I - LA FRANCE

1. LOUIS XIII et Richelieu (1610 à 1643)

L’homme caché derrière le masque de fer est-il le frère jumeau de Louis XIV ? (« The Iron Mask », 1928).

1.8e. "Le Vicomte de Bragelonne" (le Masque de Fer)

"Le Vicomte de Bragelonne, ou dix ans plus tard", roman d'Alexandre Dumas paru en 1848/50. - Période : de 1660 à 1673. D’Artagnan et Athos participent à la restauration de Charles II Stuart, exilé en Hollande, sur le trône d’Angleterre. Fils d’Athos et de la duchesse de Chevreuse, le vicomte Raoul de Bragelonne souhaite vainement épouser Louise de La Vallière (1644-1710), sa fiancée dont Louis XIV fait sa maîtresse et qui pousse le jeune homme au désespoir. Athos, se sentant insulté par le roi, brise son épée. Raoul cherche et trouve la mort en combattant les Barbaresques en Afrique du Nord, tragédie qui entraîne son père dans la tombe. Pendant ce temps, D’Artagnan est chargé d’arrêter Fouquet, surintendant du royaume dont Louis XIV est jaloux. Mais la Bastille abrite un autre prisonnier, fort mystérieux : Philippe, le frère jumeau et sosie du roi, dont la naissance a toujours été gardée secrète pour empêcher une guerre civile. Evêque de Vannes et général de l’Ordre des Jésuites, Aramis complote pour substituer Philippe au roi, et faire libérer le surintendant en disgrâce. Pendant vingt-quatre heures, Philippe se retrouve sur le trône, tandis que le roi, surpris dans son lit à Vaux-le-Vicomte, se morfond à la Bastille ; mais la magnanimité de Fouquet, qui refuse d’être complice de cette machination, fait tout échouer. Il renvoie Aramis, libère le roi et le confronte à son frère. D’Artagnan est chargé d’amener ce dernier à la forteresse de l’île Sainte-Marguerite (au large de Cannes), où il est incarcéré, le visage désormais caché sous un masque de fer. Porthos, qui a rejoint Aramis dans la rébellion, périt à la forteresse de Belle-Isle sous d’énormes blocs de roc lors de l’assaut des forces du roi. Aramis s’exile en Espagne. Refusant de jouer plus longtemps le rôle de geôlier de Fouquet, d’Artagnan rejoint Vauban à la guerre. Il est emporté par un boulet de canon durant le siège de Maastricht, au moment où il reçoit son bâton de maréchal. Seul Aramis, devenu ambassadeur d’Espagne, survit.
De ce récit mélancolique de 3000 pages illustrant le déclin de la noblesse d’épée et la féodalité enterrée par l’absolutisme royal, le cinéma n’a en général retenu que l’épisode dit du Masque de fer.
La cour du roi à Saint-Germain-en-Laye (« The Iron Mask » d’Allan Dwan, 1929).
1909La maschera di ferro (Le Masque de fer) (IT) d’Oreste Mentasti 
Itala Film, Torino, 290 m. – D’entente avec Richelieu, Louis XIII confie le frère jumeau du Dauphin à un père jésuite. Vingt ans plus tard, celui-ci décide de remplacer l’un par l’autre, puis de se faire nommer Premier ministre. Louise de La Vallière soupçonne une machination et s’en confie à d’Artagnan qui intervient pour sauver le véritable roi. Le nom d’Aramis (le jésuite) n’est pas mentionné. « Première œuvre artistique » de l’Itala Film, réalisée dans les studios de Ponte Trombetta à Turin. – DE : Die eiserne Maske, GB : Man in the Iron Mask, US : The Iron Mask.
1929***The Iron Mask (Le Masque de fer / BE : D’Artagnan et les 3 Mousquetaires) (US) d’Allan Dwan 
Elton Corporation (Douglas Fairbanks)-United Artists, 2699 m./104 min. – av. Douglas Fairbanks (d’Artagnan), William Bakewell (Louis XIV/Philippe), Belle Bennett (Anne d’Autriche), Marguerite de la Motte (Constance Bonacieux), Dorothy Revier (Milady de Winter), Leon Bary (Athos), Stanley J. Sandford (Porthos), Gino Corrado (Aramis), Rolfe Sedan (Louis XIII), Nigel de Brulier (Richelieu), Ullrich Haupt (Rochefort), Lon Poff (le père Joseph du Tremblay), Charles Stevens (Planchet), Gordon Thorpe (les jumeaux royaux, enfants), Vera Lewis (Mme Péronne), Henry Otto (valet du roi), Laurence Irving et Maurice Leloir (des savants à la Cour).
Anne d’Autriche a mis au monde des jumeaux, Louis et Philippe. Constance Bonacieux, qui est témoin de l’accouchement, est enlevée sur ordre de Richelieu à la veille de son mariage avec d’Artagnan et placée dans un couvent à Mantes. D’Artagnan et ses amis arrivent trop tard pour la sauver de la dague vengeresse de Milady, ils livrent cette dernière au bourreau. Richelieu condamne les mousquetaires à mort, mais d’Artagnan lui extorque leur libération à la pointe de son épée: il sauve la vie du cardinal que Rochefort, tombé en disgrâce, voulait assassiner. Richelieu charge le Gascon de la garde du Dauphin Louis et ordonne à ses turbulents compagnons de se retirer dans leurs terres. Vingt ans passent, Richelieu est décédé. Rochefort s'est vengé en retrouvant le petit Philippe en Espagne et en le transformant en un jeune homme haineux et fourbe, qu’il substitue à Louis XIV. D’Artagnan et Anne d’Autriche devinent la manœuvre, les trois mousquetaires perdent la vie en récupérant le vrai roi à la Bastille et lors de la confrontation des jumeaux à Saint-Germain. Philippe, qui s'apprêtait à empoisonner sa propre mère, poignarde d’Artagnan dans le dos avant d’être ligoté, masqué et emprisonné. Le mousquetaire rejoint ses amis au ciel, une sorte d’apothéose de l’amitié très proche de l’esprit dumasien… Afin de corriger les manquements ou omissions de ses Three Musketeers sept ans plus tôt, mais aussi à l’affût de rôles plus substantiels, Douglas Fairbanks, 48 ans, en fignole ici une suite beaucoup plus travaillée, qui intègre notamment la conclusion dramatique du roman.
Allan Dwan, au sommet de sa carrière muette (il a dirigé Fairbanks dans Robin Hood en 1922), sait étoffer et nuancer ce chant crépusculaire d’un mousquetaire vieilli, mûri, un triple adieu très émouvant, empreint de superbe, de nostalgie et de poésie : adieu à des personnages chéris qui meurent au cours du récit (les quatre héros, Constance, Milady, Richelieu, Louis XIII), adieu pour Fairbanks à une carrière d’aventurier-cascadeur trépidant, de Zorro au Pirate noir, adieu enfin au cinéma muet, à l’« âge de l’innocence » et d’une certaine naïveté. Le film est affublé d’une bande sonore (musique) et de deux prologues parlés où Fairbanks/d’Artagnan s’adresse aux spectateurs. Certains acteurs du film de 1921 réapparaissent : Athos, Constance, Richelieu, Planchet. Il n’est toujours pas question de caracoler en France (les studios Pickford-Fairbanks des Artistes Associés à Santa Monica Boulevard font amplement l’affaire), mais la vedette s’embarque préalablement pour l’Europe et persuade Maurice Leloir, moyennant un chèque alors mirifique de 40’000 $, de le suivre à Hollywood comme conseiller artistique. Peintre, historien et collectionneur, Maurice Leloir (1853-1940) est aussi conservateur du Musée du costume à Paris et membre de la Société des Artistes Français ; il s’est fait connaître avec son « Dictionnaire du costume » et ses illustrations des « Trois Mousquetaires » en 1894. Pendant cinq mois, Leloir, âgé de 75 ans, surveille l’exactitude des costumes, des perruques, du linge, du mobilier, des armes, des carrosses, le harnachement des chevaux, tous les intérieurs de palais et l’étiquette de la cour. (Il publiera ses souvenirs sous forme de livre illustré, Cinq mois à Hollywood avec Douglas Fairbanks, éd. J. Peyronnet, Paris 1929, 194 p.). Pour recréer le Château-Vieux de Saint-Germain-en-Laye, lieu de naissance et dernière résidence de Louis XIV avant Versailles, sa cour intérieure, ses grands escaliers, son vestibule, ses dépendances et la pittoresque place de Saint-Germain avec Sainte-Chapelle, hostellerie des mousquetaires et fontaine à mufles de lion, Fairbanks fait appel au décorateur français Benjamin Carré, ancien collaborateur de Maurice Tourneur et responsable des souterrains de Phantom of the Opera (1925), ainsi qu’à l’Anglais Laurence Irving et au fameux William Cameron Menzies (Gone with the Wind). Des agrandissements photographiques et des miniatures en volume dans la partie supérieure de l’image complètent l’illusion. Les extérieurs sont photographiés à Point Lobos sur la presqu’île de Monterey, au sud de San Francisco, avec Bruce Humberstone dirigeant la deuxième équipe. Le résultat est superbe à l’écran, la reconstitution de premier ordre, mais malgré ses éminentes qualités artistiques, le film ne couvre pas ses frais. Le public boude-t-il un d’Artagnan/Fairbanks voué au trépas (une première sur les écrans américains) ou, plus globalement, le chant du cygne du cinéma muet ? Bernard Eisenschitz a raison de parler en 1969 d'un des films "qui marquent l'apogée d'un art sur le point de disparaître. Le langage du cinéma muet n'a jamais été porté à un tel dégré de perfection, alors qu'il se savait condamné." – DE : Die eiserne Maske, IT : La maschera di ferro.
1939*The Man in the Iron Mask (L’Homme au masque de fer) (US) de James Whale [et George Bruce] 
James Whale/Edward Small Productions-United Artists, 112 min. – av. Louis Hayward (Louis XIV/Philippe de Gascogne), Joan Bennett (Marie-Thérèse d’Autriche, la reine), Warren William (d’Artagnan), Joseph Schildkraut (Nicolas Fouquet), Alan Hale (Porthos), Walter Kingsford (Colbert), Miles Mander (Aramis), Bert Roach (Athos), Marion Martin (Louise de La Vallière), Doris Kenyon (Anne d’Autriche), Albert Dekker (Louis XIII), Nigel de Brulier (Richelieu), Montague Love (ambassadeur d’Espagne), Howard Brooks (Mazarin), William Royle (gouv. de la Bastille), Howard Brooks (Mazarin), Reginald Barlow (Jean Paul), Peter Cushing (officier).
Lorsque naît Philippe, le jumeau du roi, Colbert le confie à d’Artagnan qui l’élève comme son fils adoptif en Gascogne. Vingt ans plus tard, Louis XIV est devenu un tyran haï par le peuple ; Fouquet, rival de Colbert fourbe et ambitieux, ordonne l’enlèvement de Philippe par crainte qu’il revendique le trône et les mousquetaires sont emprisonnés. A Paris, les deux frères se rencontrent, et tandis que le roi s’amuse avec sa maîtresse Louise de La Vallière, il utilise Philippe comme sosie pour accueillir sa future épouse, l’Infante d’Espagne Marie-Thérèse d'Autriche. C’est le coup de foudre. Ennemi de Fouquet, Colbert profite de l’absence de Louis à Fontainebleau pour organiser les fiançailles de l’Infante avec Philippe, qui libère les mousquetaires. Louis fait enfermer Philippe à la Bastille sous un masque de fer (dont il porte la clé autour de son cou!), mais les mousquetaires le substituent au roi et l'on organise le mariage avec Marie-Thérèse. Fouquet et ses spadassins font sortir Louis, nouveau masque de fer, de prison pour empêcher la cérémonie ; Athos, Porthos et Aramis périssent en tentant de les intercepter. D’Artagnan transperce Fouquet de son épée, celui-ci le tue d’un coup de pistolet. Les chevaux du carrosse s’emballent et Louis se noie dans la Seine, emportant avec lui le secret du masque de fer. Philippe deviendra le bon Roi-Soleil, à l’insu de (presque) tout le monde…
Un travail qui peut paraître alimentaire pour le grand James Whale, l’orfèvre légendaire des deux premiers Frankenstein avec Boris Karloff (1931/35) et de The Invisible Man (1933), même si la fin du roman, avec le décès des mousquetaires, est retenue, et que le scénario retourne en quelque sorte la situation par une pirouette surprenante, en plaçant, ni vu ni connu, Philippe sur le trône de France : un renversement des rôles qui sera d’ailleurs repris par la majorité des adaptations anglo-saxonnes ultérieures. Le mauvais Louis y prône que « l’Etat, c’est moi », tandis que le bon Philippe, qui le remplace à la fin, estime que la monarchie est « une charge sacrée » et que « le roi doit être le serviteur de l’Etat », voire un véritable "patriote" (notion pourtant inconnue sous l'Ancien Régime...). Certes, mais nous voilà bien loin du Roi-Soleil et de l'idéologie qui l'entoure ! Le tyrannique producteur Edward Small, responsable en 1934 d'un Comte de Monte-Cristo avec happy-end (signé Rowland V. Lee), porté d'habitude sur des séries B et peu enclin à écouter ses réalisateurs, s'offre néanmoins les services d'un cinéaste de catégorie A, mais refuse de tenir compte de ses desiderata : Whale voudrait Douglas Fairbanks Jr. en d'Artagnan, un script moins bavard et plus court (ce en quoi le réalisateur a mille fois raison), etc. Small interférant à tout propos et l’empêchant de fignoler ses cadrages, de ciseler sa mise en scène, Whale finit par se désintéresser de son travail. L'entente avec Louis Hayward, un Anglais natif d'Afrique du Sud, n'est pas au beau fixe non plus. Budgété à un million de dollars, le film est pourtant visuellement assez réussi, avec de jolis duels de Fred Cavens, des images de geôles « gothiques » à faire frissonner Madelon (Louis XIV y torture personnellement ses prisonniers et supervise la fabrication de l’odieux masque), réalisé en noir et blanc en février-mars 1939 aux General Services Studios à Las Palmas Avenue, Los Angeles, et en extérieurs au Los Angeles County Arboretum & Botanic Garden à Arcadia. Les plans de foule au début sont empruntés à la version muette de 1929. Peu avant la fin du tournage, Whale, fortuné, claque la porte et après son départ, George Bruce, le scénariste, est autorisé à tourner neuf jours de prises de vues supplémentaires sans être crédité. Le film fait une excellente carrière commerciale, ce qui permettra à Small de mettre en chantier The Son of Monte-Cristo, à nouveau avec Louis Hayward (1940). Nomination à l’Oscar pour la musique (Lucien Moraweck). – DE : Der Mann mit der eisernen Maske, IT : La maschera di ferro.
D’Artagnan (Louis Hayward) à la rescousse dans « The Man in the Iron Mask » de James Whale (1939).
1943El hombre de la máscara de hierro (MX) de Marco Aurelio Galindo 
Gonzalo Elvira, Miguel Mezquíriz/Cimesa Film (Ciudad de México), 120 min. – av. José Cibrián (Louis XIV/Philippe), Gloria Lynch (Marie Thérèse), Alejandro Cobo (Nicolas Fouquet), Carlos Villarias (Colbert), Alma Lorena (Louise de La Vallière), Alejandro Ciangherotti (d’Artagnan), Francisco Jambrina (Athos), José Elias Moreno (Porthos), Roberto Cañedo (Aramis), Virginia Zuri (Anne d’Autriche), José Pidal (Mazarin), Victoria Argota (La Péronne), Manuel Dondé (Pierre). – Film (en noir et blanc) tourné en avril-mai 1943 aux studios Azteca à Mexico.
1952Lady in the Iron Mask (La Femme au masque de fer) (US) de Ralph Murphy 
Walter Wanger, Eugene Fremke/20th Century-Fox, 78 min. – av. Louis Hayward (d’Artagnan), Patricia Medina (les princesses Anne et Louise de France), John Sutton (duc de Valdac), Alan Hale Jr. (Porthos), Judd Holdren (Aramis), Steve Brodie (Athos), Hal Gerard (Philippe IV d’Espagne), Lester Matthews (le Premier ministre Rochard), John Dehner (comte de Fourrier), Keith Hitchcock (chevalier La Porte), Esther Howard (Mme Duprez), Tor Johnson (Renac, le bourreau), Gavin Muir (Louis XIII).
Appelés au Louvre par la princesse Anne, d’Artagnan et les trois mousquetaires y trouvent l’accès interdit par le régent, le duc de Valdac, et le roi d’Espagne qui se présente comme futur époux de la princesse. Rochard, le Premier ministre, âgé et malade, soupçonne qu’Anne a été remplacée par Louise, une sœur jumelle tenue à l’écart dès sa naissance et, la devinant en péril de mort, enfermée dans une forteresse, charge d’Artagnan de la sauver. Cela fait, Anne (dont le Gascon est secrètement amoureux) ordonne au vaillant mousquetaire, la mort dans l’âme, de s’exiler avec Louise au Nouveau Monde. Mais dans la cabine du vaisseau, d’Artagnan découvre qu’Anne s’est substituée à sa sœur, qui régnera à sa place en France aux côtés d’un prince de sang royal…
Cette variante fauchée et particulièrement farfelue est tournée en Natural Color par Ernest Laszlo dans les petits studios du Motion Picture Center à Hollywood, d’où des décors souvent minimalistes. Elle permet de retrouver le Sud-africain Louis Hayward, l’Errol Flynn du pauvre, en d’Artagnan élégant, agile et fougueux, lui qui fut Louis XIV et son double dans The Man in the Iron Mask de James Whale en 1939 (cf. supra) ; on l’a vu en Monte-Cristo, capitaine Blood, Dick Turpin, etc., souvent aux côtés de la pulpeuse Anglaise Patricia Medina, qui tient ici le double rôle, victime affriolante derrière un masque de cauchemar, tourmentée sadiquement par un bourreau – le molosse Tor Johnson – qui veut la précipiter dans un bac de chaux vive (scène soutenue par les trémolos musicaux de Dimitri Tiomkin). Amusant. Alan Hale Jr. refait Porthos (cf. supra). Cela dit, qu'on se rassure: Louis XIII et Anne d’Autriche n’ont jamais eu de fille(s), mais seulement deux fils, le Dauphin Louis et le prince Philippe d’Orléans, de deux ans son cadet. Cette curiosité plutôt rare est mise sur pied par Walter Wanger, le légendaire producteur de Fritz Lang (Fury), Frank Borzage (History Is Made at Night), Don Siegel (Invasion of the Body Snatchers), Joseph L. Mankiewicz (Cleopatra), mais aussi de l'épatant Adventures of Hajji Baba de Don Weis, gâterie rare pour cinéphiles avisés. – DE : Die Frau mit der eisernen Maske, IT : La donna della maschera di ferro.
1954Le Vicomte de Bragelonne / Il visconte di Bragelonne (FR/IT) de Fernando Cerchio 
Robert de Nesle/Comptoir Français de Productions Cinématographiques (Paris)-Orso Films, Roma-Irisfilms Roma (Dario Sabatello), 88 min. – av. Georges Marchal (Raoul, vicomte de Bragelonne, fils d’Athos), Dawn Addams (Hélène de Winter), Jacques Dumesnil (d’Artagnan), Franco Silva (M. de Boissière), Jean Tissier (Planchet), Florence Arnaud (Louise de La Vallière), André Falcon (Louis XIV/Philippe), Nico Pepe (Mazarin), Robert Burnier (Athos), Philippe Oliver (Porthos), Nicolas Amato (chambellan), Gina Manès (paysanne), Jean Carmet.
Fils d'Athos et ami de Louis XIV, revenu d’une mission secrète en Angleterre à l’insu de Mazarin, Raoul de Bragelonne, qui est fiancé à l’ambitieuse Louise de La Vallière, apprend que celle-ci est devenue la favorite du roi. Mazarin le fait arrêter. Hélène de Winter, une amie de Louise amoureuse de Raoul, révèle l’affaire au roi et ce dernier reproche à Louise de ne pas l’avoir informé de ses fiançailles ; répudiée, la favorite entre au couvent. Bragelonne n’a pas attendu l’ordre de libération de Louis XIV pour s’enfuir. Mazarin prépare un coup d’Etat en cherchant à remplacer le roi par son frère jumeau, Philippe. Raoul, d’Artagnan, Athos et Porthos (Aramis s’est également retiré au couvent) l’en empêchent de justesse et libèrent le roi sous les murs de la Bastille. Le peuple jubile à la nouvelle du décès de Mazarin et, tout en faisant son éloge funèbre, Louis XIV déclare qu’il ne partagera plus jamais le pouvoir avec un ministre. Après avoir tué Boissière, l’âme damnée du cardinal, Raoul épouse Hélène de Winter (chez Dumas, il va se faire tuer à la guerre).
Cette unique adaptation se référant, par son titre même, à l’intégralité du roman (scénario de Roland Laudenbach et Alexandre Astruc, dialogué par Claude Boissol), constitue une déception de taille : hormis les déconvenues amoureuses (mais bien passagères) de Bragelonne et l’épisode dénaturé du masque de fer (on ne perd pas un mot sur le frère sosie du roi, il disparait sans explications), rien ne rappelle Dumas, qui est bel et bien trahi dans cette production majoritairement française, et de surcroît mal servi par une construction boiteuse. Raoul (Georges Marchal, le d’Artagnan hunebellien de 1953) semble se consoler avec la fille de Milady (la ravissante Anglaise Dawn Addams, partenaire de Charles Chaplin dans son A King in New York en 1957), une progéniture pour le moins sans rancune ! Seul à se tirer d’affaire : Fernando Cerchio, le routinier habile de Il figlio di Lagardère (1952) et d'une cascade de petits péplums justement oubliés, qui remplit son contrat en filmant ces aventures galopantes en Eastmancolor du 10 juin au 18 août 1954 aux studios de Boulogne, à Nesles-la-Vallée (région de Pontoise) et aux châteaux de Blois et de Fontainebleau. Dommage que le seul film portant le titre du roman de Dumas dont il s'inspire se résume à si peu de chose. – DE : Der Graf und die drei Musketiere, US : The Last Musketeer / Count of Bragelonne.
1958(tv) Máscara de Ferro (BR) mini-série de Silas Roberg 
Televisão Tupi, São Paulo (23.4.58), feuilleton. – av. José Soares (d’Artagnan), Lulu Benecase, Odilon del Grande, Henrique Martins (Lauro), João Monteiro, J. Nogueira, Luiz Orioni, Lolita Rodriguez, Turíbio Ruiz, Arnaldo Weiss. – Série enregistrée en direct en noir et blanc, suite du feuilleton brésilien « Os três Mosqueteiros » diffusé l’année précédente.
1962*Le Masque de fer / L’uomo dalla maschera di ferro (FR/IT) d’Henri Decoin 
Cérès Films (Hélène Dassonville)-S.N.E. Gaumont-Films Marly (Paris)-Produzione Fuchs, Roma, 127 min. – av. Jean Marais (Charles de Batz d’Artagnan), Jean-François Poron (Louis XIV/Henri), Germaine Montero (Anne d’Autriche), Claudine Auger (Isabelle de Saint-Mars), Enrico Maria Salerno (Mazarin), Jean Rochefort (Lastréaumont), Sylva Koscina (Marion), Philippe Lemaire (marquis de Vaudreuil), Giselle Pascal (Cécile Adélaïde de la Rochefontaine, comtesse de Chaulmes), Noël Roquevert (M. de Saint-Mars), Raymond Gérôme (Pimentel), Jean Davy (maréchal de Turenne), Simone Derly (Marie Mancini), Clément Thierry (Maulévrier), Jean Lara (Renaud de Lourmes).
En 1658, l’armée française de Turenne dont fait partie le capitaine d’Artagnan bat les Espagnols à la bataille des Dunes, en Flandres, et l’Infante, Marie-Thérèse, doit épouser Louis XIV pour sceller la paix. Mais le roi tombe malade, et Mazarin et Anne d’Autriche chargent d’Artagnan de chercher l’homme au masque de fer à l’île de Sainte-Marguerite : Henri, le frère jumeau de Louis. Mais celui-ci s’est évadé à Paris avec la complicité de son amoureuse Isabelle, fille du gouverneur de la forteresse. Isabelle sauve la vie d’un condamné à mort, le truand Lastréaumont, puis, présentée au roi qui a recouvré sa santé, le trouble. Henri refuse de s’allier au conspirateur Vaudreuil en remplaçant son royal frère et en renonçant à Isabelle. Mazarin rétablit donc Louis sur le trône. Henri s’évade une nouvelle fois de la Bastille grâce à Lastréaumont, qui revêt le masque de fer à sa place…
Le scénariste Cécil Saint-Laurent (alias le romancier Jacques Laurent) et Decoin adoptent le ton de la parodie, d’Artagnan vieilli devant constamment interrompre ses déclarations d’amour pour répondre aux exigences du roi (« Ah, si vous m’aviez connu il y a vingt ans ! »). Les trois autres mousquetaires ont disparu. Une œuvrette plaisante et mouvementée, avec un Jean Marais fort crédible, étonnement à l’aise en Charles de Batz d’Artagnan, Gascon fougueux de 49 ans, volage, râleur, bourru, désabusé, colérique, mais le rire contagieux malgré l’amertume sous-jacente d’une carrière militaire faite de frustrations et de disette. Les puissants et les courtisans bien-placés n’ont pas arrêté de se servir de ce « laquais galonné », puis de le mettre au rancart : nous sommes loin des rôles à la Lagardère ou Capitan orchestrés par Hunebelle et consorts. Même son mariage final avec Cécile Adélaïde de la Rochefontaine, veuve du comte de Chaulmes, est interrompu par un appel « urgent » du roi... Il s'agit du dernier film important du vétéran Henri Decoin, souvent excellent - en particulier dans l'univers de Georges Simenon (La Vérité sur Bébé Donge) et le polar (Razzia sur la chnouf) - mais en fin de carrière, et le dernier film de cape et épée de Jean Marais: "les héros y sont fatigués". Réalisé en été 1962 en Cinémascope et Eastmancolor aux studios Riviera (Victorine) à Nice et ceux de Paris-Studio-Cinéma à Billancourt, sur l’île de Sainte-Marguerite au large de Cannes, à Sospel (Alpes Maritimes), aux Etangs de Commelles à Coye-la-Forêt (Oise), aux châteaux de Courances (Essonne), Ecouen (Val d’Oise), Guermantes (Seine et Marne), Maisons-Laffitte et Rosny-sur-Seine (Yvelines) ; les préludes de la bataille des Dunes sont filmés près de Dunkerque (combats réglés par Claude Carliez). – DE : Die eiserne Maske, IT : L’uomo dalla maschera di ferro.
1968(tv) The Man in the Iron Mask (GB) mini-série d’Hugh David 
Campbell Logan-BBCtv (BBC1 28.7.-22.9.68), 9 x 25 min. – av. Edwin Richfield (d’Artagnan), Jack Gwillim (Athos), Noel Willman (Aramis), Roger Livesey (Porthos), Jonathan Newth (vicomte Raoul de Bragelonne), Frank Littlewood (Mazarin), John Ruddock (le pape Clément X), Nicholas Chagrin (Louis XIV/Philippe), Daphne Slater (Anne d’Autriche), Sonia Dresdel (duchesse de Chevreuse), Roger Delgado (Nicolas Fouquet), Richard Beale (Colbert), Susan Macready (Louise de La Vallière), Michael Malnick (ambassadeur d’Espagne), Peter Macann (comte de Saint-Aignan), Bill Burridge (Lezier), Irene Hamilton (Mlle Montalais), Norman Tyrrell (Rodier), John Scott Martin (Olivain), Paul Thompson (Basque), Fulton MacKay (M. Baisemeaux), Talfryn Thomas (geôlier), Geoffrey Dunn (Percerin), Anthony Pedley (Duhamel), Harold Kasket (gouverneur de la forteresse).
De l’honnête ouvrage télévisuel : troisième grand cycle dumasien de la BBC après les séries The Three Musketeers  (1966/67) et Further Adventures of the Musketeers (1967, s. « Vingt ans après », 1967), réalisé en noir et blanc par le même téléaste que le feuilleton précédent et rédigé par Anthony Steven.
Episodes : 1. « The Grand Design » – 2. « The King’s Mistress » – 3. « The Arrest » – 4. « The Prisoner » – 5. « The Cage Bird » – 6. « The Two Kings » – 7. « The Traitor » – 8. « The Iron Mask » – 9. « The Fortress ».
1968/69(tv) D’Artagnan – 4. Le Masque de fer / Die eiserne Maske / La maschera di ferro (FR/IT/DE) de Claude Barma 
ORTF-RAI-ZDF-Bavaria (TF1 9.1.70), 90 min. – av. Dominique Paturel (d’Artagnan), François Chaumette (Athos), Adriano Amedei Migliano (Aramis), Rolf Arndt (Porthos), Daniel Leroy (Louis XIV/Philippe), Roberto Bisacco (Charles II Stuart), Pascal Mazotti, François Darbon. – Cf. supra, s. « Les trois mousquetaires ».
1976(tv+ciné) *The Man in the Iron Mask (L’Homme au masque de fer) (GB/US) de Mike Newell 
Norman Rosemont Productions-ITC Entertainment (US : NBC 17.1.77), 103 min. – av. Richard Chamberlain (Louis XIV/Philippe), Patrick McGoohan (Nicolas Fouquet), Louis Jourdan (d’Artagnan), Jenny Agutter (Louise de La Vallière), Sir Ralph Richardson (Colbert), Vivien Merchant (la reine Marie Thérèse d’Autriche), Brenda Bruce (Anne d’Autriche), Ian Holm (Duval), Esmond Knight (Armand de La Vallière), Godfrey Quigley (Baisemeaux), Emrys James (Percerin), Denis Lawson (Claude), Anne Zelda (Henriette), Hugh Fraser (Montfleury).
Les affaires d’Etat ennuient Louis XIV et Fouquet encourage son penchant aux distractions galantes pour mieux le manipuler, à la colère de l’austère Colbert. Désirant mettre sur le trône un monarque digne de gouverner, Colbert et d’Artagnan décident de le remplacer à la Bastille par son jumeau Philippe, aîné de quelques minutes. Fouquet apprend son existence et informe le roi qui fait enfermer son frère à Sainte-Marguerite. Colbert le fait libérer par la ruse et d’Artagnan se charge de l’éduquer et de le préparer à la vie de la Cour. L’échange se fait lors d’une fête de Fouquet à Vaux-le-Vicomte, Louis disparaît à Sainte-Marguerite sous un masque de fer. Philippe, qui a séduit Louise de La Vallière et sa propre mère, fait arrêter Fouquet.
Une version opulente (coûts : deux millions de dollars) des productions Norman Rosemont, qui ont sorti un Count of Monte Cristo avec Richard Chamberlain en 1975. Le scénario de William Bast est intelligent à défaut d’être fidèle à Dumas, la photo couleur de Freddie Young très travaillée, et la réalisation, confiée au talentueux Mike Newell (Four Weddings and a Funeral) ne manque pas d’élégance ; ce sera son premier (télé)film à être aussi exploité en salle. Tourné en France aux châteaux de Fontainebleau (résidence royale), de Vaux-le-Vicomte (chez Fouquet, où a lieu la substitution), de Guermantes, de La Houssaye, de Courances, sur l’île de Sainte-Marguerite, dans le Dorset (île de Purbeck) et aux studios de Twickenham à Londres. Nominations à l’Emmy Award pour le scénario et les costumes (Olga Lehmann). – DE : Der Mann mit der eisernen Maske, IT : L’uomo dalla maschera di ferro.
1979The Fifth Musketeer / The Secret behind the Iron Mask / Der fünfte Musketier / Das Geheimnis der eisernen Maske (Le Cinquième Mousquetaire, CH  : Le Secret de l’homme au masque de fer) (AT/DE) de Ken Annakin [et Cornel Wilde] 
Sascha Film Wien-Ted Richmond Films, Inc.-S&T Film Berlin, 119 min. – av. Sylvia Kristel (l’Infante Marie-Thérèse d’Autriche), Cornel Wilde (d’Artagnan), Beau Bridges (Louis XIV/Philippe), Lloyd Bridges (Aramis), Alan Hale Jr. (Porthos), José Ferrer (Athos), Ursula Andress (Louise de La Vallière), Ian McShane (Nicolas Fouquet), Rex Harrison (Colbert), Olivia de Havilland (Anne d’Autriche), Helmut Dantine (ambassadeur d’Espagne).
Avec l’appui de Colbert, d’Artagnan et les trois mousquetaires échangent Philippe contre son frère jumeau, Louis XIV, un souverain arrogant, vaniteux et impopulaire, plus préoccupé de lutiner sa favorite, l’ambitieuse, possessive et vindicative courtisane Louise de La Vallière (la flamme du vicomte de Bragelonne, fils d'ethos inexistant ici), que d’accueillir la gentille Infante d’Espagne, sa future femme. L’intriguant Fouquet torture Colbert à la Bastille et tente vainement de faire assassiner Philippe, qui, s’étant imposé à la Cour, libère tous les prisonniers politiques du royaume. Porthos et Aramis périssent au combat pour le défendre. Lors d’un ultime règlement de comptes dans les égouts de la capitale, Louis se noie en combattant son frère, tandis que d’Artagnan, blessé, occit Fouquet. Sous le nom de Louis XIV, Philippe épouse l’Infante d’Espagne.
Un scénario médiocre de David Ambrose « d’après Alexandre Dumas et George Bruce » (cf. version de 1939), une mise en scène languissante, une distribution internationale amusante (Cornel Wilde, 60 ans, Rex Harrison, 70 ans, José Ferrer, 68 ans), voire hilarante (Sylvia Kristel et Ursula Andress, ce qui nous vaut quelques scènes dénudées) ou inepte (Beau Bridges) coulent cette production autrichienne parlée anglais, à peine distribuée et que même la superbe photo en Panavision et Eastmancolor de Jack Cardiff ne parvient pas à sauver. Le prolifique artisan britannique Ken Annakin, ex-assistant de Carol Reed connu pour son imagerie spectaculaire (Battle of the Bulge, Those Magnificent Men in their Flying Machines), déplace la France en Autriche : pour un public pas trop regardant, le Louvre et Fontainebleau deviennent Schönbrunn, on tourne dans les châteaux de Laxenburg, Burg Liechtenstein, Klosterneuburg et Kreuzenstein, ainsi qu’à Vienne même (Roter Berg, Schönlaterngasse, Votivkirche, Palais Auersperg, les égouts municipaux et la cathédrale Saint-Étienne pour le mariage royal). Au mieux, une curiosité.
1992(ciné+tv) Tayna korolevi Anny ili muchketyory 30 let spustya / tv: Mushketyori dvadtsat let spustya [Les Secrets de la reine Anne, ou Les Mousquetaires trente ans plus tard] (RU) de Georgi Yungvald-Khilkevich 
Gosteleradio-Odessa Film Studios-Soyuztelefilm-Studio Moscow-Studio Katran (First Channel Ostankino 31.12.92), 157 min. – av. Mikhail Boyarski (d’Artagnan), Venyamin Smekhov (Athos), Valentin Smirnitsky (Porthos), Igor Starygin (Aramis), Dmitri Kharatyan (Louis XIV/Philippe), Alisa Frejndlikh (Anne d’Autriche), Anatoli Ravikovich (Mazarin), Aleksei Yasoulovich (Charles II d’Angleterre), Andrej Sokolov (Raoul de Bragelonne), Katri Khorma (Louise de La Vallière), Viktor Avilov (Mordaunt, le fils de Milady), Oleg Below (Cromwell), Arnis Licitis (Lord Winter), Yuriy Sherstnyov (le bourreau de Lille), Yelena Karadzhova (Henrietta d'Angleterre), Vladimir Balon (Jussac).
Le secret du masque de fer, bien sûr, enrobé ici de quelques chansons. Troisième volet (sur quatre) de la série russo-ukrainienne initiée par D’Artagnan et les trois mousquetaires (1978) et poursuivie par Les mousquetaires vingt ans après (1992), tourné en couleurs aux studios d’Odessa par le même réalisateur ouzbékistanais et les mêmes comédiens dans les rôles principaux.
1998The Man in the Iron Mask / The Mask of Dumas (US) de William Richert 
W. Richert/Invisible Studio-The Fastest Cheapest Best Film Corp.-Jerry Seltzer-Media Magic Entertainment, 85 min. – av. Edward Albert (Athos), Dana Barron (Louise de La Vallière), Timothy Bottoms (Nicolas Fouquet), Meg Foster (Anne d’Autriche), Dennis Hayden (d’Artagnan), William Richert (Aramis/Alexandre Dumas), Rex Ryon (Porthos), Nick Richert (Louis XIV/Philippe), Daniel J. Coplan (Molière), Jeremy West (Richelieu), Fannie Brett (Henriette), Brigid Brannagh (Molly Pichon), James Gammon (commandant), Brenda James (Lucille).
Sur son lit de mort, Anne d’Autriche confie à Aramis le secret du frère jumeau de Louis XIV enfermé à la Bastille sous un masque de fer, et le conjure de le mettre à la place de son frère cadet, monarque vicieux manipulé par Fouquet. Les quatre mousquetaires, de retour « d’une guerre sauvage contre les Arabes » ( ?), remplissent leur mission, mais y perdent tous la vie, tués à coups de mousquets par les hommes de Colbert, qui a auparavant fait guillotiner (sic) Fouquet. Le récit est introduit et régulièrement interrompu par un Alexandre Dumas ruiné (les huissiers s’emparent du mobilier), qui relate les péripéties de ses héros en roucoulant avec sa maîtresse aux seins dénudés ! Sous-produit ultramodeste, bâclé et mal joué, qui tente de faire de l’ombre au film de Randall Wallace (cf. infra), avec le réalisateur dans le double rôle d’Aramis et de Dumas, et son fils Nick dans celui des jumeaux royaux (un rôle initialement prévu pour River Phoenix). Tourné pour une somme dérisoire dans l’enceinte de l’exubérante Mission Inn à Riverside, Californie. Une véritable série Z – et, au moment de sa sortie, le nadir des adaptations de Dumas, du moins en Occident. – DE : Alexander Dumas – Der Mann mit der eisernen Maske.
1998The Man in the Iron Mask (L’Homme au masque de fer) (US/GB) de Randall Wallace 
Randall Wallace, Russell Smith, René Dupont, Paul Hitchcock, Alan Ladd Jr., Frank Mancuso/United Artists-Samalga-Transpalux-TSF, 133 min. – av. Gabriel Byrne (d’Artagnan), Gérard Depardieu (Porthos), Jeremy Irons (Aramis), John Malkovich (Athos), Leonardo Di Caprio (Louis XIV/Philippe), Anne Parillaud (Anne d’Autriche), Judith Godrèche (Christine [=Louise de La Vallière]), Edward Atterton (lieut. André), Peter Sarsgaard (Raoul de Bragelonne, fils d’Athos), Hugh Laurie, David Lowe (conseillers du roi).
Egoïste et indifférent au sort de ses sujets affamés, Louis XIV courtise Christine et envoie son fiancé Raoul de Bragelonne, fils d'Athos, se faire tuer à la guerre. Révolté, Athos rejoint Aramis et Porthos dans leur plan de substituer Philippe à son frère, machination à laquelle d’Artagnan, fidèle à son roi, s’oppose. Il fait échouer la substitution, Philippe est à nouveau masqué et embastillé. Mais lorsque d’Artagnan apprend d’Anne d’Autriche, son amour secret, que les deux jumeaux sont en vérité ses propres enfant naturels, il change d’avis. Christine se suicide sous les fenêtres du roi, qui s’apprête à éliminer Philippe ; d’Artagnan s’y oppose et lors d’un raid à la Bastille, il meurt poignardé par Louis. Un jeune lieutenant mousquetaire, André, neutralise Louis sous le masque de fer et aide les trois mousquetaires survivants à placer Philippe sur le trône. Anne d’Autriche pose une rose sur la tombe du vaillant Gascon. Le commentaire de la fin apporte une note surréaliste : « Le règne de Louis XIV, dit-on, fut une longue époque de paix et de prospérité » … alors que le souverain a laissé un pays ruiné par 46 ans de guerres incessantes en Europe (dont 13 ans de 1701 à 1715 pour la seule guerre de Succession d'Espagne), créant un déficit vertigineux ! Bravo les scénaristes.
Enfin, selon le script de Randall Wallace (aussi romancier et scénariste primé de Braveheart de Mel Gibson), d’Artagnan ne serait donc rien moins que le père naturel du Roi-Soleil ! Une superproduction à 35 millions de dollars dont le casting est impressionnant, avec, en tête le jeune Leonardo Di Caprio, encore tout auréolé de la gloire du Titanic de James Cameron (1997), mais ce spectacle récréatif et mollement filmé (Wallace fait ses débuts de réalisateur) repose uniquement sur la distribution, entre ferrailleries, humour balourd et sentiments pompiers. « Grossier mélange de Dumas et de Rabelais, ce blockbuster de cape et de pets se résume à un concours de cabotinage éhonté entre papis ferrailleurs, résume Télérama. A ce petit jeu, Porthos-Dipardiou l’emporte » (2.9.09). Effectivement : le Porthos flatulent et ignare de Depardieu est d’une vulgarité quasi embarrassante, un Obélix mal lavé aux antipodes du baron-gentilhomme de Dumas, et seul le d’Artagnan triste de Gabriel Byrne parvient parfois à convaincre. Pour le rôle d'Aramis, Wallace souhaitait Anthony Hopkins ou Sam Neill; Kevin Kline refuse le rôle d'Athos. Le film, en Panavision et couleurs Deluxe, est entièrement tourné en France, de fin avril à juillet 1997 : studios d’Arpajon à Saint-Germain-les-Arpajon (scènes de la Bastille), et extérieurs au Mans, à Fontenay-sur-Vègre, Pierrefonds, Fontainebleau, Taureau, Lyon, La Ferté-Alais. Comble de l'ironie inconsciente: les cinéastes situent la cour de Louis XIV non pas à Versailles mais à Vaux-le-Vicomte, le palais construit par ce même Nicolas Fouquet, surintendant des finances et emprisonné sur ordre du roi que l’on a longtemps assimilé au Masque de Fer. Une note d’humour, volontaire celle-là : Leonardo Di Caprio dans son double rôle remporte le Razzie Award, prix décerné « au pire couple cinématographique de l’année ». L'accueil critique est défavorable, mais les recettes internationales se montent à 183 millions de dollars. – DE : Der Mann mit der eisernen Maske, IT : La mascara di ferro.
2009-2012(ciné+tv) Vozvashcheniye mushketorov, ili Sokrovishcha kardinala Mazarini (Le Retour des mousquetaires ou Les Trésors du cardinal Mazarin) (RU) mini-série de Georgi Yungvald-Khilkevich
Oleg Chamina, Veronika Rozhkova/Gosteleradio-Odessa Film Studios-New One Production (Ren-TV 7.11.09 et 10.3.12), 198 min. (tv, 4 parties) /134 min./115 min. - av. Mikhail Boyanski (d'Artagnan), Benjamin Smekhov (Athos), Valentin Smimitzkiy (Porthos), Igor Starygin (Aramis), Alisa Freundlich (Anne d'Autriche), Dimitri Kharalyan (Louis XIV jeune), Anatoly Ravikovitch (le cardinal Mazarin), Alexander Shirvindt (Colbert), Anton Makarskiy (Henri, fils d'Aramis), Leanca Gryu (Jacqueline, fille de d'Artagnan), Dimitri Nagiyev (Léon, fils de Porthos), Irina Pegova (Angelica, fille de Porthos), Danila Dunaev (Raoul de Bragelonne, fils d'Athos), Vladimir Balon (Jussac), Eugenia Kryukov (Louise de la Vallière), Alyona Yakovleva (Mme de Crual), Eugene Danchevskaya (Felton), Nina Jungvald-Khilkevich (la duchesse d'Orléans), Christina Kucherenko (Jacqueline d'Artagnan enfant), Fedor Dobronvarov (l'abbé d'Olivet, chef des Jésuites), Yuriy VAsilev (le cardinal Gota).
Ce quatrième épisode russo-ukrainien des mousquetaires, qui reprend des éléments du Vicomte de Bragelonne pour le mélanger à des intrigues nouvelles et passablement délirantes, est à nouveau filmé par le réalisateur ouzbékien Yungvald-Khilkevich (avec insertion de 11 chansons). Il débute par la mort des quatre héros, Aramis et Porthos l'épée à la main contre les gardes du cardinal; Athos dans son domaine après avoir bu une tasse de poison (dans le roman, il succombe à une crise cardiaque en apprenant le décès à la guerre de son fils Raoul), et d'Artagnan, qui est emporté par un boulet de canon après avoir obtenu le bâton de maréchal. Paris grogne, Mazarin (amant de la reine) a disparu avec le trésor de la Couronne. La progéniture des mousquetaires est appelée au secours: Jacqueline, fille de d'Artagnan (le scénariste admet avoir été marqué par le film La Fille de d'Artagnan de Bertrand Tavernier en 1994), Raoul de Bragelonne, flls d'Athos, Léon et Angelica, les enfants de Porthos (on s'inspire du roman Le Fils de Porthos de Paul Mahalin, paru en 1883), et Henri, le rejeton d'Aramis. Léon ignore ses origines et combat au départ les autres enfants des mousquetaires, tandis que sa soeur Angelica se colle une moustache et s'habille en homme. L'action pour récupérer le trésor volé par Mazarin (dont l'or disparu des Templiers!) les emmène en Angleterre et les confronte au puissant Ordre des Jésuites comme à Jussac, jadis l'ennemi mortel de d'Artagnan. Les vieux mousquetaires, qui assistent aux démêlés depuis leur nuage, reviennent pour 24 heures sur terre afin de prêter assistance à leur gamin, les Jésuites sont vaincus et l'honneur de la reine est sauf. La fille de d'Artagnan et le fils d'Aramis convolent, Raoul de Bragelonne périt au cours d'un combat dans une taverne, laissant Mademoiselle de Vallière un peu plus longtemps dans le lit de Louis XIV.
Cette semi-parodie en musique est tournée de juin à septembre 2007 dans les studios d'Odessa, au château de Svirj, à Lviv (Ukraine), à Moscou, à Saint-Pétersbourg et à Belgorod-Dniestr. Un grand succès cathodique et en salle, grâce aussi à la science du maître d'armes, Vladimir Balon. Une version remontée en quatre parties est diffusée à la télévision en 2012.