IV - ESPAGNE ET PORTUGAL

7. L’ÂGE DES CONQUISTADORS (XVe-XVIe s.)

La difficile conquête du Chili dans « La Araucana » (1971) de Julio Coll.

7.6. Autres terres conquises par les Espagnols et les Portugais

Uruguay, Guatemala, Argentine, Brésil, Bolivie, Chili, Ecuador, Venezuela, Paraguay, Floride, Californie, Porto Rico, Canaries, Kerala (Indes)
1908O Guarany – Canção do Aventureiro (BR)
William & Cia (Rio de Janeiro), 1 bob. - av. Antônio Cataldi, Santiago Pepe, Soller. – Brésil en 1560, drame d’amour entre un Indien Guarani et une aristocrate portugaise. Extrait de l’opéra d’Antônio Carlos Gomes, les comédiens chantent derrière l’écran. Cf. film de 1923.
1914O Guarani (BR)
40 min. – av. Georgina Marchiani (Doña Cecilia de Mariz). – Brésil en 1560, drame d’amour entre un Indien Guarani et une aristocrate portugaise. L’opéra d’Antônio Carlos Gomes, les comédiens chantent derrière l’écran. Cf. film de 1923.
1917/1918Tabaré (MX) de Luis Lezama et Juan Canals de Homs
Germán Camus/México Films S.A. (Compañía Mexicana de Películas), Ciudad de México, 10 bob./8 bob. (USA) - av. Enrique Castilla (Tabaré), Carmen Bonifant (Doña Blanca de Orgaz), Enrique Cantalaúba, Enrique Couto, Emilia Cassani, Matilde Cires Sánchez, Enrique Couto, Juan de Homs, Agustín R. Olloqui, Francisco Pesado, Pedro de la Torre, Carlos Vargas.
En 1527, le métisse Tabaré est capturé par les Espagnols au cours de la conquête sanglante de l’Uruguay. Libéré, il s’éprend de Blanca, la fille du conquistador Don Gonzalo de Orgaz. Durant l’attaque de cité par des caciques charrúas, Blanca est enlevée par leur chef Yamandú. Tabaré parvient à la sauver au péril de sa vie, mais le père de la belle, le prenant pour un des ravisseurs, lui plante son épée dans le cœur.
Considéré comme l’épopée nationale de l’Uruguay, le poème épique de Juan Zorrila de San Martín (1888) qui a inspiré le scénario est constitué de 4736 vers en dix chants ; il narre l’antagonisme entre le monde charrúa et l’espagnol qui aboutit à l’inévitable anéantissement du premier, tout en tirant son intrigue idyllique d’un contexte légendaire sans rapport avec la réalité de l’époque. Luis Lezama tourne cette première version à Boca del Río près de Veracruz avec du matériel technique importé de New York ; il réalisera un remake parlant de son film en apportant quelques modifications en 1946 (cf. infra).
1923Il Guarany (IT) de Salvatore Aversano
Sabaudo-film, Milano, 1984 m. – av. Elisenda Anovazzi (Doña Cecilia de Mariz), Gino Soldarelli (Peri), Anita Faraboni (Isabel), Fernando Ribacchi (Dom Alváro), Camillo De Rossi (Gonzáles), Armando Cresti (Ruy Bento), Vittorio Simbolotti (Dom Antonio).
Synopsis : Au Brésil, dans les alentours de Rio de Janeiro en 1560. Les Indiens Aymorés sont en guerre contre les Portugais dont un des soldats a blessé une jeune fille de la tribu, offense impardonnable. Dom Antônio de Mariz, vieil hidalgo et chef des mercenaires portugais, a promis de donner sa fille Cecilia (Cecy) en mariage à Dom Alvaro, jeune aventurier portugais. Mais Cecilia rencontre et s’éprend de Peri, chef indien de la tribu Guaranie, et celui-ci accepte d’aider les mercenaires dans leur lutte contre les Aymorès. Gonzáles, autre aventurier, conspire pour se saisir d’une mine d’argent et s’emparer du château de Dom Antônio ; il tente de violer Cecilia, mais Peri l’en empêche. Les amoureux sont alors capturés par les Aymorés. Le cacique empêche le sacrifice de la jolie aristocrate portugaise, la couronne reine de sa tribu et se propose de la prendre sur sa couche, tandis que Peri sera saigné avant d’être offert en pâture aux anciens de la tribu. L’intervention des soldats de Dom Antônio sauvent le couple au dernier moment. Gonzáles s’allie alors aux Aymorés et assiège le château, Dom Alvaro périt d’une flèche au combat, la bataille semble perdue d’avance. Peri veut s’enfuir avec Cecilia, mais Dom Antônio hésite de confier sa fille à un païen. L’Indien ayant renié ses dieux, le vieil hidalgo saisit son épée, baptise Peri puis, sacrifiant sa vie pour sauver celle de sa fille, met le feu aux barils de poudre. Cecilia et Peri s’enfuient et, au loin, contemplent le château en flammes.
L’intrigue échevelée provient du roman brésilien O Guarani de José de Alencar (1857) et de l’opéra-ballet en quatre actes qu’en tira Antônio Carlos Gomes, sur un livret italien d’Antonio Scalvini. La version muette du film colle au roman tout en reprenant en accompagnement la musique de l’opéra. Crée en 1870 lors d’un séjour du musicien brésilien en Italie, l’opéra devint un succès dans toutes les capitales d’Europe et le roi Victor Emmanuel II décora son auteur. La matière n’est pas entièrement inventée : l’opposition entre indiens Guaranis, de tempérament plus docile, et les Aymorès, redoutables guerriers anthropophages, est confirmée par nombre de chroniqueurs. Dom Antônio de Mariz, un des premiers gouverneurs portugais de la région de Guanabara, fut effectivement victime des mercenaires blancs à son service. Dans le Brésil esclavagiste du XIXe siècle dominé par l’aristocratie seigneuriale d’origine européenne, le récit de l’amour entre un Indien (un « bon sauvage » rousseauiste) et une Blanche souleva de nombreuses questions identitaires et sociétales, notamment celle de la destruction de l’héritage culturel autochtone par les colonisateurs. Les accords de l’ouverture de l’opéra constituent pour les Brésiliens une sorte de second hymne national. - Nota bene: La biographie de Gomes comprenant la création de son opéra et sa programmation à la Scala grâce à l’appui de Verdi a été portée à l’écran par Riccardo Freda en 1950 sous le titre de Guarany, avec Antonio Vilar dans le rôle du compositeur et Gianna Maria Canale dans celui de la cantatrice Jacqueline (tournage à Rome et au Brésil en 1948).
1936O descobrimento do Brasil / A descoberta do Brasil (La Découverte du Brésil) (BR) de Humberto Mauro
Alberto Campiglia/Brazilia Filme-Instituto do Cacau da Bahia, 83 min./60 min. (rest.). - av. Alvaro Costa (Pedro Alvarez Cabral), João de Deus (Ayres Correa), Manoel Rocha (le Père Vaz de Caminha), Alfredo Silva (Frère Henrique de Coimbra), De Los Rios (Duarte Pacheco), Armando Duval (Nicolau Coelho / Bartolomeu Dias), Arthur Oliveira (Pedro Escobar, le pilote), J. Silveira (Alfredo Cunha), Hélio Barroso (Edgar), Araçati, Costa Henrique, Humberto Mauro, João Mauro, João Baldi, Reginaldo Calmon, Artur Castro.
Synopsis : Le 9 mars 1500, l’armada du conquistador portugais Pedro Alvarez Cabral (v.1468-v.1520) quitte Lisbonne à destination des Indes (une carte animée montre la route suivie par la flotte), en passant par les îles Canaries, le Cap-Vert et São Nicolau. Dans la nuit du 23 mars, le navire de Vasco de Ataide disparaît. On poursuit le voyage à travers les eaux inconnues jusqu’à ce que, entre le 21 et le 22 avril, ils découvrent des signes de terre et aperçoivent le Monte Pascoal sur la côte brésilienne. Le 23 avril, ils contactent des indigènes locaux, les rencontres avec les Indiens sont amicales, ils aident l’équipage à reconstituer leurs provisions et à remplir les tonneaux d’eau. Pour finir, on célèbre avec pompe la première messe dite sur le nouveau continent (« l’île de Vera Cruz ») avec la participation de tout l’équipage et un grand nombre d’indigènes.
Si les premiers contacts avec les Indiens sont pacifiques (échanges de cadeaux et d’informations), les relations devinrent très vite intéressées de la part des Portugais qui s’approprièrent de force des terres et, considérant les indigènes comme inférieurs, leur imposèrent leurs lois et leurs transmettirent des maladies qui firent des ravages ; dans les siècles suivants, les rapports avec l’Indien dégénérèrent souvent en violences et bains de sang. C’est pour camoufler ce passé embarrassant que la littérature et la peinture brésiliennes du XIXe siècle recréent un passé fictionnel que ce film, encouragé dans un but pédagogique par le Ministère de l’Éducation et de Culture brésilien et l’Instituto Nacional de Cinema Educativo (INCE), est mis sur pied, en prenant pour modèle les productions de la LUCE mussolinienne : il doit en même temps servir à légitimer le nouveau programme nationaliste du président Getúlio Vargas. La narration se base en partie – les passages gênants sont omis - sur le récit épistolaire de la Carta de Pero Vaz de Caminha adressée au roi Dom Manuel de Portugal et la réalisation est confiée au prolifique documentariste Humberto Mauro qui, pour la pompeuse séquence finale illustrant la première messe célébrée sur terre brésilienne, reproduit fidèlement le fameux tableau de Victor Meirelles de Lima (A Primera Missa no Brasil, 1861), image qui présuppose que le christianisme fut assimilé « naturellement » par les « sauvages » et que ces derniers, fascinés, ont aidé à porter la croix géante. C’est du théâtre filmé – les acteurs n’ont aucune expérience cinématographique – passablement gauche et statique, une curiosité relevée surtout par la musique originale du grand Heitor Villa-Lobos. Le film représente le Brésil à la Biennale de Venise de 1938.
1945Villa Rica del Espíritu Santo / La carabela de la ilusión [ES] / Tierra de conquista [MX] (AR) de Benito Perojo
Ricardo Núñez/Pampa Films (Buenos Aires), 93 min. - av. Silvana Roth (Catalina de Carvajal / Beatriz de Guevara), Esteban Serrador (Licenciado Sombra), Ernesto Vilches (le Père Escalera), Homero Cárpena (Eloy), Pilar Muñoz (Doña Mencia), Nelly Darén (Isabel de Atienza), Armando Bó (Juan el Cazador), Fernando Lamas (le capitaine Guzmán), Horacio Priani (Antón Arcos alias Juan de Guevara), Stella Rios (Isabel de Atienza enfant), Manuel Perales (Pedro enfant), Antonio Martiánez (le Père Montoya), Ricardo Galache (le capitaine Añasco), Alberto Contreras fils (le capitaine Ruy Díaz de Melgarejo), María Esther Corán.
Synopsis (le récit est conté en flash-back par un prêtre) : En été 1537, des émigrants espagnols embarqués à Séville traversent l’Atlantique jusqu’à la nouvelle cité d’Asunción sur la rive du fleuve Paraguay, d’où ils pénètrent dans la jungle à la recherche des richesses d’« El Dorado » au sud du pays, dans l’actuelle Argentine. N’ayant rien trouvé, ils s’installent dans la région de Garatiberá où le conquistador Ruy Díaz de Melgarejo (1519-1602) fonde en 1570 la ville de Villa Rica del Espiritu Santo … une ville surtout « riche en rêves » persiflent certains. Elle est située à la frontière des territoires portugais selon le traité de Tordesillas (aujourd’hui Villarica au Paraguay). Les années passent. Catalina de Carvajal jalouse Isabel de Atienza, « l’enfant triste » que les hommes courtisent et dont les terres sont fertiles, cultivées par des Indios qui chantent en labourant. Catalina se laisse séduire par Juan de Guevara, un aventurier fantasque et mystérieux qui lui révèle l’existence d’une rivière de pierres précieuses et lui donne une émeraude en guise de promesse de mariage avant de disparaître dans la forêt. L’agriculteur Antón Arcos abandonne Isabel pour Catalina, mais celle-ci exige que son soupirant découvre d’abord la précieuse rivière. Guevara revient, à présent marchand d’un « élixir de l’éternelle jeunesse », et exige que Catalina l’épouse comme promis. Elle refuse. L’alcalde punit Guevara pour ses affabulations passées et condamne Catalina à subir le Jugement de Dieu en marchant pieds nus sur des braises, mais Arcos (qui n’est en réalité autre que Juan de Guevara) interrompt le supplice en annonçant avoir trouvé la fameuse rivière. Toute la population de Villa Rica est saisie d’hystérie et part à la recherche des trésors décrits, puis réalise, après une année de vaine quête, que le minéral si précieux n’est que du quartz. Furieux, les citoyens se compromettent avec des hors-la-loi portugais de San Pablo (les bandeirantes) et s’enrichissent en s’adonnant au commerce des esclaves noirs sur le littoral, jusqu’au jour où les jésuites fondent des missions et déclarent ce trafic illicite. Des années passent. Juan el Cazador (« le chasseur »), militaire au service des Portugais, fugue avec Beatriz de Guevara, la fille de Catalina et Guevara, et l’épouse tandis que les bandeirantes avides d’or attaquent la mission jésuite et incendient la ville. Mais Villa Rica del Espiritu Santo va renaître de ses cendres et la légende de Juan de Guevara en quête de sa fabuleuse rivière de diamants continuera à hanter sa population.
Une curieuse épopée de la colonisation traitée à la manière de DeMille par le Madrilène Benito Perojo, un vétéran inclassable et parfois original du cinéma ibérique (actif depuis 1913) qui, taxé de cosmopolitisme, fit divers films en France (ère muette), à Hollywood, en Allemagne, en Italie et en Argentine dans les années 1930/40, évitant ainsi les troubles de la guerre civile dans sa patrie. À Buenos Aires, il tourna neuf films – dont celui-ci - avant de revenir en Espagne où il renoncera à la réalisation pour devenir de 1952 à 1970 un des producteurs marquants de l’ère franquiste. Tout en célébrant la dynamique de la conquête, Perojo prend de sérieux risques en s’attaquant sans complaisance au passé colonisateur du Nouveau Monde, avec sa rapacité, ses chimères, ses délires collectifs, une approche alors totalement inédite dans le cinéma latino-américain. Filmée au printemps 1945 à El Talar de Pacheco et dans les studios de la Pampa Film à Buenos Aires (où sont érigés les décors de la cité coloniale), sa fresque est à l’époque un des films les plus chers jamais tournés en Argentine et tranche aussi radicalement sur le mélo urbain en cours. Tous ces efforts sont cependant handicapés par un scénario bancal d’Hugo Mac Dougall, une intrigue confuse, mal construite et surchargée de personnages peu développés. En salle, le film est un échec, malgré, ça et là, quelques critiques encourageantes soulignant le savoir-faire manifeste du réalisateur.
1946Tabaré (MX) de Luis Lezama
Luis Lezama Producciones (Ciudad de México)-Panamericana Films. - av. Rafael Baledón (Tabaré), Josette Simó (Blanca de Orgaz), Elena Dorgaz (Magdalena), José Baviera (Don Gonzalo de Orgaz), Ramón Sánchez (Caracé), Luana Alcañiz (Doña Luz de Orgaz), Daniel Pastor (Tabaré enfant), Luis Mussot (le Père Estebán), Gaby Dublán (Gualconda), Paco Martínez.
Synopsis : Vers 1510, une caravelle espagnole s’approche des côtes uruguayennes. À peine débarqué, le missionnaire Frère Juan célèbre le premier mariage espagnol en Amérique : celui de Magdalena, la fille du capitaine de la caravelle, avec un officier à bord. La cérémonie nuptiale est interrompue par l’attaque de caciques charrúas menée par Caracé. Le fiancé de Magdalena est tué, elle-même est enlevée par Caracé qui en fait sa femme et lui donne un fils. le métis Tabaré. Magdalena le fait baptiser. En grandissant, Tabaré révèle de grandes aptitudes à la chasse. Magdalena décède, les années passent, la lutte entre envahisseurs et autochtones se poursuit. Adulte, Tabaré est capturé par les Espagnols. Don Gonzalo de Orgaz, qui vit dans une petite colonie avec sa sœur Blanca et son épouse Luz, fait libérer l’Indien. Blanca s’intéresse à ce « sauvage » toujours plongé dans une rare tristesse tandis que Luz déteste les caciques. Après s’être battu contre une poignée de soldats hispaniques qui le tourmentaient, Tabaré est expulsé du quartier blanc et se réfugie en forêt, dans la cabane du Frère franciscain Estebán. Les Indiens charrás s’attaquent au village blanc et le chef Yamandú enlève Blanca, mais Tabaré, depuis toujours épris sans espoir de la jeune femme, intervient avec ruse, étrangle le ravisseur et ramène la jeune femme au village. Croyant que c’est lui qui a déshonoré sa sœur, Don Gonzalo le tue. – La tragédie d’un indigène qui n’a plus de place nulle part. Pour clore sa carrière, le prolifique réalisateur mexicain Luis Lezama fabrique ce remake parlant et augmenté de plusieurs épisodes de sa production muette de 1918 (cf. supra), deuxième adaptation du poème mélodramatique de Juan Zorrilla de San Martín (1888), filmé en novembre 1946 dans les studios Churubusco à Ciudad de México.
Juan Ponce de León empoisonné par une flèche indienne (« Hurricane Island »).
1951Hurricane Island (US) de Lew Landers
Sam Katzman/Kay Pictures, Inc.-Columbia Pictures Corp., 71 min. - av. Jon Hall (cpt. Carlos Montalvo), Edgar Barrier (Juan Ponce de León), Marie Windsor (la pirate Jane Bolton), Marc Lawrence (le pirate Angus Macready), Romo Vincent (José), Karen Randle (Maria), Jo Gilbert (Okahla), Nelson Leigh (un Père), Marshall Reed (Rolle), Don Harvey (Valco).
Synopsis : Le jour de Pâques 1513, l’expédition espagnole menée par Juan Ponce de León (c.1460-1521), gouverneur de Porto Rico, débarque au sud-ouest de la Floride où elle s’approprie des terres au nom du roi d’Espagne. Mais, égarés dans les marécages, les intrus sont attaqués par des Indiens et leur commandant blessé par une flèche empoisonnée ; il est ramené d’urgence à Cuba où les médecins sont impuissants. Un chamane révèle que le conquistador est sous l’influence de Hurrican, le dieu des vents, et qu’il lui faut retourner en Floride pour y trouver le reliquaire secret du dieu, une « Fontaine de jouvence » en or dont le lieu est marqué sur une carte. Appâtée, la femme-pirate Jane Bolton tente vainement d’apprendre où se trouve ce lieu mythique et rejoint un groupe de prostituées que Ponce de León a réunies pour peupler les nouvelles conquêtes territoriales. Elle essaye de séduire le second du commandant, le séduisant capitaine Carlos Montalvo ; nullement dupe, celui-ci met le feu au galion pirate d’Angus Macready, le compère de Jane. À terre en Floride, Jane et Macready échouent à s’emparer de la carte ; prisonnière, Jane est troublée par Montalvo. Vasco, un jeune guerrier indigène hostile aux Espagnols veut les anéantir, mais il en est empêché par Okahla, la grande prêtresse de la Fontaine qui veut imposer la paix. Vasco s’allie aux pirates, mais entretemps, Okahla a guéri Ponce de León avec l’eau magique, et lorsque leurs ennemis attaquent, elle appelle le dieu Hurrican et déclenche un ouragan qui les anéantit. Montalvo tue Macready, puis emmène Okahla, rétive, sur le navire, mais celle-ci se transforme en vieille femme et meurt. Ponce de León salue son esprit de paix, de sagesse et d’harmonie.
Selon une légende populaire, Ponce de León aurait découvert la Floride alors qu’il était à la recherche de la Fontaine de jouvence, propos réfutés par les historiens qui affirment que le conquistador était bien plus intéressé à guérir sa syphilis et à répondre aux exigences expansionnistes de Madrid. La légende est reprise dans cette bande médiocre et hautement fantaisiste bricolée en SuperCinecolor en octobre 1950 sur le « backlot » des studios Columbia à North Gower Street par un briscard du film d’aventures fauché. Pour amateurs incorrigibles de cinéma-bis. - IT : L’isola dell’uragano, MX : La isla maldita, PT : A ilha dos furacões.
1954La principessa delle Canarie / Tirma (Conquête héroïque) (IT/ES) de Paolo Moffa, Carlos Serrano de Osma et Pietro Francisci
Carlos Serrano de Osma, Carlo Bessi, Martin Probaram, M. Kugel/Film Costellazione Produzione (Roma)-I.N.F.I.E.S. (Madrid), 105 min./98 min. - av. Silvana Pampanini (la princesse Guayarmina/Almadena), Marcello Mastroianni (cpt. Don Diego Hernán), Gustavo Rojo (Bentejuí), José Maria Lado (Fayçan, le Grand Prêtre), Elvira Quintillá (Tasirga), Anibal Vela (le gouverneur), José Maria Rodero (Don Alvaro), Félix de Pomés (Guanazteml / Guanateme), Julio Riscal (Pedro), Aníbal Vela (le gouverneur), Salvador Soler Marí (cpt. Miguel de Carvajal / de Trejo), Nicolás Puga, Plácido Bermúdez (Frère Antonio), Dante Tulipano.
Synopsis : En 1470, les Rois Catholiques envoient un contingent militaire sur la Grande Canarie pour y renforcer pacifiquement leur « colonisation bienveillante », la petite garnison espagnole ayant été massacrée par les indigènes. L’attaque a été organisée par le fougueux guerrier Bentejuí et le Grand Prêtre Fayçan pour regagner à tout prix leur autonomie, mais contre la volonté du vieux roi Guanazteml et de sa fille Guayarmina, partisans de la paix à tout prix. Les Espagnols brûlent à leur tour un village et, en signe de bonne volonté, Guanazteml autorise les Castillans à s’installer sur une partie délimitée de l’île. Guayarmina se laisse séduire par un bel officier espagnol, Don Diego Hernán (qui ignore qui elle est), ce qui contrevient aux plans de Fayçan : éliminer le roi, placer la jeune femme sur le trône et la marier à Bentejuí, ennemi des intrus. Guanazteml meurt empoisonné, mais sa fille, à présent souveraine de l’île, refuse de s’unir à Bentejuí. L’Espagne envoie de nouvelles troupes pour renforcer sa présence tandis que Don Diego est chargé de négocier en parlementaire avec la reine. En aparté, elle s’oppose à une vie à deux à Madrid comme le lui propose son amoureux. Sur le chemin du retour, la délégation des parlementaires tombe dans une embuscade de Fayçan. Don Diego s’en sort et les Espagnols incendient un village en retaliation, ce que, à l’incitation du Grand Prêtre, les indigènes et Guayarmina considèrent comme une trahison des accords de paix. Furieuse, la reine accepte de s’unir à Bentejuí, l’île est en feu. Guayarmina revoit Diego en secret pour s’expliquer, mais il est trop tard : Canariens et Castillans s’affrontent dans une sanglante bataille rangée au pied de la forteresse canarie d’Ansite que ces derniers gagnent grâce à leurs arquebuses, leurs canons et leur cavalerie. Fayçan périt, Bentejuí s’enfuit à cheval avec la princesse sur les flancs de Tirma, la montagne sacrée. Diego sauve sa bien-aimée de justesse tandis que l’Indien se jette dans un précipice. L’Amour, toujours !
Le cas d’école d’un projet ambitieux qui déraille pour des raisons de coproduction, de gros sous et de politique culturelle. À l’origine, une pièce de théâtre poétique intitulée Tirma. Romance de la conquista de la Gran Canaria (1947), rédigée par Juan del Rio Ayala, un écrivain-ethnologue des Canaries spécialisé dans la culture indigène locale et qui aborde avec sa pièce l’incorporation forcée des îles de l’Atlantique dans la géographie des routes commerciales castillanes. En effet, entérinée par le traité d’Alcaçovas en 1479, la mainmise sur les îles Canaries mit fin à des querelles de succession avec le Portugal qui se consola avec la région côtière de l’Afrique occidentale. (La chose n’alla pas de soi, car la fureur des Canariens avait déjà fait échouer une tentative de colonisation française par Jean de Béthencourt en 1402). La pièce, sortie avec succès le 11 octobre 1949 à Las Palmas, a pour fil conducteur la romance entre une guayarmina (princesse) canarie et un jeune capitaine espagnol. Or, en avril 1953, à l’occasion du 470ème anniversaire de ce rattachement à la Couronne de Castille, le cinéaste Carlos Serrano de Osma (surréaliste de gauche et critique de cinéma madrilène auquel on doit un onirique Parsifal avec Gustavo Rojo filmé en Catalogne deux ans plus tôt) annonce la mise en chantier de Tirma, à tourner sur place en respectant les recherches historiques originales de l’auteur de la pièce. Mais les capitaux hispaniques pour ce type de projet manquent et on se tourne vers l’Italie dont le cinéma est habitué aux films en costumes décomplexés. La société Costellazione à Rome impose un co-réalisateur, Paolo Moffa, qui co-dirigea sans gloire Les derniers jours de Pompéi avec Marcel L’Herbier en 1950, et, à l’affiche la star du moment, Silvana Pampanini (Poppée dans O.K. Nerone), flanquée d’un tout jeune Marcello Mastroianni en armure de conquistador (une curiosité) et de l’Uruguayen Gustavo Rojo. Serrano de Osma doit se contenter de superviser la version espagnole. La grande bataille finale est confiée à un habitué du péplum, Pietro Francisci (Attila avec Anthony Quinn, deux Hercule incarnés par Steve Reeves) qui, avec quelque deux mille figurants du crû à disposition, s’en donne à cœur joie. On filme dans un Ferraniacolor pétaradant de la mi-mai à début septembre 1954 aux studios de la Sevilla Films à Madrid, à Cinecitta à Rome et surtout à la Grande Canarie (Tejeda, Bentayga, Gáldar, Las Palmas, parc naturel de Tamadaba). Huit scénaristes ont malmené la matière originale, transformant ce qui se voulait le récit de cinq ans de résistance acharnée des insulaires, de 1478 à 1483, suivi de la destruction des modes de vie ancestrales, de l’esclavage et de l’expropriation, en une cascade de clichés mensongers, en une lecture eurocentrique de colonisation et de « civilisation positive ». (La phase initiale de l’invasion espagnole de l’archipel avait d’ailleurs été financée par l’évêque de Rubicón, Juan de Frias.) Pareille conquête n’a donc rien d’« héroïque » (comme la qualifie idiotement le titre français) vu la disproportion des forces. À l’écran, aucune recherche ethnographique a été prise en compte : les aborigènes rebelles (les guanches ou Inekarens) ont des coupes de cheveux iroquoises ou huronnes et sont costumés tantôt en Polynésiens, tantôt en Incas ou en Sénégalais emplumés, sans doute venus de l’Afrique voisine. Ceux qui s’opposent à la pacification blanche sont obligatoirement tous des complotistes assassins, si possible aussi des prêtres païens. En réalité, le chef Guanazeml/Guanateme n’a pas été lâchement empoisonné par les siens, comme le veut le scénario, mais capturé et ultérieurement baptisé sous le nom de Fernando en honneur de son « bienfaiteur », le roi de Castille. Seuls facteurs vaguement authentiques : le leader guanche Benetjuí et le Fayçán (prêtre) de Telde se sont suicidés au cri de « pour ma Terre ! ». Quant au héros du film, Pérez de Guzmán, on sait qu’il fut gouverneur de Grande-Canarie de 1518 à 1520 alors que la princesse de son cœur dans le film n’était qu’une enfant au moment des combats. Bref, La Principessa delle Canarie alias Tirma, reflet de l’union discrète entre la Démocratie chrétienne d’Andreotti à Rome et le national-catholicisme franquiste, est une déception pour tout le monde : les patriotes canariens qui se sentent trahis, la presse de cinéma (le film est médiocre) et le public. Il est projeté hors concours au Festival de San Sebastián 1955 avant de passer aux oubliettes. - MX : La princesa de las Canarias, US : The Island Princess, BE : Déesse des Tropiques, PT : A Princesa das Canárias, DE : Aufstand im Inselparadies.
1962(tv-mus) Cabeza de Vaca (US) de Joseph K. Chomyn
Pamela Ilott Prod., New York (CBS 10.6.62), 45 min. – av. Ronald Holgate (Alvar Nuñez Cabeza de Vaca), Rudolph Petrak (Charles Quint), Bruce Zahariades (Angel). – Première mondiale de la cantate de George Antheil sur un livret de Allan Dowling (1955) : en 1528, l’explorateur espagnol Cabeza de Vaca monte son expédition en Floride dont les navires feront naufrage. Cf. film de 1990/91.
1966Kunjali Marakkar (IN) de S. S. Rajan
T. K. Pareekutty/Chandrathara Productions, Kerala (parlé malayalam), 147 min. – av. Kottarakkara Sridharan Nair (cpt. Kunjali Marakkar), Prem Nazir (Antonio le Portuguais), Premji (Zamorin de Calicut), Prem Nazir (Antonio / Narajana Nair), P. J. Anthony (le neveu de Zamorin), Adoor Bhasi, S. P. Pillai, Kottayam Chelappan, P. J. Anthony, G. K. Pillai.
Entre 1520 et 1600, le légendaire capitaine corsaire Marakkar (un titre honorifique décerné par l’amirauté de la flotte royale de Calicut) affronte la flotte portuguaise qui contrôle la côte de Malabar (Kérala) en Inde depuis le passage de Vasco de Gama et ses navires chargés par le roi Manuel du Portugal d’une mission colonisatrice à la fois religieuse, politique et économique en 1498 ; le navigateur portugais, considéré en Inde comme le premier colonialiste européen, s’était alors vanté d’avoir « découvert les Indes », une contre-vérité flagrante (cf. chap. 7.3). Le film décroche le Prix National du Cinéma décerné au meilleur long métrage de l’année.
Un petit Français bon à manger dans le film de Nelson Pereira dos Santos (1971).
1971* Como era gostoso o meu Françés (Qu'il était bon mon petit Français !) (BR) de Nelson Pereira dos Santos
Nelson Pereira dos Santos/Condor Filmes-Luiz Carlos Barreto Produções Cinematográficas-Regina Filmes (Rio de Janeiro), 87 min./84 min. – av. Arduíno Colassanti (le Français), Anna Maria Magalhães (Seboipepe, sa compagne), Eduardo Imbassahy Filho (Cunhambebe), José Kléber (Ipiraguaçu), Gabriel Archanjo (Mbiratata), Manfredo Colassanti (le marchand), Gabriel Araújo, Marlete Ribeiro Barbosa, Ana Batista, João Amaro Batista, Heloisa de Carvalho, Gildete Dos Santos, Lidia Maria Dos Santos, Hélio Fernando, Erley Freitas, Luiz Carlos Lacerda.
Synopsis : Au Brésil en 1594, un demi-siècle après l’arrivée des Européens. Un Français est capturé par la tribu cannibale des Tupinambás, alliée des Français, ennemie des Tupiniquins et des barbares esclavagistes portugais. Comme il est pris pour un de ces derniers, et pour venger la mort de Tapiruçu, le mari de Seboipepe tué par les Portugais, le chef Cunhambebe décide de manger le prisonnier lors d’une cérémonie rituelle. Mais grâce à ses connaissances en artillerie, le Français obtient un sursis et se lie sentimentalement avec Seboipepe qui lui révèle l’existence d’un trésor caché dans les environs. Un commerçant français de passage, auquel Cunhambebe a commandé de la poudre à canon, refuse de révéler la nationalité du captif. Celui-ci lui propose alors d’échanger le trésor caché contre de la poudre, tue le commerçant, cache le double butin dans une caverne et aide les Tupinambás à anéantir les Tupiniquin. Pour célébrer leur victoire, les Tupinambás mangent leur Français, son épouse en recevant le meilleur morceau.
L’histoire s’inspire du récit du marin allemand Hans Staden (cf. infra, film de 1999) qui, après avoir vécu deux ans parmi les Tupinambás, s’en est sorti et a publié ses mémoires. Elle commence d’ailleurs par la lecture d’une lettre de Nicolas Durand de Villegagnon (fondateur de l’éphémère colonie française au Brésil nommée « France antarctique ») à son ami Jean Calvin datée du 31 mars 1547 dans laquelle le navigateur raconte son expérience de prisonnier des Indiens du Nouveau Monde en compagnie d’autres Français. Avec passablement d’humour noir et de gaieté, Nelson Pereira dos Santos, un des principaux représentants du Cinema Novo brésilien, s’amuse dans cette « comédie cannibale » satirique (parlée tupi) à confronter deux cultures et à décrire la découverte et l’intégration du Français à l’univers indigène au point d’en accepter finalement son sort avec gaieté. Comme le précise Jean de Baroncelli dans Le Monde, « au franc cannibalisme des Tupinambás, l’auteur oppose le cannibalisme féroce de nos sociétés modernes. Il chante les plaisirs de la vie primitive et laisse entendre que la culture des citoyens de Pindorama valait bien la nôtre. Bref, il marche sur les traces des écologistes et des ethnologues modernes » (29.3.74). L’approche est quasi-documentaire tandis que la nudité intégrale des acteurs et la fraîche sensualité des échanges s’expriment dans une suite d’images évoquant les gravures du XVIIIe siècle célébrant les vertus des « bons sauvages » ; cet aspect fait scandale lors de la première et vaudra au film d’être menacé d’interdiction par la censure locale, mesure qui provoquera ricanements et sarcasmes généraux sur place). Filmé en Eastmancolor dans les environs de Paraty (Rio de Janeiro). Il remporte trois prix au Festival de Brazilia do Cinema Brasileiro (scénario, dialogues, décors), le prix de l’Associação Paulista dos Críticos de Arte (« espoir de l’année » à Ana Maria Magalhães) et est présenté à la « Quinzaine des réalisateurs » du Festival de Cannes 1971. Acteur fétiche de Pereira dos Santos, Arduino Colassanti – le Français - abandonnera le cinéma pour vivre à bord d’un radeau au nord du Brésil. - DE: Mein kleiner Franzose war sehr lecker, US: How Tasty Was My Little Frenchman.
1971* La Araucana (La conquista de Chile) / La Araucana (Conquista de gigantes) / L’Araucana, massacro degli dei (ES/IT/CL/PE) de Julio Coll
José Antonio Pérez Giner/Paraguas Films S.A. (Madrid)-M.G.B. Cinematografica S.r.L. (Roma)-Lautaro Films S.L. (Santiago de Chile), 106 min. - av. Elsa Martinelli (Inés de Suárez), Venantino Venantini (Don Pedro de Valdivia, gouverneur de la Nouvelle-Estrémadure [Chili]), Victor Alcázar [V. Barrera] (Felipe Lautaro, chef des Araucans), Julio Peña (Rodrigo de Quiroga), Elisa Montés (La Coya), Alberto Dalbés (Fiscal), Beni Deus (Père Marmolejo), Eduardo Fajardo (Pedro de La Gasca, gouverneur du Pérou), Ricardo Palacios (Antolikan), Pepe Martín (Monseñor Lobo), Elena Moreno (Machi), Armando Fenoglio (un médecin), Juan Pérez Berrocal (Colo Colo), Roberto Cruz, Manolo Otero, Erika López, Carlos A. Matamala, Emiliano Redondo, Joaquín Pamplona, Antonio Alfonso, Gerardo Grez, Luis Rico, Tomás Torres.
Synopsis : En 1540 à Cuzco, capitale du Viregnat du Pérou, Don Pedro de Valdivia, ex-lieutenant de Pizarro, revient avec cinq soldats blessés, seuls survivants d’une désastreuse expédition vers le Sud. Doña Inés de Suárez, dont l’époux est mort dans cette entreprise, soigne les blessés et sauve la jambe de Valdivia qui devient son amant. Peu de temps après, ce-dernier retourne au Sud avec 150 hommes et Doña Inés, traversant le désert d’Atacama et diverses chaînes de montagne. Les Picunches, première tribu rencontrée, craignent chevaux, arquebuses et cuirasses et prennent les intrus colonisateurs pour des divinités. Valdivia fonde sans résistance la cité de Santiago, tandis que, plus au sud, les Mapuches ou Araucans (les « insoumis » en quechua), peuple guerrier, n’entendent pas se laisser dominer. Le jeune Felipe Lautaro, leur chef, prône la contre-attaque sur le territoire même occupé par l’ennemi malgré les hésitations des vieux chefs ; il laisse en arrière sa compagne Guacolda et s’introduit dans le camp espagnol où il étudie armements et tactiques, puis, passant à l’attaque en 1541, il éloigne Valdivia de Santiago tandis que ses alliés Picunches incendient la cité. Assiégée avec une poignée d’hommes, Inés résiste héroïquement et coupe la tête d’un chef picunche pour intimider l’assaillant. Valdivia reprend la ville en ruines et se rend à Lima afin de réunir une armée capable d’écraser les Araucans, mais il s’y heurte au tribunal de la Sainte Inquisition. L’Église l’accuse de cruauté envers Indiens et Espagnols, d’abus d’autorité, enfin d’adultère avec Inés, car il est déjà marié en Espagne. Absous de toutes les accusations sauf l’adultère et nommé gouverneur du Chili par Charles Quint, il rentre à Santiago avec des troupes et de l’argent, mais doit se séparer d’Inés. À la fin décembre 1553, il descend vers le Sud à la pointe de son armée conquérante, mais Lautaro et les Araucans l’attendent vers Tucapel prés du fleuve sacré de Río Biobio, et après avoir épuisé les chevaux ennemis avec des tactiques guerrières, provoque la déroute totale de l’Espagnol. Criblé de flèches, Valdivia trouve la mort sous les yeux de Lautaro. Au milieu de la bataille, une femme accouche, un enfant naît, symbole du Chili de l’avenir.
Ces divers événements ont inspiré un des chefs-d’œuvre de la littérature épique espagnole, le poème La Araucana d’Alonso de Ercilla (1569 à 1589), dont le scénario affirme s’inspirer, suivi d’une pièce du même titre écrite par Lope de Vega (1625). Sauf que le cinéaste catalan Julio Coll (Tarde de toros, 1956) s’est permis diverses libertés tout en brodant une romance inventée et en résumant 14 ans en quelques mois. Dans les faits, Pedro de Valdivia (1497-1553) fut capturé et dépecé vif : les Araucans lui coupèrent les bras et les mangèrent en sa présence ; selon divers chroniqueurs, les vainqueurs trempèrent leurs armes dans son sang et transformèrent en flûtes les os de ses jambes ! Gageons que montrer ces détails-là à l’écran n’aurait pas fait plaisir à tout le monde... Quant à son adversaire Lautaro (v.1534-1557), il fut capturé à l’âge de 11 ans par les hommes de Valdivia mais parvint à s’enfuir et à rejoindre les siens après avoir été témoin des atrocités commises par les conquistadors. Après la mort de Valdivia, les troupes de Lautaro affrontèrent victorieusement les gros de l’armée espagnole en février 1554 à Marihueñu, détruisirent Concepcion et la plupart des positions d’Araucanie. Trahi par un autochtone, Lautaro fut tué dans une embuscade, il avait 23 ans. Il demeure le plus célèbre des chefs indiens qui s’opposèrent aux Espagnols et les Mapuches/Araucans ont continué pendant des siècles à résister aux « campagnes de pacification » occidentales.
La matière est riche, mais hélas, il eut fallu un Anthony Mann, un Raoul Walsh ou un Ridley Scott pour lui conférer l’ampleur méritée. Or Julio Coll, surtout à l’aise dans le film criminel et dont c’est le dernier travail de cinéma, n’est rien de cela. Le tournage de cette coproduction quadrinationale – Madrid assume le gros du financement et les vedettes sont italiennes (Elsa Martinelli, Venantino Venantini) - se fait en Eastmancolor et Techniscope 70mm en août-octobre 1970, avec des prises de vues au Chili (Rauten, Tabolango, désert d’Atacama, parc national de Los Paraguas, régions des volcans), au Pérou (Cuzco, Lima) et dans les parages de Madrid. Soit, la mise en scène manque de moyens, de nerf et d’imagination, et le scénario masque mal quelque embarras côté espagnol (on tente de respecter le point de vue des envahisseurs comme des envahis, ou du moins de ménager les descendants actuels des conquérants, colons et autochtones), mais restent de fort belles images et un sujet des plus rares à l’écran. Ce qui est bon à prendre. – Le sujet sera aussi abordé dans la télésérie hispano-chilienne Inés del alma mía en 2020 (cf. infra). - DE : Der Conquistador / Legionen des Todes / Die letzte Schlacht der Inkas, US : Bloody Conquest.
1972Conquista ! (GB) de Michael Syson
Michael Syson/Syson-Omnibus, 39 min. - av. Johnny Scott (le conquistador espagnol), José Maria Serrano (l’Indien).
Dans le Kansas en 1541, un jeune Indien quivira/wichita rencontre Francisco Vásquez de Coronado (1510-1554), le conquistador espagnol parti à la vaine recherche d’or et qui a introduit les premiers chevaux au Nouveau-Mexique puis dans le sud-ouest des actuels États-Unis Amérique. L’Indien est d’abord étonné, terrifié, puis obsédé par le splendide animal qu’il cherche à monter. Le récit paraîtra en 1979 sous forme de livre pour la jeunesse, écrit par Michael Syson, Clyde Robert Bulla et illustré par Ronald Himler.
1982(tv) Père Gonzalo de Betanzos (CA/FR) de Jorge Fajardo
Série « Légendes du monde » no 6, Daniel Bertolino/Antenne 2-Jean-Paul Blondeau Productions-Les Productions Via le Monde-Société Radio Canada (SRC 18.10.84), 26 min. – av. Vicente Castro, Ariel Cuevas, Oscar Giner, Maribella Maldonado, Antonio Moran, Juan Penalty Oliva, Rosabel Oton, Vincent Davy (narrateur).
En 1519, le Père Gonzalo quitte l’Espagne et se rend à Porto Rico évangéliser les Indiens. Mais son voyage tourne vite au cauchemar lorsque, traversant des marais, il refuse de s’enduire de l’onguent fétide préparé par les Indiens pour se protéger contre les morsures d’insectes. Le missionnaire croit cependant que les moustiques sont envoyés par le diable et, perdant la raison, il s’enfuit pour toujours dans la forêt. Il apprend à ses dépens que l’homme doit accepter ses faiblesses et respecter le savoir des autres, fussent-ils des « sauvages ».
1984Orinoko, nuevo mundo (VE) de Diego Risquez
Diego Risquez/Producciones Guakamaya (Caracas), 103 min. – av. Kosinegue (le chamane Yanomami), Rolando Peña (Christophe Colomb), Carlos Castillo (Antonio Berrio), Hugo Marquez, Diego Risquez (Sir Walter Raleigh), Henrique Vera-Villanueva (son fils), Alejandro Alcega (Alexander von Humboldt), Banca Baldó (America), Nelson Varela, Angel Bartoli.
Le fleuve Orénoque, témoin de trois siècles de conquêtes coloniales, entre le troisième voyage de Christophe Colomb, l’arrivée des conquistadors et missionnaires, ces derniers pas toujours bienvenus et noyés, le corsaire britannique Raleigh à la recherche d’El Dorado et les travaux scientifiques du savant allemand Humboldt (reconstitutions). Fresque épique sans dialogues, filmée en super-8, gonflée en 35mm et présentée dans le cadre de la Quinzaine des Réalisateurs au Festival de Cannes 1984. Deuxième partie d’une trilogie cinématographique (cf. infra, Amérika, terra incógnita, 1988).
1985/86La máscara de la conquista (AR) de Miguel Mirra
Miguel Mirra, Hugo Predrazzoli, Diana Alvarez/Grupo Maskay (Buenos Aires), 85 min. – av. Victor Schajovistz (Alonso le barde), Ricardo Antuña (Alfonso de Marañon), Janet Simonetta (Ana Feliza), Luis María Carrizo (Diego de Miranda), Marta Valle (sa femme), Enrique Marinoff (Don Bernardino), Rudy Lostra (le Père Carrasco), Walter Becker (Sancho), Jorge Paz (le bossu), Eduardo Cid (Basilio le fou), Nico Miraviglia (José le solitaire), Graciela Pignataro (Teresa), Jorge Duallo (Juan, le manchot), Liliana Pasarelli (la femme de Bernardino).
Ce premier long métrage de fiction du documentariste argentin Miguel Mirra se veut une métaphore des deux faces de la conquête du continent américain, l’épée et le crucifix (« conquistador par la volonté du Seigneur »). Il narre les péripéties d’une expédition espagnole en Amérique latine au XVIe siècle à laquelle seule survit Ana Felisa, grâce à sa nature dépourvue de tout esprit de conquête. Film exploité en dehors des circuits commerciaux.
1986(tv-mus) Il Guarany (BR)
Opera Dubs-RTC, 148 min. – av. Ivo Lessa (Peri), Niza de Castro Tank (Doña Cecilia de Mariz), Eduardo Janho-Abumrad (Dom Antônio de Mariz), Nelson N. Di Marzio (Gonzáles). - Brésil en 1560, drame d’amour entre un Indien Guarani et une aristocrate portuguaise. L’opéra d’Antônio Carlos Gomes, cf. film de 1923.
1987Matar la tierra (AR) de Tito de Francisco
Astronic Films (Buenos Aires), 90 min. – av. Sergio Poves Campos, Alfredo Noberasco, Luis Martinez Rusconi, Elisa Cortoppassi, Mónica Jorquera, Anahi Quiroga, Ricardo Ortubia, Vicente Calisaya, Oscar Veliz, Leonardo Demarchi, Luísa Gámez, René Gatica, Tito de Francisco.
Un conquistador espagnol s’oppose à son fils lorsque celui-ci s’éprend d’une Indienne. Le film, tiré d’un roman d’Alberto Rodríguez (1952) dont ce-dernier a aussi signé une adaptation théâtrale (Nahueiquintún, 1963), a été tourné dans la province de Mendoza. Film exploité en dehors des circuits commerciaux.
1988Amérika, terra incógnita (VE) de Diego Risquez
Diego Risquez, Morelba Pacheco/Producciones Guakamaya (Caracas), 98 min. – av. Maria Luisa Mosquera (l’infante), Alberto Martin (l’Indien), Luis Mariano Trujillo (le conquistador), John Phelbs (le roi), Valentina Maduno (la reine), Hugo Márquez (l’astrologue), Henrique Ver-Villanueva (le jeune pirate), Luis Duque (un garçon à la Cour), Amapola Risquez, Ximena Negrin.
L’histoire d’un conquistador qui revient en Europe riche de tous les trésors qu’il rapporte du Nouveau Monde : des pierres précieuses et des fruits exotiques, des oiseaux inconnus, des plantes tropicales et ... un homme, un chef indien. La cour européenne (de Charles Quint) est émerveillée par cet indigène déraciné, perdu au milieu de la musique, des artistes, des religieuses et des jongleurs. Une princesse tombe aussitôt amoureuse de cet homme aux charmes exotiques et de cette union clandestine avec l’infante naît le premier prince bâtard et métis d’une cour européenne. Il vient au monde recouvert d’or tandis que son géniteur s’échappe du palais. – Pour le cinéaste vénézuélien Diego Risquez, ce film est le troisième volet d’une trilogie consacrée à l’histoire de son pays, après Bolivar, Sinfonia Tropikal (1981) et Orinoko, Nuevo Mundo (1984). Tourné initialement en Super 16mm, gonflé en 35mm, il se compose de tableaux vivants sans dialogues, la vision d’un Indien captif à la cour d’Espagne et la fascination mutuelle que provoque cette rencontre. Présenté au Festival de Cannes 1988 à la Quinzaine des réalisateurs.
1990/91** Cabeza de Vaca – El Conquistador conquistado (Les Aventures de Cabeza de Vaca) (MX/ES/GB/US) de Nicolás Echevarría
Rafael Cruz, Jorgé Sánchez, Julio Solórzano Foppa, Bertha Navarro/Producciones Iguana (San Angel)-Cooperativa José Revueltas-American Playhouse Theatrical Films-Channel Four Films-Instituto Mexicano de Cinematografia (IMCINE)-Grupo Alicia-Televisión Española (TVE), 112 min. - av. Juan Diego (Alvar Núñez Cabeza de Vaca, trésorier de Charles Quint), Daniel Giménez Cacho (Dorantes), Roberto Sosa (Cascabel / Araino), Carlos Castañón (Castillo), Gerardo Villareal (Estebanico, l’esclave noir), Roberto Cobo (Lozoya), José Flores (Malacosa), Eli ‘Chupadera’ Machuca (un chamane), Farnesio de Bernal (Frère Suárez), Josefina Echánove (Anciana Avavar), Oscar Yoldi (Esquivel), Ramón Barragán (cpt. Pánfilo de Narváez).
Synopsis : En 1536 à San Miguel de Culiacán, dans un camp militaire infesté de mercenaires cuirassés et d’esclaves indiens sur la côte du Pacifique, quatre hommes fraichement arrivés, l’officier Alvar Núñez Cabeza de Vaca et ses compagnons Castillo, Dorantes et l’esclave maure Estebanico constatent qu’ils sont les seuls survivants de l’expédition de 1528 qui comptait à l’origine 600 hommes... Flash-back : Après le naufrage de la flotte, deux radeaux dérivent au large de la Floride avec des rescapés commandés par le capitaine Pánfilo de Narváez et par Cabeza de Vaca, trésorier de l’expédition envoyée par Charles Quint. Ils débarquent sur la côte et s’enfoncent dans l’arrière-pays pour atteindre le fleuve Pánuco où ils espèrent rencontrer d’autres Espagnols. La petite troupe est décimée par une attaque indienne, le curé plus transpercé de flèches que saint Sébastien, les survivants sont faits prisonniers. Alvar devient l’esclave d’un chamane emperlé et colérique du nom de Malacosa, un nain sans bras ni jambes qui parcourt le pays avec son serviteur noir. À leur contact, Alvar apprend peu à peu la langue, les us et les coutumes du pays. Alors qu’il reprend confiance et ressent un regain d’énergie, le chamane, à sa grande surprise, lui rend sa liberté car il a accompli quelques guérisons spectaculaires. Il erre dans la forêt équatoriale et dans des régions désertiques, souffre de faim et de froid, puis retrouve ses trois compagnons d’infortune qui vivent au sein de la tribu des Iguase. Alvar ayant sauvé la vie d’un de ses jeunes guerriers, Araino, la communauté indienne lui offre l’hospitalité. D’une maigreur extrême, peinturluré de blanc, couvert de peaux animales, ayant perdu tous ses repères, Alvar découvre un nouvel univers et dévient un chamane très demandé : le trésorier devient sorcier parmi les mangeurs de peyotl hallucinogène, figure mystique qui se défait progressivement de sa culture chrétienne pour se plonger dans l’irrationnel des indigènes. Des villages calcinés révèlent le passage des Espagnols qu’Alvaro évite pour épargner la vie de ses protégés indiens. Huit ans et 8000 kilomètres plus tard (arpentant à pied les territoires appelés aujourd’hui Louisiane, Arkansas, Texas, Nouvelle-Mexique, Arizona et Californie), il rejoint une colonie de ses compatriotes – et trouve le cadavre de son jeune ami Araino. Il refuse de participer à l’élévation d’une cathédrale. L’image finale, symbole parlant de la conquista : une soixantaine d’eclaves indiens portent une croix géante de 15 mètres en argent à travers le désert, au rythme du tambour d’un officier cuirassé...
 Documentariste et musicien mexicain passionné par l’irrationnel (avec quelques emprunts oniriques à Alejandro Jodorowsky), Nicolás Echevarría reconstitue en ethnologue les rituels chamaniques et le quotidien de tribus anéanties depuis des siècles dans un style austère, usant de plans longs, souvent immobiles et presque sans dialogues, plongeant ses protagonistes au cœur de décors épurés et naturels. Il s’inspire pour cela – assez librement - des étonnantes mémoires de l’explorateur, écrites à son retour en Espagne en 1537 et publiées en 1542 sous le titre de Naufragios (Les Naufragés). Il lui faut cependant plus de six ans pour mener son projet à bien, luttant contre les désaffectations successives de ses financeurs, contraint d’abandonner temporairement le tournage et de voir ses décors tomber en lambeaux. Le travail concret démarre à partir d’avril 1990 au Mexique à Coahuíla (lagune de Mayran, désert de Parras), Durango (Gomez Palacios, Mapimi) et Nayarit (San Blas et marécages). Juan Diego interprète avec émotion et fougue ce conquistador n’ayant jamais rien conquis (v.1488-v.1559), protecteur des Indiens au point de devenir un étranger pour les siens, mais qui finira néanmoins comme gouverneur tyrannique de l’Uruguay. Pour l’anecdote, le responsable des masques et maquillages est le jeune Guillermo del Toro, futur champion de l’étrange et du cinéma fantastique mexicano-américain (The Shape of Water, 2017). Projeté au Festival de Berlin ainsi qu’au Toronto International Film Festival en 1991, le film est lancé aux États-Unis comme un équivalent mexicain du Dancing with Wolves de Kevin Costner (autre récit d’un Blanc parmi les Indiens) et Variety le salue avec enthousiasme comme un des meilleurs films mexicains produits depuis des années (4.3.91). En France, il restera curieusement inédit pendant plus de vingt ans (déc. 2010). – Notons que la matière fera l’objet d’une cantate de George Antheil (cf. diffusion télévisuelle de 1962). - DE : Die Abenteuer des Cabeza de Vaca.
1991* Jéricó (Jéricho) (VE) de Luis Alberto Lamata
Omar Mesones, Adolfo López Sojo/Thalia Producciones-Foncine (Caracas), 82 min. - av. Cosme Cortázar (Frère Santiago), Doris Díaz (sa sœur), Francis Rueda (cpt. Gazcuña), Reggie Nalder (le mercenaire allemand), Alexander Milic (un conquistador espagnol), Luis Pardi, Yajaira Salazar, Amílcar Marcano, Wilfredo Cisneros, Fanny Díaz, Luis Alberto de Mozos, Armando Gotta, Gonzalo Cubero, Zenay Santana, Hector Clotet, Diego Sadot, Alfredo Gerardi, Armando Gota, Reggie Nalder.
Synopsis : Au Venezuela en 1529, le prêtre Santiago, un frère dominicain chargé d’évangéliser le Nouveau-Monde, accompagne une expédition de conquistadors espagnols que dirige l’implacable capitaine Gazcuña dans la forêt équatoriale. Horrifié par la cruauté des soldats et en particulier d’un mercenaire allemand qui tue et viole à tour de bras, il vient à se demander qui sont les véritables « sauvages » et se joint à une poignée d’autres compatriotes qui s’enfuient après s’être emparés du butin de l’Allemand, quelque 30'000 pesos en or. Mais, perdus dans la jungle, les dissidents sont massacrés par les Indiens Caraïbes ; le prêtre est le seul survivant et les indigènes, respectueux de sa ferveur religieuse, lui permettent de s’intégrer dans leur tribu. Santiago vit cinq ans parmi eux, renonçant non à son Dieu mais à sa religion et à son passé, puis se marie avec une Indienne qui lui donne un fils. Un incident avec le chef de la tribu le contraint à fuir avec sa petite famille. Il est arrêté par les Espagnols qui l’accusent d’hérésie, ce qui signifie Inquisition et torture. Mais en vérité, les mercenaires veulent qu’il leur révèle ou sont cachés les pesos en or. Enfermé dans sa cellule, Santiago médite sur son sort, perdant ses certitudes catholiques et morales, sa famille et son identité, enfin tout discernement (« Jéricho n’est pas tombée, elle est dans mon âme »).
Considéré comme un des meilleurs films produit au Venezuela, Jéricó est inspiré par la trajectoire du conquistador et explorateur allemand Ambrosius Alfinger/Ehinger (1500-1533) en Colombie et au Venezuela vers 1529, où son expédition, qui transportait un chargement d’or, fut annihilée par la faim, la maladie et les Indiens, tandis que lui-même était tué par une flèche. Seuls rescapés, quatre soldats espagnols dont Francisco Martín, blessé. Ses trois compatriotes l’abandonnèrent et périrent à leur tour dans la jungle tandis que Martín fut accueilli et soigné par les Indiens Xumara, revendu comme esclave à diverses tribus ; il finit par s’assimiler, apprendre leur langue, devenir chef et prendre femme qui lui donna deux enfants. En 1532, « l’indien blanc » fut retrouvé et ramené deux fois de force à Coro par les Espagnols, s’enfuit deux fois pour retourner vivre parmi les indigènes. Autres personnages qui ont inspiré le scénario : Alvar Núñez Cabeza de Vaca (cf. supra, film de 1990) et l’Allemand Hans Staden (film de 1999), enfin le prêtre dominicain espagnol Bartolomé Carranza (1503-1576), théologien enfermé pendant dix ans par l’Inquisition. Le Vénézuélien Luis Alberto Lamata, dont c’est le premier long métrage (titre initial : Terra de Gracia), tourne en novembre-décembre 1990 avec l’aide d’une anthropologue et un mini-budget dans l’ouest du Venezuela (État de Monagas, delta de l’Orénoque, Cueva del Guácharo) avec des Indiens Kariñas (dialogues parlés en hoti). Découvert au Ve Festival del Cine Venezolano à Caracas, on le propose en vain à Hollywood pour représenter le Venezuela aux Oscars (« meilleur film en langue étrangère ») ; il obtient le prix de la meilleure première œuvre à Biarritz, le Gran Premio Coral à la Havane et le Prix spécial du Jury au festival de Carthagène.
1996O Guarani (BR) de Norma Bengell
Norma Bengell, Jaime A. Schwartz/NB Produções-Grupo Novo, 91 min. - av. Márcio Garcia (Peri), Tatiana Issa (Ceci/Doña Cecilia de Mariz, fille de Dom Antônio), Glória Pires (Isabel), José de Abreu (Loredano), Herson Capri (Dom Antônio de Mariz, gouverneur du Brésil), Imara Rais (Laureana), Cláudio Mamberti (Mestre Nunes), Marco Ricca (Dom Alváro), Tonico Pereira (Aires), Tamur Aimara. - Brésil en 1560, drame d’amour entre un Indien Guarani et une aristocrate portugaise. L’opéra d’Antônio Carlos Gomes, cf. film de 1923.
1996(vd-mus) O Guarani (BU) de Plamen Kartaloff
Opéra National de Sofia (BNT 25.10.96), 145 min. – av. Roumen Doykov (Peri), Krassamira Stoyanova (Doña Cecilia de Mariz). - Brésil en 1560, drame d’amour entre un Indien Guarani et une aristocrate portugaise. L’opéra d’Antônio Carlos Gomes, cf. film de 1923.
1998La isla del infierno (ES) de Javier Fernández Caldás
Pepe Fernández Caldás, Javier Fernández Caldás/Caldas Procucciones Cinematográficas S.L. (Madrid), 84 min. – av. José Conde (le capitaine), Pablo Scola (Antón Guanche), Arturo Soriano (Arturo « El Templario »), Rogelio Quintana (Rogelio), Antonio Oval (El Mencey), Domingo Regalado (Guanchero), José Maria Barrera (El Hermético), Modou Fall (Mabú).
Les Canaries au XVe siècle avant le débarquement des Rois Catholiques (cf. supra, La principessa delle Canarie/Tirma, 1954). Après 20 ans d’esclavage en Espagne, la Canarien Antón Guanche voyage comme passager clandestin à bord d’un navire corsaire qui s’est rendu au Cap-Vert à la recherche d’autruches utiles comme moyen de transport dans la Péninsule. Sur le chemin de retour, un fait imprévu conduit Antón à Tenerife, « l’île de l’Enfer » (ainsi nommée en raison des éruptions du volcan Teide), où il a été capturé dans son enfance puis vendu à Séville. Antón quitte le bateau en emportant le seul exemplaire d’autruche capturé. Furieux, le capitaine s’enfonce dans l’île à sa recherche. Fait prisonnier par les Guanches de sa tribu d’origine, Antón les aide dans leur lutte contre la soldatesque et les trafiquants d’esclaves hispaniques. – Un petit film d’aventures sans éclats, premier ouvrage d’un cinéaste canarien réalisé de mars à mai 1996 en Eastmancolor et Techniscope sur les lieux de l’action, à la Grande Canarie (Agaete, Santa Cruz de Tenerife et Las Palmas). Le héros est campé par le Madrilène Pablo Scola (The Man from U.N.C.L.E. de Guy Ritchie). Présenté au Festival Internacional de Cine Iberoamericano de Huelva et au Festival de Cine de Alcalá de Henares.
1999Hans Staden (BR/PT) de Luis Alberto Pereira
Jorge Neves, Luis Alberto Pereira, João di Bartolo/Instituto Portughês da Arte Cinematográfica e Audiovisual (IPACA)-Jorge Neves Produção Audiovisual-Lapfilme, 92 min. - av. Carlos Evelyn (Hans Staden), Ariana Messias (NairáI, Darci Figueiredo (Ipiru), Beto Simas (Nhaepepô), Sténio Garcia (Pajé), Sérgio Mamberti (Jacó), Ariana Messias (Nairá), Cláudia Liz (Marabá), Hissa de Urkiola (Ibirapema), Mário Jacques (le capitaine), Macsuara Kadiweu (Cunhambebe), Carol Li (Joacy), Alfredo Penteado (Caruata), Antonio Peyr (Perot), Daniel Portela (Cacique), Walter Portela (Abati Pogança), Jefferson Primo (Paraguá), Reynaldo Puebla (Guaratinga), Valdir Raimundo (Maracajá), Valdir Ramos (Japi), José Mateus Lopes, Luiza Albuquerque, Teresa Convé, Olga de Silva, Maria de Oliveira, Francisco Di Franco, Tania Freire, Cintia Grillo.
Synopsis : En 1554, le marin et aventurier allemand Hans Staden (v.1525-1579), mercenaire des guerres de religion européennes, échoue avec son navire espagnol sur la côte brésilienne près de l’île de São Vicente où il devient prisonnier des Indiens Tupinambás, adeptes du cannibalisme, en particulier pour les Portugais qui envahissent leur pays. Sous la menace constante d’être dévoré dans un rituel anthropophage de la tribu, Staden réussit à reporter sa mort pendant neuf mois en tentant de convaincre les Indiens qu’il n’est pas portugais, mais un compagnon de leurs alliés français et que leur Dieu sera très en colère s’ils s’en prennent à lui. Finalement, les Tupinambás acceptent de le vendre à un navire français qui le ramènera en Europe.
Le récit, filmé au Brésil (Ubatuba v. São Paulo) et au Portugal (Lisbonne) par le Brésilien Luis Alberto Pereira, suit assez fidèlement et avec application le journal de Staden, rédigé en allemand à Marburg sous le titre de Warhaftige Historia und beschreibung eyner Landtschafft der Wilden Nacketen, Grimmigen Menschfresser-Leuthen in der Newenwelt America gelegen (1557), traduit en portugais (Duas viagens no Brasil) puis en français (Nus, féroces et anthropophages), en latin, en anglais, etc. L’ouvrage est considéré comme un des textes fondateurs de l’ethnographie sud-américaine. Nelson Pereira dos Santos s’en inspira librement en 1971 pour son film Como era gostoso o meu Françés (Qu’il était bon mon petit Français), pourvu d’une fin différente... (cf. supra).
2001Caramuru : A invenção do Brasil [Caramuru, l’invention du Brésil] (BR) de Guel Arraes
Anna Barroso, Eduardo Figueira, Daniel Filho, Guel Arraes/Globo Filmes-Lereby Productions-Rede Globo de Televisão, 88 min. – av. Selton Mello (Diogo Alvares Correia, dit Caramuru), Camila Pitanga (la princesse Paraguaçu), Déborah Secco (Moema), Tonico Pereira (le chef Itaparica), Luis Mello (Dom Vasco de Althayde), Pedro Paulo Rangel (Dom Jayme), Diogo Vilela (Heitor), Déborah Bloch (Isabelle, la fiancée française de Caramuru), Julio Salgado (Monge), Pedro Perazzo.
Synopsis : Le peintre, cartographe, aventurier et explorateur portugais Diogo Alvarez Correia dit Caramuru (1475-1557) est envoyé au Brésil. Naufragé dans la baie de São Salvador en 1510, il est bien recueilli par les indios Tupinambás, mais quand il découvre qu’on l’engraisse pour un grand festin, il parvient à tenir ses bienfaiteurs à distance grâce à son arme à feu qui impressionne les indigènes anthropophages, ce qui lui vaut le surnom de Caramuru (« fils du tonnerre »). Ïtaparica, le chef de la tribu, lui donne sa fille Paraguaçu en mariage et grâce à cette union, Diogo se taille un petit empire à l’intérieur de la capitainerie de Bahia tout en restant vassal du roi du Portugal. Avec d’autres colons portugais, il exploite le brésil (bois qui donne une teinture rouge) qu’il vend aux Européens. C’est le premier Occidental à vivre au Brésil et à entâmer un processus de métissage généralisé avec la bénédiction des missionnaires jésuites, ses précieux alliés. Lors d’un voyage d’affaires en France, sa femme sera baptisée à Saint-Malo et prendra le nom de Catherine de Brésil tandis que trois de leurs fils et un de leurs gendres seront armés chevalier pour services rendus à la couronne portugaise. Leurs sept enfants épouseront des Portugais. Tant pour l’Histoire.
La matière du film s’inspire lointainement du poème épico-romantique Caramuru rédigé en 1781 par le Frère Santa Rita Durão, mais elle est traitée ici en comédie, une farce joyeusement érotique et irrespectueuse qui ridiculise la colonisation sans trop se soucier de l’exactitude historique. Au départ, Diogo est un dessinateur volage au service du cartographe royal à Lisbonne ; le précieux document qu’il est chargé d’illustrer est volé par un courtisan français et Diogo, puni, est exilé dans les colonies. Sur place, il se laisse séduire par la princesse tupinambá et couche aussi avec sa sœur Moema, mais tait cette relation triangulée pour ne pas choquer ses compatriotes. Lorsque Diogo embarque sur une caravelle pour regagner l’Europe, Paraguaçu le suit à la nage. Quoique fiancé sur ordre du roi à une aristocrate française, Isabelle, il prend l’Indienne à bord, et celle-ci, ignorant ce qu’implique le mot « mariage », se joue de sa rivale en lui promettant en échange de son fiancé de l’or brésilien qui n’existe pas... L’Ancien et le Nouveau-Monde, explique Guel Arraes, sont deux planètes différentes, mais en parvenant à surmonter les obstacles, elles ont contribué à inventer le Brésil multiracial d’aujourd’hui. Précisons que les scènes du film ont d’abord fait partie d’une minisérie docu-fictionnelle plus sérieuse de Guel Arraes, A invenção do Brasil (2h25), sortie sur Rede Globo de Televisão le 19 avril 2000. Le tournage s’est fait sur la plage de Picinguaba à Ubatuba, puis au Portugal (Palais national de Queluz, château de Leiria, monastère de Batalha). Un grand succès populaire. - GB/US : Caramuru : The Invention of Brazil.
2002Desmundo (La Fiancée rebelle) (BR) d’Alain Fresnot
Alain Fresnot, Van Fresnot/A.F. Cinema e Video Prod.-Columbia Tristar, 101 min. – av. Simone Spoladore (Oribela), Osmar Prado (Francisco de Albuquerque), Caco Ciocler (Ximeno Dias), Berta Zemel (Doña Branca), Beatriz Segall (Doña Brites), José Eduardo (le gouverneur), Marcos Daud (Cristóvão Boralho), Cacá Rosset (Afonso Soares D’Aragão), José Rubens Chachá (João Couto), Giovanna Borghi (Bernardinha).
Synopsis : Née à Covilho au Portugal, la séduisante Oribella, 16 ans, débarque en 1555 au Brésil, accompagnée d’autres jeunes orphelines, toutes chrétiennes, élevées au couvent et distribuées comme épouses aux colons portugais méritants avec pour mission de procréer et de freiner par la même occasion les mariages métissés, sur place, considérés comme « impurs ». Mais dans ce monde brutal et machiste, le statut des arrivantes est à peine plus enviable que celui des Indiens réduits en esclavage. Oribella crache sur le prétendant qu’on veut lui imposer. Elle se retrouve mariée à Francisco de Albuquerque, un semi-paria qui vit dans la jungle avec sa mère, sa sœur handicapée et ses esclaves, et qui pratique sans états d’âme le viol conjugal. Elle se rebelle contre son époux violent, fugue et trouve finalement refuge auprès de Ximeno Dias, un marchand qui se rend régulièrement au Portugal. – Le cinéaste franco-brésilien Alain Fresnot s’attaque à un sujet délicat tiré du roman Desmundo (1996) de la Brésilienne Ana Miranda, avec un résultat un peu trop esthétisant pour convaincre. Tourné à Ubatuba (São Paulo), et parlé en portugais galicien archaïque (avec sous-titres). Primé au festival du Cinema Brasileiro de Brasilia (2002), projeté au Rio de Janeiro International Film Festival et au Festròia-Tróia International (2003), lauréat du ABC Cinematography Award (photo et décors, 2004).
2005The King Maker / The Rebellion of Queen Sudachan / Ga-bot (TH/GB) de Lek Kitaparaporn
David Winters/Winters Hollywood Entertainment Holdings Corp.-Alpha Beta Films International, 92 min. – av. Gary Stretch (Fernando de Gama), John Rhys-Davies (Philippe de Torres), Cindy Burbridge [=Cindy Sirinya Bishop] (Maria de Torres), Yossawadee [Yoe] Hassadeevichit (la reine Sudachan), Nirut Sirichanya (le roi Chairacha), Charlie Trairat (le prince Yodfa, leur fils), Oliver Pupart (Chakkraphat, demi-frère du roi), Mark Sobels (Père Pedro).
Synopsis : En 1547, Fernando de Gama, un « soldat de fortune » portugais parti à la recherche de l’assassin de son père, fait naufrage dans l’Océan indien et se voit capturé par des marchands d’esclaves arabes. Le mercenaire se retrouve à Ayutthaya, à la cour royale du Siam où il est libéré de ses chaînes par Maria de Torres, une belle Portugaise dont le père, Dom Philippe, a tué son propre père. Chairach, le roi thaï, est en guerre avec un renégat du Nord et mobilise à cet effet l’importante communauté portugaise, car en 1511, le Portugal a été la première nation européenne à entrer en contact avec la Thaïlande et ses commerçants y ont introduit des armes à feu ainsi que des produits du Nouveau Monde. Fernando et son nouvel ami Tong entrent dans la garde personnelle du monarque. Mais la reine Sudachan cherche à empoisonner son époux et son propre fils pour installer son amant Worawongsathirat sur le trône ; elle engage Dom Philippe à cet effet, qui échoue et perd la vie. La deuxième tentative réussit et la reine met le meurtre du roi sur le dos de Fernando et de Tong, qui sont contraints de se combattre à mort. Mais Tong tue l’amant de la reine, et le demi-frère du roi, Maha Chakkraphat, destitue la reine, prend les Portugais sous sa protection et rétablit l’ordre. – Un médiocre film d’aventures basé partiellement sur des faits authentiques, mal joué mais aux belles images exotiques (filmé sur place en Thaïlande de juillet à septembre 2004 à Ayutthaya, Bangkok, Samut Prakhan, Saraburi). – DE :nDas Königreich der Drachen, PT : A Espada do Rei, ES : El guerrero.
2005(tv-df) The Conquest of America – 1. The Southwest : Coronado’s Quest for Gold – 2. The Southeast : Massacre at Matanzas (US) de Rocky Collins
Rocky Collins, Lisa Quijano Wolfinger/Lone Wolf Documentary Group-The History Channel-A&E Television (HC 28.3.05), 2 x 45 min. - av. Alejandro Velasquez (Francisco Vazques de Coronado), Lee Perkins (Melchior Diaz), Carlos Antonio (Hernando Bermejo), Michael Bellino (Philippe II d’Espagne), Julian Bailey (l’amiral Gaspard de Coligny), Amiée Conn (Concepcion Arguello), Stephen P. Conrad (Lope de Samaniego), Alexander Del Romero (Frère Marcos de Niza), Paul Drinan (Pedro Menéndez de Avilés), Jonathan Erickson Eisley (Diego Lopez de la Cardenas), Rayn Else (Don Luis Arguello), Marcos Akiaten (le chef Anaztazi), Nicholas Bailey (Jean François), Sean Demers (René Laudonnière), Justin Ipock (Francisco Martin), Gus Lynch (Lorenzo de Tejada), Sergio Manzo (Juan de Contreras), Luis Medina (Alonzo de Sanchez), Lisa Quijano Wolfinger (Catherine de Médicis), Greggo Trzaskowski (Jean Ribault), Sabin Lomac (Jacques Le Moyne).
Docu-fiction illustrant l’exploration hasardeuse et la conquête de l’Amérique du Nord par les Espagnols et les Français : à l’est, en février 1540, Francisco Vásquez de Coronado (1510-1554) à la tête d’une armée de 300 mercenaires hispaniques et d’un milliers d’Indios mexicains alliés, traverse le Texas jusqu’en Californie à la recherche des « Sept Cités de Cebola », suivant ainsi l’exemple de Cortés et de Pizarro. Arrivés à Cebola, les Espagnols n’y trouvent pas d’or, découvrent le Grand Canyon, s’égarent jusqu’au Kansas, massacrent les indigènes et retournent bredouilles au Mexique sans avoir trouvé une once du métal convoité. Une autre expédition en Baja California menée par Juan Rodriguez Cabrillo subit de lourdes pertes, payant chèrement la cruauté de Coronado et la brutalité de ses « hommes barbus » ; il meurt de la gangrène. À l’ouest, Ponce de León, toujours à la recherche de l’or des Amériques, découvre la Floride en 1513 où il est tué par les Indiens, comme son successeur Hernando de Soto en 1539. Mandaté par l’amiral de Coligny, Jean Ribault († 1565) explore, lui aussi, les côtes de la Floride en 1522 pour y établir une colonie de Huguenots français et fonde Fort Caroline (Port Royal) en 1564. Il est tué par les soldats de l’amiral-corsaire Pedro Menéndez de Avilés (1519-1574), commandant de la flotte royale espagnole, qui détruisent le fort français et exécutent tous les hérétiques protestants sur les bords de la rivière Matanzas. Le fort est rebaptisé San Mateo. - Le tournage en Floride (Jacksonville, St. Augustine) est bousculé par l’ouragan de 2004. Costumes nominés à l’Emmy Award.
Damoiselles à épouser sur place : « El corazón del océano » (2014).
2011 [sortie: 2014](tv) El corazón del océano (ES) télésérie de Pablo Barrera (1,2,5,6) et Guillermo Fernández Groizard (3,4)
Mercedes Gamero, Daniel Écija, Mikel Lejarza, Alfonso Mardones, Juan Carlos Caro, Manuel Valdivia/Globomedia-Colombiana Dynamo Producionnes-Antena 3 Films (Antena Tres 27.1.-5.3.14), 6 x 70 min. – av. Hugo Silva (Juan de Salazar y Espinosa), Ingrid Rubio (Doña Mencía de Calderón Ocampo), Lala Aguirre (Clarita de Sanabria), Clara Lago (Ana de Rojas), Alvaro Cervantes (Alonso), Ferrán Vilajosana (Pelayo), María Cantuel (María de Sanabria), Ane Gabarain (Sancha), Hiba Abouk (Guadalupe), Juan David Agudelo (Frère Carrillo), Matilde Lemaitre (Elvira), Vida Torres (Pola), Marian Zapico (Isabel Contreras), Daniel Holguín (Rui Raña), Dani Herrera (Di), Didier Van den Hove (Francisco Becerra), Sandra Lena (Rosita), Albi De Abreu (cpt. Bompere), Juliana Gómez (Fátima), Karem Escobar (Martiña), Ilja Rosendahl (Ulrico Schmidels), Rodrigo Trujillo (le pirate Bonpère).
Synopsis : En 1550, Alonso, jeune homme de Galice, doit fuir son village et gagne Séville pour s’embarquer pour le Nouveau Monde parce qu’il a accidentellement tué le fils du comte Raña ; il porte une lettre de recommandation pour Juan de Sanabria, gouverneur de Rio de la Plata qui prépare une expédition de trois navires de Séville à Asunción, au Paraguay ; en attendant l’embarquement, il trouve un ami en Pelayo, jeune espiègle sans famille. Doña Mencía de Calderón, l’épouse du gouverneur, rassemble 80 damoiselles de familles nobles sans ressources afin qu’elles voyagent avec elle et ses deux filles à Asunción où elles épouseront des Espagnols qui se sont installés dans la ville, ceci afin de freiner le métissage croissant (cf. aussi le film Desmundo, 2002). Ana de Rojas, une fille peu conventionnelle qui sait lire et écrire, devient sa secrétaire durant le voyage et s’éprend du beau capitaine Juan de Salazar, vétéran navigateur et conquistador, à bord du San Miguel qui transporte Doña Mencía et les diverses demoiselles. Après les Grandes Canaries, une tempête sépare les trois navires et laisse le San Miguel battu et à la dérive, capturé par les pirates du capitaine Bonpère, puis abandonné sans instruments de navigation. Arrivés à Santa Catalina, elles commencent une odyssée de six ans, affrontant la faim, le scorbut, les indigènes et les autorités portugaises, en tout deux mille kilomètres à pied à travers la jungle avant d’arriver, transformées, à destination.
Le scénario repose sur le roman éponyme d’Elvira Menéndez González (2010) qui s’inspire de faits et de personnages rééls comme Juan de Salazar y Espinosa (1508-1560), conquistador qui contribua effectivement à coloniser le Paraguay, et Doña Mencía Calderón la Adelantada (1514-1593) qui dirigea l’expédition féminine dont il est question ici. La série est filmée en 2011 en Colombie (Bogotà) et en Espagne (Cádiz et Angalousie), mais ne sort que trois ans plus tard, avec un accueil critique peu favorable : rythme trop lent et trames sentimentales ultraprévisibles. Les protagonistes forment un groupe de stéréotypes physiques et esthétiques correspondant à la jeune génération espagnole, à un public adolescent qui boude le spectacle sur le petit écran. - Épisodes : 1. « El viejo mundo » - 2. « El corazón de la tormenta » - 3. « La travesia de la mar océana » - 4. « El nuevo mundo » - 5. « De encuentros y desencuentros » - 6. « El corazón de la selva ».
2012* (tv) Rouge Brésil / Vermelho Brasil (FR/BR/PT/CA) télésérie de Sylvain Archambault
Nicolas Traube, Leonel Vieira, Christian Duguay, António da Cunha Telles/France 3-Conspiração Filmes-Pampa Production-IDL Films Inc. (Canada)-Stopline Films (Brésil)-Sunflag-Globo Filmes-Riofilme-France Télévisions-RTP-CNC (FR3 22-23.1.13 / Brésil 6.9.13), 1h29 et 1h41 min. – av. Stellan Skarsgård (Nicolas Durand de Villegagnon, vice-amiral de Bretagne), Sagamore Stévenin (cpt. Don Gonzague de Ladru, son second), Théo Frilet (Just Clamorgan), Juliette Lamboley (Colombe/Colin Clamorgan, sa sœur), Joaquim de Almeida (cpt. João da Silva), Olivier Chantreau (Martin Delacroix), Didier Flamand (Père Thévet), Vlasta Vrana (Pierre Richer, pasteur protestant), Liana Balaban (Aude Richer, sa fille), Pietro Mário Bogianchini (Pay Lo/Old Sea Do), Tatsu Carvalho (le chevalier Gustave), Giselle Motta (Paraguaçu), Agnès Soral (Eléonore Rouen), Bruno Wolkowitch (cpt. Des Granges), Hélène Hardouin (Emilienne), Paulo Campani (horloger).
Synopsis : En août 1555, Just et Colombe Clamorgan, deux adolescents français, décident de partir au Brésil pour y rechercher leur père disparu. Ils sont embauchés comme interprètes dans l’expédition coloniale menée par un chevalier de Malte, le vice-amiral Nicolas Durand de Villegagnon (1510-1571), qui est secondé par le capitaine Gonzague, un homme violent et d'une discipline rigoriste ; les femmes n'étant pas bienvenues dans les expéditions, Colombe doit se déguiser en garçon et devient Colin. Villegagnon a été chargé par Henri II d’installer une colonie sous les tropiques, au Brésil, en terre portugaise, où les protestants français pourront exercer librement leur religion. Arrivés dans la baie de Guanabara (Rio de Janeiro), sur l’île de Serigipe, les Français se trouvent rapidement confrontés aux populations indigènes, certaines restées traditionnelles et cannibales, d'autres soumises au malfrat portugais João da Silva. Colombe est capturée par des Indiens, mais réussit à se lier d'amitié avec eux au sein d'une tribu dirigée par le vieux Français Pay Lo qui a fait sa vie parmi eux. Villegagnon fait construire un fort en pierres pour résister aux Portugais, Fort Coligny, mais faute de moyens humains, il est amené à négocier avec Da Silva le prêt d'esclaves indiens, contrairement aux principes dictés par son humanisme, sa foi religieuse et un certain respect envers les populations locales. Malgré les difficultés, Villegagnon poursuit son objectif de bâtir une colonie française régie par l'humanisme. Pour pouvoir rivaliser avec la puissance de Da Silva, il demande des renforts au roi de France et à Jean Calvin à Genève. Villegagnon s'est pris d'amitié pour Just, fils de son ancien compagnon d'armes pendant les guerres d’Italie, et forme à la chevalerie ce jeune homme qui croit en la mission civilisatrice de l’Europe chrétienne. Cachée dans la tribu de Pay Lo, Colombe s'adapte, elle, avec plaisir au mode de vie des indigènes. En mars 1577, l'arrivée d’une deuxième fournée de colons protestants envoyés par Jean Calvin, accompagnés de leurs femmes et nettement plus radicaux que la première, avive les tensions religieuses. Ce nouveau groupe est commandé par le pasteur Pierre Richer (qui annonce le décès accidentel de Henri II), un homme intolérant et autoritaire, bien décidé à « apporter aux sauvages la bonne parole » et à extirper la corruption. Villegagnon et le calviniste se disputent au sujet de Just qui a demandé la main d’Aude Richer, la fille du pasteur ; le vice-amiral veut faire du jeune homme un chevalier de Malte, soumis au vœu de chasteté, tandis que Richer refuse tout mariage mixte avec un catholique. L’île se transforme en champ de bataille théologique, Richer cherche une alliance avec Da Silva pour renverser Villegagnon, mais ses émissaires se font massacrer.
Ayant appris l’arrivée prochaine de vingt-quatre navires portugais envoyés pour détruire Fort Coligny, le vice-amiral cherche à s’allier avec la tribu de Pay Lo, mais celui-ci n’est pas dupe (« la seule chose que le Blanc offre aux Indiens, c’est l’extermination »). Just retrouve sa sœur qu’il croyait morte, métamorphosée en « sauvage », épanouie et qui cherche même à le séduire sexuellement (elle ne croit plus au péché, dit-elle). Colons et chevaliers s’unissent pour anéantir Da Silva, devenu de plus en plus menaçant et que Just abat au pistolet. Pris en tenaille entre Français et Portugais, les Indiens détruisent leur camp et disparaissent dans la jungle après le décès de Pay Lo ; Colombe rentre auprès des siens. Just refuse d’être adoubé chevalier et, résigné, le vice-amiral lui révèle que Colombe n’est pas sa sœur, mais une enfant trouvée par son père jadis en Italie. La flottille portugaise est en vue, il est urgent d’abandonner l’île et son fort. Les chevaliers de Malte décident de mourir en défendant la place. Just, Colombe et les colons protestants s’enfoncent dans la forêt vierge sous la guidance des Indiens Tupinambas, tandis que résonnent les premiers coups de canon... Carton final : « Villegagnon et ses chevaliers perdirent la bataille pour la sauvegarde du fort. Il survécut et rentra en France. Frustré de n’avoir pu établir la paix entre chrétiens, il combattit avec sauvagerie dans les rangs catholiques, au cours des guerres de religion qui durèrent plus de 20 ans. Just, Colombe et les autres colons s’unirent aux Indiens et prospérèrent sur la terre qui devint la leur. » Fondu sur Rio aujourd’hui.
Adapté du roman éponyme de Jean-Christophe Rufin de l’Académie Française, prix Goncourt 2001, ce téléfilm raconte la fondation au Brésil de l’éphémère colonie baptisée « France antarctique » par les chevaliers de Malte, un épisode mal connu, rapporté par le théologien protestant Jean de Léry, un membre de l’expédition (Histoire d’un voyage fait en la terre de Brésil, 1578). Villegagnon et le pasteur Richer ont bien existé, ainsi que les disputes entre chevaliers, Portugais, Indiens et colons calvinistes. Les jeunes Just et Colombe sont les porte-parole fictifs de l’auteur, leur découverte de ce nouveau monde proche de la nature et leur lente maturation à son contact fait toute la trame du roman, centré sur ce choc de civilisations. Le titre du livre évoque directement le bois brésil découvert dans le pays et dont on tire une teinture rouge. Dans les faits, Villegagnon, contesté par les siens, retourna en France en 1559. Fort Coligny et le bourg voisin d’Henriville furent attaqués par les Portugais en 1560 et les Français qui les occupaient se réfugièrent dans les forêts environnantes et s'installèrent avec les Indiens. Ils parvinrent à maintenir une relation commerciale avec la France jusque vers 1567, période à laquelle les Portugais se décidèrent à une occupation véritable de la région. Aujourd'hui, l’île qui abritait le fort est appelée Ilha Villegaignon et abrite l'École navale brésilienne. Dans le roman de Rufin, Villegagnon est un utopiste aux idées généreuses, un croyant tourmenté par ses actes qui dérive dans la violence lorsque son projet de communauté s’effondre. Le téléfilm de Sylvain Archambault, plus porté sur la joliesse des images que sur l’exotisme tape-à-l’œil ou la vision politico-religieuse de la colonisation, adoucit le portrait du vice-amiral en faisant de Gonzague son double inquiétant, l’homme des sales besognes. La matière extrêmement dense du récit doit être réduite à trois heures et on ne peut que survoler les thèmes passionnants développés dans le livre (la confrontation génocidaire de deux mondes, le « sauvage » et le « civilisateur », les rivalités entre puissances coloniales, le début des guerres de religion). On passe comme chat sur braise sur l’exploitation portugaise qui suivit. Mais Archambault mène son récit d’aventures tambour battant, avec efficacité et une certaine flamboyance (on songe plus d’une fois à la Forêt d’émeraudes de John Boorman), soutenu par la justesse de la reconstitution ethnologique et la fougue des interprètes, Stellan Skarsgård, Juliette Lamboley et Théo Frilet en tête. Le tournage s’est effectué sur place au Brésil, sur le littoral de Rio de Janeiro, avec de la figuration tupi provenant des villages indigènes de Maracana, Camboinhas, Sapucaia et Paraty. Jouissif malgré ses limites.
2017* Oro (Oro, la cité perdue) (ES) d’Agustín Díaz Yanes
Gabriel Arias-Salgado, Mikel Lejarza, Enrique Lopez Lavigne, Marta Velasco, Mercedes Gamero, Axel Kuschevatzky, /Apaches Entertainment-Atresmedia Cine-Sony Pictures España-Canal Sur Televisión, 103 min. – av. Raúl Arévalo (Martín Dávila), Bárbara Lennie (Doña Ana de Baztán), Anna Castillo (La Parda, sa domestique), Oscar Jaenada (ltn. Juan de Gorriamendi), Juan José Ballesta (Iturbe), José Manuel Cervino (Don Gonzalo de Baztán), Rafael Cebrian (cpt. Juan Medrano), Antonio Dechent (Barbate), Luís Callejo (le Père Vargas), Juan José Ballesta (Iturbe), Juan Carlos Aduviri (le guide et interprète Mediamano), Diego París (Marchena), Josean Bengoetxea (Aresti), José Coronado (sergent Bastaurrès), José Manuel Poga (Romero), Cristhian Esquivel (l’indio Achache), Juan Diego (Manuel Requena), Andrés Gertrúdix (Ulzama, le scribe), Antonio Dechent (Barbate), Jon Bermúdez (Pedro), Ayelen K. Franco (Quetza), Jon Rod (Pedro le Jeune), Daniel Cebrián (Medrano), Amaruk Kayshapanta (Jeromillo, le messager).
Synopsis : En 1538, une expédition d’une quarantaine de soldats et de mercenaires espagnols au service de Charles Quint, deux femmes comprises, traverse la forêt tropicale d’Amazonie à la recherche de la légendaire cité de Tezutlan « aux toits recouverts d’or pur », lieu signalé par une expédition précédente. Ils sont dirigés en principe par Don Gonzalo de Baztán, tyran atteint de démence sénile et féru d’exécutions sommaires au garrot, et sa jeune épouse Doña Ana, mais en réalité commandés par le lieutenant Juan de Gorriamendi, un conquistador aguerri, brutal et avide. Le groupe est sous tension en raison des périls de la jungle, des rivières infestées d’alligators, des mousitques qui transmettent la fièvre jaune, de l’impopularité de Gorriamendi, enfin de l’attraction entre Doña Ana et Martín Dávila, vétéran des guerres d’Italie, qui attise la jalousie de Gorriamendi. Un messager leur annonce que le nouveau gouverneur à Port-au-Prince a envoyé un autre contingent commandé par le capitaine Juan Medrano, chargé d’annuler l’actuelle expédition et de faire exécuter Don Gonzalo. Afin d’éviter Medrano, la troupe se tourne vers un territoire peuplé de tribus hostiles ; les soldats en profitent pour tuer l’incompétent Don Gonzalo et nommer Gorriamendi à sa place. Celui-ci prend Doña Ana de force. La troupe atteint un paisible village indien où ils trouvent Manuel Requena, un survivant de la première expédition qui a fondé une famille avec une indigène. Mais Jeromillo, un traître à la solde de Medrano, a signalé leur position aux poursuivants qui incendient le village et massacrent ses habitants. En représailles, Gorriamendi tend une embuscade sanglante aux hommes de Medrano, ce dernier étant exécuté, puis dirige ses hommes jusqu’à Rio Grande. Ils sont décimés en cours de route par les flèchettes empoisonnées d’une autre tribu hostile, mais remportent une victoire chèrement payée malgré leur infériorité numérique. Lors qu’ils découvrent dans les cabanes les restes cannibalisés de soldats espagnols, Gorriamandi et le Père Vargas veulent tuer femmes et enfants indigènes du village. Dávila s’y oppose au nom de Charles Quint, les Espagnols s’entretuent, le Père Vargas est englouti dans les sables mouvants. Doña Ana meurt au combat, mais son sacrifie permet aux loyalistes de vaincre et d’exécuter Gorriamendi. Réduite à quatre hommes dirigés par le sergent Bastaurrés, l’expédition traverse un champ de bataille entre deux tribus ennemies. Seuls Dávila et le soldat Barbate s’en sortent vivants. Après 62 jours de marche, ils atteignent finalement la ville de Tezutlan sur les rives de l’océan Pacifique – qui n’est qu’un village côtier pauvre avec des toits en argile vernissés de couleur or... Dávila prend possession du territoire au nom de la Couronne espagnole tout en sachant qu’il sera probablement exécuté à son retour à cause de l’échec de sa mission.
Le jeune cinéaste madrilène Agustín Díaz Yanes, grand admirateur d'Alexandre Dumas, adapte avec Oro une nouvelle inédite de l’écrivain-journaliste Arturo Pérez-Reverte, dont il a déjà porté à l’écran en 2006, et avec un succès retentissant, les trépidantes aventures du capitaine Alatriste, saga de cape et d’épée du XVIIe siécle. Mais la collaboration avec le romancier s’avère cette fois moins aisée, Díaz Yanes ayant volontairement gommé le côté épique teinté d’admiration du récit originel pour n’en retenir que la dureté, la cruauté et la barbarie. À ses yeux, les conquistadors sont des délinquants, leur comportement, entre trahisons, assassinats et rivalités haineuses, plus impitoyable que tous les périls de la jungle, indigènes compris. Les personnages n’ont pas de passé, la géographie est imaginaire, la jungle est sombre, claustrophobique : ce qui commence comme une aventure se termine en fuite en avant pour la survie. Le sentiment de danger est permanent, la violence sèche et brutale frappe à tout moment n’importe lequel des nombreux personnages et le traitement implacable de la folie des hommes prêts à s’entretuer pour une hypothétique fortune constitue une charge (au passage aussi anticléricale) possédant le souffle barbare d’une épopée sans concession. Ce voyage dérisoire et futile au boût de l’enfer vert n’est bien sûr pas sans rappeler l’Aguirre de Werner Herzog (cf. chap. 7.5), mais si Díaz Yanes n’en atteint pas la démesure, il parvient, avec ses lenteurs calculées, son réalisme et son efficacité, à exprimer l’inéluctable glissement vers la folie de ses pathétiques aventuriers. Oro a été tourné pour 8 millions d’euros en mars-avril 2016 aux Canaries (parc rural d’Anaga à Tenerife, Chamorga, Las Palmas), près de Madrid (El Molar), en Andalousie (Séville, Cadix), au Panama et en Colombie. Il obtient un Prix Goya pour les meilleurs effets visuels et six nominations dans d’autres catégories. « Du sang, de la sueur, mais peu de larmes » regrette la presse qui aurait souhaité plus d’émotion, tandis que le grand public évite les salles. - DE/GB/US: Gold, IT: Oro – La città perduta.
2020(vd) Hans Staden (DE) d’Og Reis
Waterfall Hills Films, 25 min. – av. Christian Breitschädel (Hans Staden jeune), Martin Liese (Hans Staden âgé), Cengiz Erdem (Don Diego de Sanábria), Matthias Moser (Heliodorus Hessus), Kerstin Huth-Rauscher (Frau Staden), Zuhaib Hassan (le gouverneur Tomé de Souza), Miran Vegas (le chamane), Amelia Conrado, Marion Seidel et Frank Schäffer (des Indiens et Indiennes), Doris Schneider-Coutandin, Kerstin Huth-Rauscher. - En 1554, un marin allemand est capturé par des Indiens Tupinambás anthropophages (essai vidéo). Cf. supra, film de 1999.
Au Chili où les conquistadors affrontent les Indiens Auracans, Inés de Suárez (Elena Rivera) défend Santiago (2020).
2020(tv) Inés del alma mía [Inès de mon âme] (ES/CL) télésérie de Nicolás Acuña (3,4,6,8), Alejandro Bazzano (1,2,5,7) et Vicente Sabatini
Bruno Canale, Andrés Canales, Juan Manuel Egaña, Jorge Redondo, María Roy, Consuelo Silva Dagorret/APU Productions-Boomerang TV-Chilevisión (CHV)-Radiotelevisión Española (RTVE)-Consejo Nacional de Televisión-Fondo de Fomento Audiovisual de Chile (Amazon Prime Video/TVE1 31.7.20 / Chilevisión 14.-17.9.20), 8 x 50 min. – av. Elena Rivera (Inés de Suárez), Eduardo Noriega (Don Pedro de Valdivia), Ismael Martínez (Francisco de Aguirre Meneses), Nicolás Zárate (Jerónimo de Alderete), Pedro Fontaine (Juan Gómez de Almagro), Federico Aguado (Hernando Pizarro), Francesc Orella (Francisco Pizarro, vice-roi du Pérou), Mauricio Paniagua (Felipe Lautaro, chef des Araucans), Antonia Giesen (Cecilia), Patricia Cuyul (Catalina), Enrique Arce (Pedro Sánchez De la Hoz), Francisco Ossa (Don Benito), Gastón Salgado (Michimalonko, chef Picunche), Benjamín Vicuña (Rodrigo de Quiroga), Rafael de la Reguera (Alonso de Monroy), Elvis Fuentes (Rodrigo González Marmolejo), Daniela Ramírez (Marina de Valdivia), Carlos Bardem (Diego de Almagro), Daniel Alvarez Leyton (une sentinelle), Carlos Serrano (Juan de Málaga), Andrea Trepat (Asunción, soeur d’Inés), Roberto Farías (Sebastián Romero), Juan Fernández (Don Alonso), Juan Codina (l’évêque Lagasca), Raúl Escudero (Père Gregorio), Francisco Ossa (Pedro Gómez de Don Benito), Orlando Alfaro, Felipe Zepeda Urrutia.
Une méga-série qui reprend les personnages historiques vus dans le film La Auracana (La Conquista de Chile) en 1971 (cf. supra) : Pedro de Valdivia, sa muse et compagne Inés de Suárez et l’Indien Lautaro, chef des Araucans. Ils sont ici présentés dans une perspective « occidentalisée » et féministe exaltant les efforts des pionniers hispaniques tels que les glorifie la romancière et journaliste Isabel Allende, nièce du président chilien assassiné, dans son roman éponyme paru en 2006 (en France : Inés de mon âme, 2008). L’autrice, naturalisée américaine, voit dans son héroïne conquistadora (1507-1580) une sorte de « Jeanne d’Arc » de la colonisation, célébrant en elle une femme qui tient obstinément tête au machisme de son entourage ainsi qu’aux pressions de l’Église et de la société hispanique. - Synopsis : Après la mort de sa mère en 1537, Inés de Suárez, jeune fille humble mais au caractère bien tranché originaire d’Estrémadure, s’établit à Plasencia avec sa sœur Asunción et son grand-père autoritaire. Elle y rencontre Juan de Malaga, un commerçant qu’elle épouse pour fuir la maison familiale et s’établit avec lui à Séville, la « porte du Nouveau Monde ». Mais les affaires de Juan périclitent et il gagne seul les Amériques afin d’y faire fortune. Après une année sans nouvelles, Inés traverse à son tour l’Atlantique, puis la jungle périlleuse de Panama jusqu’au Pérou. À Cuzco, le commandant de la garnison, Don Pedro de Valdivia, l’informe que son mari a été tué dans une bataille entre rivaux espagnols à Las Salinas (1538) : Inés reste seule dans un pays déchiré par la guerre civile entre les frères Hernando et Gonzalo Pizarro et Diego de Almagro, tandis que Valdivia et Pedro Sánchez De la Hoz se disputent la priorité de conquérir le Chili, au sud. La jolie veuve se joint à l’expédition militaire de Valdivia, qui est déjà marié en Espagne, et devient sa maîtresse. Ils descendent vers la « terre promise » chilienne, traversant le désert d’Atacama harcelé par les caciques Mapuche. Six mois plus tard, avec la fondation de la capitale du territoire qu’on nomme Santiago de la Nueva Extremadura (décembre 1540), son gouverneur Valdivia poursuit l’extension territoriale au sud tandis qu’Inés trompe son ennui en compagnie de son bras droit, Rodrigo de Quiroga, qui va devenir son troisième conjoint. Menés par Michimalonko, les Mapuche de la région attaquent massivement Santiago en septembre 1541, repoussent la cavalerie et incendient une grande partie de la ville avec leurs flèches enflammées. Inès soigne les blessés, encourage les résistants. Alors que la situation des assiégés semble désespérée, Inès prône la décapitation des sept prisonniers autochtones gardés en réserve pour des pourparlers de paix, dont le chef Quilicanta, et prend elle-même l’épée. Les têtes coupées jetées parmi les attaquants provoquent terreur, confusion et fuite. Santiago est sauvée et, de retour trois ans plus tard, Valdivia décernera à Inés une décoration pour son héroïsme. Mais la cité est détruite, la pauvreté et la famine démoralisent les habitants, des soldats se rebellent contre l’intransigeant et irascible Valdivia qui, frustré par l’abandon d’Inés, ne songe qu’à sa gloire personnelle. Il tente vainement d’empêcher le mariage d’Inès avec Quiroga, puis, rageur, se décide en décembre 1553 d’envahir le territoire d’Arauco où l’attendent les redoutables guerriers du chef Lautaro. Il y trouve la mort, son armée est anéantie, tandis qu’à Santiago, grâce à Inés et à Quiroga, l’œuvre civilisatrice du pays commence à porter des fruits.
La série, réalisée sans génie mais avec soin et étoffée de 2500 figurants, est filmée de septembre à décembre 2019 d’abord en Espagne, en Estrémadure (Cáceres, Trujillo) et en Andalousie (La Calahorra à Grenade), puis au Pérou (Cuzco, Ollantaytabo, Chinchero, Pisak, les Andes), enfin au Chili (désert d’Atacama, Araucanie, Valdivia, Santiago de Chile où l’on construit dans la lagune de Carén une petite ville de 5000 m2). La production, distribuée internationalement par Amazon, est primée au Festival des création télévisuelles de Luchon (Audience Award) en 2021. - Épisodes : 1. « Un mundo nuevo » - 2. « La conquista de un sueño » - 3. « La muerte, menos temida, da más vida » - 4. « La tierra prometida » - 5. « Sangre y fuego » - 6. « Hombre de gloria » - 7. « Semillas de traición » - 8. « Hasta el fin del mundo ». - IT : Inés dell’anima mia, PT : Inês da minha alma, GB/US : Inés of My Soul.
La belle reine indienne et l’irrésistible conquistador dans la telenovela de 2020.
2020(tv) La Reina de Indias y el Conquistador (La Reine et le Conquistador) (CO) télésérie de Camilo Villamizar et Juan Carlos Vásquez
Asier Aguilar, Johan Fandiño/Caracol Televisión S.A. (Bogota)-Netflix (Netflix 20.5.20), 60 x 45 min. - av. Essined Aponte (Catalina de Indias), Emmanuel Esparza (Pedro de Heredia), Manuel Navarro (Diego de Nicuesa), Alvaro Benet (José Buendia), Alejandro Rodríguez (Pedro Badillo, gouverneur de Santa Marta), Cristina Warner (Gloria Badillo, son épouse), Luis Mesa (Fernando de Valenzuela), Kepa Amuchastegui (Bartolomé de Las Casas), Wolframio Sinué (le cacique Galeras, père de Catalina), Gilma Escobar (la grand-mère Toto), Alejandro Muñoz (Alonso Montes, le médecin), Maia Landaburu (Constanza), Angel Bayón (Juan Anzula), Mercedes Salazar (Inés), Fernando Campo (Alberto de Heredia), Jairo Camargo (Père Sancho Frías), Tahimi Alvariño (la reine Juana Ie de Castille), Mauro Donetti (le gouverneur Rodrigo Figueroa), Cristina Warner (Gloria Badillo), Fernando Bocanegra (Andrés de Valenzuela), Eduardo Hernández (Jara), Camilo Jimenez Varon (ltn. Rodrigo Falla), Juan Carlos Ortega (García de Lerma), Maricarmen Regalado (Patricia Gómez de Valenzuela), Gonzalo Sagarminaga (Francisco Gómez de Cardona), Adelaida Buscato (soeur Geneviève), Maia Landaburu (Constanza Franco), Lucho Velasco (le chamane des cadiques Galeras), Raúl Rufo (le gouverneur d’Almería).
Synopsis : L’Indienne Catalina (surnommée plus tard India Catalina, 1495-1538 ?) est enlevée dans son village par le fourbe conquistador espagnol Diego de Nicuesa (1477-1511) qui la veut comme esclave et maîtresse à Saint-Domingue, mais arrivée sur place, elle est sauvée par le beau Castillan Pedro de Heredia (v.1490-1554) qui a fui son Espagne natale où il a tué en duel le fils du duc de Cardona. Le couple se cache dans une grotte ; en se rendant au marché, Pedro est arrêté par Nicuesa et traduit en justice. Le gouverneur épargne sa vie mais le condamne à servir d’esclave chez Fernando de Valenzuela. Quant à Catalina, elle est sauvée par le fameux Bartolomé de Las Casas (cf. chap. 7.8), père de l’église locale qui lui apprend à lire et à écrire, la libère et lui donne de l’assurance. Entretemps, Pedro retourne incognito en Espagne pour sauver son frère Alberto, accusé de meurtre à sa place. Il y apprend qu’il a une fille nommée Sol, fruit de sa relation secrète avec Constanza Franco. Lorsqu’il est emprisonné par les autorités espagnoles, Constanza convainc la reine Isabelle de Castille d’intervenir en sa faveur. Il obtient gain de cause en lui parlant de l’or qui se trouverait dans la tribu de Catalina, et c’est avec cette dernière en tant que compagne et d’interprète qu’il s’embarque, tout sauf désintéressé, pour explorer le pays natal de sa jeune amante. En passant, le couple fonde Cartagène des Indes (1533), dans l’actuelle Colombie, détail pour une fois authentique. Mais ce n’est que le début d’interminables tribulations, séparations, retrouvailles (sur 60 épisodes, soit 45 heures) qui forment le gros de cette télésérie (ou websérie) telenovelesque parsemée de viols, de trahisons, d’infâmes injustices et de noblesse d’âme, le tout sans grand rapport avec l’Histoire. Au mieux peut-on y voir une sorte d’équivalent exotique d’Angélique marquise des Anges mâtiné de Pocahontas (version Walt Disney). - DE: Die Königin und der Eroberer, GB/US: The Queen and the Conqueror.
2021Marakkar : Lion of the Arabian Sea / Marakkar : Arabikadalinte Simham / Marakkyar : Arabikkadalin Singam (IN) de Priyadarshan
Antony Perumbavoor/Aashirvad Cinemas-Confident Group (parlé malayam), 181 min. - av. Mohanial (Mohammed Ali, Kunjali Marakkar IV), Pranav Mohanial (Mammali alias Kunjali Marakkar IV jeune), Arjun Sarja (Anandan Mangattachan), Suniel Shetty (Chandroth Panicker), Siddique (Pattu Marakkar), Manju Warrier (Subaida), Keerthy Suresh (Aarcha), G. Suresh Kumar (le rajah de Kochi), Nedumudi Venu (le roi Samoothiri), Toby Sauberback (le vice-roi Francisco de Gama), Max Cavenham (André Furtado de Mendonça, gouverneur de l’Inde portugaise).
Dans la deuxième moitié du XVIe siècle, le Portugal s’est allié au royaume de Kochi à Malabar (Kérala), aux Indes, afin de détruire le royaume de Calicut et d’en chasser tous les musulmans ; le commandant militaire portugais Alfonso de Noronho apprend aux soldats de Kochi à manipuler armes à feu et canons. Mais le redoutable Marakkar IV, chef de la flotte royale de Calicut, inflige plusieurs défaites aux envahisseurs portugais jusqu’à ce que ces derniers parviennent à corrompre le monarque, à anéantir le refuge de l’héroïque corsaire, la forteresse de Kunjali, et à le faire fusiller à Goa en 1600. Une superproduction indienne véhiculant un message patriotique, anti-occidental, et filmée entre décembre 2018 et mars 2019 aux studios de Ramoji Film City à Hyderabad. Le film remporte trois National Film Awards (production, effets spéciaux et costumes) mais le public ne se dérange pas. Cf. aussi supra, Kunjali Marakkar (1966).