Kozintsev et son fabuleux chef opérateur Jonas Gritsius composent un ensemble de panoramas à la fois arides, primitifs et inhospitaliers, dignes de la dimension majestueuse de la pièce. Par leur organisation plastique et dynamique, certains cadrages rappellent Eisenstein, mais contrairement à ce dernier, l’approche de Kozintsev (qui se réfère plus d’une fois aux perspectives du Corbusier) consiste à pénétrer l’intérieur de la conscience humaine et non pas à représenter le jeu des foules sur fond historique. Récusant tout naturalisme historisant qui détruirait l’unité poétique de l’œuvre (l’action semble située au XIVe siècle), le cinéaste estime que seule l’importance métaphorique des lieux peut rejoindre l’imagination de l’original. Il faut donc, souligne-t-il, « transformer visuellement toutes les significations des lieux », leurs implications philosophiques, dévoiler leur haut degré de poésie et créer une organisation visuelle dynamique des relations entre les personnages, « essayer de tout rendre visuel, de transformer l’oral en utilisant les différentes échelles de plans, en passant du gros plan en plan lointain » (Séquences no 68, février 1972). Sa mise en scène, loin d’Eisenstein, s’appuie essentiellement sur le mouvement. « Lear, dit-il, c’est le chemin parcouru par la pensée humaine ». Cette esthétique très étudiée est particulièrement saisissante dans les séquences guerrières de la fin, rythmées par de longs travellings combinant avec brio incendies multiples, mouvements de troupes, machines de siège et les allers-retours insensés des protagonistes, le tout presque sans dialogues, accompagné seulement du sifflement féroce du vent : Akira Kurosawa s’en souviendra pour Ran quinze ans plus tard (œuvre à laquelle le cinéaste russe vouera un grande admiration).
Cordelia (Valentina Sendrikova) débarque à Douvres pour sauver son père avec l’armée de son royal époux, mais la situation tourne au tragique.
 Pendant son travail, Kozintsev échange une correspondance nourrie avec Peter Brook qui filme alors la même matière au Danemark (cf. infra), pour constater que leurs approches du drame sont opposées. Pour Brook, le pays de Lear est un petit royaume rural, alors que le Russe voit dans cet univers « féodal » le masque d’une civilisation qui cache sa sauvagerie foncière et chemine vers son anéantissement. Ainsi que le souligne Marcel Oms, Kozintsev a « donné un peuple au Roi : ce n’est pas seulement l’histoire d’un homme, c’est la tragédie du monde », les scènes de destruction ayant pour fonction de « projeter à l’échelle historique la dimension des tragédies individuelles » (G. Kozintsev, Anthologie du cinéma t. 9, Paris, 1976, p. 473). Titan qui se croit inébranlable, Lear comprend progressivement la vraie condition humaine en vivant douleurs et déchirements de ses sujets qu’il avait jusque-là ignorés. La descente progressive dans son enfer se traduit par l’enfer des hommes, leur fureur, leur cupidité et leur haine. Son film est, dès l’ouverture devant le château royal, rythmé visuellement par le leitmotiv d’une « marche des mendiants », victimes de l’injustice et de l’inégalité de la société ; cette horde de sans-abris est bientôt rejointe dans son cheminement silencieux par Edgar, Kent, Gloucester, Cordelia et Lear lui-même qui tous ont eu le tort de penser qu’ils sont « au-dessus » de ce monde. En conclusion de la tragédie et de son champ de ruines fumantes devant Douvres, Kozintsev montre le bouffon qui, bousculé par la soldatesque, joue sur sa flûte une mélodie de Chostakovitch : la musique, l’humour et le petit peuple survivent toujours aux horreurs des gouvernements. Une vision marxiste non doctrinaire, si l’on veut, mais qui ne détourne à aucun moment les intentions profondes de la pièce.
Pour son casting, le cinéaste rejette toute forme de jeu scénique et a préféré choisir des acteurs qui n’ont jamais joué Shakespeare au théâtre. La principale difficulté a donc été de dénicher un Lear adéquat. Tombé pratiquement à la veille du tournage, le choix final du comédien Jüri Jevgenievich Järvet (un Estonien inconnu qui doit être doublé en russe), après une myriade de tests avec des acteurs cotés et expérimentés, déboussole l’équipe de production. Mais, acharné et têtu, Kozintsev décèle dans ce mime plutôt petit, homme-oiseau à la chevelure blanche désordonnée, tête de pomme ridée, doux, nerveux, rageur, un brin excentrique, la capacité d’exprimer parfaitement l’ironie amère nourrie par la souffrance, puis la sagesse et l’amour engendrées par la folie. Ce Lear-là ne remplit pas l’écran et n’écrase pas son entourage comme le font Orson Welles, Paul Scofield ou Laurence Olivier, mais sa rage et sa tragédie n’en sont pas moins royales. Autre trouvaille que le bouffon anxieux et vulnérable d’Oleg Dahl, lutin au crâne rasé, recroquevillé, abattu tel un survivant d’Auschwitz, le désespoir de sa propre impuissance dans les yeux, lui qui a tout deviné mais que personne ne veut écouter : étant plus intelligent et plus lucide que Lear, il a saisi toutes les motivations des personnages et Kozintsev/Pasternak lui confèrent un rôle proche du chœur antique grec (Shakespeare le fait disparaître sans autre explication à la fin du IIIe acte).
Sorti en Union soviétique le 8 février 1971, Korol’ Lir est présenté pour la première fois à l’Ouest en mai lors d’une séance spéciale au Festival de Cannes, puis au « World Shakespeare Congress » de Vancouver (British Columbia) en août, en présence du cinéaste qui est acclamé avec un rare enthousiasme. Kozintsev décroche le Grand Prix et Yuri Yarvet le Prix spécial d’interprétation au Festival international de Téhéran en 1972, enfin leur film gagne encore un « Silver Hugo » au Festival de Chicago (novembre 1972) et une Médaille d’or au Festival de Milan en 1973. Lors de sa première exploitation en France (1974), quelques criticastres font la moue en parlant d’« académisme » alors que le film en est tout le contraire, comme l’avenir le démontrera : le Korol’ Lir de Kozintsev, écrira Marcel Martin, « a parfaitement pénétré l’esprit de Shakespeare et le traduit dans un style plastique d’une noblesse souveraine » (Le cinéma russe et soviétique, Centre Georges Pompidou, Paris, 1981, p.87). Son film est reconnu aujourd’hui comme une œuvre hautement personnelle, réfléchie et maîtrisée, sans conteste la plus saisissante transposition de ce drame difficile et complexe à l’écran. – À titre de curiosité, dans King Lear (1987), sa déconstruction punk et absurde de la pièce, Jean-Luc Godard engage Freddy Buache, directeur de la Cinémathèque suisse, pour le rôle d’un certain « Professeur Quentin Kozintsev ». No comment.
DE: König Lear, ES: El rey Lear, IT: Re Lear.
1971* King Lear (US/GB/DK) de Peter Brook
Michael Birkett, Mogens Skot-Hansen/Filmways, Inc.-Lanterna-Athena-Royal Shakespeare Company, 137 min. – av. Paul Scofield (Lear), Irene Worth (Goneril), Anne-Lise Gabold (Cordelia), Susan Engel (Regan), Cyril Cusack (duc d’Albany), Ian Hogg (Edmund), Robert Langdon Lloyd (Edgar), Alan Webb (duc de Gloucester), Patrick Magee (duc de Cornouailles), Tom Fleming (comte de Kent), Jack MacGowran (le bouffon), Soeren Elung-Jensen (le duc de Bourgogne), Barry Stanton (Oswald).
Une des mises en scène les plus célèbres de la pièce, due à Peter Brook en mai 1962. En Grande-Bretagne, le Lear de Paul Scofield a été désigné comme la plus grande interprétation d’une pièce de Shakespeare de toute l’histoire de la Royal Shakespeare Company. Une décennie plus tard, afin d’immortaliser cette création, Brooks transforme sa mise en scène en un film excentrique qu’il tourne en hiver 1971 en 16 mm noir et blanc sur la péninsule enneigée de Jutland avec ses châteaux (Spoettrup), au Danemark. Entretemps, Scofield, longtemps cantonné au théâtre, a percé au cinéma et remporté un Oscar à Hollywood pour son interprétation de Sir Thomas More dans A Man for All Seasons (Un Homme pour l’éternité) de Fred Zinnemann (1966). Fortement marqué par la pièce Fin de partie de Samuel Beckett, mais aussi par le cinéma d’Ingmar Bergman, située dans un monde dévasté où les personnages, physiquement handicapés, attendent la mort, Brooks présente le drame shakespearien comme « une moralité clownesque », la tragédie de l’absurde et du grotesque. Ses acteurs évoluent dans un paysage post-apocalyptique, sans soleil, désertique. Scofield évite jusqu’au bout toute sentimentalité pouvant provoquer de la sympathie pour son patriarche égaré, sénile et aux cheveux blancs. Dans le New Yorker, la redoutable critique Pauline Kael propose, sarcastique, de changer le titre du film en La Nuit des morts-vivants.
1971(tv) König Lear (DE-RDA) de Friedo Solter
Deutscher Fernsehfunk, Ost-Berlin (DFF 9.4.71), 193 min. – av. Wolfgang Heinz (Lear, roi de Bretagne), Christine Gloger (Goneril), Katja Paryla (Regan), Karin Gregorek (Cordelia), Dietrich Körner (duc de Kent), Adolf-Peter Hoffmann (Gloucester), Christian Grashof (Edgar), Dieter Mann (Edmund), Herwart Grosse (le bouffon), Horst Hiemer (duc de Cornouailles), Christoph Engel (duc d’Albany), Carl-Hermann Risse (le roi de France), Wolfgang Lohse (duc de Bourgogne), Heinz Hinze (Oswald).
1974(tv) King Lear (GB) minisérie de Tony Davenall
Tony Davenall, Charles Warren/Thames Television Ltd. (London) (ITV 24.9.-5.11.74), 120 min., 6 x 20 min. – av. Patrick Magee (Lear, roi de Bretagne), Ann Lynn (Regan), Beth Harris (Goneril), Wendy Allnutt (Cordelia), Robert Coleby (Edgar), Patrick Mower (Edmund), Philip Brack (duc d’Albany), Ronald Radd (comte de Gloucester), Ray Smith (comte de Kent), Ellis Jones (le bouffon), Peter Jeffrey (duc de Cornouailles).
Une curiosité : la pièce découpée en six tranches et raccourcie de presque une heure et demie (le bouffon disparaît en grande partie), filmée avec un budget dérisoire aux studios de Teddington et en extérieurs dans le Middlesex. La formule de la minisérie permet une exploitation dans les collèges, mais hélas, l’interprétation laisse sérieusement à désirer. Avec une exception : la BBC étant en grève, Thames Television peut s’offir quelques comédiens inoccupés et sinon financièrement inabordables pour elle. Ainsi Patrick Magee, qui a interprété le marquis de Sade dans le film Marat/Sade de Peter Brook en 1967 et a frappé les cinéphiles dans deux films majeurs de Stanley Kubrick (Mr. Alexander, la victime brutalisée de A Clockwork Orange en 1971 et le chevalier borgne de Balibari dans Barry Lyndon en 1975). Magee a déjà campé le duc de Cornwall dans le King Lear de Richard Brook en 1970 (cf. supra).
1974(tv) King Lear (US) d’Edwin Sherin
« Great Performances », Edwin Sherin, Joseph Papp/New York Shakespeare Festival-Public Broadcasting Service (PBS) (PBS 20.2.74), 175 min. – av. James Earl Jones (Lear, roi de Bretagne), Douglass Watson (Kent), Paul Sorvino (Gloucester), Raúl Juliá (Edmund), Rosalind Cash (Goneril), Lee Chamberlin (Cordelia), René Auberjonois (Edgar), Ellen Holly (Regan), Robert Stattel (duc d’Albany), Robert Lanchester (duc de Cornouailles), Lou Quinones (duc de Bourgogne), Jean-Pierre Stewart (le roi de France), Frederick Coffin (Oswald), Tom Aldredge (le bouffon).
Captation de la mise en scène du New York Shakespeare Festival au Delacorte Theatre (Central Park) en été 1973, avec réactions audibles des spectateurs.
1975(tv) King Lear (GB) de Jonathan Miller
« BBC Play of the Month », Cedric Messina/BBC Television (BBC One 23.3.75), 190 min. – av. Sir Michael Hordern (Lear, roi de Bretagne), Sarah Badel (Goneril), Angela Down (Cordelia), Penelope Wilton (Regan), Michael Jayston (Edmund), Frank Middlemass (le bouffon), John Shrapnel (duc de Cornouailles), Ronald Pickup (Edgar), Ewan Hooper (comte de Ken), Benjamin Withrow (duc d’Albany), Donald Gee (Oswald).
Une version très raccourcie de la tragédie, reprise de la mise en scène de Jonathan Miller au Nottingham Playhouse (1969) avec Hordern (Lear) et Middlemass (le bouffon). Décors monochromatiques, caméra presque immobile.
1979(tv) Re Lear (IT) de Giorgio Strehler (th) et Carlo Battistoni (tv)
Radiotelevisione Italiana (RAI)-Piccolo Teatro di Milano (RAI Due 5+6.10.79), 111 + 112 min. – av. Tino Carraro (Lear, roi de Bretagne), Ottavia Piccolo (Cordelia), Lia Tanzi (Goneril), Anna Rossini (Regan), Franco Patano (le roi de France), Franco Alpestre (comte de Kent), Renato De Carmina (comte de Gloucester), Antonio Fattorini (Edgar), Orlando Mezzabotta (duc de Cornouailles), Giuseppe Pambieri (Edmund), Franco Patano (roi de France), Furio Ricciardi (Oswald).
Captation de la célèbre mise en scène de Giorgio Strehler au Piccolo Teatro de Milan (1972/73).
1981(tv) Le Roi Lear (FR) de Daniel Mesguich (th) et Jean-Marie Coldefy (tv)
(TF1 17.7.81), 120 min. – av. Philippe Morier-Genoud (Lear, roi de Bretagne), Catherine Rougelin (Cordelia), Anne Rondags (Goneril), Catherine Berriane (Regan), Jean-Luc Bucquet (Edmund), Redjep Mitrovitsa (Edgar), Éric Frey (le bouffon), Yves Gourvil (duc de Cornouailles), Alain Lenglet (Oswald), Serge Merlin (duc de Bourgogne), Gerald Robard (comte de Gloucester).
Captation de la mise en scène de Daniel Mesguich au Palais des Papes à Avignon.
1982(tv) King Lear (GB) Jonathan Miller
« The Shakespeare Plays » (saison 5), Shaun Sutton/BBC Television-Time Life (BBC Two 19.9.82), 200 min./185 min. – av. Sir Michael Hordern (Lear, roi de Bretagne), Gillian Barge (Goneril), Brenda Blethyn (Cordelia), Penelope Wilton (Regan), Harry Waters (le roi de France), John Shrapnel (comte de Kent), Norman Rodway (comte de Gloucester), David Weston (duc de Bourgogne), Julian Curry (duc de Cornouailles), John Bird (duc d’Albany), Anton Lesser (Edgar), Michael Kitchen (Edmund), Frank Middlemass (le bouffon), John Grillo (Oswald).
Michael Hordern et Penelope Wilton reprennent leurs rôles de Lear et de Regan (cf. dramatique de la série « Play of the Month » pour la BBC en 1975) ; les costumes et les décors sont également identiques. Jonathan Miller avait déjà dirigé Hordern (Lear) et Frank Middlemass (le bouffon) sur les tréteaux du Nottingham Playhouse en 1969. C’est initialement Robert Shaw qui devait interpréter Lear, mais son décès en août 1978 retarda toute la mise en chantier.
1983* (tv+ciné) King Lear (GB) de Michael Elliott
David Plowright, Laurence Olivier/Granada Television-National Theatre Company (Channel Four 3.4.83), 159 min. – av. Sir Laurence Olivier (Lear, roi de Bretagne), Diana Rigg (Regan), Dorothy Tutin (Goneril), Anna Calder-Marshall (Cordelia), Leo McKern (comte de Gloucester), Colin Blakely (comte de Kent), Jeremy Kemp (duc de Cornwall), Robert Lindsay (Edmund), David Threlfall (Edgar), John Hurt (le bouffon), Robert Lang (duc d’Albany), Jeremy Kemp (duc de Cornouailles), Brian Cox (duc de Bourgogne), Edward Petherbridge (le roi de France), Geoffrey Bateman (Oswald), Esmond Knight (le vieillard), Paul Curran (le médecin).
Laurence Olivier aborde le rôle pour la deuxième fois à l’âge de 75 ans, entouré d’une affiche de grande classe (Diana Rigg, John Hurt, Leo McKern, etc.). « Lear est le seul rôle de vieillard du répertoire classique, je ne pouvais pas le rater », dit-il. (Faye Dunaway a renoncé à interpréter Regan pour jouer dans la bande d’aventures The Wicked Lady de Michael Winner.) Le tournage – avec un budget exorbitant de 1,5 million de livres – s’effectue en automne 1982 aux Quay Street Studios de Granada Television à Manchester sous la supervision du producteur David Plowright, beau-frère d’Olivier. Le décorateur Roy Stonehouse replace l’action dans un univers celte d’avant les Romains, une initiative originale, et on déverse 3'400 litres d’eau froide sur les acteurs pour les scènes d’orage. Olivier avait joué précédemment Lear en 1946, à l’âge de 39 ans, à l’Old Vic Theatre, mais son interprétation avait déçu et été éclipsée par la performance d’Alec Guinness dans le rôle du bouffon. Avec cette nouvelle prestation, Olivier décroche aux États-Unis le dernier de ses nombreux Emmy Awards comme meilleur acteur. Il souhaitait déclamer ses longs discours en une seule prise mais n’y parvint pas, épuisé par la maladie (c’est son dernier rôle shakespearien, il décède en 1989). La version américaine (diffusée le 26.1.84, Mobil Showcase Network) comporte une introduction par Peter Ustinov filmée à Stonehenge, cadre évoquant la légende du mythique roi Leir et de ses ancêtres druides.
1983-1985[Ran [Chaos] (JP/FR) d’Akira Kurosawa; Greenwich Film Productions (Serge Silberman)-Nippon Herald Films-Herald/Asmic Ace, Inc., 162 min. – av. Tatsuya Nakadai (le vieux daimyo Hidetora Ichimonji [=Lear]), Akira Terao, Jinpachi Nezu. – Une transposition magistrale, sanglante et spectaculaire dans le Japon médiéval, tournée sur les flancs du Mont Fuji et aux châteaux de Kumamoto et Himeji. Les trois filles y deviennent trois fils. En 1985 le film le plus cher jamais tourné au Japon.]
1992(tv) König Lear (DE) de Dieter Dorn (th) et C. Rainer Ecke (tv)
Münchner Kammerspiele-Bavaria (Munich) (BR 28.2.92), 273 min. – av. Rolf Boysen (Lear, roi de Bretagne), Heinz Bennent (le bouffon), Gisela Stein (Goneril), Franziska Walser (Regan), Stefani Jarke (Cordelia), Manfred Zapatka (duc d’Albany), Arnulf Schumacher (duc de Cornouailles), Claus Eberth (comte de Kent), Thomas Holtzmann (comte de Gloucester), Stefan Hunstein (Edgar), Michael von Au (Edmund), Michael Tregor (le roi de France), Michael Seyfried (duc de Bourgogne), Horst Kotterba (Oswald).
Captation de la mise en scène des Münchner Kammerspiele à Munich où Rolf Boysen fait une création mémorable qui est restée dans les annales du théâtre germanophone d’après-guerre.
1998* (tv) King Lear (GB/US) de Richard Eyre
Série « Performance »/« Masterpiece Theatre », Sue Birtwistle, Joy Spink/BBC Television-Chestermead Production Ltd. (London)-WGBH Boston-Public Broadcasting Service (BBC Two 21.3.98 / PBS 11.10.98), 169 min. – av. Ian Holm (Lear, roi de Bretagne), Barbara Flynn (Goneril), Victoria Hamilton (Cordelia), Amanda Redman (Regan), David Lyon (duc d’Albany), Michael Simkins (duc de Cornouailles), Timothy West (comte de Gloucester), Michael Bryant (le bouffon), David Burke (comte de Kent), Paul Rhys (Edgar), Finbar Lynch (Edmund), William Osborne (Oswald), Adrian Irvine (roi de France), Nicholas Bailey (duc de Bourgogne).
La mise en scène de Richard Eyre sur la scène de Cottlesloe au Royal National Theatre à Londres en 1997 remporte un tel succès (cinq mois d’exclusivité) que la BBC et ses partenaires américains la font filmer aux studios de Shepperton (Surrey) dans des décors minimalistes mettant l’accent sur le jeu des acteurs ; la scène d’ouverture se déroule dans une salle aux parois et aux meubles rouges comme du sang séché, seulement illuminée par des torches ; le blanc et le gris dominent les autres décors monochromes. Ian Holm joue Lear avec une énergie virile décuplée qui se retourne contre lui, aboyant ses ordres, robuste, violent et inconstant. Il remporte le Lawrence Olivier Award pour sa prestation sur scène (la mise en scène de Richard Eyre aussi) tandis que celle de la version télévisée lui vaut une nomination à l’Emmy Award à Hollywood.
1999King Lear (GB) de Brian Blessed et Tony Rotherham
Bob Carruthers, Vanessa Tovell/Cromwell Productions Ltd. (London)-A-Z Russian Services-Lamancha Productions Ltd. (West Linton), 190 min. – av. Brian Blessed (le roi Lear), Hildegarde Neil (le bouffon), Phillipa Peak (Cordelia), Claire Laurie (Regan), Caroline Lennon (Goneril), Paul Curran (le roi de France), Graham McTavish (duc d’Albany), Mark Denny (duc de Cornouailles), Robert Whelan (comte de Gloucester), Jason Riddington (Edmund), Mark Burgess (Edgar), Iain Stuart Robertson (comte de Kent), Mark Hayden (Oswald).
Brian Blessed (Guildford Shakespeare Company) campe un Lear puissant, brutal et violent dans cette version cinématographique ampoulée et sans surprises, dont les extérieurs sont filmés en Écosse. Décevant malgré sa figuration et ses scènes de bataille spectaculaires.
2007(tv) Le Roi Lear (FR/FN) de André Engel (th) et Don Kent (tv)
Idéale Audience (Paris)-Arte-TV5-C.N.D.P. (Paris)-YLE Teema (Helsinki)-Youel Murray (Arte 20.9.07), 161 min. – av. Michel Piccoli (Lear, roi de Bretagne), Anne Sée (Goneril), Lisa Martino (Regane), Julie-Marie Parmentier (Cordelia), Gérard Desarthe (comte de Kent), Thierry Bosc (duc de Gloucester), Gérard Watkins (Edmund), Jérôme Kircher (Edgar), Gilles Kneusé (duc de Cornouailles), Jean-Paul Farré (le bouffon), Nicolas Bonnefoy (roi de France), Lucien Marchal (Oswald), Arnaud Lechien (duc de Bourgogne).
Captation de la mise en scène à l’Odéon-Théâtre de l’Europe à Paris.
2008(tv) King Lear (GB/US) de Trevor Nunn
Richard Price, Andy Picheta, Chris Hunt/Richard Price TV Associated Ltd. (London)-Royal Shakespeare Company, USA: Série PBS « Great Performances » (Channel Four 25.12.08 / KCET 25.3.09), 181 min./156 min. – av. Ian McKellen (Lear, roi de Bretagne), Romola Garai (Cordiela), Frances Barber (Goneril), Monica Dolan (Regan), William Gaunt (comte de Gloucester), Jonathan Hyde (comte de Kent), Philip Winchester (Edmund), Sylvester McCoy (le bouffon), Ben Meyjes (Edgar), Julian Harries (duc d’Albany), Guy Williams (duc de Cornouailles), Seymour Matthews (Curan), John Heffernan (Oswald), Peter Hinton (duc de Bourgogne), Ben Addis (roi de France).
Pour les cinéphiles, Sir Ian McKellen s’est révélé dans des rôles comme celui du cinéaste James Whale (Gods and Monsters, 1998) ou de Gandalf dans les fameuses trilogies de Lord of the Rings et The Hobbit créées par Peter Jackson. L’acteur connaît la tragédie de Shakespeare par cœur, ayant précédemment remporté un Drama Desk Award pour les rôles d’Edgar et de Kent (1973/74), puis triomphé dans celui de Lear avec la Royal Shakespeare Company au Courtyard Theatre de Stratford-upon-Avon en avril 2007. Par la suite, la mise en scène de Trevor Nunn est partie pour une tournée mondiale qui s’est achevée au New London Theatre de Drury Lane en janvier 2008 et a valu à McKellen une nomination au Laurence Olivier Award. Au lendemain de la dernière représentation, Trevor Nunn (qui avait déjà porté à l’écran Twelfth Night/La Nuit des rois en 1996 avec Helena Bonham Carter et le drame tudorien de Lady Jane en 1986) filme la pièce pendant un mois aux studios de Pinewood, en janvier-février. Sur scène, Ian McKellen apparaît nu dans la lande, mais la coproductrice américaine (PBS Television) censure ces images. L’acteur se console avec une nomination à l’Emmy Award (Hollywood).
2008(tv) König Lear (DE/AT) de Luc Bondy
3Sat-ZDFtheaterkanal-ORF (3Sat 29.3.08), 140 min. – av. Gert Voss (Lear, roi de Bretagne), Andrea Clausen (Goneril), Caroline Peters (Regan), Adina Vetter (Cordelia), Martin Schwab (comte de Gloucester), Klaus Pohl (comte de Kent), Birgit Minichmayr (le bouffon), Philipp Hauss (Edgar), Christian Nickel (Edmund), Roch Leibovici (roi de France), Johannes Krisch (duc de Cornouailles), Gerd Böckermann (duc d’Albany), Markus Hering (duc de Bourgogne).
Captation de la mise en scène de Luc Bondy au Burgtheater à Vienne (2007).